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SQ 3: Un climat de classe positif et un esprit d’équipe peuvent-ils émerger au sein d’une classe de l’enseignement spécialisé où les compétences scolaires des élèves sont

4.1 Présentation des résultats

4.1.2.1 Du côté des élèves Les valeurs observées

L’entraide

− S. commence à lire le problème à haute-voix. Lorsqu'il bute sur un mot, R. prend la relève et lit le mot à

sa place. (08.12.2014)

Nous observons sous ce point que R. reconnaît que son camarade S. a besoin d’aide même si aucune demande d’aide n’a été explicitement formulée. L’entraide y est donc spontanée.

• L’engagement

− Je suis surprise de voir un élève, D. qui a énormément de difficultés en lecture, choisir comme

respon-sabilité la lecture de la recette. (04.-05.05.2015)

L’une des élèves, généralement mutique, prend son rôle à cœur. (21.03.2015)

On remarque ici l’investissement sur le plan cognitif que D. est capable de fournir. Dans le deuxième exemple une élève, qui n’ose pas en règle générale s’exprimer et prendre sa place dans le groupe, parvient à dépasser ses craintes pour réaliser le mandat de l’équipe.

• L’ouverture aux autres

− I. a été capable d’écouter l’autre et accepter par exemple qu’ils fassent la moitié de la vaisselle chacun (elle voulait la faire en entier au départ). (09.12.2014)

Les jaguars (I. + R.) : ils ont plutôt tendance à s’éviter dans le quotidien, mais là, ils parlent, rigolent, plaisantent. (15.12.2014)

Ces deux verbatim illustrent la capacité de certains élèves à accepter de faire un premier pas dans la direction de l’autre et, le temps de l’activité, de réduire les différences d’affinités et d’intérêts entre chaque membre du groupe.

• Le plaisir

Je vois trois élèves à genou devant le four qui regardent les biscuits gonfler en disant : « ça c’est nos biscuits ». (04.05.2015)

Cet exemple rend compte de deux éléments qu’il nous semble intéressant de relever ici. Il y a tout d’abord le plaisir qui est exprimé par les élèves eux-mêmes par rapport à leur réalisation, mais aussi, et cela est suggéré par le fait que l’enseignante ait relevé cette information dans son journal de bord, sa satisfaction d’observer “ses“ élèves avoir du plaisir.

• La confiance

« J’ai fait comme d’habitude. On s’occupe d’abord des ingrédients et des quantités et ensuite on orga-nise ce que l’on doit faire ». (18.-19.05.2015)

Lors du premier exercice, elles se répartissent le travail. J’observe que cette répartition tient compte de leur niveau de compétence. B. découpe les groupes de mots, M. reconstitue les phrases mais demande quand même du soutien à B. (15.12.2014)

Le premier verbatim nous montre qu’en exerçant à plusieurs reprises le même type d’activité, l’élève gagne en confiance en lui. Il peut se référer à ce qu’il a déjà expérimenté les fois pré-cédentes et anticiper les étapes qu’il devra suivre pour mener à terme son objectif. Le

deu-xième exemple met en avant le fait que non seulement les membres de l’équipe ont confiance les uns vis-à-vis des autres, mais aussi que les élèves ont confiance en la capacité de l’équipe à réussir.

• La démocratie

Je reviens un moment plus tard et observe : après chaque lettre écrite, ils se passent le clavier pour que le suivant puisse à son tour noter la lettre suivante. (12.05.2015)

De manière spontanée il dit : la 1ère c’est moi, la 2e c’est B. et la 3e c’est J. et il reprend, la 4e c’est moi et la 5e c’est B., le dessin c’est toi J. (12.05.2015)

Ces deux éléments mettent en évidence la volonté des élèves d’accorder la même importance à chacun des membres du groupe.

Les valeurs difficiles à incarner par les élèves • L’entraide:

La demande d’aide est formulée d’abord aux adultes avant d’être formulée aux camarades. (21.04.2015)

L’entraide est difficile à mettre en œuvre quand la référence demeure l’adulte. Les élèves n’ont pas encore conscience de leur propre capacité d’aider.

• L’engagement

− Le choix des couleurs se fait par M. Elle prend le leadership du groupe. Je les interpelle à ce sujet,

mais et I. et A. sont ok avec ce mode de faire. J’observe un désinvestissement progressif de la tâche et ils acquiescent simplement aux propositions de M. (12.05.2015)

− B., quant à elle, ne se positionne pas, attend que ses deux camarades aient choisi avant de prendre la

place qui reste. (04-05.05.2015)

Le premier exemple nous montre qu’avec l’émergence d’un leader au sein du groupe, l’investissement sur le plan interpersonnel s’amenuise et les autres membres du groupe s’en accommodent. Dans le second exemple, nous voyons que les difficultés propres à cette élève la freinent grandement dans la possibilité de s’engager dans la tâche.

• L’ouverture aux autres

− L. : « Ce n’est pas juste, elle a pas la même chose que nous ». R. : « Elle, pour elle, c’est facile de faire

zéro faute, elle a que des syllabes. Pourquoi nous on a pas pareil ? c’est vraiment nul ». L. : « ouais elle a que des petits mots, c’est pas juste. Moi je m’en fous, je fais plus la dictée ». (12.12.2014)

− A. est trop énervé d’être dans ce groupe de travail et refuse catégoriquement de travailler. Il est le seul

garçon dans ce groupe et cela lui est insupportable. (12.05.2015)

Lorsque les comparaisons entre les élèves perdurent et procurent un sentiment d’injustice, les différences peuvent conduire à des conflits. Il n’est plus possible alors pour certains d’être conciliants.

− « Maîtresse, c’est bien ça le séré ? ». « Maîtresse, je dois faire quoi ensuite ? ». (21.04.2015)

− A. qui craint de se risquer, de prendre sa place, choisit le rôle de vérificateur après avoir d’abord voulu

prendre celui de lecteur. Il est vite revenu en arrière. (04.-05.05.2015)

Cette valeur exige des élèves qu’ils croient en leurs compétences. Quand cela n’est pas le cas, on observe alors qu’ils ne parviennent plus à trouver les ressources à l’intérieur d’eux-mêmes. L’enseignante est donc sollicitée et devient la référence à qui adresser les demandes d’aide. Dans le deuxième exemple, nous observons que l’élève aimerait se risquer un peu plus, mais que son manque de confiance en lui l’empêche encore de le faire.

• La prise de risque

− I. triche en regardant discrètement sa carte. R. fait tomber deux fois sa carte ce qui lui permet de voir le

dessin, mais il assure qu’il n’a rien vu. (25.11.2014)

− Les règles du jeu, pourtant largement connues de toutes et tous, semblent oubliées et laissent place à de

nouvelles règles dont la responsabilité est inversée. Celui qui fait le pendu serait censé aider ses cama-rades à trouver la solution. (05.12.2014)

Dans ces deux exemples, l’accès à la responsabilisation individuelle, c’est-à-dire accepter ses erreurs ou celles des autres, est fragilisé ce qui entraîne une perte d’assurance qui va interférer dans l’activité en cours.

• La démocratie

− Le tirage au sort est demandé par les élèves, mais ils ont de la peine à accepter ce choix hasardeux.

(05.12.2014)

− Sur le trajet du retour en classe, I. essaie de monter deux garçons, R. et S. contre J. en leur faisant

croire des bêtises à son sujet. (09.12.2014)

A travers ces deux exemples, nous constatons que les jugements que se portent les élèves peuvent pencher très rapidement d’un côté de la balance comme de l’autre. Ils n’accordent pas la même importance à tous.

4.1.2.2 Du côté de l’enseignante