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PARTIE II : OBJECTIFS ET TRAVAUX DE THESE

II. Article 1 : L’apeline centrale contrôle l’homéostasie glucidique chez la souris

3) Discussion et perspectives

Cette étude a permis de mettre en évidence pour la première fois un rôle important de l’apeline centrale dans la régulation du métabolisme glucidique en conditions physiologiques et physiopathologiques, avec des effets dose- dépendants et en relation avec le statut nutritionnel de l’animal.

La partie de notre étude menée sur des souris normopondérales a montré que la présence de faibles taux d’apeline au niveau central exerce des effets bénéfiques sur le métabolisme glucidique en condition nourrie. Plus précisément, nous avons observé chez les animaux ayant reçu ce traitement une diminution de la glycémie, associée à une augmentation de la tolérance au glucose et à l’insuline. Ces résultats suggèrent premièrement que l’apeline centrale soit impliquée de façon physiologique dans la régulation du métabolisme glucidique. Dans nos travaux, nous avons entrepris de mesurer les variations des taux circulants d’apeline sur une période de 24 heures chez des souris normopondérales. Les résultats obtenus montrent une augmentation de l’apelinémie des animaux en période nocturne, c'est-à-dire lors de la période de prise alimentaire des rongeurs. De façon intéressante, l’augmentation des taux d’apeline est corrélée avec l’augmentation de l’insulinémie. Ainsi, nous pouvons proposer qu’en réponse à l’arrivée de glucose au niveau sanguin suite à une prise alimentaire, la production d’apeline soit stimulée par l’insuline et qu’une partie de l’apeline puisse atteindre l’hypothalamus, « mimant » ainsi les effets de l’injection de faible taux d’apeline au niveau central, et agissant en synergie avec l’insuline afin de permettre une assimilation correcte du glucose. Dans ce travail, nous n’avons pas étudié de façon spécifique la variation des taux centraux d’apeline entre une condition de jeûne et une condition nourrie et ne pouvons donc exclure une augmentation directe de la production centrale d’apeline en réponse à une prise alimentaire.

Nous montrons également dans nos travaux l’établissement d’effets totalement opposés en condition de jeûne lorsque les taux centraux d’apeline sont plus importants. Dans ces conditions, les animaux présentent une hyperglycémie associée à une hyperinsulinémie. Les mêmes effets sont retrouvés chez des

bénéfiques de faibles taux d’apeline sont supprimés. Ces résultats suggèrent donc qu’une augmentation des taux hypothalamiques d’apeline puisse potentiellement participer à la mise en place du diabète de type II. Dans nos travaux, la mesure des variations de l’apelinémie sur une période de 24 heures montre que, chez les animaux obèses et diabétiques, les taux circulants d’apeline sont fortement augmentés et n’évoluent plus en fonction de la prise alimentaire. Ce résultat est en accord avec plusieurs études qui avait déjà décrit une augmentation de ces taux dans des situations pathologiques comportant un fort risque d’installation de diabète de type II telles que l’obésité 490,491. Ainsi, l’augmentation de l’apelinémie résultant du fort développement de la masse adipeuse pourrait contribuer à cette augmentation centrale des taux d’apeline en condition d’obésité. Cette hypothèse considère toutefois que l’apeline périphérique soit capable d’atteindre l’hypothalamus, ce qui n’a pour l’instant jamais été clairement mis en évidence. Quelques données peuvent toutefois appuyer cette hypothèse. Higuchi et al488 ont rapporté qu’un traitement de 14 jours à l’apeline injectée par voie intra-péritonéale entraîne une augmentation des taux d’apeline dans l’hypothalamus. Par ailleurs, des expériences préliminaires de notre laboratoire menées sur des souris délétées pour le gène de l’apeline ont également permis de détecter ce peptide au niveau hypothalamique après une injection périphérique. L’apeline pourrait aussi avoir une origine extra-adipocytaire. En effet, Reaux et al 461 ont montré que ce peptide est également produit par les neurones à POMC de l’hypothalamus. Dans la même étude, les auteurs rapportent qu’en condition d’obésité, la production d’apeline par ces neurones est augmentée chez le rat comme chez la souris ce qui entraîne une augmentation des taux hypothalamiques d’apeline. Ainsi, de nouvelles études sont à mener afin d’identifier de manière précise la part de chaque organe producteur dans l’augmentation des taux centraux en conditions d’obésité. Le développement d’animaux invalidés de façon tissu- spécifique pour le gène de l’apeline sera d’une grande aide dans la réalisation de cette étape. Nous travaillons actuellement à la génération d’animaux délétés spécifiquement au niveau de l’hypothalamus pour le gène de l’apeline. Un tel modèle animal existe déjà pour l’expression hypothalamique de la leptine

