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CHAPITRE   I   -­‐ LOI SUR LE COURTAGE IMMOBILIER 92

1.2   La troisième Loi sur le courtage immobilier – 2010 109

1.3.2   Évolution des dispositions législatives portant sur le conflit d’intérêt 111

1.3.2.2   Dispositions pertinentes du Règlement sur les conditions

1.3.2.2.7     Dispositions complémentaires 122

Les prochaines dispositions analysées se trouvent quant à elles dans le chapitre III : DÉONTOLOGIE272.

Ce chapitre expose les valeurs devant guider les titulaires de permis. Les articles s’y trouvant doivent ainsi être rédigés d’une manière large et libérale afin d’être intemporels. Autrement, l’Organisme ne pourrait pas assurer et réaliser pleinement sa mission et la loi serait rapidement contournée.

270 Supra, p. 117

271 Règlement sur les conditions d’exercice, art. 15

272 Bien que plusieurs articles de la réglementation et de la loi sont de nature déontologiques ou éthiques, ce n’est toutefois qu’au chapitre III que sont spécifiquement prévues les règles de déontologie des courtiers immobiliers.

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En effet, toute infraction ne peut être nommément prévue à la loi. D’abord, de par la lourdeur que cela impliquerait, mais également pour permettre aux lois d’inclure des situations nouvelles. Une loi trop précise deviendrait rapidement désuète et ses objectifs irréalisables. C’est pourquoi la loi doit évoluer avec le marché, avec ceux qui font preuve d’imagination pour la contourner et avec les technologies, sans cesse nouvelles.

Afin de favoriser cette adaptation, les lois professionnelles contiennent un certain nombre de dispositions d’ordre général qui constituent, en quelque sorte, le guide moral des professionnels. En somme, avec en main ces seules dispositions, tous les professionnels devraient savoir comment se comporter.

C’est ainsi que l’article 62 du Règlement sur les conditions d’exercice, consacrant l’interdiction de commettre quelque « acte dérogatoire à l’honneur et à la dignité de la profession » suffit à couvrir tout geste qui, de l’avis de l’instance disciplinaire en place, est inadmissible :

« 62. Le courtier ou le dirigeant d'agence doit exercer ses activités avec prudence, diligence et compétence, et faire preuve de probité, de courtoisie et d'esprit de collaboration. Il ne doit commettre aucun acte dérogatoire à l'honneur et à la dignité de la profession.

Le courtier ou le dirigeant d'agence doit aussi maintenir de saines pratiques. »

Selon cette disposition, tout comportement qui n’est pas spécifiquement visé par la codification demeure tout de même assujetti aux dispositions générales, et notamment à celles de l’article 62. Bref, on comprend que la loi et ses règlements ne peuvent de façon expresse règlementer chaque situation. Les articles à portée générale combleront ainsi le vide et guideront le membre vers la bonne attitude à adopter.

Toutefois, un article à portée générale ne doit pas servir à élargir la règle particulière prévue à une autre disposition273. Par exemple, les articles 23 et suivants de la Loi créent des exigences particulières lorsque l’objet du contrat est un immeuble principalement résidentiel de moins de cinq logements. On ne peut élargir leur portée par l’entremise de l’article 62.

Pour les mêmes raisons que celles que nous venons d’exposer, nous sommes d’avis qu’une situation de conflit d’intérêts contrevient également à l’article 63 :

« 63. La conduite d'un courtier ou d'un dirigeant d'agence doit être empreinte d'objectivité, de discrétion et de modération. »

En effet, il nous semble difficile de s’attendre d’une personne qu’elle soit objective lorsque ses intérêts sont opposés à ceux de son client.

Par ailleurs, à ces nombreux articles traitant de près ou de loin du conflit d’intérêts, nous ne pouvons passer sous silence ceux relatifs à l’indépendance professionnelle et à la loyauté, valeurs indéniables et qui trouveront tout leur sens en cas de silence du législateur.

Outre l’article 21 de la Loi dont nous avons précédemment discuté, s’ajoute ainsi l’article 3 :

« 3. Le titulaire de permis qui, en plus de ses activités en matière de courtage immobilier, se livre à d’autres activités professionnelles ou exploite une autre entreprise, doit éviter que ces autres activités ou cette autre entreprise ne compromettent son intégrité, son indépendance ou sa compétence. »

Essentiellement, le législateur a tenu compte d’une réalité bien concrète, soit que plusieurs courtiers ont des activités connexes à leur carrière en immobilier, voir même une double carrière.

273 P.-A. C

OTE, préc. note 16, par. 1047 : « En lisant un texte de loi, on doit en outre présumer

que chaque terme, chaque phrase, chaque alinéa, chaque paragraphe ont été rédigés délibérément en vue de produire quelque effet. Le législateur est économe de ses paroles : il ne « parle pas pour rien dire»

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Ce que l’on retient de cet article, c’est que peu importe ces activités connexes, elles ne doivent pas porter atteinte aux valeurs centrales de la « profession » soit l’intégrité, l’indépendance et la compétence. Et puisque nous parlons de conflit d’intérêts, nous sommes d’avis que toute situation dans laquelle cette indépendance est menacée, constitue inévitablement un conflit d’intérêts, alors que l’inverse n’est pas toujours vrai.

Finalement, la Loi actuelle, tout comme la Loi de 1994, prévoit que dans certaines circonstances, le client ne peut pas renoncer à ses droits. L’article 30 indique à cet effet :

« 30. Un client ne peut, par convention particulière, renoncer aux droits que lui confère le présent chapitre. »

Le chapitre en question inclut les articles 23 à 30 et s’applique dans les cas visés par l’article 23 qui prévoit :

« 23. Le présent chapitre s'applique à un contrat conclu entre une personne ou une société et un courtier ou une agence en vertu duquel ce courtier ou cette agence s'engage à agir comme intermédiaire pour l'achat, la vente, la location ou l'échange de l'un des immeubles suivants:

1° d'une partie ou de l'ensemble d'un immeuble principalement résidentiel de moins de cinq logements;

2° d'une fraction d'un immeuble principalement résidentiel qui fait l'objet d'une convention ou d'une déclaration visée aux articles 1009 à 1109 du Code civil. »

Encore une fois, deux interprétations se confrontent. Premièrement, en préconisant une interprétation limitative, l’on dira que les droits prévus aux articles de ce chapitre274 ne peuvent faire l’objet d’une renonciation. Le client pourrait renoncer à tout ce qui n’y est pas inclus. Par contre, la protection que la Loi actuelle vise à octroyer au public en serait grandement affectée. En adhérant à cette interprétation, l’on dira que les dispositions traitant

du conflit d’intérêts peuvent faire l’objet d’une renonciation puisqu’aucune d’entre elles ne se trouve dans le chapitre pertinent.

La seconde interprétation possible est que le client ne peut renoncer aux protections accordées par la Loi lorsqu’il se situe dans les limites de l’article 23. Cette interprétation consacre la position de vulnérabilité du client lors d’une transaction immobilière « résidentielle ». Par exemple, l’utilisation de formulaires édités par l’OACIQ est obligatoire et la conduite de la transaction est davantage encadrée.

Ainsi, toujours selon cette interprétation, les situations de conflits d’intérêts ne pourraient pas faire l’objet d’une renonciation lorsqu’une transaction vise un immeuble rencontrant les caractéristiques de l’article 23. C’est cette seconde interprétation de l’article 30 qui nous semble la plus harmonieuse avec l’esprit de la loi.