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5.1. Discussion

Les évènements coronariens aigus de la maladie cardiaque ischémique se manifestent à la suite de l’occlusion d’une artère coronaire, et génèrent l’IAM qui représente encore aujourd’hui un lourd fardeau économique sur les systèmes de santé (Gerczuk et al., 2012; Kumar et al., 2009; Sanz-Rosa et al., 2012). Le prompt rétablissement du flux sanguin dans le myocarde privé d’oxygène est essentiel pour limiter les dommages en territoire ischémique. La reperfusion n’est pas sans conséquences délétères pour le myocarde ischémique et peut causer jusqu’à 40 % de la taille de l’infarctus. La taille de l’infarctus est donc la somme des dommages cellulaires reliées à l’I/R, mais dépend aussi d’autres facteurs comme la présence de vaisseaux collatéraux et de comorbidités. L’intervalle de temps mis pour la reperfusion du myocarde ischémique est le principal déterminant de mortalité, morbidité et de la taille de l’infarctus associée à l’IAM; c’est pourquoi l’intervention coronarienne percutanée (percutaneous coronary intervention, PCI) est établie aujourd’hui comme étant la principale stratégie de reperfusion. Les traitements actuels pour la gestion de l’IAM consistent principalement à augmenter l’apport en oxygène au cœur (PCI) ou à diminuer la demande en oxygène de ce dernier (bêta-bloqueurs et nitrates) (Wang et al., 2007). La pharmacothérapie complémentaire consiste en des thérapies antiplaquettaires, dont les inhibiteurs du récepteur P2Y12 adénosine diphosphate (thiénopyridines) et des gp IIb/IIIa, en des thérapies anticoagulantes dont l’héparine (non fractionnée et bas poids moléculaire), ainsi que les inhibiteurs de thrombine et du facteur Xa (Welch et al., 2012).

D’autres thérapies sont en cours de recherche et de développement afin de limiter la taille de l’infarctus et d’améliorer le pronostic fonctionnel des patients atteints de l’IAM (Sanz-Rosa et al., 2012). Il est reconnu depuis plusieurs années que le myocarde peut être conditionné à devenir plus tolérant à une longue période ischémique en effectuant des épisodes brefs d’hypoxie/de réoxygénation dans le myocarde, avant et après l’IAM; ce phénomène se nomme pré-conditionnement et post-conditionnement ischémique. Ces types de conditionnement sont notamment connus pour réduire la taille de l’infarctus dans différents

modèles animaux, mais restent controversés chez l’être humain. Le post-conditionnement ischémique est une approche intéressante chez l’être humain atteint d’un IAM, mais la fenêtre de temps pendant laquelle les épisodes d’I/R peuvent être effectués en clinique est limitée aux premières minutes de la période de reperfusion. Les mécanismes cardioprotecteurs impliqués concourent à inhiber l’ouverture du pore de transition de perméabilité mitochondrial afin de limiter les conséquences néfastes cellulaires, dont : le gonflement de la mitochondrie par l’entrée d’eau; l’inhibition de la chaîne respiratoire; la libération dans le cytosol de calcium et de facteurs pro-apoptotiques, tel que le cytochrome c. Le maintien de l’intégrité mitochondriale est aussi obtenu de manière pharmacologique par la cyclosporine A qui, en se fixant sur la cyclophiline D, empêche l’ouverture du pore de transition mitochondrial et ses conséquences néfastes. Une étude clinique montre une réduction de la taille de l’infarctus suivant l’administration de cyclosporine aux patients atteints de l’IAM lorsque combinée à une procédure PCI (Piot et al., 2008). De plus, le conditionnement ischémique à distance est une forme de cardioprotection dans laquelle des séquences d’I/R de courtes durées sont effectuées au niveau d’un organe ou tissu à distance du cœur (Sanz-Rosa et al., 2012). Une autre étude clinique a obtenu des résultats provocateurs, notamment l’augmentation de la sauvegarde du myocarde accompagnée de la diminution des niveaux de troponine I plasmatique lorsque des cycles d’inflation et déflation du brassard de tension artérielle posé sur le bras de patients atteints de l’IAM sont effectués avant la procédure PCI (Bøtker et al., 2010). Finalement, l’administration du peptide natriurétique auriculaire diminue la taille de l’infarctus et améliore la fonction cardiaque dans différents modèles animaux d’I/R du myocarde, ainsi qu’en clinique chez des patients atteints de l’IAM (Kasama et al., 2008).

