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Les résultats de cette étude suggèrent que chez les survivants d’un AVC en phase chronique avec déficits cognitifs, 1) l’effet de pratique n’affecte pas systématiquement les résultats des tests à l’effort aérobie maximaux, 2) d’ordre général, la fidélité test-retest des résultats des tests à l’effort aérobie maximaux est excellente, et 3) la capacité cognitive générale ainsi que l’effet de la pratique semblent être positivement corrélés. La VO2pic des

participants de cette étude sont comparables, mais légèrement inférieures à celles qui ont été rapportées dans les études similaires portant sur des survivants d’un AVC en phase chronique11, 16, 92, soit de 17 à 18 .

Effet de pratique

Les résultats de la présente étude diffèrent de ceux rapportés par Tang et al.27 portant sur la faisabilité et la fidélité d’une évaluation de la capacité cardiorespiratoire de survivants d’un AVC en phase subaigüe. En effet, ces auteurs ont observé une amélioration significative (P = 0,04) de la VO2pic de 1,0 d’un test à l’autre (espacés de un à quatre

jours) chez 20 participants âgés de 69,3 ± 2,3 ans et de 18,6 ± 3,1 jours post AVC27. L’hypothèse proposée pour expliquer cette amélioration est que l’effet de pratique puisse être causé par une diminution de l’anxiété des participants face à la réalisation du test14, 89. Or, bien que l’effet de l’activité physique sur la santé mentale soit bien connu13, l’impact de l’état émotionnel sur les résultats des tests à l’effort n’a pas encore été étudié. Ainsi, ilest impossible de confirmer l’hypothèse selon laquelle l’effet de pratique soit effectivement attribuable à une diminution de l’anxiété des participants testés.

La différence des résultats suggérés par la présente étude et celle de Tang et al.27 en ce qui concerne l’effet de pratique pourrait être expliquée par la possibilité que les capacités cognitives des participants des deux études ne soient pas comparables. Bien que la fonction cognitive n’ait pas été formellement documentée dans l’étude de Tang et al.27, le profil neurologique des participants a cependant été évalué par le National Institutes of Health

l’AVC par le biais de l’évaluation des déficits provoqués ainsi que par le degré de récupération. Or, les travaux de Cumming et al.94 proposent que les quatre items d’évaluation cognitive du NIHSS dépistent presque aussi bien les déficits cognitifs que le MMSE chez les survivants d’un AVC en phase chronique (>1 an post AVC). De ce fait, il est possible que les participants de la présente étude aient eu des déficits cognitifs plus importants que ceux de l’étude de Tang et al. puisque le score moyen au NIHSS de ces derniers était de 4,3 ± 0,4, indiquant un déficit neurologique général léger93. Il est alors probable que la divergence des résultats entre les deux études soit effectivement reliée aux différences de capacités cognitives entre les deux groupes.

Alors que les capacités cognitives semblent jouer un rôle dans l’effet de pratique, les capacités motrices seraient aussi à considérer. Si toutefois les capacités cognitives n’influencent pas directement l’effet de pratique, il est probable que les capacités motrices soient le médiateur de cette relation. Donc, il est envisageable que les individus avec un AVC chronique de l’étude de Tang et al.27, ayant des déficiences cognitives moins

importantes, puissent avoir eu une VO2pic plus élevée lors de leur deuxième test parce

qu’ils étaient davantage aptes à bénéficier de l’apprentissage moteur. Bien que ces auteurs n’aient pas documenté cette relation, nos résultats proposent que le score au CMSA de la jambe affectée par l’AVC soit positivement relié à la VO2pic relative au poids de la

première (rho = 0,563; P = 0,01) et de la deuxième évaluation (rho = 0,532; P = 0,016). Autrement dit, une VO2pic plus élevée est attendue chez les individus avec des capacités

fonctionnelles supérieures et des déficiences motrices inférieures. Puisque la puissance maximale développée lors d’un test aérobie est ainsi plus importante, la VO2pic sera plus

élevée. Cependant, bien que les individus ayant des déficiences motrices inférieures aient une meilleure capacité cardiorespiratoire, l’effet de pratique ne semble pas être lié aux résultats du CMSA de nos participants. L’explication proposée de cette inconsistance avec l’étude de Tang et al. est que les déficits moteurs du membre inférieur de nos participants étaient en moyenne moins importants que ceux de Tang et al. (CMSA = 4,7 ± 0,2; 3-6).

