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Chapitre 1   Prise en compte du cycle de vie des ouvrages d’art à la conception

1.4   Etude de l’analyse des incertitudes sur les analyses de cycle de vie

1.4.6   Discussion

La méthode proposée dans ce chapitre permet, lors de l’utilisation d’un modèle d’analyse de cycle de vie, de déterminer les principales sources d’incertitudes. La visualisation de la propagation d’incertitudes permet de voir si une différence entre deux solutions technologiques est significative par rapport aux différentes incertitudes. Il a notamment été montré que selon les axes étudiés (économique, environnemental ou sociétal), les intervalles interquartiles peuvent se recouper ou être disjoints.

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 0 2 4 6 8 10 12 x 105 Années G êne aux us ager s ( ) Acier classique Acier autopatinable 3èmes quartiles 1ers quartiles Valeurs médianes

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Par ailleurs, la visualisation de l’évolution du coût au gestionnaire ou d’un impact environnemental ou encore de la gêne aux usagers, peut aider le maître d’ouvrage à prendre conscience de l’importance des opérations de maintenance dans la bonne gestion de l’ouvrage.

Ici, l’arbitrage est de choisir une solution moins onéreuse à la fabrication et nécessitant plus de maintenance ou bien d’investir dans une solution plus coûteuse qui permet de se passer de certaines opérations de maintenance. Ainsi, une lecture plus facile du rôle de la maintenance et de la déconstruction, avec une fourchette basse et haute, peut aider le maître d’ouvrage à prendre les bonnes décisions au moment de la construction.

Il est évident que la méthode décrite ci-dessus ne peut nullement se substituer au jugement du maître d’ouvrage ou à l’expertise métier. Tout d’abord, le nombre de paramètres d’étude a été limité et le choix des paramètres étudiés présente forcément une part d’arbitraire. De manière générale, il s’agit de choisir des paramètres pertinents en fonction des objectifs de l’étude, puis de voir leurs importances respectives dans l’incertitude du résultat.

Une seconde limite est liée à certains aspects non pris en compte : selon les catégories d’impact environnementaux choisies, certains impacts échappent à l’analyse. Citons par exemple les déchets de la couche anticorrosion : ce sont des déchets dangereux qui doivent être stockés dans des centres spéciaux, ce que ne prend pas en compte l’analyse de cycle de vie, car les catégories choisies différencient seulement les déchets radioactifs et les déchets non-radioactifs. D’autre part, les choix des maîtres d’ouvrage dépendent souvent des caractéristiques locales des ouvrages, propres au chantier. Encore une fois, citons le cas de la couche anticorrosion et un retour d’expérience de chantier du pont de la Mulatière et d’un second pont en aval sur le Rhône, dans la région Lyonnaise. Selon l’organisation de la structure en acier, différent procédés peuvent être employés pour enlever la couche de peinture usagée :

 l’abrasion par projection de grenailles métalliques : après avoir retirer la couche de peinture, il est possible de séparer les déchets de peinture de la grenaille qui est ensuite réutilisée. En conséquence, la quantité de déchets est limitée à environ 1,5 kg par mètre carré de surface d’acier ;

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 l’abrasion par projection de sable : cette technique peut être utilisée lorsque l’organisation de la structure en acier ne permet pas d’utiliser la projection de grenaille. La quantité de déchets est beaucoup plus importante, de l’ordre de 6 kg par mètre carré de surface d’acier. Ces déchets doivent être stockés dans un centre agréé ;

 le décapage à l’eau ultra-haute pression : en cas d’impossibilité à utiliser des grenailles, il est possible d’utiliser cette technique, plus sobre en émission de déchets.

Un des deux ponts a pu bénéficier de la technique de projection de grenaille. Pour l’autre pont, l’organisation de la structure en acier ne permettait pas son emploi. En raison du surcoût trop important de la technique d’eau ultra-haute pression, la technique utilisant du sable a été employée, générant dans le cas de ce chantier 1200 tonnes de déchets dangereux. Dans la mesure où le retour d’expérience n’est pas suffisant pour que ces aspects soient pris en compte dans les études d’analyse de cycle de vie, ce genre de décision relève de l’expérience du maître d’ouvrage et de la connaissance du chantier.

Une autre difficulté pour l’étude des incertitudes est la difficulté à trouver des informations fiable sur l’incertitude des paramètres d’entrée. Le but de l’analyse de l’incertitude est, en cas d’information incomplète sur un paramètre, d’étudier les conséquences sur le résultat de l’étude. Cependant, en cas de manque d’information sur la valeur d’un paramètre, il est parfois également difficile d’estimer l’incertitude de ce paramètre.

Comme perspective d’amélioration, il serait pertinent de mieux prendre en compte des corrélations entre les variables. Les variables ont toutes été supposées indépendantes, à part pour la courbe débit-vitesse, où l’on a supposé une dépendance linéaire de trois paramètres. Ainsi, le prix du béton et de l’acier ont été supposés indépendants. De même, le coût de différents équipements du pont n’ont pas été considérés, car leur prix est négligeable devant le prix d’achat du béton et de l’acier. En revanche, si le prix de différents équipements est corrélé, il se peut que l’influence sur l’incertitude du résultat soit non négligeable. En particulier, pour les paramètres de coût, il est évident qu’il y a une corrélation non nulle, provenant de la situation économique du pays (inflation ...). Les travaux de Chastaing (2013) pourront notamment être considérés pour étudier la prise en compte des dépendances entre variables d’entrée.

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L’extension de l’implémentation à des densités de probabilité quelconques, en passant par les fonctions de répartition inverses, est également envisagée. Encore une fois, l’apport ne sera significatif que si l’on connaît assez bien la dispersion des paramètres pour estimer avec une précision acceptable une densité de probabilité. Si la connaissance des incertitudes ne permet que déterminer un ordre de grandeur, l’utilisation de densités de probabilités adaptées de différentes formes peut paraître accessoire.