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1.3 Partitionnement et statistique de forme des signaux

1.3.1 D´efinitions et propri´et´es

Si nous voulons d´ecrire une statistique de forme d’un ensemble de signaux, il est n´ecessaire de d´efinir quand deux signaux sont ´egaux en forme. De plus, nous aurons aussi besoin d’une distance de forme, capable de mesurer un ´ecart de forme, et d’une moyenne de forme qui serait le ”centre de gravit´e” au sens des formes de cet ensemble de signaux. Pour caract´eriser cette dis- persion de forme intrins`eque, cette distance et cette moyenne poss´ederaient la propri´et´e d’ˆetre invariant vis `a vis de certaines transformations autoris´ees par la d´efinition d’´egalit´e de forme. La propri´et´e la plus importante que la d´efinition d’´egalit´e de forme doit poss´eder est d’ˆetre une relation d’´equivalence sur l’ensemble des signaux. Seulement dans ce cas, chaque signal appartient exactement `a un sous-ensemble (classe d’´equivalence) de la partition associ´ee `a cette relation. Pour d´efinir la notion d’´egalit´e de forme nous pouvons donner la partition a priori ou, plus commun´ement, donner le groupe de transformations sur l’ensemble des signaux qui ne changent pas la forme. Ainsi, la structure de groupe de ces transformations assure la propri´et´e

d’´equivalence de la relation d’´egalit´e de forme.

En d’autres termes, les signaux x et y sont de mˆeme forme si x = T (y) o`u T est une transformation ´el´ement d’un groupe G pour la composition. Une fa¸con commode de d´efinir cette relation est de consid´erer T sous la forme :

y = T1◦ x ◦ T2⇔ les signaux x et y sont de mˆeme forme (1.137) o`u T1 et T2 sont des transformations appartenants `a des ensembles donn´es. Elles peuvent agir sur la phase (warping) et l’amplitude des signaux. Comme d´ecrit pr´ec´edemment, T1 et T2 appar- tiennent respectivement `a deux groupes de fonctions qui peuvent ˆetre semblables ou diff´erents. Dans ce qui suit, nous pr´esentons des exemples de d´efinition d’´egalit´e de forme.

1- Mod`ele invariant de forme (Shape Invariant Model) : c’est la d´efinition classique la plus commun´ement accept´ee. Elle explicite l’´egalit´e de forme au sens visuel. Elle lie deux signaux x(t) et y(t) comme suit :

y = kx(at + b) + c⇔ les signaux x et y sont de mˆeme forme (1.138) une autre d´efinition admise est :

y = kx(t− b

a ) + c⇔ les signaux x et y sont de mˆeme forme (1.139) o`u a, b, c et k sont des constantes, a > 0,k > 0. Nous pouvons noter que, dans cette d´efinition, les transformations T1 et T2 appartiennent au groupe des fonctions croissantes affines. Prati- quement, un sous groupe peut ˆetre consid´er´e pour c = 0, qui correspond au retrait de la ligne de base.

2- Mod`ele de d´ecalage non lin´eaire (Non Linear Shift Model) : cette d´efinition d´ecrit l’´egalit´e de forme pour le mod`ele de g´en´eration employ´e en recalage de courbes et d´efini comme le mod`ele de d´ecalage non lin´eaire [18] (voir section 1.2.1). Elle autorise des transformations temporelles non lin´eaires strictement croissantes entre les signaux y et x sur un support commun [0,T] :

y = kx(v(t)) + c⇔ les signaux x et y sont de mˆeme forme (1.140) o`u k > 0, c sont des constantes et v (v(0) = 0 et v(T ) = T ) appartient `a un sous groupe des fonctions strictement croissantes. D’apr`es la d´efinition, T1 appartient au groupe affine et T2 au groupe d´efini pr´ec´edemment. Nous remarquons que cette d´efinition restreint la fluctuation tem- porelle `a un mˆeme support. Elle n’a plus de sens visuel mais permet de mesurer une variabilit´e de forme ind´ependamment d’une transformation non lin´eaire ”parasite” de l’axe temporel.

