La supputation a duré deux moisenviron.
L'ongle
s'estéliminé; il en estpoussé un nouveau et toutesles lésions cutanéesont guéri.A la suite de cette affection, le doigt est resté gros, violet etraide.
Il y a deux mois, consécutivement àun traumatisme dans la même
région, s'est montrée une douleur très vive. Il y a quinze jours, il s'est produitau niveau de la pulpe de l'index gaucheet de la racine de l'on"
gle deuxsoulèvements pustuleuxqui ontabouti à la formation d'ulcé¬
rations.
Rien d'intéressantà noter dans les autres antécédents de la malade ; elleaccuse cependantun degré de nervosismeexagéré.
Actuellement,
l'index gauche est volumineux, arrondi; son extrémité esteffilée. Les mouvements de flexion desphalanges sont impossibles : seule la flexion dudoigtsurlapaume de la main se fait encore. Sur le dos dudoigt, etprès de son extrémité, se trouve une ulcération en forme de croissant, de 5 millimètresde largeetquioccupe presque toute l'étendue du repli sus-unguéal, ulcération à fondsaillant, dépassant très légèrement les bords.A la partie inférieure, sur lapulpe, on voit une deuxième ulcération arrondie, peu
déprimée,
àbords plats, à fondjaunâtre, lisse, vernissée,peusuppurante, très douloureuse au toucher. La peau, au pourtourde
ces ulcérations, estlisse et tendue. La pression est douloureuse, mais
non également, assez accusée au niveau del'articulation de la dernière
phalange, excessivementau niveau de l'extrémité du doigt.
L'onglede nouvelle formation estpetit, présenteune voussure bicon¬
vexe. On remarque à sa surface quelques petites striations longitudi¬
nales.
La malade n'ajamais eu
d'engelures
dans son enfance, mais depuis l'âgede quarante-cinq ans elle en a présentétous les hivers à la main gauche. Elles ne seprolongeaient pas au delà de l'hiver. On peut noter quelques troubles du côté du médius de la même main, parfois gonfléetun peu refroidi.
La nuit, la malade accuse des démangeaisons et, parfois aussi, des élancements dans le doigt malade,se produisant surtoutsous l'influence de la chaleur.
La sensibilitéparaît conservée.
Lamalade, très nerveuse, afailli se trouver mal pendant qu'on exa¬
minait sondoigt.
Le froidproduit de la douleur. * Ledoigt'ne dégage aucuneodeur spéciale.
On donne une pommade àl'ichthyol et àl'oxyde de zinc.
24février 1899. Amélioration sensible. L'ulcération de la pulpe du doigt tendàse cicatriser. Les douleurs ont un peu diminué. En re¬
vanche, le doigt dégage une odeur spéciale déjà observée chez notre autre malade.
Comme la pommade, bien qu'inofl'ensive, détermine d'assez vives douleurs,on prescrit des pansements humides à la créoline.
3 mars 1899. Les douleursont disparu. L'épiderme se dessèche sous l'influence des pansements humides. L'odeur disparaît devant celle de la créoline. Pas d'amélioration desulcérations, qui suppurent toujours.
L'ongle est stationnaire. Le doigt semble moins gonflé; cependant l'extrémitéa toujoursl'aspect fusiforme.
10 mars 1899. Aucune amélioration des ulcérations. Nulle odeurpar¬
ticulièreà la partie inférieure du lit unguéal, l'ongle a disparu et est remplacépar l'épiderme légèrement épaissi. Le repli unguéal està peu
près complètement aboli, saufdansunpoint
(partie supéro-interne).
Conservation de lasensibilité,
Malgré
la raideur très accentuée du doigt, les mouvements provoquéssontpossibles.
24mars 1899. Les ulcérations sont en voie de cicatrisation. Ledoigt
semble avoir diminué devolume et est moins douloureux.
Rien de nouveau àsignaler du côté de l'ongleet du repli unguéal. La malade peut exécuter quelques légers mouvements de flexion sans dou¬
leur. Les mouvements provoquéssontdouloureux etpeu étendus.
Depuis huitjours, la maladeemploie la poudre d'aristol.
21 avril1899. Guérison à peu près complète. Il n'existe qu'un seul point douloureux sur la face antéro-interne du doigt. La plaie est cica¬
trisée mais non obstruée. Il reste une dépression assez excavée etassez irrégulière, recouverte d'une couche cornée excessivement dure. Toute la phalangetteest trèsdure,commesi les partiesmollesavaientdisparu.
L'ankylose de l'articulation phalangino-phalangétienne est à peu près complète.
sont étendus à l'arti¬
culation métacarpo-phalangienne, mais excessivementrestreints à l'arti¬
culation phalango-phalanginienne.
Rien de nouveau à signalerpour l'ongle.
Il existe une légère desquamation de l'épiderme du doigt.
