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Pour l’ensemble des chercheurs du domaine, en fonction des situations et en fonction des individus, différentes formes de dynamiques identitaires opèrent dans l’engagement ou non en formation. Kaddouri (2006) propose une typologie de ces différentes formes alors que Barbier (1996) en présente une autre. Afin de mettre en évidence le lien fort qui peut exister entre

3Notes du cours, Bourgeois « savoirs et organisation dans l’entreprise » 09-10

l’engagement en formation dans un dispositif de formation en alternance et la construction identitaire de chaque étudiant, il nous paraît important de relever l’ensemble de ces dynamiques. Cet inventaire, qui émane du croisement des observations et théorisations des deux auteurs, Kaddouri (2006, pp. 131-136) et Barbier (1996), se présente ainsi :

Selon Kaddouri (2006), Les dynamiques de continuité identitaire permettent au sujet de faire perdurer une identité vécue de façon satisfaisante. Dans le contexte de notre recherche on peut imaginer, par exemple, qu’un étudiant ayant le sentiment d’avoir acquis les connaissances nécessaires pour être un professionnel du travail social, ne trouve plus aucun intérêt à se former. Le « Soi » travailleur social efface la raison d’être du « Soi » étudiant. On peut dès lors imaginer que le sujet fera tout pour maintenir le « Soi » travailleur social, malgré la présence obligatoire à des cours théoriques à l’école, mobilisant indirectement le « Soi » étudiant. L’auteur propose trois stratégies pour maintenir cette identité :

o La préservation conflictuelle (on pourrait imaginer que l’étudiant entre en conflit avec les professeurs et critique ouvertement les programmes pédagogiques).

o La préservation collaboratrice (l’étudiant adopte une attitude d’arrangement, il fait ce qu’on lui demande afin d’obtenir les crédits nécessaires pour le diplôme).

o La préservation par repliement (l’étudiant sans solution pour réduire les tensions existantes décide de quitter la formation).

Les dynamiques de transformation identitaire (Kaddouri, 2006) quant à elles apparaissent proches à ce que Barbier (1996) appelle la dynamique de restauration identitaire. Ces dynamiques permettent d’acquérir une nouvelle identité, et d’abandonner l’identité actuelle vécue de façon insatisfaisante. La formation permet alors une rupture avec l’itinéraire antérieur et la construction d’une nouvelle image identitaire. Sur le plan temporel, on peut relever que ce sont des transformations planifiées. L’engagement d’un étudiant dans la formation en travail social fait partie d’un projet professionnel. Il a comme objectif de devenir travailleur social. Cette transformation peut être soutenue ou non par des autrui significatifs (patron de l’institution, copain, époux, famille), elle peut également être refusée. Dans ce cas, il y a éventuellement confrontation pour faire reconnaître son identité anticipée ou alors la mise en place des stratégies clandestines pour poursuivre son projet identitaire.

Les dynamiques de gestation identitaire (Kaddouri, 2006) apparaissent quand les contenus et les contours de l’identité du sujet ne sont pas encore bien définis. Elles se manifestent sous trois formes :

o Le projet de confirmation de soi, il s’agit là de faire reconnaître une identité existante ou nouvellement acquise. Barbier (1996) fait une différence et nomme ces dynamiques, les dynamiques de différenciation identitaire. Elles concernent des personnes possédant déjà de grandes ressources

professionnelles mais ne se montrant pas encore satisfaites. Ces dynamiques sont vécues en terme d’accomplissement. Le chercheur les nomme encore

« dynamique de confirmation identitaire ». Elles concernent des individus qui sont satisfaits de leur parcours professionnel et social, mais auxquels il manque quelques marques de reconnaissance sociale. Ces dynamiques donnent à la formation une signification dominante de légitimation. On retrouve des situations semblables lorsque des personnes œuvrent depuis de nombreuses années dans le social et désirent un jour faire le bachelor dans ce domaine afin d’être réellement reconnues en tant que travailleur social.

o Le projet de reconstruction de soi (Kaddouri, 2006) permet, lui, la restauration et la réhabilitation de l’identité de sujets qui connaissent une fragilité identitaire alimentée par un sentiment d’humiliation et d’injustice. « Il s’agit de retrouver l’estime de soi d’autrefois » (Kaddouri, 2006, p. 135).

o Le projet de redéfinition de soi (Kaddouri, 2006) permet au sujet d’élaborer une nouvelle définition de soi quand il éprouve des sentiments d’incertitude et d’imprécision quant à ses frontières identitaires. Ce projet pourrait être apparenté à ce que Barbier (1996) appelle la dynamique de préservation identitaire. Dans ce cas, la situation que vit l’individu n’est pas celle qu’il attend par rapport à sa représentation identitaire. Cette dynamique donne à la formation une signification dominante de défense

