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II) Vers une nouvelle synthèse des borures de nickel

2) Effet de la température

Des synthèses ont été effectuées à partir de nanoparticules de nickel de 28 nm à différentes températures entre 350 °C et 750 °C avec un ratio B:Ni = 1:1 dans LiCl/KCl, excepté pour les synthèses à 350 °C. En effet, le point de fusion du mélange LiCl/KCl (353 °C) est trop haut pour que la réaction ait lieu dans ce sel. Un sel avec un point de fusion plus bas était donc nécessaire (mélange eutectique LiI/KI, Tfusion = 295 °C).

Figure II-10 Diffractogrammes de rayons X des poudres synthétisées à partir d’un ratio B:Ni initial de 1:1 à différentes températures dans LiCl/KCl, sauf à 350 °C où LiI/KI est utilisé. Les

réflexions sont indexées selon les fiches ICDD 03-065-2865 pour le nickel métallique et 01-073-2551 pour Ni4B3 orthorhombique.

La Figure II-10 montre les diffractogrammes de rayons X des différentes poudres obtenues après lavage. A 350 °C, une phase amorphe d’après la diffraction des rayons X est observée, avec un large pic à environ 47 ° (2 theta Cu K). Ce diffractogramme est identique à celui déjà obtenu pour les borures de nickel amorphes synthétisés dans l’eau à température ambiante.12–14 A 400 °C on note l’apparition de pics larges à 42 °, 45 ° et 49 °. A partir de 450 °C, le pic large aux environs de 47 ° disparait, suggérant un matériau totalement cristallin. De même, les trois pics qui émergent (42 °, 45 ° 49 °) lors de la réaction à 350 °C pendant 4 h 30 deviennent minoritaires à 400 °C (1h30) par rapport à ceux correspondant à la phase Ni4B3 orthorhombique. Ainsi, il semble qu’au moins une autre phase puisse être isolée à basse température. Ces pics n’ont pas pu être attribués à une phase connue des borures de nickel, ni à d’autres solides.

L’influence de la température sur la morphologie des particules a également été étudié par Microscopie Electronique à Transmission (TEM) (Figure II-11).

Nickel (0) 350 °C 1h30 350 °C 4h30 650 °C 1h30 400 °C 1h30 450 °C 1h30 750 °C 1h30 Nickel (0) Ni 4B3

Figure II-11 Clichés TEM de nanoparticules de nickel (0) avant réaction (a), et de Ni4B3 synthétisées à partir d’un ratio B:Ni = 1:1 à différentes températures dans LiCl/KCl (excepté

pour la réaction à 350 °C effectuée dans LiI/KI): b) 350 °C ; c) 400 °C ; d) 450 °C ; e) 650 °C ; f) 750 °C

Les nanoparticules amorphes de borures de nickel synthétisées à 350 °C et les particules obtenues à 400 °C (Figure II-11b et 4c) conservent la même morphologie sphérique des nanoparticules de nickel (0) de départ. A fort grossissement, on constate que les nanoparticules amorphes (350 °C) ou peu cristallisées (400 °C) ont une densité électronique homogène à l’échelle de chaque particule. On remarque aussi, dès 350 °C, la présence d’une couche amorphe dont le faible contraste électronique indique qu’il s’agit d’une phase riche en bore. On remarque également un début de cristallisation à 400 °C avec l’apparition de franges cristallines (Figure II-11c), en accord avec la DRX. A 450 °C, la morphologie sphérique des

nanoparticules initiales est conservée mais on observe un début d’agrégation des particules (Figure II-11d). Ce phénomène d’agrégation est exacerbé à 650 °C (Figure II-11e), avec un nombre plus important de cols de fusions observés entre les particules et une perte de la morphologie sphérique des nanoparticules initiales de nickel (0). A 750 °C (Figure II-11f), on observe une perte totale de la nanostructure initiale avec une très forte agrégation des particules, une augmentation du diamètre moyen et une modification de la couche de surface des particules. En effet, la couche de surface amorphe est de 5 nm d’épaisseur environ, devient plus épaisse, jusqu’à 20 nm et présente une morphologie en feuillet.

Afin de déterminer avec plus de précision la composition de cette couche, une cartographie STEM-EDX a été réalisée par Luisa Ruiz Gonzàlez dans l’équipe de José Gonzales Calbet au Département de Chimie Inorganique de l’Université de Madrid ; les résultats sont présentés sur La Figure II-12. La Figure II-12a indique une distribution homogène du bore et du nickel dans les nanoparticules. De l’oxygène est également observé à la surface de ces particules, au niveau de la couche amorphe. Ceci est confirmé dans la Figure II-12b où on constate que le nickel est très peu présent aux bords de la nanoparticule (jusqu’à 5 nm sur le profile, donc ~2 nm de profondeur), c’est-à-dire au niveau de la couche amorphe. La composition en bore est homogène dans le cœur de la nanoparticule. A partir de ces résultats, on peut conclure que les nanoparticules de borures de nickel sont composées d’un cœur de borure de nickel homogène en bore et en nickel et d’une couche amorphe de bore oxydé. Le bore amorphe est très sensible à l’air et s’oxyde facilement, expliquant ainsi la présence d’oxygène qui apparait lors du lavage à l’eau et/ou de l’exposition de la poudre à l’air.