3- M´ethode des Fonctions de R´epartition (MFR) : dans cette d´efinition, x et y sont suppos´es positifs sur des supports qui peuvent ˆetre distincts. Si nous d´efinissons X et Y comme leur int´egrales norm´ees respectivement, l’´egalit´e de forme peut s’´ecrire [35] :

Y = X◦ ϕ ⇔ les signaux x et y sont de mˆeme forme (1.141) o`u ϕ appartient `a un groupe Φ de fonctions croissantes. Les signaux x et v sont proportionnels aux d´eriv´es de X et Y . Nous pouvons d´eduire une autre d´efinition de l’´egalit´e de forme :

o`u [′] d´efinit l’op´eration de d´erivation. On peut montrer que cette d´efinition entre dans le cadre de la d´efinition g´en´erale de (1.137). Cette relation d´ecrit le mod`ele de ϕ-similitude [35]. Nous pouvons remarquer que, si ϕ appartient au groupe des fonctions croissantes affines, nous retrou- vons la relation d’´egalit´e de forme au sens visuel (SIM) d´efini pr´ec´edemment. Cette importante propri´et´e justifie l’utilisation de la m´ethode des fonctions de r´epartition pour mesurer un ´ecart de forme au sens visuel.

Une fois la d´efinition de l’´egalit´e de forme ´etablie, il est n´ecessaire de proposer une mesure d’´ecart de forme qui soit si possible une distance au sens math´ematique. Pour la d´efinition visuelle (SIM), une premi`ere proposition a ´et´e faite avec le crit`ere de similarit´e employant la m´ethode des fonctions de r´epartition [35]. Ce crit`ere consiste `a mesurer l’´ecart quadratique moyen entre la fonction ϕ, d´efinie `a partir de deux signaux, et une r´egression affine sur celle-ci. Ce crit`ere a permis de d´etecter de tr`es petites diff´erences de forme sur des spectres chroma- tographiques [37]. En revanche, il ne constitue pas une distance entre signaux (absence de la condition d’in´egalit´e triangulaire). Le crit`ere MFR a pour propri´et´e principale d’ˆetre invariant lorsque les deux signaux sont de mˆeme forme et soumis aux transformations affines d´efinies dans le mod`ele de forme invariant. En revanche, il perd cette propri´et´e d’invariance lorsque les deux signaux sont de formes diff´erentes.

Pour caract´eriser la statistique de forme d’un ensemble de signaux, nous devons aussi avoir un centre de gravit´e ou moyenne au sens de la forme qui minimise la dispersion moyenne (va- riance) des ´ecarts de forme de cet ensemble. A l’´egal de la distance, cette moyenne de forme doit ˆetre invariante vis `a vis des transformations autoris´ees par la d´efinition d’´egalit´e de forme. Pour la d´efinition au sens visuel, une premi`ere tentative pour r´epondre `a cette probl´ematique a ´et´e de proposer l’approche ISA. Cette approche fournit un signal moyen qui peut ˆetre consid´er´e comme une moyenne de forme. En revanche, comme nous l’avons d´emontr´e, le signal ISA ne poss´ede pas l’invariance par rapport aux transformations temporelles affines. Malgr´e cela, l’ap- proche, coupl´ee au crit`ere MFR, a ´et´e appliqu´ee avec succ`es dans des applications de classement de signaux [39], [40]. Ces r´esultats indiquent que la moyenne ISA et le crit`ere MFR, mˆeme s’ils ne poss`edent pas toutes les propri´et´es optimales, peuvent fournir un partitionnement de formes coh´erent.

