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Effets des impacts d’éjectas sur l’environnement proche

Afin de protéger les différents diagnostics et hublots composant l’environnement optique de la cible FCI, sensibles à un endommagement induit par des éjectas métalliques, des éléments de protection amovibles (EPA) seront disposés dans la chambre d’expériences du LMJ. Ces éléments seront peu coûteux, destinés à être soumis aux impacts des débris générés lors de l’expérience, donc prévus pour une durée de fonctionnement très courte. Le matériau choisi pour la conception des EPA est le verre borosilicate. Leur épaisseur sera de 2 mm. Des études spécifiques sur l’endommagement de ces EPA sont menées par le CEA depuis plusieurs années dans le cadre du projet terme source.

Certaines expériences réalisées au cours de cette thèse ont permis de soumettre des matériaux transparents comme le verre ou le polycarbonate à l’impact de fragments d’or et d’aluminium, ces matériaux ayant été utilisés comme protections de diagnostics optiques (cf.

II.2.1). Ces impacts ont souvent mené à une métallisation des protections ou à la formation de cratères de faibles dimensions. Cependant, dans certaines conditions expérimentales, ils ont conduit à une destruction de la protection.

La figure V.3 montre une lame de verre de 1 mm d’épaisseur utilisée pour protéger une sonde VH lors d’une expérience d’écaillage par choc laser d’une cible d’or de 300 µm d’épaisseur impactée avec une intensité incidente de 3,34 TW/cm2. La lame était disposée 5 cm derrière la cible.

(a) (b)

FIGURE V.3 – Vues microscopiques d’une lame de verre de 1 mm d’épaisseur positionnée 5 cm derrière une cible d’or de 300 µm d’épaisseur impactée par une impulsion laser avec une intensité de 3,34 TW/cm2. L’impact des débris provenant de la cible a percé la plaque de verre.

Les observations réalisées après le tir mettent clairement en évidence une perforation de la plaque de protection suite à l’impact des fragments d’or éjectés de la cible écaillée. Lors de cette expérience, la visualisation transverse a permis d’évaluer la vitesse d’éjection des

fragments à 589±41 m/s. Le diamètre de l’ouverture dans la lame de verre est d’environ 2 mm et quelques fragments d’or de faibles dimensions peuvent être observés sur le bord du cratère.

Le choc induit dans le matériau a entraîné la formation de plusieurs fractures transversales sur quelques mm, depuis la zone d’impact.

La figureV.4montre une lame de verre de 1 mm d’épaisseur utilisée lors d’une expérience similaire sur une cible d’aluminium de 200 µm d’épaisseur impactée à 7,27 TW/cm2.

(a) (b)

FIGUREV.4 – Vues microscopiques d’une lame de verre de 1 mm d’épaisseur positionnée 5 cm derrière une cible d’aluminium de 200 µm d’épaisseur impactée par une impulsion laser avec une intensité de 7,27 TW/cm2.

On a vu précédemment qu’une telle intensité produit la perforation de la cible d’aluminium (cf. IV.1), donc un important volume de fragments éjectés. La vitesse maximale d’éjection des fragments a été mesurée lors de ce tir à 10810±366 m/s. La lame a été entièrement détruite par l’impact des fragments. Les fractures transversales générées par le choc se sont propagées sur toute la largeur de la lame depuis la zone d’impact des fragments. Un plus fort grossissement de cette zone d’impact (Fig.V.4(b)) permet d’observer principalement des éjectas liquides. En effet, la cible a été partiellement fondue en détente dans cette expérience, et la perforation a conduit à l’éjection de fragments provenant de la couche fondue.

Dans les deux cas présentés plus haut (Fig.V.3etV.4), on constate que la protection a été mal dimensionnée, puisqu’a elle n’a pas supporté l’impact des fragments éjectés. Néanmoins, ces fragments ont été suffisamment ralentis pour que la tête optique derrière la protection n’ait pas été endommagée.

Des expériences spécifiques ont été réalisées afin de visualiser l’onde de choc que peuvent générer les impacts des éjectas sur une plaque de protection. Pour cela, un polissage optique a été effectué sur la tranche de plaques de polycarbonate servant à protéger la lentille achromatique du système VISAR, dans le but de pouvoir observer une éventuelle modification du matériau grâce au diagnostic de visualisation transverse.

La figure V.5 présente les observations réalisées lors de tirs effectués sur des cibles d’aluminium de 10 et 20 µm d’épaisseur (avec une seule acquisition par tir lors de cette

campagne, donc sans mesure de vitesse des éjectas). Le faisceau sonde est fourni par un laser continu, ce qui génère une figure de speckle dans le fond de l’image.

(a) (b)

(c) (d)

FIGUREV.5 – Visualisation transverse des fragments issus de cibles d’aluminium de 10 µm et 20 µm d’épaisseur soumises à des intensités laser de (b) 1,81, (c) 1,05 et (d) 1,79 TW/cm2. Les éjectas impactent une lame de polycarbonate de 3 mm d’épaisseur(à droite), dont les tranches sont polies.

La visualisation de référence au temps initial (Fig.V.5(a)) montre que le polissage optique réalisé sur la tranche permet effectivement de voir à travers le matériau sur toute la profondeur dans la direction transverse (10 mm). La distance initiale entre la surface libre de la cible (à gauche) et la surface du polycarbonate est de 5 mm.

Pour les trois expériences, la visualisation met en évidence la pénétration des fragments sous la surface du polycarbonate, ainsi que des ondes de choc produites par l’impact. En effet, la modification de densité du polycarbonate due à la variation de pression entraîne un changement de l’indice optique qui se répercute dans la transmission du faisceau sonde.

Ainsi, dans la figure V.5(b) on peut observer la propagation d’une onde de compression approximativement sphérique, matérialisée par des zones plus lumineuses en arcs de cercle centrés sur la zone d’impact des fragments. Dans la figureV.5(c), l’onde de choc a atteint la face arrière de la plaque de polycarbonate, et elle se réfléchit en une onde de détente. La traction induite dans le matériau entraîne une diminution de la transmission du faisceau sonde, donc

l’effet inverse de la compression. Enfin dans la figureV.5(d), l’onde de détente est entièrement formée et se propage vers la face avant.

Dans des géométries plus complexes, de telles visualisations pourraient aider à comprendre les interactions d’ondes dans les plaques de protection, expliquer des ruptures ou une fragilisation, avec un rôle possible des fixations de ces plaques dans leur support.