Les dynamiques de destructivité identitaire et les dynamiques d’anéantissement identitaire (Kaddouri, 2006) sont liées à des situations difficiles qui entraînent une destructivité identitaire. Les dynamiques de destructivité identitaire peuvent déboucher sur des dynamiques de gestation lorsque l’individu arrive à rebondir par rapport à une situation. L’issue sera, dans ce cas, positive. Par contre, la situation peut s’aggraver et déboucher sur des dynamiques d’anéantissement et l’issue sera dès lors négative. Ces dynamiques « conduisent à l’élimination d’un Soi devenu le siège de tous les « malheurs » (ibid., p. 136). Dans le cas d’un dispositif de formation en alternance, certains étudiants vivent des stages très difficiles et frustrants sur le plan de l’image de Soi. Cette situation peut provenir d’un sentiment personnel d’incompétence ou, peut être généré par un autrui significatif, par exemple un PF (praticien formateur) ou par des collègues de travail. On pourrait, dans ce cas, imaginer un renforcement du Soi étudiant qui est rassurant en ce qu’il favorise l’estime de soi. A contrario le Soi travailleur social peut se voir détruit par le jeune en formation tant ce Soi amène frustration et détresse.

Les dynamiques d’affirmation identitaire individuelle ou collective (Barbier, 1996).

Elles donnent à la formation une signification dominante d’accroissement, d’efficacité et de maîtrise des situations.

Les dynamiques de réservation identitaire (ibid.). Les personnes ont eu diverses expériences mais ne trouvent pas de cohérence dans la gestion de leur construction identitaire. Elles donnent à la formation une signification dominante d’opportunités qui peuvent être diverses.

Dynamiques d’acquisition identitaire (ibid.). La formation a pour signification dominante de permettre l’appartenance à un groupe de référence.

Cette typologie présente des dynamiques identitaires qui ont le caractère d’« idéaux-types ».

Kaddouri relève l’importance de ne pas en faire des outils sociaux utilisés en gestion de personnel. Dans le cas du présent travail, cette typologie nous paraît cependant offrir la possibilité de mettre à jour le rapport à la formation ainsi que l’engagement en formation des étudiants inscrits dans le cursus en travail social.

En continuité avec la précédente typologie, Kaddouri (2006, pp. 136-141) en propose une nouvelle mettant en évidence les différents rapports à la formation en lien avec les dynamiques identitaires :

Le rapport d’engagement : processus qui conduit l’adulte à un moment donné de sa vie, à prendre la décision d’entamer telle ou telle formation, c’est-à-dire le plus souvent de renoncer à d’autres options qui s’offrent à lui (Bourgeois, 1998). Dans ce cas, l’engagement en formation constitue la stratégie identitaire du sujet.

Le rapport de désengagement : il suit l’engagement. Le sujet se trouve confronté à une tension identitaire très forte résultant d’un décalage entre son identité pour soi et son identité pour autrui. Le désengagement devient alors une stratégie identitaire pour faire face à cette tension. Ce désengagement peut se traduire par l’abandon de la formation.

Le rapport d’ambivalence : la réalisation du projet identitaire démarre par un engagement fort en formation, puis il se transforme en désinvestissement dans la formation au profit d’autres moyens jugés plus pertinents pour réaliser ce projet.

Le rapport d’indifférence : dans le cadre de ses stratégies identitaires, le sujet ne voit pas d’utilité personnelle à la formation. Dans le cas de notre recherche, nous pouvons imaginer des étudiants pour lesquels les cours ne font plus sens car la matière enseignée paraît inutile pour devenir travailleur social. La formation ne représente plus une stratégie dans la construction de l’identité souhaitée.

Le rapport d’hostilité : c’est quand le sujet s’oppose à la formation car elle entraîne une modification de l’identité que le sujet ne désire pas. L’exemple précédent peut mener jusqu’à un rapport d’hostilité, et l’étudiant peut dès lors mettre un terme à la formation.

Le schéma ci-dessous (ibid., p. 142) reprend le développement précédent et met en évidence le lien entre l’engagement en formation et les stratégies identitaires.

(Kaddouri, 2006, p. 142)

Cette typologie des rapports à la formation a été construite en fonction des recherches effectuées par le groupe de recherche de Kaddouri et concerne la formation continue d’adulte.

Cependant il nous a paru extrêmement intéressant d’y faire référence car le transfert de cette typologie à des groupes de jeunes étudiants en formation initiale nous paraît tout à fait réalisable.

Après avoir mis en évidence les dynamiques identitaires en jeu lors de l’engagement en