L'état nerveuxde la malade esttoujours trèsaccusé.
Depuis, nousn'avons pas revu cette malade.
DESCRIPTION
Ces neuf observations ne présentent pas certes le même
intérêt pour nous. Nous pouvons de suite placerau premier plan pour notre description les nos III, VII et VIII.
Il y a deux ans
à
peine, Hallopeau,étudiant
dans une cli¬nique magistrale les
acrodermatites,
les divisaient en trois groupes :a)
Vésiculeusesb)
Pustuleusesc)
MixtesCette troisième variété nous s'emble inutile, car, si au
début, l'affection s'est présentée sous la forme d'une petite vésicule, celle-ci ne tardaitpas à se transformeren pustule, à devenir purulente et à subir l'évolution que nous avons observée dans cette forme. Il en fut ainsi pendant toute la durée de la maladie ; par conséquentnous ferons rentrer ce cas
(Obs. IV)
dans notre groupe d'acrodermatites à forme pustuleuse.Nous ne garderons donc que deux variétés et dans le seul but de favoriser notre description, car les acrodermatitesne
semblent, pour nous, former qu'une seule famille.
Lo Acrodermatile vésiculeuse. — A notre grand regret,
nousn avons jamais eu l'occasion de voir cette affection ; aussi nous contenterons-nous de reproduire la description
que Hallopeau en a faite en sebasantsurles troiscas qu'il a vus
(Obs.
I, V et VI). « Cette forme est constituée par desvé¬sicules reposant sur une surface rouge. Ces vésicules isolées
persistent d'abordun certain temps
après l'éruptionqui
n'estenpremier lieu quepartielle. Quant les vésiculesse rompent elles laissent des excoriations qui se recouvrent bientôt soit de croûtes, soit de squames lamellcuses plus ou moins épaisses. La peau sous-jacente est rouge et tuméfiée. Si les squames se
détachent, l'épiderme
est aminci,lisseetbrillant;
quelquefois,
au contraire, il estépaissi, etcetépaississementse traduit par uneexagération desplis. L'ongle souffre dans
sa nutrition, perd son poli, se creuse verticalement de plis
et de sillons profonds. Il présentedes aplatissements trans¬
versaux et de nombreuses
dépressions
punctiformes. Le malade éprouve une sensation pénible de cuisson, mois non de prurit. Cette forme ne sedéveloppe
pas aux orteils. »2° Acrodermatite pustuleuse. — Nous allons nous baser sur les Observations II, IV, IX et surtout III, VII et VIII pour cette
description.
L'affection débute presque toujours par une tourniole (Obs. II, III, VIII,
IX).
Cette tourniole évolue normalement, décolle etsoulève l'épiderme, amène la chute de l'ongle, et,sans aucunphénomène plusgrave, guérit difficilement.Dans l'Observation III elle fut incisée etguérit assez vite. Quelque¬
fois on ne trouve qu'une simple tache enfumée, noirâtre,sur un côté de l'ongle
indiquant
un défaut de nutrition ; peu àpeu, le rebord de l'ongle se décolle pour livrer passage au pus quis'élait amassé par dessous (Obs. VII).
On peut voir encore apparaître une petite vésicule
près
dela matrice de l'ongle,se
changer
en pustule, devenir puru¬lente et évoluer normalement
(Obs. IV).
La lésion est constituée.
Au bout d'un temps plus ou moins éloigné, par le
même
processus, un outre doigtest atteint, puis un autre, et enfin
tous ou la presque totalité des doigts sont pris.
Mais pendant ce temps, des lésions analogues ont pu se montrer à la paume des mains et aux pieds : c'est d'abord
un érythème de la région sur
lequel
une ou plusieurs pus¬tules affectant des contours
polycycliques
apparaissent,s'ou-vrent, laissant échapper unsuintement plus ou moins abon¬
dant. Ces pustules se dessèchent assez rapidement, mais à la périphérie du petit placard d'autres apparaissent qui subis¬
sent le même cycle d'évolution. Les placards augmentent ainsi d'étendue: du volume d'une lentille à une pièce de
50 centimes au début, ils atteignent bientôt celui d'une
pièce
de 2 francs et plus, et confluentjusqu'à
se confondre les uns avec les autres, occupant ainsi toutes les faces pal¬maires des doigts et des mains.
Aux pieds, l'affection peut débuter par les petits orteils
(Obs. VII)ou
bienpar lesespaces rétro-malléolaires(Obs.VIII).
Nous avons même vu un petit placard situé au milieu de la plante du pied.
