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4. Le Ruisseau des Awirs

5.4. Données diverses sur la biologie des anguilles dans la Méhaigne

5.4.1. Comportement de remontée dans l’ échelle à poissons de Moha

Au cours de 9 années de contrôle du piège de l’échelle à poissons de Moha, furent capturées 4 anguilles de 31-72 cm sur un total de 1 497 poissons. Les conditions de capture étaient celles indiqués dans le tableau 17. Les mouvements qui ont amené ces quatre anguilles dans le piège sont probablement des déplacements d’activité dans les limites du domaine vital. Le faible nombre de poissons capturés tient au fait que le piège ne retient pas les anguilles de la taille (> 40 cm) de celles qui colonisent la basse Méhaigne à partir de la Meuse.

11 mars 1993 70 8,2 500 (227)

16 avril 1993 106 13,7 720 (685)

24 juillet 1996 205 16,9 310 (54)

15 mai 1998 135 16,6 (510) (241)

___________________________________________________________________________ 5.4.2. Observations sur la dévalaison vers la Meuse

En 1998 et 1999, les conditions de fonctionnement de l’échelle à poissons de Moha ont permis d’intercepter des poissons dévalants. Sur 236 poissons dévalants en 1998, on a dénombré 2 anguilles (biomasse : 1,464 kg ) et sur les 102 poissons dévalants en 1999, aucune anguille n’a été trouvée. Mais des anguilles sont régulièrement interceptées sur la grille de protection de la prise d’eau de la turbine hydroélectrique.

5.4.3. Testage de la migration de remontée des anguilles jaunes dans la Méhaigne

Dans le cadre de l’évaluation de l’efficacité de l’échelle à poissons aménagée en 2006-2007 pour permettre le contournement du barrage modernisé de Huccorgne Collinet (fig. 45B) a été entreprise par le LDPH-ULg une expérience qui a consisté à relâcher en aval du barrage des anguilles capturées dans l’échelle du barrage de Lixhe et équipée d’une marque (puce électronique) (voir étude par Ovidio et al, 2009). Au total, 47 anguilles de 35,5-61,5 cm ont été utilisées en lots remis à l’eau à différentes distances en aval du barrage : 9 anguilles au pied du barrage (23/6), 9 anguilles à 450 m dans le secteur à débit réservé (23/6), 20 anguilles à 1600 m en aval du tronçon à débit réservé (23/6) et 19 anguilles à 2,2 km en aval du barrage du four à chaux à Moha (9/7).

Pour déceler le passage des anguilles marquées à la sortie de l’échelle à poissons, cette sortie a été équipée d’un dispositif d’enregistrement automatique des passages basé sur la technologie CIPAM (fig. 53).

Sur les 27 anguilles relâchées de 0 à 1600m en aval du barrage de prise d’eau de la centrale de Huccorgne, 15 (56 %) ont été détectées à la sortie de l’échelle à poissons, avec des délais de détection parfois rapides (premières détections enregistrées à peine 4 jours après la date de relâcher dans le cours d’eau). Parmi les 20 anguilles relâchées au village de Moha, 4 (20 %) ont été détectées à la sortie de l’échelle à poissons de Huccorgne. Globalement, cela fait 19 anguilles sur 47 (40 %) qui ont manifesté une impulsion nette à la migration vers l’amont (essentiellement pendant la nuit), conformément à ce qui était attendu chez des sujets juvéniles interceptés en pleine phase de remontée dans la Meuse.

On ignore ce que sont devenues les 28 anguilles marquées non recapturées mais on peut supposer que certaines n’ont pas été détectées à cause d’épisodes de dysfonctionnement de l’appareil et que d’autres se sont stabilisées dans la rivière et reprendront peut-être leur migration pendant l’année 2010.

Figure 53. Composants du dispositif CIPAM de détection automatique d’anguilles marquées à la sortie de la nouvelle échelle à poissons de Huccorgne-barrage Collinet. De haut en bas : antenne de détection, boitier électronique et puce électronique implantée dans le poisson (source : Ovidio et al.,2009).

la Méhaigne situé en aval du barrage de Huccorgne-Collinet déjà évoqué au point 5.4.4. Cette partie de la Méhaigne (fig. 54) a la particularité d’être composée de deux secteurs très différenciés au point de vue de l’habitat hydraulique et morphologique de l’anguille. Le tronçon de l’amont, long d’environ 900m, est situé en aval du barrage de prise d’eau vers la turbine hydroélectrique ; il est alimenté par un débit généralement (sauf en cas d’arrêt du turbinage ou de fortes eaux) artificiellement faible correspondant au débit réel de la rivière diminué du débit nécessaire à l’alimentation de la turbine, avec toutefois un débit minimum réservé fixé à 0,3 m3

/s écoulé via l’échelle à poissons de contournement. Le deuxième tronçon , long de 500 m, est situé en aval de la restitution de l’eau turbinée et se caractérise par un débit tout à fait normal.

Figure 54. La Méhaigne à Moha (Huccorgne) dans la zone d’influence de la dérivation d’eau par la centrale hydroélectrique de Carmeuse-Collinet: (a) barrage, (b) conduite forcée, (c) centrale hydroélectrique, (d) canal de fuite, (e) zone en débit réservé, (f) zone en débit naturel et (g) échelle à poissons (source : Seredynski, 2009).

