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IV. REGLES D’ASSEMBLAGES ET ANTHROPISATION

IV.2 EFFETS DE L’HABITAT SUR LES ASSEMBLAGES DE FOURMIS

Bien que de nombreuses études aient décrit des changements dans la composition d’espèces de fourmis le long de gradients environnementaux (Hoffmann 2010, Gibb et al. 2015a), peu d’entre elles ont essayé d’identifier les mécanismes responsables de ces substitutions (Wiescher et al. 2012, Arnan et al. 2014, Yates et al. 2014).

Les effets de l’habitat sur la diversité et la composition spécifique des fourmis sont évalués. Une explication de ces variations est recherchée à travers un examen des variations de caractéristiques fonctionnelles telles que les préférences alimentaires et les stratégies de fourragement (Article 2) ainsi qu’à travers les traits morphologiques (Article 3). La prévision théorique est alors que l’on trouve localement un sous-ensemble d’espèces capables de coloniser ce type d’habitat, parmi toutes les espèces présentes dans la région (Keddy 1992b). Cette capacité à coloniser et survivre dans chaque environnement dépend des caractéristiques écologiques de chaque espèce. Ainsi, dans différents habitats on peut trouver des variations du nombre d’espèces voire de l’identité de ces dernières (Fig. 3). D’une part, les changements de nombre d’espèces peuvent être issus d’une diminution de la diversité fonctionnelle viable dans un type d’habitat (Petchey and Gaston 2002). Cette « contraction de niche» peut s’expliquer par une diminution du nombre de stratégies écologiques viables dans un environnement par rapport à un autre, ce qui aurait comme conséquence la disparition des espèces possédant des caractéristiques non adaptées (Ricklefs 2012b, Lamanna et al. 2014). De plus, le remplacement d’espèces entre habitats est souvent expliqué par un changement d’identité fonctionnelle, c’est-à-dire un « déplacement de niche », expliqué par une variation dans la dominance de type d’espèces, reflété par un changement de la valeur moyenne des traits des espèces (Garnier et al. 2004, Cornwell et al. 2006).

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Figure 3. Relations entre filtre environnemental, diversité et identité fonctionnelle et composition d’espèces exemplifiées dans un espace fonctionnel. Les points représentent des espèces, leur position et séparation dans l’espace fonctionnel nous indiquent leurs différences écologiques. Les polygones délimitent les espèces présentes dans un même type d’habitat. L’aire de ces polygones illustre la diversité fonctionnelle des espèces présentes, tandis que leur position dans l’espace montre des changements de valeurs de traits (identité fonctionnelle). Les polygones bleu, rouge et verte représentent des communautés de diversité fonctionnelle similaire, mais une différence dans la composition spécifique, expliqué par des changements dans l’identité fonctionnelle de ces espèces. Les communautés noire et verte contiennent des espèces avec une identité fonctionnelle similaire, mais différent dans la diversité fonctionnelle et le nombre d’espèces.

Dans le gradient d’anthropisation étudiée on a pu constater une forte diminution du nombre d’espèces, ainsi qu’un fort changement dans la composition d’espèces. Ces changements, était notamment observables en comparant les milieux forestiers (terrafirme et basfonds) et les milieux ouverts (jardins et abattis). En effet, la chute de biodiversité dans les milieux ouverts est flagrante (Articles 2, 3), mais il est aussi frappant de ne pas trouver (ou presque pas) des espèces en commun avec les milieux forestiers. Les lisères uniquement, étant un milieu de transition, contenaient des communautés des espèces qui intégrait un mélange

-0,16 0,00 0,16 Coordinate 1 -0,20 -0,16 -0,12 -0,08 -0,04 0,00 0,04 0,08 0,12 0,16 C o o rd in a te 2

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d’espèces de ces deux types d’habitats, ainsi que certaines espèces qui leur était propres (Article 3).

L’étude des communautés par le biais de leur diversité fonctionnelle a montré des différences très nuancées entre milieux. Par exemple, parmi les aspects écologiques étudiés, c’est uniquement en examinant les stratégies de fourragement, qu’on a trouvé une faible partition de niche dans les abattis en comparaison avec les forêts (Article 2). Alors que la partition de niche alimentaire semblait très importante dans ces deux types de milieux (Article 2). Enfin, d’un point de vu morphologique, les milieux ouverts contenaient un ensemble d’espèces tout aussi différentes que les milieux forestiers (Article 3). Il est donc difficile de conclure que la réduction du nombre d’espèces soit une conséquence d’un espace fonctionnel plus restreint. En revanche, lorsqu’on s’intéresse à l’identité fonctionnelle, plutôt qu’à leur diversité, les différences semblent plus nettes. En effet, des changements des valeurs moyennes des traits morphologiques importants ont été trouvés entre habitats (Article 3), ainsi que des modifications dans l’utilisation de ressources alimentaires, et même dans leurs stratégies de fourragement (Article 2).

Cependant, les traits morphologiques pour lesquels nous avons trouvé les plus grands changements, déviaient des hypothèses principales émises pour expliquer le filtrage environnemental chez les fourmis entre habitats du type forêts et habitats simplifiés/agricoles. En effet, bien que les traits les plus souvent mentionnés comme importants dans le processus de filtrage environnemental entre ces habitats soient la taille et la longueur des pattes (i.e. « size grain hypothesis », Kaspari & Weiser 1999; Farji-Brener et al. 2004), dans notre étude c’était plutôt des traits tels que la taille relative des mandibules ou des dents qui étaient les plus variables, ainsi que des traits plus « sensoriels » comme les antennes. Ces résultats semblent cohérents avec les différences observés dans l’utilisation de ressources alimentaires entre habitats. En effet, les traits mandibulaires sont en général associés à des régimes alimentaires particuliers (Weiser and Kaspari 2006, Silva and Brandão 2010, Gibb et al. 2015b). mais remarquons que d’autres études ont également trouvé une différence dans l’utilisation de ressources entre habitats (Bihn et al. 2008, Peters et al. 2014). A la vue de ces résultats, on peut suggérer, qu’un filtrage d’espèces par les ressources alimentaires disponibles est possible. Cette question, peu étudiée jusqu’à présent, mérite donc plus d’intérêt dans des études futures (Kaspari et al. 2012).

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ARTICLE 1. DIETARY AND TEMPORAL NICHE DIFFERENTIATION

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