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, utilisant le système Cre-Lox avec la recombinase Cre placée sous la dépendance du promoteur Nkx2.1, spécifique de l’hypothalamus 492. Par

ailleurs, par l’utilisation du même système, nous cherchons également à générer des animaux ayant perdu le gène de l’apeline spécifiquement au sein du tissu adipeux en plaçant à cet effet la recombinase Cre sous la dépendance du promoteur aP2493, majoritairement spécifique de l’adipocyte494.

Nous avons réalisé un marquage immunohistochimique de l’expression du proto-oncogène c-Fos au sein de 3 régions hypothalamiques fortement impliquées dans la régulation du métabolisme glucidique (noyau arqué, noyau ventromédian et noyau dorsomédian) après l’injection centrale d’apeline. De cette façon, nous avons pu mettre en évidence une activation différentielle de ces régions en fonction de la quantité d’apeline injectée et du statut nutritionnel de l’animal. Cependant, nous ne sommes pas actuellement en mesure de discerner une activation directe d’un noyau par l’apeline, d’une activation indirecte qui serait la conséquence de la modification de l’activité de neurones appartenant à un noyau voisin. Des travaux sont en cours au laboratoire afin de réaliser une injection intra-structurale d’un lentivirus permettant de surexprimer l’apeline au niveau de différents noyaux hypothalamiques de notre choix. Les résultats de ces manipulations permettront alors sans doute de pouvoir approfondir nos connaissances sur les implications exactes des différents noyaux hypothalamiques dans l’établissement des effets bénéfiques et délétères résultant de nos injections centrales d’apeline.

La diversité de ces effets ainsi que l’activation différente des noyaux hypothalamiques mis en évidence par nos travaux suggèrent que l’apeline puisse activer 2 voies de signalisation différentes selon la quantité d’apeline présente. L’utilisation d’une méthode de détection ampérométrique en temps réel et d’outils pharmacologiques nous a permis d’impliquer le NO hypothalamique en tant qu’acteur majeur de la mise en place des effets bénéfiques observés chez les animaux normoponderaux nourris. L’utilisation de souris eNOS -/- nous a permis d’impliquer plus particulièrement le NO produit par cette synthase puisque ces animaux restent insensibles à de faibles taux icv d’apeline. De façon intéressante, chez ces animaux génétiquement modifiés et également lorsque la eNOS hypothalamique est pharmacologiquement inhibée chez des animaux sains, les effets délétères d’une forte dose d’apeline

tonus basal de production hypothalamique de NO est nécessaire à l’effet « hypoglycémiant » de l’apeline et renforce son rôle clef dans la régulation de l’homéostasie glucidique. Dans ce sens, Shankar et al198 avaient déjà montré que l’inhibition pharmacologique de la production hypothalamique de NO générait une insulinorésistance. Par ailleurs, les animaux eNOS -/- présentent d’importantes altérations de l’homéostasie énergétique, notamment une résistance à l’insuline. Cette capacité de l’apeline à engendrer une production de NO était déjà connue puisque plusieurs travaux avaient montré une activation de la eNOS 471,495,496. La protéine eNOS est moins exprimée et moins active dans l’hypothalamus de souris obèses et diabétiques 197. Cette observation peut permettre d’expliquer la disparition des effets bénéfiques de faibles taux d’apeline hypothalamique chez des souris obèses et diabétiques. En revanche, les effets délétères d’une injection icv de forts taux d’apeline sont maintenus chez les animaux obèses et diabétiques et également chez les souris eNOS -/- suggèrant que le NO n’est pas impliqué dans ces effets.