Figure II-12 Cartographie TEM-EDX d’une nanoparticule de Ni4B3 synthétisée à partir d’un ratio Ni:B de 1:1 à 400 °C pendant 1 h 30 dans LiI/KI.

En résumé, à 350 °C des nanoparticules de borure de nickel amorphes sont obtenues. Elles cristallisent à partir de 400 °C et sont totalement cristallisées à 450 °C. A des températures plus élevées, les particules s’agrègent fortement. La couche de surface est modifiée à haute température (au-delà de 750 °C). L’apparition d’une nouvelle couche s’apparente à la formation d’hydroxydes de nickel lors de l’étape de lavage des particules à l’eau. Ceci indique qu’à cette température, une plus grande quantité d’atomes de nickel se trouve à la surface des particules, entrainant la formation de ces hydroxydes. Il y a donc, à haute température, un début de perte de la structure locale laissant présager une décomposition de la phase Ni4B3 orthorhombique. Pour ces raisons la température de réaction pour les borures de nickel a été fixée à 450 °C par la suite puisqu’il s’agit de la température où le meilleur compromis entre cristallinité et morphologie des nanoparticules est obtenu.

Boron Nickel Oxygen

0. 01 µm 5 nm Spectrum Image 2 0 n m Spectrum Image 0 5 10 15 20 25 30 35 40 Re lati ve co mp o sit ion % Distance (nm) B Ni O

a

b Boron

Nickel

Oxygen

Figure II-13 Nanoparticules de borures de nickel amorphe, de Ni3B et de Ni4B3 synthétisées en sels fondus dans LiI/KI : a) Spectres XANES; b) Combinaison linéaire des spectres de Ni4B3 et Ni3B avec un ratio de 0,7:0,3) superposé au spectre du borure de nickel amorphe ; c) spectres EXAFS dans le R-space ; d) Fit du borure de nickel amorphe (en pointillé) à partir d’une référence de Ni4B3 orthorhombique.

En superposant les trois spectres XANES (Figure II-13a), on constate que le pic dans la région du seuil du borure amorphe est d’intensité intermédiaire entre celui de la phase Ni3B et Ni4B3. Grace au logiciel Athena, une combinaison linéaire entre les spectres XANES de Ni4B3 et Ni3B est réalisée. La combinaison linéaire est reportée sur la Figure II-13b. Pour un rapport Ni4B3:Ni3B de 0,7:0,3, le fit obtenu est parfaitement superposable à celui des nanoparticules de borure amorphe. Afin de confirmer cette observation, les spectres EXAFS sont eux aussi superposés (Figure II-13c). En allant plus loin dans l’analyse du spectre EXAFS de la phase amorphe, on constate qu’un bon fit, représenté en pointillé sur la Figure II-13d, est obtenu à partir de la phase o-Ni4B3. Les valeurs de distances isolées et des paramètres utilisés pour ce fit sont reportés dans le tableau suivant. Ceci confirme bien que la phase de borure amorphe comporte en majorité des distances interatomiques de la phase o-Ni4B3. a b c d Ni4B3 Ni3B Amorphous Ni-B Linear Combinaison Amorphous Ni-B

Cependant aucune information sur l’ordre locale du composé amorphe ne pouvait être apportée. Les spectres XANES des borures ont montré que le composé amorphe comporte une structure intermédiaire entre la phase Ni4B3 majoritairement et Ni3B, laissant ainsi pensé qu’à courte distance il exprime des distances interatomiques communes aux deux composés. L’analyse du spectre EXAFS de ce matériau amorphe a confirmé la présence de distances interatomiques de la phase Ni4B3. Le ratio initialement introduit lors de la synthèse du borure amorphe est B:Ni = 1:1, soit le même que celui utilisé pour le borure Ni4B3. Il parait donc cohérent que ce composé amorphe exprime à courtes distances des caractéristiques structurales de la phase Ni4B3. Ces résultats laissent penser que la phase amorphe est un intermédiaire présentant à la fois des distances interatomiques à courte échelle de Ni4B3 et Ni3B et que le ratio B:Ni introduit dans le mélange réactionnel va guider la formation de l’un des deux composés.

b) Discussion mécanistique

D’un point de vue mécanistique, la formation à 350 °C d’un composé amorphe de borure de nickel, ayant le même ratio B:Ni que celui introduit initialement, signifie que l’incorporation du bore dans les nanoparticules de nickel (0) a lieu à basse température, dès que le mélange eutectique fond, c’est-à-dire à 295 ou 355 °C suivant le sel choisi. Une couche de bore amorphe d’épaisseur environ 3 nm entoure ces nanoparticules amorphes. Ainsi l’incorporation du bore s’accompagne d’une étape intermédiaire, où un borure de nickel amorphe est formé et peut être isolé. Avec l’augmentation de la température de réaction, ce borure de nickel amorphe cristallise progressivement. La réaction semble impliquer un mécanisme en deux étapes, avec dans un premier temps l’incorporation du bore dans les nanoparticules de nickel, puis dans un second temps la cristallisation d’une phase de borure de nickel. Dans la suite du manuscrit, cette voie de synthèse sera appelée « par conversion ».

3) Effet de la stœchiométrie