Les survivants d’un AVC en phase aigüe semblent également être plus sensibles aux effets de la pratique que ceux en phase chronique19, 52. Par exemple, après avoir évalué la capacité

cardiopulmonaire de 25 adultes sans déficits cognitifs à 1, 2, 3 et 6 mois suite à l’AVC, Mackay-Lyons et al.69 ont noté que la VO2pic moyenne du groupe est passée de 14,8 ±

5,3 au premier mois à 17,3 ± 7,0 au 6ème mois et

ce, en absence d’entraînement aérobie. Cette amélioration dite « spontanée » a également été observée chez des individus ayant eu un infarctus du myocarde95. En effet, sur une période d’observation de huit semaines, la VO2max moyenne du groupe s’est améliorée de

23% et ce, sans entraînement quel qu’il soit. L’hypothèse pouvant expliquer cette amélioration spontanée réside dans l’exécution des activités de la vie quotidienne. Puisque la consommation d’oxygène nécessaire à l’exécution des activités correspond en moyenne à 75 à 88% du VO2pic des survivants d’un AVC96, ces stimulations seraient suffisantes pour

engendrer une amélioration de leur capacité aérobie. Bien que les observations de Mackay- Lyons et al.69 aient noté une amélioration spontanée de la capacité aérobie maximale pour un intervalle test-retest de six mois, l’exécution des activités de la vie quotidienne sur une période d’une semaine n’a pu expliquer à elle seule les gains de la capacité aérobie maximale et l’effet de pratique.

À notre connaissance, une seule étude a pu démontrer un effet de pratique chez les AVC lors de tests à l’effort aérobie maximaux27. De plus, en ce qui concerne le test à l’effort de six minutes de marche89, une pratique s’est également montrée bénéfique chez les survivants d’un AVC28 ainsi que chez les personnes atteintes de paralysie cérébrale29. Bien que ce test n’évalue pas directement la fonction cardiorespiratoire et que l’intensité de l’effort ne soit généralement pas maximal, plusieurs études ont observé que la distance parcourue en six minutes était significativement liée à la capacité aérobie mesurée lors d’une épreuve maximale avec mesures des échanges respiratoires92, 97, 98. D’une autre part, au même titre que la présente étude, une pratique de test à l’effort s’est montrée inutile lors de l’évaluation de la capacité aérobie maximale d’insuffisants cardiaques30 et d’athlètes31. Ainsi, il semble que l’effet de pratique ne soit pas systématique à toutes les populations. Bien que les capacités cognitives des insuffisants cardiaques et des athlètes ne soient pas reconnues pour être différentes de l’individu moyen en santé et qu’elles n’aient pas été documentées dans ces deux dernières études, il demeure encore prudent d’associer l’impact des capacités cognitives à l’effet de pratique. Ainsi, l’évaluation de la capacité aérobie

maximale des survivants d’un AVC avec déficiences cognitives lors de mesures répétées demeure problématique.

Du fait que la prévalence de fatigabilité auprès des survivants d’un AVC soit plus de 51,5% à 69,5%99, 100, ceci représente un autre facteur qui a pu contribuer à l’expression de l’effet de pratique. Tenant compte que le temps d’intervalle entre les évaluations de la capacité cardiorespiratoire de l’étude de Tang et al. soit seulement de un à quatre jours, il est possible que les participants n’aient pu récupérer pleinement de leur première évaluation. Or, si les évaluations avaient été plus espacées, il aurait été probable qu’un effet de pratique encore plus grand puisse être observé. D’une autre part, il est aussi suggéré que l’effet de pratique soit éphémère. Effectivement, aucun effet de pratique systématique n’a été observé pour la VO2pic dans cette dernière étude où le temps espaçant les deux évaluations était

plus long (9,1 ± 6,9 jours) que l’intervalle de temps test-retest observé dans l’étude de Tang et al.27 (1 à 4 jours). Ainsi, les bénéfices d’une pratique de test sont possiblement délétères.

En somme, concernant les résultats des tests à l’effort aérobie maximaux effectués chez les survivants d’un AVC, des recherches plus approfondies sont nécessaires pour mieux décrire l’effet de pratique et les facteurs qui influencent son expression.

Fidélité test-retest

La fidélité test-retest de nos résultats est comparable à la majeure partie des études ayant effectué l’évaluation métrologique de leur test à l’effort aérobie maximal effectué chez des survivants d’un AVC6, 12, 22, 49. Toutefois, il est à noter que ces dernières études n’ont pas documenté les déficits cognitifs de leurs participants. Chez six survivants en phase aigüe de la récupération de leur AVC (26,0 ± 8,8 jours post AVC), Mackay-Lyons et al.62 ont mesuré un ICC3,1 de 0,94 lors d’un test sur tapis roulant. Duncan et al.10 ont rapporté un

