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Fondements mathématiques de la théorie de la gravité

2.1. De la distribution de masse au champ de gravité 21

2.1.2 L’équation fondamentale de Poisson

L’équation de Poisson fournit une formulation alternative à celle proposée par Newton avec l’équation 2.2. Soit ∇2l’opérateur laplacien, qui appliqué à une fonction scalaire V (xM), se définit en coordonnées cartésiennes par :

2V (xM) = ∂2X XV (xM) + ∂2Y YV (xM),+∂2Z ZV (xM) (2.13) où les notations ∂2

ααV avec α = X , Y , Z , désignent les dérivées partielles secondes, calculées suivant les coordonnées du point M, de la forme suivante :

2ααV (xM) = 2V

∂α2. (2.14)

En tout point M où la fonction ρ (xM) est continue, l’équation de Poisson stipule que le po-tentiel V (xM) satisfait la relation :

2V (xM) = −4πG ρ (xM). (2.15)

L’équation de Poisson est donc une équation aux dérivées partielles linéaire, du second ordre, de type elliptique. Cette dernière découle de l’équation intégrale du potentiel 2.2 et, récipro-quement, l’intégration de l’équation de Poisson conduit à l’équation intégrale du potentiel.

FIGURE2.4 –Schéma illustrant les élé-ments géométriques nécessaires pour exprimer les conditions de continuité du champ gravitationnel au passage d’une surface limite.

L’équation de Poisson permet de ramener le pro-blème de la détermination du potentiel V a celui de la résolution dans un domaine D de l’espace d’une équation aux dérivées partielles elliptique qui né-cessite la connaissance de conditions aux limites. Ces conditions peuvent être de deux types suivant la nature de la fonction connue sur la bordure ∂D de D : il s’agit des conditions de Dirichlet lorsque le potentiel V est connu en tout point de la bor-dure ∂D et des conditions de Neumann lorsque seule la composante de g (xM) suivant la normale ˆn (xM) en M au domaine D, autrement dit la dérivée nor-male ∂nV (xM) = ∇ V (xM). ˆn (xM), est connue en tout point de la bordure. Il est alors possible d’ac-céder au potentiel sans connaître nécessairement la

distribution ρ (xM) en tout point, mais seulement le potentiel ou le champ gravitationnel sur une surface fermée entourant la région de l’espace où le potentiel est recherché.

L’équation de Poisson n’étant pas valable aux points de discontinuité de la fonction den-sité ρ (xM), la formulation des conditions aux limites nécessite de connaître le comporte-ment du potentiel V (xM) ou du vecteur g (xM) au voisinage des discontinuités. La condi-tion de continuité du potentiel est essentielle puisqu’elle permet de fixer très facilement des conditions aux limites. En revanche, la continuité n’est plus assurée pour le champ de gra-vité.

Considérons par exemple une distribution de masse répartie sur une surface S et carac-térisée par la densité surfacique σ(xM) mesurée en kgm−2(Fig. 2.4). Soient ˆn (xM) le vecteur unitaire normal à la surface au point M et ˆt(xM) un vecteur unitaire localement tangent à la surface S en M. Soient P1et P2deux points situés de part et d’autre de la surface S de sorte

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que −−−→MP1= −−−−→MP2= k ˆn (xM) pour k ∈ R.

Les conditions de continuité pour le champ gravitationnel g (x ) = ∇ V s’expriment alors par : lim P1,P2→M /−→∇ V -xP1..ˆt(xM) −∇ V-xP2..ˆt(xM)0= 0 ; (2.16) lim P1,P2→M /−→∇ V -xP1.. ˆn (xM) −∇ V-xP2.. ˆn (xM)0= −4πσ(xM). (2.17)

Les deux conditions précédentes indiquent que la composante tangentielle du champ gravi-tationnel −→∇ V (x ).ˆt(x ) est continue sur S alors que la composante normale ∂

nV est discon-tinue sauf dans le cas où la densité surfacique est nulle sur S. L’équation de Poisson et les conditions de continuité 2.16 et 2.17 permettent théoriquement la détermination complète du potentiel gravitationnel.

2.1.3 Un corollaire capital : l’équation de Laplace

La conséquence immédiate de l’équation de Poisson est que le potentiel V satisfait l’équa-tion de Laplace :

2V (xM) = 0, (2.18)

en tout point M tel que ρ (xM) = 0.

Le problème de la détermination du potentiel V dans un domaine D ne comportant au-cune masse, revient à chercher une fonction deux fois continûment différentiable dans D satisfaisant l’équation de Laplace étant donné les conditions aux limites de Dirichlet ou de Neumann. Ces dernières consistent respectivement à fixer le potentiel V -xQ., ou sa dérivée normale ∂nV-xQ., en tout point Q de ∂D. La fonction recherchée est dite harmonique dans le domaine D. La théorie mathématique du potentiel permet de montrer que cette fonction existe et est unique.

D’un point de vue strictement théorique, le potentiel gravitationnel extérieur de la Terre est une fonction harmonique et régulière à l’infini. Il suffit donc, pour le définir dans tout l’espace, de le connaître uniquement sur la surface de la Terre pour satisfaire les condi-tions de Dirichlet. De même, il suffirait de connaître sa dérivée normale ∂nV (x ) sur toute la surface terrestre pour satisfaire les conditions de Neumann. L’adéquation du problème mathématique de la détermination du potentiel gravitationnel avec le problème géodésique concret demeure cependant incomplète puisque, d’une part, la dérivée normale ne s’identi-fie qu’à la pesanteur d’une Terre sphérique, homogène et immobile et, d’autre part, la surface de la Terre sur laquelle doit s’appliquer la théorie, c’est-à-dire la surface topographique, reste inconnue. La solution pratique mise au point par les gravimétriciens pour la détermination du potentiel extérieur repose sur une représentation fonctionnelle particulière de la fonction potentiel : la décomposition en série d’harmoniques sphériques.

