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Les collectivités locales et les pouvoirs publics fédérés autour du CISALB poursuivent les efforts de réduction des flux de pollutions initiés dans les années 1980. Le projet « Grand Lac » débuté en 1999 pour une durée de 15 ans, formalise un premier contrat de bassin versant signé en 2002 dont les efforts sont largement tournés vers les traitements des eaux usées urbaines (domestiques et industrielles). Le bilan de ce premier contrat ouvre des perspectives d’améliorations concrétisées par un second contrat de bassin versant couvrant la période 2012-2017. Les problématiques centrales de ce nouveau contrat convergent vers l’évaluation et le traitement des pollutions diffuses urbaines et agricoles et la réhabilitation de milieux naturels aquatiques perturbés (zones humides, cours d’eaux, ripisylves). Les pollutions diffuses urbaines ciblées sont les rejets urbains par temps de pluie (RUTP) vecteurs de nombreux éléments polluants (nutriments, éléments traces métalliques, polychlorobiphényles -PCB, hydrocarbures aromatiques polycycliques –HAP – Pleux, 2011) retrouvés en concentrations non négligeables dans les eaux de ruissellements mais aussi dans les sédiments du lac (Jung et al., 2008 ; Jung, 2009 ).

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La qualité des eaux du lac du Bourget comme la qualité des eaux du lac d’Annecy ou du lac Léman, sont suivies dans le cadre de suivis écologiques gérés par des syndicats (CISALB pour le lac du Bourget et SILA pour le lac d’Annecy) ou par des commissions de gestionnaires (CIPEL pour le Léman). Ces suivis techniques et scientifiques alimentent la reflexion des gestionnaires et parallelement contribuent au Système d’Observation et d’Expérimentation pour la Recherche en Environnement (SOERE GLACPE pour Grands LACs PEri-alpins). La mission du SOERE est de poursuivre et développer l’acquisition et la formalisation de données écosystémiques. Une finalité de ce SOERE est de mieux comprendre les fonctionnements écologiques de ces lacs soumis aux modifications des régimes des pressions anthropiques ainsi qu’aux changements globaux. L’animation scientifique du SOERE GLACPE est assurée par l’INRA UMR CARRTEL (www6.dijon.inra.fr/thonon).

Pour le lac du Bourget, ces outils scientifiques viennent en appui des outils réglementaires dispensés dans le cadre du SDAGE du Rhône et notamment des

deux contrats de bassin versant successifs (www.cisalb.com) visant à améliorer la

qualité des masses d’eaux superficielles et profondes. Les masses d’eau visées par le SDAGE sont les masses d’eau superficielles (lac du Bourget et son réseau d’affluents – CISALB, 2012) et souterraines (au nombre de quatre - CISALB, 2012). Le SDAGE défini huit orientations fondamentales (dont l’Orientation Fondamentale 5 notée OF5 – Lutter contre les pollutions, en mettant la priorité sur les pollutions par les substances dangereuses et la protection de la santé) déclinées sur les masses d’eau selon un programme d’actions pré-établi par la réglementation en vigueur, ou un programme de mesures complémentaires (PMC) à définir. Les questions relatives aux actions de gestions des pollutions diffuses agricoles restent ouvertes et font partie intégrantes de ce travail de thèse.

1.1.2.1 Évolution de la qualité des eaux du Lac du Bourget

Les efforts engagés par les pouvoirs publics depuis les années 1970 sont probants et Jacquet et al (2013) confirment le statut oligo-mésotrophe du lac du Bourget depuis 2010. Une restauration « rapide » n’est peut être pas le signe d’un retour à un état d’équilibre du fonctionnement des écosystèmes, mais les différents indicateurs suivis révèlent au demeurant, de nettes améliorations de la qualité de l’écosystème lacustre.

Suivant la normalisation de la DCE, Jacquet et al (2013) décrit par un « tableau de bord », les indicateurs clés qui renseignent sur la qualité de l’eau et des milieux aquatiques. Ce tableau de bord permet une lecture rapide de l’évolution de plusieurs indicateurs clés qui renseignent sur la qualité des eaux du lac du Bourget. Pour le détail de ce suivi, les lecteurs sont invités à lire les rapports de suivis scientifiques de l’INRA UMR CARTEL (Jacquet et al., 2007 à 2013 –

http://jacquet.stephan.free.fr/).

L’évolution des orthophosphates dans la colonne d’eau (Figure 1-1), lors du

brassage hivernal, appelle cependant quelques commentaires. Cet indicateur renseigne sur la quantité de phosphore disponible pour la croissance de la biomasse. L’objectif visé par la DCE est une concentration de P-PO4 de 10 µg/l. Cette valeur seuil atteinte pour la première fois en 2011 se confirme en 2012

Figure 1-1 : évolution de la concentration en othophosphate mesurée au moment du brassage hivernal du lac (température homogène au sein de la colonne d’eau) et indication de l’état trophique des eaux du Lac. L’objectif de qualité à l’horizon 2021 est une concentration de P-PO4=10 µg/l. (Jacquet et al., 2013)

1.1.2.2 Apports au Lac et évolution de la qualité des eaux

des rivières

Les suivis relatifs à la DCE sont réalisés en plusieurs points du bassin versant du lac du Bourget et notamment à l’exutoire de la Leysse et du Sierroz, principaux contributeurs du lac du Bourget (ils drainent les ¾ du bassin versant). Le point du Sierroz nous intéresse particulièrement car les sous bassins versants suivis dans le cadre de la thèse sont inclus dans le bassin versant du Sierroz.