L’identification des mécanismes et des acteurs impliqués dans la mise en place de ces effets délétères en réponse à de forts taux d’apeline font actuellement l’objet de recherches au sein du laboratoire. L’établissement rapide des conséquences périphériques de l’injection centrale d’une forte dose d’apeline suggère fortement l’implication du système nerveux autonome. L’apparition précoce d’une hyperglycémie (dès 15 minutes après l’injection) ainsi que son maintien dans le temps (durant 180 minutes) en condition de jeûne laisse penser à une modulation nerveuse de l’activité hépatique, seul organe capable de produire une quantité aussi importante de glucose dans ces conditions. Appuyant cette hypothèse, le foie est un organe richement innervé 497 et la stimulation électrique du système nerveux sympathique est capable d’entraîner en moins de 30 secondes une augmentation de l’activité de certaines enzymes glycogénolytiques comme la glycogène phosphorylase et la glucose-6- phosphatase498. Ce contrôle nerveux de l’activité enzymatique résulte en une diminution du contenu hépatique en glycogène moins de 5 minutes après la stimulation. Dans des temps plus longs, cette stimulation des fibres sympathiques du système nerveux autonome active le processus de néoglucogénèse, notamment via une augmentation de l’activité de la PEPCK

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. Prises ensemble, ces données mènent à s’intéresser à l’étude d’une possible stimulation par l’apeline centrale des mécanismes hépatiques de production de glucose que sont la glycogénolyse et la néoglucogénèse. L’implication du système nerveux autonome dans la mise en place de cet effet hyperglycémiant de forts taux d’apeline au niveau central doit également être étudiée, soit par la mesure directe de l’activité du système nerveux autonome en réponse à l’injection d’apeline, soit par l’utilisation d’animaux dénervés localement au niveau hépatique. L’injection de forts taux d’apeline au niveau central entraîne également une hyperinsulinémie périphérique. Ainsi, l’hypothèse de l’existence d’un axe apeline hypothalamique / pancréas n’est pas à exclure. Toutefois, avant de tenter de mettre en évidence l’existence de cet axe, il conviendra de vérifier que cette hyperinsulinémie n’est pas une simple conséquence de la stimulation de la production hépatique de glucose par l’apeline. Pour cela, le modèle d’animaux localement dénervés pourra être utilisé.

Les prochains travaux devront également déterminer l’acteur moléculaire impliqué dans l’établissement de ces effets délétères. Certaines données préliminaires laissent actuellement penser à l’implication des espèces actives de l’oxygène. Ces dérivés oxygénés présentent un intérêt tout particulier du fait de leur production exacerbée en condition d’obésité305, de leur implication déjà montrée au niveau hypothalamique dans la régulation de l’homéostasie glucidique302 et des travaux de Yao et al500démontrant la capacité de l’apeline à augmenter leur production sur des neurones en culture. Par ailleurs, les EAOs produites au niveau central ont déjà été montrées dans certains cas comme capables d’augmenter l’activité du système nerveux sympathique 501,502 et, de façon très intéressante, les rats Zücker obèses, caractérisés par une production exacerbée d’EAOs au niveau hypothalamique 305 présentent un tonus sympathique plus élevé que leurs homologues sains 503,504. Certains de ces dérivés oxygénés ont également la capacité d’inhiber la production de NO, notamment par l’inactivation de cofacteurs indispensables à la eNOS 505, et pourraient donc contribuer à l’inhibition de la voie « bénéfique » de l’apeline centrale. Si l’implication des EAOs est avérée, il sera alors important de connaître par quel(s) moyen(s) l’apeline est capable de stimuler leur production.

Dans ce cadre, l’étude de l’activité mitochondriale en réponse à la forte dose d’apeline sera une étape importante du fait, d’une part, de la forte production d’EAOs par cet organite et, d’autre part, de la capacité, montrée par notre équipe, de l’apeline à augmenter le nombre et l’activité des mitochondries au niveau musculaire489.

III. Article 2 : L’inflammation du jéjunum observée chez la souris obèse et