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La durabilité des prairies permanentes est aujourd‟hui fortement menacée par les effets grandissants du changement climatique (Tubiello et al., 2008). Au cours du XXIème siècle, la production agricole sera très vraisemblablement affectée par les changements atmosphériques et climatiques. Des effets sur la production fourragère et sa répartition saisonnière, sur la valeur alimentaire de l'herbe, sur l'utilisation d'intrants (azote, eau) et sur la biodiversité des prairies sont hautement probables.

Selon Gaujour et al., (2012) des changements des pratiques (mode d'exploitation, fertilisation) de gestion des prairies sont également prévisibles. Estimer le bilan des gaz à effet de serre de l‟activité agricole dans sa plus grande diversité est plus que jamais d‟actualité. Il est donc utile d'explorer dès maintenant toutes les pistes qui peuvent conduire à une meilleure adaptation au changement climatique, tout en favorisant la séquestration de carbone dans le sol par les prairies, en limitant les émissions de GES et en maintenant un niveau élevé de biodiversité .

Les besoins en production animale vont augmenter et la satisfaction des besoins fourragers va devoir faire appel à une utilisation intensive et écologique de la prairie (Neely et

al., 2009). Le statut polyvalent des prairies (production de fourrage, protection du sol,

stockage de carbone, conservation de la biodiversité) est aujourd‟hui bien reconnu (Hervieu, 2002). Il est donc certain que le changement climatique a dès à présent un impact sur les services des agroécosystèmes, en affectant la composition des prairies et leur potentiel de production. Selon un des scenarios climatiques les plus modérés et prenant en compte des mesures efficaces pour réduire la production de gaz à effet de serre au cours de ce siècle, les

simulations climatiques annoncent un bilan hydrique climatique estival (P-ET°) dégradé (Durand et al., 2010).

Dans ce contexte, depuis une quinzaine d'années, des programmes de recherche cherchent à évaluer l'impact des modifications climatiques sur les prairies et leur biodiversité (Bindi et Olesen, 2011). A titre d'exemple, il a été montré qu'un doublement de la concentration atmosphérique en CO2 est susceptible de diminuer les besoins en eau du couvert

végétal, de stimuler sa production annuelle de fourrage, mais avec des conséquences sur sa valeur nutritive (diminution de la teneur en matières azotées totales). Cela a notamment permis de montrer que les différentes espèces prairiales ne réagissent pas toutes de la même manière, et que certains groupes peuvent être favorisés (légumineuses). De plus, les performances de la prairie résultent des interactions entre les espèces végétales et avec les micro-organismes du sol (cycle biogéochimique et disponibilité en nutriments).

Les réponses des prairies à ces changements sont complexes car elles dépendent d‟interactions avec la disponibilité de l‟eau et des nutriments, avec la nature des sols et de la végétation et avec les conditions de gestion.

L‟effet relatif du CO2 sur la croissance végétale d‟une graminée comme le ray-grass

anglais augmente avec la température (Casella et al., 1996). La qualité du fourrage sera également affectée : sous fort CO2, la teneur en protéines a diminué d‟un tiers et les teneurs en

sucres solubles ont pratiquement doublé ; un réchauffement de 3°C a entraîné une légère baisse de la digestibilité du fourrage (Soussana et al., 1996). La baisse de la teneur en protéines du fourrage ne tenait pas seulement à une dilution accrue des protéines par les sucres solubles. Les graminées cultivées sous fort CO2 étaient en effet plus carencées en azote

que dans le traitement témoin. Des études détaillées des cycles C et N dans le sol grâce aux isotopes stables 13C et 15N ont permis de montrer que l‟immobilisation de l‟azote minéral par les micro-organismes du sol est plus forte lorsque le taux de CO2 est doublé (Loiseau et

Soussana, 2000).