Par ailleurs, la thérapie métabolique, avec objectif d’optimiser le métabolisme énergétique cardiaque, est une stratégie intéressante pour le traitement de la maladie cardiaque ischémique (Lopaschuk et al., 2010; Wang et al., 2007). La décharge de catécholamines liée à la douleur de l’IAM contribue (1) à mobiliser les AGNE du tissu adipeux; (2) à inhiber la relâche d’insuline par le pancréas; (3) à causer une hyperglycémie (Opie 2008). Tel que décrit dans la présente thèse, un haut niveau d’AGNE a un rôle délétère direct sur le myocarde ischémique dans les premières heures suivant la reperfusion. Il existe différents traitements ayant pour stratégie de diminuer le niveau circulant d’AGNE afin d’augmenter l’efficacité de

la production et l’utilisation d’ATP en condition d’I/R. Toutefois, peu de traitements ont eu un succès clinique à ce jour. L’insuline a pour rôle d’inhiber la mobilisation d’AGNE du tissu adipeux afin de réduire le niveau circulant d’AGNE et de favoriser la glycolyse. Cependant, les résultats d’études cliniques sur la réduction de la taille de l’infarctus chez les patients atteints de l’IAM ayant reçu la thérapie glucose-insuline-potassium (GIK) sont peu concluants (Opie 2008; Sanz-Rosa et al., 2012). L’étude clinique IMMEDIATE a vérifié l’hypothèse qu’une administration très précoce de la thérapie GIK allait protéger le myocarde en favorisant le métabolisme du glucose et en inhibant celui des AG et ce, malgré l’hyperglycémie causée par cette thérapie et le stress oxydant qui en découle (Selker et al., 2012). Les résultats décevants de cette étude indiquent que l’administration de GIK ne réduit ni la progression de la maladie, ni la mortalité. En revanche, le glucagon-like peptide-1 (hormone incrétine) et son analogue l’exénatide étudiés en clinique sont des agents insulinomimétiques qui stimulent la captation cellulaire du glucose sans l’administration concomitante de glucose. Cette stratégie thérapeutique capable de diminuer l’hyperglycémie, tout en favorisant la sécrétion de l’insuline et la captation cellulaire du glucose, améliore le pronostic des patients atteints de l’IAM (Sanz-Rosa et al., 2012). Les agonistes PPARα (fibrates) et PPARγ (TZD) ont la capacité de diminuer le niveau circulant d’AGNE en augmentant la bêta-oxydation extracardiaque, mais leur utilisation lors de certaines pathologies, telles que la défaillance cardiaque et le diabète, doit être limitée (Lopaschuk et al., 2010). Par ailleurs, les composés perhexeline et trimétazidine inhibent la bêta-oxydation cardiaque. La perhexiline l’inhibe indirectement en bloquant CPT-I, responsable de l’entrée mitochondriale de l’acyl-CoA à longue chaîne. Ce traitement a un succès clinique limité pour le traitement de la défaillance cardiaque. La trimétazidine inhibe l’enzyme responsable de catalyser la dernière étape de la bêta-oxydation et elle est utilisée en clinique pour le traitement de différentes pathologies cardiaques dont la maladie cardiaque ischémique.

Notre groupe de recherche s’est intéressé au récepteur CD36, qui joue un rôle pivot dans le métabolisme énergétique cardiaque de par son rôle de facilitateur dans l’internalisation des AGLC ou AGNE, suivant sa relocalisation cellulaire des dépôts intracellulaires jusqu’au sarcolemme (Glatz et al., 2013). Tandis que le CD36 semble être crucial à la bioénergétique du cœur, tel que l’on observe chez le rat SHR avec une diminution du CD36 sarcolemmale