La tendance générale est à la diminution marquée des entrées de phosphore et d’azote au Lac du Bourget depuis les années 1970 (estimées entre 1970 et 2004 puis calculées à partir de 2004) avec une valeur minimale en 2009 puis une

augmentation notable pour les années 2010 à 2012 (Tableau 1-1 – valeurs

calculées sur la base de la somme des flux de la Leysse, du Sierroz et du déversoir d’orage des « Biatres » à Aix-les-Bains).

1974 1983 1995-96 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 Ptot (en tonnes de P) 300 150 94 41 21 25 32,8 18,2 13,7 20,4 26,4 40,6

PO4 (en tonnes de P) 140 ? 18 5,1 3,5 3,6 4,6 3 1,8 1,9 1,5 3,1

NO3 (en tonnes de N) 1500 580 450 327 252 275 367 290 214 309 181 347

Tableau 1-1 : apports au lac, de la Leysse et du Sierroz, en tonnes de phosphore total (Ptot), orthophosphates (PO4) et nitrates (NO3), entre 1974 et 2012 (Jacquet et al., 2013). 0 20 40 60 80 100 120 140 1981 1986 1991 1996 2001 2006 2011 P-PO4 (µg/l) milieu hypereutrophe milieu mésotrophe milieu oligotrophe milieu eutrophe

Sur le Sierroz pour l’année 2010, qui correspond à notre année de mesure sur nos bassins versants d’étude, les calculs des flux se basent sur 77 analyses d’eau (tous régimes hydrologiques confondus). Les flux de phosphore calculés à l’exutoire du Sierroz (Tableau 1-2) représentent 40% du bilan des entrées au Lac du Bourget (pour le phosphore total) et plus de 50% pour les orthophosphates. Pour cette même année 2010, pour le Sierroz, les concentrations en phosphore total et orthophosphates ne présentaient aucun déclassement vis à vis des contraintes du SEQ-Eau (moyenne des concentrations pondérées par le débit de l’ordre de 0,034 mgP/l pour le phosphore total et de l’ordre de 0,013 mgP/l pour les orthophosphates).

Le Sierroz % (contribution)

Volume (Mm3) 60,5 27%

Ptot (en tonnes de P) 7,43 40%

PO4 (en tonnes de P) 0,97 52%

NO3 (en tonnes de N) 122 39%

Année 2010

Tableau 1-2 : volume d’eau, flux de phosphore (total – Ptot et orthosphosphates – PO4) et de nitrates (NO3) mesurés à l’exutoire du Sierroz pour l’année 2010. Jacquet et al., 2011.

En rappel, la Directive Cadre sur l’Eau (DCE) vise l’atteinte du bon état écologique des cours d’eau à l’horizon 2015. Le Tableau 1-3 présente la grille de notation des résultats (composée des 5 classes de qualité avec un code couleur) et un extrait des paramètres mesurés dans le cadre de la DCE.

Tableau 1-3 : Valeurs seuils du SEQ Eau concernant les nitrates (en mg NO3/l, le

phosphore total (en mg P/l) et les orthophosphates (en mg PO4/l).

1.2 Synthèse de la problématique locale

La qualité des eaux du Lac du Bourget s’est nettement améliorée et celui-ci tend vers un statut de Lac oligo-mésotrophe (Jacquet et al., 2013). Malgré des bilans relativement bons sur les indicateurs détaillés dans les suivis scientifiques, on s’interroge, dans un contexte climatique perturbé (GIEC, 2007 ; GIEC, 2014) et d’évolutions des usages des sols (mitages péri-urbains, augmentation des surfaces imperméabilisées), sur l’existence d’une pollution phosphorée résiduelle trop importante et sur la contribution à celle-ci des sources diffuses d’origines agricoles.

Pour tenter d’estimer l’impact de ces évolutions et forçages sur les exportations vers le lac (eau, sediments, phosphore, azote), il est necessaire de mettre en œuvre des outils prédictifs spécifiques aux conditions du terrain. Comment développer ces outils ? à quelles échelles les appliquer ? Comment réduire la complexité du système à étudier ? Comment déployer, à partir d’un outil de modélisation, des pratiques opérationnelles de gestion du territoire pour diagnostiquer puis limiter les transferts des pollutions diffuses ?

2- États des connaissances sur la

dynamique du P dans les bassins

versants : couplage avec l’eau et les

sédiments

2.1 Le bassin versant : définition et

comportement hydrologique

2.1.1 Définition

Un bassin versant topographique est l’ensemble d’une région qui a un exutoire commun pour les écoulements de surface (Musy, 2005). C’est l’unité fonctionnelle d’étude des transferts de l’eau et des flux associés. Les limites du bassin versant topographique sont définies par les lignes de crête qui déterminent le partage des eaux d’un bassin à l’autre. On distingue les bassins versants topographiques, des bassins versants réels. Ces derniers intègrent les écoulements souterrains (Roche, 1963). Cette différence peut être qualitativement et quantitativement très importante en fonction de la perméabilité du substrat géologique. Il convient également d’intégrer les effets anthropiques pour la délimitation des bassins versants (tronçons de rivières court-circuitées par des ouvrages EDF, routes qui détournent les eaux de ruissellements, …). Les bassins versants sont également des outils réglementaires et opérationnels (SDAGE, SAGE) incontournables au niveau de la gestion qualitative et quantitative de la ressource en eau et de ses usages (Charnay, 2010).

2.1.2 Cycle hydrologique, bilan et réponses