ICC de 0,98 chez neuf personnes en phase subaigüe (30 à 150 jours post AVC) alors que Eng et al.16 ont rapporté une fidélité test-retest excellente avec un ICC de 0,93 chez 12 personnes en phase chronique (un à sept ans post AVC). Cependant, Tang et al.27 ont rapporté une fidélité test-retest beaucoup moins élevée (ICC = 0,50) utilisant un ergocycle

semi-couché chez 20 personnes en phase subaigüe (7 à 62 jours post AVC). Les auteurs de cette dernière étude expliquent leurs résultats en suggérant que la faible fidélité soit due à la présence d’un effet de pratique. D’une autre part, l’effet de pratique pourrait également être à l’issue de la faible fidélité des résultats. En somme, ne sachant pas si l’analyse de la fidélité test-retest conduite par Tang et al.27 concernait la généralisabilité absolue ou la consistance interne, il est impossible d’attribuer le changement significatif de VO2pic à une

cause spécifique.

Le protocole employé dans cette dernière étude est considéré fidèle pour la VO2pic lors de

mesures répétées pour un intervalle test-retest d’environ une semaine. Tel que discuté plus haut, il est probable que l’absence d’effet de pratique systématique ait contribué à une bonne stabilité temporelle de la VO2pic. En ce qui concerne la FCpic, il semble que la

faible fidélité test-retest soit reliée à la baisse de la FCpic du groupe lors de la deuxième évaluation. Puisque la FCpic a diminuée lors du second test à l’effort aérobie maximal et ce, sans changement significatif de la VO2pic, il est suggéré que le deuxième test ait été

perçu comme étant moins difficile aux yeux des survivants que le premier. Bien qu’il soit probable que les participants aient été moins anxieux ou stressés par l’épreuve aérobie maximale, il est impossible de répondre à cette hypothèse puisque l’état émotionnel des participants n’a pas été documenté dans cette étude.

Selon les valeurs de CMD exprimées dans le tableau 4 de l’article scientifique, le protocole de test à l’effort employé dans la présente étude serait sensible au changement individuel pour la FCpic, la VO2pic relative au poids et la VO2pic absolue pour respectivement 4,3%,

5,9% et 6,3%. Puisque les changements de capacité cardiopulmonaire suite à un entraînement chez les personnes en phase chronique sont de 8,9% à 22,5%11, 63, 87, et que la variabilité normale acceptée d’un jour à l’autre en ce qui concerne la VO2pic d’un individu

moyen soit de ±3%101, il apparaît que le protocole employé dans cette étude soit assez sensible pour détecter les changements individuels de la VO2pic induits par un

Une des limitations de cette étude en ce qui concerne l’analyse de la fidélité était la grande variabilité de l’CI95% pour la FCpic et pour un moindre impact, la durée du test. Puisque

l’incertitude quant à la fidélité test-retest de ces deux variables est considérable, leur utilisation et leur interprétation doit être effectuée avec précaution. Puisque les épreuves à l’effort maximales aérobie indirectes (où les échanges gazeux ne sont pas analysés) estiment généralement la VO2pic en fonction de l’évolution de la fréquence cardiaque et

que la fidélité test-retest de cette dernière variable est faible, les évaluations indirectes de la capacité cardiorespiratoire des survivants d’un AVC en phase chronique ne devraient jamais être conduites avec ce protocole.

Effet individuel des déficiences cognitives sur l’effet de

pratique

La présente étude suggère que l’effet de pratique puisse dépendre de la capacité cognitive générale individuelle. Autrement dit, il semble que les individus ayant des déficiences cognitives moins importantes répondent différemment que leurs compères cognitivement plus atteints lors de mesures répétées de test à l’effort aérobie maximal. Cependant, puisque la variabilité individuelle de cette relation est considérable, l’effet de pratique n’est pas systématique pour tous les survivants d’un AVC en phase chronique.

Une des limitations de cette étude est l’utilisation du MMSE qui évaluait seulement la fonction cognitive générale. Dans le but de déterminer si certaines fonctions cognitives (mémoire, attention, fonction exécutive, etc.) sont spécifiquement reliées aux changements de la condition cardiorespiratoire suite à une pratique de test à l’effort, une cohorte plus nombreuse aurait permis l’utilisation d’analyses multivariées avec des tests neurocognitifs plus pointus. Puisque l’objectif de cette étude était d’investiguer la relation entre les capacités cognitives générales et l’effet de pratique, l’utilisation de tests de dépistage neurocognitifs tels que suggérés par le NINDS-CSN Vascular Cognitive Impairment

De plus, l’impact d’une pratique sur les résultats des tests à l’effort incluant la capacité cardiopulmonaire n’a pas été étudié chez les survivants en phase chronique sans déficits cognitifs.

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