2.2. L’essentiel sur les séries d’harmoniques sphériques 23

2.2 L’essentiel sur les séries d’harmoniques sphériques

Les séries d’harmoniques sphériques constituent une représentation fonctionnelle des solutions de l’équation de Laplace exprimée en coordonnées sphériques. Ces dernières per-mettent de repérer tout point M de l’espace par deux angles, la longitude λ et la colatitude θ associées à un réel positif r égal à la norme du vecteur −−→OM.

2.2.1 L’équation de Laplace en coordonnées sphériques

FIGURE 2.5 – Définition des coordon-nées sphériques.

Tout point M de coordonnées cartésiennes (X , Y , Z ) possède également un triplet de coor-données sphériques (λ, θ, r ) appartenant au pavé [0, 2π[×[0, π] × [0, +∞[ (Fig. 2.5). Le passage des co-ordonnées sphériques aux coco-ordonnées cartésiennes s’effectue grâce aux trois relations suivantes :

   X = r sinθ cosλ Y = r sinθ sinλ Z = r cosθ (2.19)

La surface coordonnée correspondant à la coor-donnée r – c’est-à-dire la surface décrite par le point M lorsque le couple (λ, θ) parcourt le pavé [0, 2π[×[0, π], r étant fixé – est une sphère de centre O et de rayon r . L’angle λ est celui formé par le plan ( ˆeX, ˆeZ) et le plan méridien passant par M et l’axe (OZ ) – également surface coordonnée de la longitude –. La colatitude est finalement l’angle formé dans le plan méridien par l’axe (OZ ) et le vecteur −−→OM.

En notant respectivement ∂λ, ∂θet ∂r les dérivées partielles premières par rapport à λ, θ, et r , le laplacien de la fonction potentiel V exprimé en coordonnées sphériques s’écrit :

2V = 1 r2sin2θλ -∂λV.+ 1 r2sin2θθ -sinθ ∂θV.+ r12r -r2rV.. (2.20)

2.2.2 Solutions de l’équation de Laplace

La résolution de l’équation de Laplace à partir de la relation 2.20 conduit toute une fa-mille de fonctions solutions Vlm appelées harmoniques sphériques de la forme suivante :

Vlm(λ, θ, r ) = 4 rl r−(l+1) 5 Ylm(λ, θ), (2.21)

où l et m sont deux entiers relatifs, appelés respectivement degré et ordre de l’harmonique sphérique, tels que l ≥ 0 et |m| ≤ l.

Les fonctions Ylm(λ,θ) forment la partie angulaire de l’harmonique sphérique, puisqu’ils ne dépendent que de la longitude et la colatitude du point d’observation. Elles sont appe-lées harmoniques sphériques de surface et définies sur la sphère unité – et sur toute sphère

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homothétique – par les relations suivantes :

Ylm(λ, θ) =          ! 2l + 1 (l − m)! (l + m)!P m l (cosθ)ei mλ pour m ≥ 0 (−1)−m(Y−m l )(λ, θ) pour m < 0 , (2.22)

où le symbole (...) est utilisé pour désigner le complexe conjugué; les fonctions Plm sont définies pour toute valeur réelle de x de l’intervalle [−1, +1] par :

Plm(x) =            1 2ll! dl d xl(x2− 1)l = Pl(x) pour m = 0 (−1)m(1 − x2)m2 dm d xmPl(x) pour m > 0 . (2.23)

Les fonctions Pl(x) = Pl0(x) sont des polynômes de degré l appelés polynômes de Legrendre. Lorsque m > 0, les fonctions non polynomiales Plm(x) sont plus généralement appelées fonc-tions associées de Legendre .

La propriété fondamentale des harmoniques sphériques de surface est qu’ils forment un système complet de fonctions orthogonales sur la sphère unité. Ainsi, toute fonction V0(λ, θ) définie sur la sphère unité – c’est-à-dire pour (λ, θ) ∈ [0, 2π[×[0, π] –, suffisamment régulière et telle que :

V0(λ, θ) = V0(λ + 2π, θ),

peut-elle être décomposée en harmoniques sphériques, c’est-à-dire qu’il existe des nombres complexes Aml tels que :

V0(λ, θ) =+∞7 l=0 l 7 m=−l Aml Ylm(λ, θ). (2.24)

Les nombres complexes Am

l , appelés également coefficient de Stokes, peuvent être calculés par l’intégrale suivante :

Aml = "

0 "π

0 dθ sinθ V0(λ, θ)-Ylm.(λ, θ), (2.25) qui découle de la relation d’orthogonalité :

" 0

"π

0 dθ sinθ Ylm(λ, θ)%Ylm- -&(λ, θ) = δl l-δm m-, (2.26) où δl l- (resp. δm m-) désigne le symbole de Kronecker défini par δl l- = 0 (resp. δm m- = 0) si l .= l-(resp. m .= m-) et δl l = 1 (resp. δm m = 1).

La représentation du potentiel gravitationnel sous la forme d’une série d’harmoniques sphériques permet de résoudre simplement l’équation de Laplace lorsque les conditions aux limites sont données sur des sphères.

Considérons, par exemple, une sphère de rayon a sur laquelle le potentiel gravitationnel est constant égal à V0. La détermination du potentiel extérieur revient à résoudre le problème aux limites suivant :

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2V = 0 pour r > a ; V (λ, θ, r = a) = V0 et lim

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