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ECOLOGIE DES ECOSYSTEMES : RELATIONS ENTRE BIODIVERSITE ET PROCESSUS ECOSYSTEMIQUES

Taxonomic changes are accompanied by a strong functional shift

V. ECOLOGIE DES ECOSYSTEMES : RELATIONS ENTRE BIODIVERSITE ET PROCESSUS ECOSYSTEMIQUES

L’objectif de ce chapitre est d’essayer de comprendre comment la performance des communautés de fourmis dans l’utilisation de différentes ressources alimentaires est liée à la composition et à la structure fonctionnelle de ces communautés. Il s’insère donc dans la lignée de recherche étudiant les rapports entre biodiversité et fonctionnement des écosystèmes (Hooper et al. 2005, Díaz et al. 2006a). Bien que le chapitre précédent visait à comprendre les mécanismes responsables de la composition et de la structure fonctionnelle des communautés, celui-ci va plus loin dans le but de comprendre comment cette structure est liée à l’activité combinée des espèces dans l’obtention de ressources alimentaires. En conséquence l’accent est mis sur les attributs de la communauté entière et sur les implications que cette communauté peut avoir sur le fonctionnement des écosystèmes plutôt que sur les espèces.

L’écologie des écosystèmes est principalement basée sur deux hypothèses : i) les organismes ont un effet positif sur les taux de processus écologiques via leur complémentarité (Chapin et al. 1997, Hooper 1997), ii) quelques organismes favorisés par les conditions environnementales monopolisent la majorité des ressources et vont être responsables de la plupart des processus (Aarssen 1997, Grime 1998). De plus, l’écologie des écosystèmes a pour but de prédire les relations entre organismes et fonctionnement des écosystèmes à travers des indicateurs plus simples que la quantification de l’abondance des organismes et leur contribution processus.

Ainsi, je me suis d’abord intéressé aux liens qui existent entre structure taxonomique et trophique des assemblages et leur performance dans l’exploitation de ressources dans différents conditions environnementales (Article 4). J’ai ensuite étudié les relations entre composition morphologique des communautés de fourmis et l’intensité de prélèvement de différentes ressources (Article 5). L’hypothèse était alors la suivante : la morphologie des espèces est reliée à leurs différences alimentaires, et les valeurs moyennes de traits des communautés sont des indicateurs de la performance de la communauté à prélever ces différents types de ressources.

V.1 DES DIFFICULTES POUR INFERER LA REALISATION DE

PROCESSUS PAR LES FOURMIS

Nos résultats démontrent premièrement qu’une perte de diversité n’a pas entraîné une diminution dans l’activité de fourragement des fourmis. Si l’on accepte que ces activités de

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fourragement constituent un indicateur de la contribution des fourmis à différents processus écosystémiques, nous ne pouvons pas valider l’hypothèse sur les relations positives entre le nombre d’espèces et leur performance à réaliser des processus (Hooper et al. 2005, Díaz et al. 2006a). Cependant, et comme on l’a vu dans les sections précédentes, la diversité écologique était fortement conservée entre habitats malgré la simplification environnementale dans les milieux anthropisés/ouverts. Est-ce donc la diversité fonctionnelle qui est responsable d’une maintenance des processus écologiques (Poisot et al. 2013, Frainer et al. 2014, Gagic et al. 2015)? Nos résultats ne soutiennent pas non plus cette hypothèse, car l’examen des processus isolés, ne semblent pas confirmer un pattern de relation entre diversité fonctionnelle et activité dans des appâts (Article 4).

Bien que l’intensité des activités des organismes soit une mesure importante du fonctionnement des écosystèmes, les proportions (taux) dans lesquels ces différents processus sont réalisés constituent aussi un facteur essentiel pour comprendre leur stabilité (Cardinale et al. 2009b). En effet nous avons trouvé que les proportions de ressources utilisées par les fourmis étaient différentes en fonction de l’habitat. Ainsi, nous nous sommes penchés sur la structure trophique et/ou morphologique afin de savoir si elle(s) pouvai(en)t expliquer ces variations. On trouve alors que l’utilisation de ressources alimentaires par les espèces de fourmis semble garder un lien avec l’environnement (Article 4) mais aussi avec leurs traits morphologiques (Article 5). Ces relations sont en partie expliquées par la phylogénie des espèces (Article 5). D’une part, nous avons trouvé que la consommation de proies par les fourmis était plus importante dans les abattis et les jardins, que dans les habitats forestiers. Ceci est en accord avec d’autres travaux démontrant que les fourmis associées aux milieux ouverts consomment une proportion de ressources plus riche en protéines qu’en carbohydrates, tandis que la tendance opposée est trouvée dans les forêts (Bihn et al. 2008, Peters et al. 2014). Or nous avons également observé que la consommation d’insectes morts était tout aussi importante dans les deux types de milieu (Article 4). Dès lors, ces différences d’exploitation des ressources sont-elles donc liées à l’efficacité supérieure des espèces des milieux ouverts dans l’exploitation de proies ou sont-elles dues à la limitation de ces ressources dans les autres types d’habitats ? L’ensemble de nos observations nous empêche de privilégier une possibilité plutôt qu’une autre.

Nous avons également trouvé une relation positive entre la taille du corps, des mandibules et la capacité des fourmis à capturer des proies. Les fourmis en question appartenaient souvent aux sous-familles Ponerine et Ectatomminae. De plus les espèces exploitant le plus souvent

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des graines appartenaient principalement à la sous-famille Myrmicinae. Ces fourmis étaient en moyenne de taille réduite. Enfin, les fourmis exploitant majoritairement des carbohydrates appartenaient essentiellement aux familles Formicinae et Dolichoderinae qui possédaient de longues pattes et de longues antennes (Article 5).

Ces résultats suggèrent qu’on peut prédire le rôle écologique des espèces en prenant en compte leur morphologies et leur groupe taxonomique (Silva and Brandão 2010, Yates et al. 2014, Gibb et al. 2015b). Cependant, la prédiction des processus écologiques réalisés par une communauté en fonction de sa structure fonctionnelle, est une tâche plus compliquée. En effet, les résultats ne suggèrent que de manière très faible qu’on puisse employer des mesures intégratives des traits/niches des communautés pour une prédiction de leur utilisation de ressources, et donc pour prédire des processus écologiques. En effet, ce lien entre structure fonctionnelle et processus était plutôt nuancé dans l’article 4ème, car les liens étaient spécifiques à chaque environnement, une généralisation n’était donc pas possible. Dans le 5ème article, on n’a pas trouvé de liens entre les variations de traits morphologiques au niveau des assemblages, et la performance de ces assemblages dans l’exploitation de différentes ressources.

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