Cette expérience montre également que le changement climatique aura des impacts sur le bilan environnemental de la prairie : - le drainage hivernal, qui permet de réalimenter les nappes, a été réduit de 40 à 50 mm dans le climat réchauffé de 3°C (Casella et al., 1996) : i) les pertes hivernales en nitrate dans les eaux de drainage ont diminué dans les peuplements exposés à un doublement du CO2 atmosphérique (Soussana et al., 1996) ; ii) le stockage de

l‟augmentation du CO2 et ce stockage n‟a pas été affecté par un réchauffement de 3°C

(Loiseau et Soussana, 2000). En revanche, la composition botanique de la prairie a dérivé, les graminées qui étaient initialement dominantes ont fortement régressé dans le traitement soumis à une augmentation du CO2 atmosphérique, au profit des légumineuses.

La valeur nutritive du fourrage récolté en prairie permanente a également été étudiée. On a observé des tendances communes pour les graminées : diminution des protéines, augmentation des sucres solubles ; l‟augmentation des légumineuses et des dicotylédones non fixatrices a permis de compenser cette réduction des protéines et de préserver la valeur azotée du fourrage (Teyssonneyre et al., 2002; Picon-cochard et al., 2004).

Ces résultats soulignent donc que les impacts sur la production de la prairie et sa valeur alimentaire pour des herbivores dépendront largement des changements de composition botanique induits par l‟augmentation de la concentration atmosphérique en CO2. Ces

expériences montrent que la diversité, la productivité et la composition botanique des prairies seront affectées par la hausse actuelle des concentrations atmosphériques en CO2 et des

températures en plus les principes de la gestion des prairies (fertilisation, fréquence des coupes, pâturage...) devront être adaptés au changement climatique (Hopkins et Del prado, 2007).

Des travaux récents ont toutefois démontré la capacité de ces systèmes à réduire leur contribution aux émissions de GES, notamment grâce à leur capacité à séquestrer le carbone dans le sol, en particulier dans le cas de prairies permanentes (Soussana et al., 2010). Relever ce défi implique un accroissement des connaissances scientifiques à l‟échelle de l‟écosystème, particulièrement sur les mécanismes pilotant son fonctionnement et sur les processus de régulation interne. Compte tenu du grand nombre de facteurs (abiotiques ou biotiques) susceptibles d‟influer sur le système et les interactions existantes entre eux.

1-5-La rénovation des prairies

La démarche de diagnostic et d'amélioration des prairies s'inscrit dans une réflexion plus globale de l'éleveur sur le système d'élevage qu'il pratique. L'éleveur doit avant tout satisfaire les besoins alimentaires de son troupeau. La prairie, qui demeure le moyen le plus économique de produire des unités fourragères, est malheureusement handicapée par une saisonnalité très forte: production supérieure des besoins au printemps, faible à très faible en été, moyenne en automne, nulle en hiver. Produire un fourrage de qualité est un des objectifs

que peut se fixer tout éleveur désireux d‟améliorer les performances de son élevage. Ainsi l'intérêt d'améliorer la productivité ou la qualité d'une prairie ne peut se discuter qu'en fonction de ce que l'on en attend pour bien nourrir son ou ses troupeaux. En effet l‟adéquation entre production fourragère et besoins du troupeau a pour but d‟apporter des éléments d‟analyse afin d‟améliorer ou de restaurer. Tout manquement aux bonnes pratiques agricoles sera sanctionné par une diminution de la qualité et de la quantité ; il en sera de même à la suite d‟éléments naturels défavorables (sécheresse ou inondations, maladies, dégâts de sangliers, de campagnols, …). Afin de vérifier s‟il y a nécessité de rénover complètement, ou seulement d‟améliorer par une adaptation de la conduite, il faut réaliser (ou faire réaliser) un diagnostic des prairies qui posent question.

D‟après Knoden (2013) la rénovation des prairies permet: i) d‟augmenter la production et la qualité fourragères; ii) d‟obtenir des parcelles dotées d‟une meilleure souplesse d‟exploitation. iii) d‟obtenir une production plus appétente et mieux valorisée par le bétail. iiii) d‟éviter l‟envahissement du couvert par des plantes indésirables.