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En termes de développement, l’apport d’azote avant le débourrement n’a eu aucun effet

sur le profil de débourrement aussi bien au niveau de la vitesse de débourrement que du

nombre de bourgeons ayant débourrés. Ce résultat confirme celui obtenu au cours de la thèse de Suraphon Thitithanakul au PIAF (communication personnelle).

Il ressort de cette étude que l’apport d’azote avant le débourrement dans la solution

nutritive n’a pas eu d’impact sur la croissance du scion de Peuplier tout au long de cette

expérimentation. D’une part, cela s’explique par la courte durée de l’expérimentation qui n’a

pas permis de quantifier l’effet à plus long terme sur la croissance de la tige, des racines et des feuilles. D’autre part, l’azote absorbé n’a pu être exporté vers l’ensemble des parties aériennes uniquement à partir du débourrement, ce qui a limité son action sur la croissance dans le cadre de cette expérimentation.

En revanche, l’apport d’azote avant le débourrement entraîne une amélioration de la qualité de jeune pousse foliaire se caractérisant par une augmentation importante de la

surface foliaire et de la teneur en azote. En moyenne, huit feuilles ont été émises, soit le

nombre d’ébauches foliaires contenues initialement dans le bourgeon (Rohde et al., 2007). Malgré un nombre de feuilles équivalent pour les deux niveaux de nutrition azotée, la surface foliaire spécifique (SLA ; cm2. g-1) augmente (test T, pval=0,005) dans le cas de l’apport d’azote induisant une optimisation de la distribution de la biomasse foliaire pour la captation de la lumière. Ce résultat montre que l’apport précoce d’azote permet de maximiser la taille des capteurs de lumière et donc les capacités de photosynthèse, processus fondamental à cette étape du développement pour garantir une croissance optimale lors

Discussion et perspectives

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de la reprise de croissance. A plus long terme, cela améliorerait l’allocation de la biomasse

vers les racines et donc l’absorption de l’azote du sol.

Par ailleurs, pour les deux niveaux de nutrition azotée, un gradient de la surface

foliaire et de la teneur en azote le long de la tige a révélé une dynamique complexe de

l’apparition des feuilles: les pousses foliaires situées en bas de tige présentent une biomasse faible alors que celles situées en haut de la tige ont une biomasse et une surface foliaire nettement plus fortes. D’un point de vue fonctionnel, ce résultat suggère que les feuilles du bas de la tige participent, dans un premier temps, à la reprise du flux transpiratoire et, de façon moindre, à la photosynthèse lors de la reprise de croissance. L’apport d’azote entraîne une augmentation de la durée de croissance des feuilles du bas de la tige, améliorant ainsi la reprise de la transpiration (et donc l’exportation de l’azote vers les parties aériennes) et la photosynthèse. L’apparition des feuilles situées dans les étages supérieurs de la tige permettent d’accroître la quantité de carbone fixé à leur propre profit ainsi que pour alimenter en squelettes carbonés la pousse apicale.

B. Effet de l’apport d’azote sur le recyclage de l’azote

Notre étude a mis en évidence la capacité du scion de Peuplier à absorber le nitrate

présent dans la solution nutritive avant le débourrement. Ce résultat est en adéquation

avec celui obtenu par Suraphon Thitithanakul en thèse au PIAF (2012). L’absorption est rendue possible par la présence de transporteurs actifs qui permettent au nitrate marqué de franchir l’endoderme et d’être alloué, dans un premier temps, dans les racines et à la base de la tige (écorce et xylème). Le mouvement de l’azote marqué vers ces compartiments est piloté par des forces osmotiques (différences de concentrations en nitrate). L’enrichissement en nitrate dans ces compartiments induit, à son tour, des flux d’eau comme en témoigne l’augmentation de l’humidité pondérale. La réhydratation du xylème suite à l’apport de nitrate pourrait donc participer à la réparation de l’embolie (apparition de bulles d’air

dans les tissus conducteurs) hivernale. Cependant, en raison de l’absence de flux

transpiratoire avant le débourrement, l’azote absorbé n’est pas véhiculé vers les parties aériennes et l’absorption est stoppée avant de reprendre à partir du débourrement.

L’analyse de la quantité en azote total combiné à la méthode du marquage de chasse du 15N a permis de préciser la dynamique de l’azote marqué depuis la dormance jusqu’à l’étalement du limbe. Il est important de rappeler que l’azote marqué accumulé dans les différents compartiments pendant la période de marquage rend compte de l’allocation de l’azote absorbé avant le débourrement. La période de chasse du 15N qui suit permet de préciser le

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24 devenir de l’azote absorbé et rend aussi compte de la capacité (ou non) de remobilisation de l’azote dans les compartiments explorés. Il ressort que :

- l’azote issu de l’absorption puis stocké de façon transitoire dans les racines est

remobilisé de façon importante et exporté vers les parties aériennes au cours de l’étalement

du limbe. Ce résultat montre notamment que les grosses racines sont des fournisseurs importants d’azote au cours de l’étalement du limbe. Il est possible d’observer des disparités au sein des grosses racines entre le cortex racinaire (zone de stockage) et le cylindre central (zone de conduction) montrant l’importance du système racinaire dans le stockage (Pregitzer

et al., 1990),

- les quantités d’azote issu de l’absorption mesurées dans la tige (écorce et

xylème) sont faibles et varient peu au cours de l’expérimentation. Le compartiment

« xylème » reste marqué de manière constante entre les deux derniers prélèvements alors que la quantité d’azote marqué apparait légèrement croissante pour le compartiment « écorce ». L’étude réalisée permet donc de montrer que l’azote n’est pas dirigé de manière exclusive vers les feuilles mais que l’écorce, qui a cédé une partie de ces réserves azotées, est capable de recevoir localement de l’azote depuis le xylème et/ou, de façon plus large, depuis les racines. La stabilité de la quantité en 15N ne correspond pas à une équilibre statique (pas d’entrée et pas de sortie de 15N dans l’écorce) mais bien à un équilibre dynamique (entrée de 15N = sortie de 15N). Cette étude met en évidence le double-rôle de l’écorce en tant que source importante d’azote avant débourrement mais également en tant que puits lors des phases plus tardives car le compartiment sera capable de puiser l’azote marqué tout

en se vidant de son pool azoté initialement présent. Cette conclusion est renforcée par le

fait que l’azote total se situe initialement (au début de l’expérimentation) au niveau de l’écorce de la tige, par rapport aux quantités mesurées dans le xylème. L’écorce est donc une zone centrale autour de laquelle s’articule la remobilisation des réserves azotées. Les tissus conducteurs ne contiennent quant à eux que très peu d’azote (0.4% MS) ce qui apparait cohérent étant donné la forte proportion de cellules mortes.

- la moitié de l’azote ajouté avant débourrement est allouée vers les nouvelles

pousses foliaires (nouveaux puits en croissance) au stade « étalement des limbes » et

contribue à l’amélioration de la teneur en azote.

D’une manière globale, l’étude a mis en avant une diminution globale de la quantité d’azote au niveau des tissus pérennes et une augmentation de la quantité pour les feuilles ce qui souligne des mouvements d’azote entre ces tissus de stockage et les jeunes pousses. L’ensemble du pool azoté est donc dirigé des tissus de stockage (écorce) vers les jeunes pousses en développement qui vont assurer la production d’énergie par le processus de

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25 photosynthèse dont le rendement dépend en grande partie de la teneur en azote des tissus modifiant le niveau de métabolisme