Les lésions sont donc constituées par de petites pustules
miliaires formantun placard à extension excentrique, ame¬
nant toujours un agrandissement en surface. Ces pustules
contiennentunpus
jaune
blanchâtre, assez épais, fétide.Elles reposent sur unépiderme
rouge, mince, enflammé. Cetépi-dermepeut
disparaître
avecelles (Obs. VII) etlaisserunevaste plaque excoriée avec un dermerouge foncé, lisse,non papillo-mateux, parseméçàetlà
de quelques petites pustules miliai¬res qui ont survécu,oubien il persiste, mince, tendu, lisse,
nelaissant àpeine voirque les crêtes papillaires, sec, desqua¬
mant peu abondamment en petites lamelles farineuses (Obs.
VIII).
Mais il arrive un moment où la lésion semble rester sta-tionnaire et présente un contourassez net. Dans les
régions
à épiderme épais,comme au talon de la main,nous trouvons
une bordure de cet épiderme décollé, flottant librement du
côté de lalésion, et recouvrantunamas depus plusou moins grumeleux, adhérent du côté de la peau saine et
large
de quelques millimètres à 1 centimètre. Si l'épidermeestminceau contraire, il n'y a qu'une simple
arcole
rougeûtre et enflammée qui indique la transition entre les deux parties.A la face dorsale des mains, les lésions ne dépassentpas les dernières phalanges et sont constituées par un
épiderme
Led. 3
érythémateux
sur lequel apparaissent quelques rares pus¬tulesqui
disparaissent
sans laisserde traces.Mais sur cetteface de la main, la lésion la plus
importante
àétudier est celle de l'ongle. Atteint dans sa nutrition soit
primitivement (Obs.
VII),
soit par la suppuration de la tour-niole, il tombe le plus souvent. Sur sonlit, 011 rencontregéné¬ralement de fines croùtelles ou de petites squames,qui, sou¬
levées, laissent sourdre un pus épais, grumeleux, fétide, et voirun litunguéal rougeetenflammé.La sertissureest rouge, œdématiée, suinte un peu, mais ne présente aucune autre altération. Si l'ongle persiste,
lapartie
basale,sur unelargeurdeplusieurs millimètres, est molle, dépressible, écailleuse.
Mais peu
à
peu la partie restée normale s'élimine, sans être immédiatement remplacée.La lésion s'améliore par le temps ou sous l'influence des antiseptiques ? Nous assistons alors à une sorte de gonfle¬
ment du litunguéal qui se couvre peu à peu d'un épiderme mince, délicat, friableet desquamantfinement. Cetépiderme
sedurcit lentement et finit parprendre uneconsistanceassez dure. Mais que nous sommes loin de l'ongle ordinaire! Le poli a disparu pour faire place à des stries
longitudinales,
traversant tout cet épiderme durci. En même temps, une
dépression très
forte siège au niveau de la partiebasale,
pendant quela partie médiane est proéminente.Quelquefois,onconstate de petits pertuisminuscules
taillés
comme à l'emporte-pièce, siégeant au pourtour de cette cou¬
cheépidermique. Et nous notons toujours la même desqua¬
mation en quelque sorte farineuse. Enfin, avec le temps,
ces difformités disparaissent, l'ongle redevient peu
à
peu ce qu'il doit être sans recouvrercependantsonpoli et sonéclat.
Nous insisterons maintenant sur un caractère que nous
avons constaté chez nos deux malades; c'est l'odeur
particu¬
lièreque dégageaient les parties atteintes. Nous regrettons quenotre belle langue française soit si pauvre en
épithètes
quand il s'agit de décrire les impressions de notreodorat
:nous écririons le cœur léger tant nous avons encore vivante
— 35 —
cette odeur nauséeusequi nous a poursuivi
pendant
tout le tempsque nous avonssoigné nos deux malades; mais nous sommes profondément embarrassé. Ily a quelque chose du favus etce n'est pas cela; ce n'est pas non plus l'odeur que laissent échapper les pieds de certains malheureux. Il y manquequelque chose d'indéfinissable.Dans une des longues causeries que notre maître, M. le
Prof, agrégé Dubreuilh a bien voulu avoiravec nous, nous cherchions ensemble un qualificatif, et tous
deux
nousavons prononcé une expression connue sur nos
côtes
et rendue plus piquante encore par l'accentbordelais: «Ça
sent le fraichin». C'est nauséeux, en effet, c'est fade; c'est
en un mot l'odeur de ces assiettes mal nettoyées que l'on place quelquefois devant vous dans des restaurants popu¬
laires. A défaut d'autres, nous demandons l'indulgencepour cette épithète :
«Ça
sentle fraichin».
Nousrendons
une partie de notre pensée, et nous en laissons une autresans pouvoir la définir.Les lésions des mains rétrogradent: alors
l'épiderme
sedesquame abondamment en fines lamelles blanches, pen¬
dant que se montrent en nombre variable de petits pertuis
tailléscornme à l'emporte-pièce et qui
semblent
correspon¬dre aux orifices des glandes sudoripares. Les paumes
des
mains et les