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Partie 3 : Impact de la présence des opioïdes dans l'eau sur l’environnement et

A. Systèmes d’épuration des eaux usées : techniques utilisées et efficacité

2. Efficacité de l’épuration des eaux

L’efficacité de l’élimination des résidus médicamenteux dans les eaux par le biais des stations d’épuration dépend des contaminants ciblés et de paramètres liés aux méthodes de traitement utilisées. Ces derniers correspondent au temps de rétention dans les boues, au temps de rétention hydraulique et aux conditions environnementales.

a. Temps de rétention dans les boues

Le temps de rétention dans les boues (sludge retention time, SRT, ou âge des

boues) représente le temps de séjour des boues dans le bassin de clarification et est calculé en réalisant le rapport entre la masse de boue dans le bassin sur le débit

massique de soutirage des boues. Son calcul se base sur la formule suivante100 :

Où : Vi : Volume du bassin d’aération (m3)

Xi : Concentration de boues activées (mg.L-1)

QX : Débit d’évacuation des boues (m3.h-1)

XX : Concentration de boue en excès (mg.L-1)

Le SRT va notamment influencer le développement de nombreux microorganismes ; plus il est long, plus les bactéries à croissance lente se développeront améliorant ainsi la capacité d’épuration de cette biomasse. Le SRT module aussi le temps de contact entre les contaminants et les microorganismes, favorisant ainsi le processus de biodégradation et le processus de sorption. Ainsi, plus le SRT est long, plus l’élimination des contaminants médicamenteux est favorisée. Cependant, les

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données expérimentales démontrent qu’il n’y a pas d’intérêt à avoir un SRT supérieure à 30 jours (pas d’augmentation de l’efficacité significative).

b. Temps de rétention hydraulique

Le temps de rétention hydraulique (Hydraulic retention time ou HRT) est la

durée moyenne durant laquelle l’eau usée reste dans le réservoir ou le bassin. Il est

calculé grâce à la formule suivante100 :

Où : ΣiVi : Volume total des bassins (m3)

Qx : Débit affluent d’eaux usées (m3.h-1)

Pour certains produits pharmaceutiques comme les analgésiques, une corrélation semblerait exister entre la demi-vie du médicament et l’HRT avec une épuration plus efficace si l’HRT est supérieure à la demi-vie du produit.

c. Conditions environnementales

Les conditions environnementales, telles que la température, les conditions d’oxydoréduction (ex : anaérobies et aérobie) et le pH ont aussi un rôle sur l’efficacité de l’épuration. Les températures basses sembleraient limiter l’efficacité de l’épuration comme certaines études le démontrent en période hivernale. Le pH affecte la cinétique de biodégradation et va influencer le Log P ce qui peut entrainer une modulation de l’efficacité du phénomène de sorption.

d. Nature des composants ciblés

Les autres facteurs influençant l’efficacité de l’épuration des eaux usées dépendent des propriétés physico-chimiques et biologiques des composants ciblés.

Les propriétés physico-chimiques des composants d’intérêt vont être leur hydrophobie et leur charge car elles conditionnent leur adsorption sur les particules solides (phénomène de sorption). On observe donc deux types d’adsorption : une

83 dépendante des interactions électrostatiques (par exemple entre les groupements lipophiles des contaminants et les charges de surfaces négatives d’une PSS) et l’autre des interactions hydrophobes (par exemple, l’interaction entre les groupements aliphatiques ou aromatiques des contaminants et la fraction lipidique des PSS). Pour ce qui concerne l’adsorption dépendant des interactions électrostatiques, elle est conditionnée par le Log P (coefficient de partage eau/octanol) des composants ciblés. Ce Log P permet notamment d’évaluer si un phénomène de sorption est possible et donc de présager de l’élimination du composant d’intérêt. Si le Log P est inférieur à 3, le composant n’est pas absorbé de manière significative sur les particules solides et est plus difficilement éliminé de par son affinité pour la phase aqueuse : il est donc plus présent dans les eaux effluentes. Cependant, si son Log P est élevé (supérieur à 4.5), le composant a tendance à se dissocier en phase aqueuse et ne se lie pas aux particules solides. Cela limite donc l’efficacité de son épuration. En ce qui concerne la famille des opioïdes, les Log P sont hétérogènes, comme nous le verrons par la suite.

Les propriétés biologiques des composants ciblés impactent aussi l’efficacité

d’épuration. La biodégradation est le procédé le plus efficace pour la dégradation des

opioïdes et son efficacité est corrélée avec leurs caractéristiques biologiques. En effet, si un opioïde (ex : alcaloïdes de l’opium) possède une activité antimicrobienne, alors il sera mieux épuré par des procédés abiotiques (sorption, photo dégradation, hydrolyse, réactions redox, …).

e. Conclusion sur l’efficacité de l’épuration

L’efficacité des centres d’épuration peut être étudiée en comparant la différence de concentrations d’opioïdes dans les eaux affluentes et effluentes entre plusieurs stations. Cependant, du fait de la disparité des techniques de traitement des eaux utilisées à travers le monde, il est difficile de déterminer l’efficacité d’élimination des opioïdes pour chaque étape du processus d’épuration. De manière générale, les procédés d’élimination les plus efficaces sont l’adsorption sur des particules solides et la biodégradation. Ces deux procédés sont notamment présents

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avec les techniques conventionnelles de boue activée ou avec les BRM. A l’inverse, l’efficacité du pré-traitement et du traitement primaire est généralement faible.

Certains phénomènes peuvent aussi limiter l’efficacité de l’épuration des opioïdes car ils sont responsables de ce qui est nommé l’épuration « négative ». Cela se traduit par une quantité d’opioïdes plus importante dans les eaux effluentes qu’affluentes. L’épuration négative peut être liée à :

- Un phénomène de désorption soit une dissociation des complexes opioïdes–

PSS.

- Un phénomène de déconjugaison des opioïdes soit la transformation des

composés glucuronides conjugués en molécule mère.

Une erreur de calcul faussant le moment d’échantillonnage de l’eau effluente (lié à une mauvaise quantification du flux, à des variations de concentrations entrainant un biais au niveau de la comparabilité entre les concentrations des eaux affluentes et effluentes) peut aussi entrainer une pseudo-élimination négative lors de l’analyse des concentrations affluentes et effluentes. Ces phénomènes peuvent donc être responsables d’un taux d’épuration négatif, comme nous allons le voir par la

suite89,95,99,101–103.

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