• Aucun résultat trouvé

4.6.1 Méthodes compositionnelles

Les méthodes d’analyse compositionnelle élaborées dans ce chapitre apportent un éclairage nouveau sur la conduite et la précision du diagnostic nutritif du pâturin des prés. En effet, la méthode traditionnelle des intervalles critiques de concentration ne tient pas compte des interactions entre les éléments nutritifs (Bates, 1971). Par ailleurs, les ratios binaires sont

140

souvent établis alors que les relations entre les concentrations peuvent être non linéaires (Kenworthy, 1967) et sans considérer que le même ratio peut être obtenu alors que les deux éléments sont carencés ou en excès (Marschner, 2011).

Ces inconvénients des ratios binaires ont été abordés par DRIS (Beaufils, 1973) et avec une transformation logarithmique simple des ratios dans DRIS (Beverly, 1987). DRIS génère 𝐷 × (𝐷−1) ⁄ 2 ratios binaires pour un simplex de D composantes et le choix de l’expression (A/V ou V/A) peut influencer le résultat du diagnostic. Faute de théorie mathématique solide, DRIS a été modifié à maintes reprises (Walworth and Sumner, 1987). La précision de ces diagnostics telle qu’indiquée pour les tests de biologie clinique (Delacour et al., 2005) n’a jamais été rapportée en appui à ces méthodes.

L’analyse compositionnelle (Aitchison, 1986; Egozcue et al., 2003) a apporté une solution théorique et pratique au diagnostic nutritif en reconnaissant la valeur relative des données analytiques contraintes à une unité ou à une échelle de mesure par l’utilisation des ratios logarithmiques centrés (Parent L.-É. et Dafir, 1992) ou isométriques (Parent L.-É., 2011). Les deux sites expérimentaux des chapitres II et III montraient deux classes texturales de sol (loam natif non perturbé et sable de Norme U.S.G.A.) comportent des doses croissantes d’engrais azotés, phosphatés et potassiques testées en combinaisons. Ces diverses combinaisons d’éléments nutritifs ont influencé de façon différentielle la relation entre la composition nutritive foliaire du pâturin des prés et la biomasse souterraine. L’approche compositionnelle diffère d’une analyse des données sous la loi du minimum de Sprengel ou de l’optimum de Liebscher où tous les autres facteurs sont égaux ou optimaux sauf ceux que l’ont fait varier (De Wit, 1992). En réalité, chaque composante d’un système clos peut changer par « résonnance » si au moins une autre composante change car le système est interactif et les composantes ont une position relative les unes par rapport aux autres dans un système clos.

Des valeurs critiques des clr et ilr de ces compositions ont été déterminées d’une part avec la partition Cate-Nelson et d’autre part avec la densité de biomasse souterraine de 2500 g m-3 dans un profil de sol de 0-15 cm. La précision de la partition était très haute pour VN et

141

moyenne à haute pour la distance de Mahalanobis et moyenne pour VS, VCu, VZn, et la balance

[Cu | Zn]. La balance anions-cations, essentielle pour le maintien de la charge dans les cellules (Marschner, 2011) a été la plus discriminante pour le développement de la biomasse souterraine.

Un excès de N et de P peut affecter la biomasse souterraine. Alors que la littérature confirme que le N réduit le développement de la biomasse souterraine (Badra et al., 2005), elle rapporte généralement que le P la stimule en raison des températures printanières fraîches (Marschner, 2011). Comme la balance [P | N,S] n’était pas reliée à la biomasse souterraine, le sol fournissait assez de P et le pâturin des prés ne requerrait donc pas de fertilisation phosphatée, compte tenu que le P ayant été prélevé proportionnellement à la synthèse des protéines (N, S).

Le ratio Redfield N/P, qui reflète l’interaction N*P, variait de 4 à 10, un niveau bas par rapport aux autres graminoïdes (Güsewell, 2004). Il s’est avéré que le bore et le cuivre étaient des éléments importants lors de l’établissement du pâturin des prés. Les interactions K*B, Ca*B et Cu*Zn pourraient être impliquées aussi.

Cette étude met également en évidence que les besoins en S devraient être comblés en lien avec la fertilisation azotée pour équilibrer le ratio N/S dans la synthèse des protéines. Des essais ultérieurs de fertilisation soufrée pourraient confirmer le seuil critique de la balance [S | N] chez le pâturin des prés.

4.6.2 Conduite du diagnostic nutritif foliaire chez le pâturin des prés

Le diagnostic compositionnel de l’analyse minérale des tissus végétaux est le plus fréquemment conduit par la méthode clr (http://www.registro.unesp.br/#!/sites/cnd/). Les données brutes sont saisies, transformées en clr, puis standardisées en indices clr d’interprétation facile. Les indices clr sont agglomérés en valeurs khideux en vue d’évaluer le degré de déséquilibre global, ces indices sont classés du plus négatif au plus positif pour déterminer l’ordre des besoins nutritifs. La présente étude a déterminé les valeurs standards

142

des clr et ilr pour l’obtention d’une biomasse souterraine supérieure à 2500 g m-3. Il devient donc possible de conduire le diagnostic comme suit :

1. Uniformiser l’unité de mesure des données analytiques, souvent rapportées en

pourcentages pour les éléments majeurs et en ppm (mg kg-1) pour les éléments mineurs.

2. Calculer une distance multivariée (Mahalanobis) en utilisant les données du Tableau 4.3

en vue de confirmer ou infirmer la présence d’un déséquilibre nutritif global.

3. Advenant la présence d’un déséquilibre, ressortir les balances les plus affectées en les

comparants aux données du Tableau 4.4.

4. Calculer les valeurs clr, les comparer aux valeurs critiques de précision moyenne à très

haute, et les interpréter dans le contexte des balances.

5. Déterminer l’ordre des indices clr et les interpréter en fonction des balances.

Les étapes 3 et 4 sont en appui à l’interprétation mais leur impact est limité aux valeurs critiques établies avec une précision suffisante. Un exemple de la démarche est présenté à la fin du chapitre comme matériel supplémentaire A1.

Documents relatifs