En continuit´e des m´ethodes MFR et ISA, nous avons voulu pr´esenter de nouveaux outils pour d´ecrire la dispersion de forme (au sens visuel) d’un ensemble de signaux. Ces outils sont la moyenne de forme corrig´ee CISA et la distance CISA. L’objectif sous-jacent ´etait d’obtenir des outils capables de d´ecrire cette dispersion et respectant toutes les conditions th´eoriques impos´ees. En travaillant sur les fonctions de r´epartition, l’id´ee principale ´etait de transformer, d’une mani`ere biunivoque, ces fonctions d’un espace de base vers un nouvel espace susceptible de permettre un acc`es direct `a la variation de forme intrins`eque. Pour cela, nous avons propos´e l’op´eration de r´ealignement affine des signaux et l’estimation d’une nouvelle moyenne de forme intrins`eque. Cette nouvelle moyenne sert de signal de r´ef´erence pour un r´ealignement affine op- timal. Elle poss`ede aussi la propri´et´e, manquante `a la moyenne ISA (voir section 1.2.4), d’ˆetre invariante pour les transformations affines (temporelle et d’amplitude). De plus le nouvel espace de repr´esentation F−1 permet de d´efinir une distance de forme (distance L2) au sens strict (voir section 1.2.4). Cette distance est bien invariante vis `a vis des transformations affines puisqu’elle mesure la dispersion de forme intrins`eque apr`es r´ealignement temporel affine et normalisation de surface.

velle moyenne et acc´eder au nouvel espace de mesure. Si nous rajoutons un signal `a l’ensemble, il faudra recalculer le signal de r´ef´erence qui permet un alignement optimal et l’´elimination de la fluctuation temporelle affine sur un nouvel ensemble de N + 1 signaux. De la mˆeme mani`ere, la distance CISA est tributaire de l’ensemble de r´ealignement. Elle ne peut ˆetre utilis´ee pour me- surer l’´ecart de forme entre des signaux n’appartenant pas `a l’ensemble de r´ealignement. Cette limitation de l’approche ne nous gˆene pas pour mesurer la dispersion de forme d’un ensemble de signaux ou le partitionner. En effet, cet ensemble est g´en´eralement d´efini au pr´ealable. Cette remarque se confirme au vu des bons r´esultats de classement obtenus sur des signaux r´eels (ECG) et d´ecrits en d´etails en chapitre 3.

Le mod`ele de forme noyau peut ˆetre consid´er´e comme une tentative d’extension de l’ap- proche CISA pour caract´eriser la forme d’un ensemble de signaux. L’acc`es direct `a la variation de forme intrins`eque dans le nouvel espace se fait en utilisant des fonctions polynomiales, de degr´e k, croissantes. Dans cette espace, nous d´efinissons une distance qui permet de mesurer les ´ecarts et une moyenne qui est le centre de gravit´e au sens de cette d´efinition.

Les approches de recalage de courbes peuvent ˆetre utilis´ees pour d´ecrire une variabilit´e de forme au sens de la d´efinition 2 (NLSM) apr`es un pr´etraitement des signaux (normalisation d’amplitude) garantissant l’invariance en amplitude. L’approche de moyennage convexe per- met d’acc´eder s´epar´ement aux variabilit´es temporelles et d’amplitude, constituant la variabilit´e de forme, sans hypoth`ese a priori de structure commune. Elle peut aussi ˆetre employ´ee `a la mˆeme tˆache et n´ecessite le mˆeme pr´etraitement. Par contre, son formalisme n’inclut pas la prise en compte de la notion de forme au sens visuel tout comme les autres approches de recalage de courbes classiques. En effet, dans [42], nous comparons sur des exemples de simulation, la premi`ere mouture incompl`ete de l’approche CISA et l’approche FCA dans une application de mesure de dispersion de forme au sens visuel. Les r´esultats montrent clairement la non prise en compte de la forme dans l’approche FCA (et sa distance) `a l’inverse de l’approche CISA sous son premier formalisme. Dans la section qui suit, nous allons illustrer, par quelques exemples inspir´es de cette ´etude comparative, les propri´et´es d´edi´ees `a l’analyse de forme des approches CISA et d’estimation de forme noyau pr´esent´ees dans ce chapitre.