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Etude thermodynamique et cinétique de l’oxydation de sulfures de cuivre à l’état solide

IV. 4.2) Effet de la taille des particules

En passant de particules de 1 mm à 100 µm, le rapport surface/volume est multiplié par 10. A cinétique d’oxydation égale (i.e. à flux local identique), la vitesse d’oxydation globale est donc 10

fois plus grande. Il y a alors saturation du SO2 dans le système et l’étape limitante est le

renouvellement de l’oxygène à l'interface sulfure-oxyde.

En réalité, la vitesse d’oxydation globale n’est pas tout à fait 10 fois plus grande, mais environ 3 fois (Tableau 29 p.215). Pourtant, la taille des particules ne devrait théoriquement pas influer sur

les flux moyens locaux de SO2 traversant leur surface. Comment expliquer que ces derniers sont

moins grands à 100 µm qu’à 1 mm (58 nmol.cm-2.s-1 contre 220 nmol.cm-2.s-1)?

Une hypothèse proposée est la suivante : en réduisant la taille des particules de chalcopyrite, le

transport du O2 dans le gaz jusqu’à l’interface sulfures oxydes est plus complexe. En plus de

traverser, par diffusion/écoulement, la couche laminaire de gaz qui apparaît dans le creuset au

dessus du tas de particules, le O2 doit également traverser le tas de particules lui-même, pour

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En-dessous d’une taille critique des particules, le système passe donc d’un régime de diffusion/convection dans un fluide à une diffusion dans un milieu poreux [Lefevre, 2003] (Figure 68).

Figure 68: Modèle du transport des espèces dans le gaz pour des particules de chalcopyrite de 1mm et à 100 µm.

Dans les milieux poreux, la loi de Fick s’écrit de la même façon que pour les fluides libres mais en substituant D0 par De.

La diffusivité effective (De) des composés dans les milieux poreux est moindre que le coefficient

de diffusion dans les fluides libres (D0)car la présence de solides rend le parcours des composés

plus tortueux et limite leur capacité de diffusion.

Dans le modèle le plus simple, diffusivité effective et porosité sont linéaires [Pruess, 1987]. (i.e. elle décroît donc avec la granulométrie)

En négligeant l’effet de diffusion dans le solide poreux, et en partant de la même hypothèse qu’à

1mm, nous avons calculé un coefficient de diffusion d’environ 10-3 cm².s-1, soit environ 5 fois

moins grand qu’à 1 mm.

En plus de la porosité, un autre paramètre doit être pris en compte pour discuter de cet effet : la hauteur de la couche du milieu poreux à traverser. Afin d’étudier précisément l’influence de ces paramètres sur le transport dans le gaz, il faudrait effectuer des mesures précises de flux de gaz en les faisant varier.

IV.5) Intérêt de la présence d’un oxyde d’origine solide dans le système

En résumé, lors de l’oxydation de particules de chalcopyrite sous air, deux étapes du mécanisme réactionnel sont en série : le transport des espèces chimiques dans le gaz, et leur diffusion dans le

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solide. L’étape la plus lente des deux contrôle donc la cinétique. Nos expériences ont mis en évidences deux cas distincts :

- à T=500 °C et pour des tailles de particules de 1 mm, la cinétique est contrôlée par la

diffusion des espèces chimiques dans le solide (D~10-7 cm².s-1). L’oxydation est alors

lente (moins de 50 % de soufre éliminé en 11 h).

- en augmentant la température (700 °C, 900 °C) ou en diminuant la granulométrie

(Ø=100 µm), la cinétique est alors contrôlée par le transport du O2 dans le gaz. (D~10-3

cm².s-1)et diminue avec la granulométrie. L’oxydation est alors plus rapide (oxydation

totale en environ 1 h). En revanche, dans ce cas, la cinétique est beaucoup plus difficile à accélérer davantage. D’une part, la diffusion dans le gaz est faiblement activée. D’autre

part, diminuer la granulométrie n’a pas non plus d’effet car il y a saturation de SO2 à la

surface des particules. Remarquons que cette limite maximale est propre à un système stationnaire et que pour atteindre des cinétiques plus importantes les industriels sont passés à un système à lits fluidisés (voir Chapitre I paragraphe II.4.2.a).

Nous avons alors testé une autre hypothèse, plus compatible avec les procédés anciens, qui pourrait permettre d’accélérer l’oxydation de la chalcopyrite, même lorsque celle-ci est contrôlée par le transport dans le gaz : la présence dans le mélange d’oxygène d’origine solide, matérialisé par un oxyde de cuivre, la ténorite (CuO).

Les simulations en laboratoire ont montré non seulement que l’interaction oxyde sulfure est possible à l’état solide, mais en plus que le grillage est plus rapide en présence d’un oxyde que par

le simple apport d’oxygène gazeux. Pour cela, une condition nécessaire est que la pO2 de

l’atmosphère en surface des particules soit peu élevée, c'est-à-dire que la diffusivité de l’oxygène gazeux dans le système soit faible. Deux cas on été testés :

- Lorsque le dispositif est balayé par de l’Argon, la pO2 de l’atmosphère régnant dans le four

est inférieure à 10-3 atm. Dans ce cas, en l’absence d’oxyde, aucune oxydation par l’oxygène

d’origine gazeuse n’est observée. En revanche, en présence d’oxyde, la réduction de ce dernier entraîne instantanément à 475 °C et 680 °C une oxydation du sulfure.

- Même sous air, dans certains cas, le grillage peut être accéléré par la présence d’un oxyde. Pour cela, il faut se trouver dans un cas de figure où l’écoulement de l’air jusqu’à la surface

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des particules est faible. Par exemple, dans le cas d’une charge importante (500 mg) de particules fines (20 µm de diamètre). Dans ce cas particulier, le système se comporte comme un milieux poreux, dans lequel la diffusivité effective des composés est faible. Cette diffusivité varie avec la taille des particules et la quantité de charge.

Faute de temps, nous n’avons pas pu effectuer une étude systématique en faisant varier régulièrement chacun de ces paramètres. Néanmoins, un argument montre que l’hypothèse d’un grillage en présence d’oxyde est compatible avec le procédé protohistorique. Dans les conditions

réelles d’un réacteur protohistorique, il est très probable que pO2 soit comprise entre 0,21 et 10-3

atm car la combustion du charbon produit du monoxyde et du dioxyde de carbone, qui abaissent la

pO2 effective au dessus du minerai (voir Chapitre IV).

Cette piste mérite donc d’être explorée lors des études à venir. D’une part, les mécanismes doivent être affinés par de nouvelles expériences en laboratoire. D’autre part, cette hypothèse doit être testée en conditions protohistoriques.

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Chapitre III

Etude des correspondances entre les paramètres