Entre le 27/02/09 et le 17/03/09, 12 anguilles de 50 -5-80,2 cm furent pêchées à l’électricité dans le secteur d’étude, équipées d’un émetteur radio et relâchées à l’endroit de leur capture : 7 anguilles dans le secteur à débit faible et 5 anguilles dans le secteur à débit naturel. Les poissons furent localisés tous les 2 jours pendant la période de mars à juin avec enregistrement des données sur la température de l’eau et les débits naturel et perturbé de la rivière.

La figure 55 décrit, à titre d’exemple, la mobilité des anguilles 4 et 5 au milieu du tronçon à débit artificiellement réduit.

-370 -350 -330 -310 -290 -270 -250 19/2/05 5/3/05 19/3/05 2/4/05 16/4/05 30/4/05 14/5/05 28/5/05 11/6/05 25/6/05 9/7/05 Temps (jours) Position (m) anguille 4 anguille 5

Figure 55. Positions des anguilles radio-pistées n° 4 et 5 du 20 mars au 30 juin 2009 en zone à débit réservé dans la Méhaigne. Le point zéro correspond au barrage de prise d’eau et à l’entrée de l’échelle à poissons (source : Seredynski, 2009).

De manière plus générale, les principaux apports de cette étude sont les suivants :

* Les anguilles étudiées occupent un domaine vital (positions extrèmes en aval et en amont) qui mesure en moyenne 127 m, avec un minimum de 2 m (0,002 ha) et un maximum de 341 m (0,3 ha). A l’occupation de tels domaines vitaux correspondent des déplacements nets cumulés (somme des déplacements sans tenir compte de la direction) qui valent en moyenne 305 m avec des extrèmes de 9 et 840 m. On enregistre donc une très grande variabilité individuelle du comportement d’utilisation de l’habitat qui s’explique en partie par la taille des poissons dans le sens d’une augmentation des déplacements moyens avec la taille.

* Dans le secteur à débit artificiellement faible, les anguilles ont effectué un déplacement net de 9 à 840 m en occupant un domaine vital de 2 à 341 m (ou 0,002 à 0,3 ha) tandis que dans le secteur à débit naturel, le domaine vital est de 25 à 139 m et le déplacement net est de 92 à 288 m. Cette différence traduit le fait que les variations temporelles des conditions d’habitat (profondeur de l’eau, bonne convenance des abris) sont plus marquées (instabilité) en débit réservé qu’en débit naturel et poussent davantage les poissons à bouger pour occuper les meilleurs habitats disponibles.

* Au cours de l’étude, deux anguilles ont réussi à franchir l’échelle à poissons et se sont stabilisées dans la partie profonde de la Méhaigne en amont du barrage de prise d’eau.

Figure 56. Les photos représentent les cinq types d’habitats rencontrés durant l’étude, avec dans l’ordre de gauche à droite et de haut en bas : souche d’arbre, sous berge, rocher (<50cm), bloc (>50cm) et sédiment (source : Seredynski, 2009).

* Cette étude débouche enfin sur quelques mesures préliminaires de gestion applicables à la Méhaigne et aux cours d’eau comparables (moins de 10 m de largeur, habitat général cyprinicole) :

- entretenir et maintenir des berges naturelles fixées par de la végétation ligneuse car les anguilles utilisent principalement les habitats situés le long des berges (sous-berges creusés, racines, embacles de débris végétaux).

11 12

13 14

15

1m 40cm

- améliorer morphologiquement les cours d’eau dégradés : il faut envisager de recréer des zones d’habitat à anguille (par placement de rochers, création d’embacles fixés, structures artificielles à imaginer, plages de végétation aquatique) au sein de cours d’eau remaniés (chenalisés, canalisés) ou pauvres en habitats.

- surveiller, pour les améliorer, les sites hydrauliquement perturbés : les anguilles doivent avoir accès à des habitats situées dans les zones à plus grande profondeur lorsque le débit est artificiellement réduit dans un tronçon court-circuité par une prise d’eau hydroélectrique en dérivation ou lors du fonctionnement en éclusée d’une turbine-centrale hydroélectrique ( voir fig. 56).

- réaliser des ouvrages efficaces de franchissement des obstacles pour la remontée des jeunes et la dévalaison des pré-adultes.

hauteur d’eau de 0,50m hauteur d’eau de 0,68m

Figure 56 . Le même microhabitat à – 188 m (zone à débit réservé) dans deux conditions de débit-hauteur d’eau : situation plus favorable à droite (H= 0,68 m) qu’à gauche (H=0,50 m). (source : Seredynski, 2009).

C’est principalement le cas du Hoyoux qui est peuplé de quelques anguilles dans son cours inférieur en contact direct avec la Meuse mais dans ce cours d’eau très fragmenté par de nombreux barrages, la remontée des poissons migrateurs est actuellement rendue très difficile, voire impossible à plusieurs endroits.

Un autre affluent intéressant est le Ruisseau d’Oxhe qui est surtout peuplé de truites communes et d’espèces de petite taille d’accompagnement (chabot, petite lamproie) mais l’anguille y est très rare.

Il faut enfin signaler que dans l’est de la Province de Liège se trouvent deux cours d’eau, la Roer et son affluent la Schwalm, qui abritaient quelques anguilles dans les années 1970. Il s’agit d’une situation est tout à fait marginale qui ne justifie pas un développement plus important.

VII. L’ANGUILLE DANS LES SOUS-BASSINS DE l’OURTHE, DE L’AMBLEVE