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CHAPITRE 3 Discussion, perspectives

1. Discussion des résultats

1.1. Bénéfice en survie d’un traitement prolongé par TMZ adjuvant

Dans notre série la poursuite du TMZ au delà de six cycles apportait un bénéfice significatif sur le risque de récidive (HR = 2,25, IC 95% 1,05 à 4,82; p=0,03). La survie sans progression médiane dans le groupe 9C était de 28.4 mois. La survie sans récidive médiane dans le groupe 6C et dans le groupe 9C était de 82,9% contre 100% à 12 mois et de 25,7% contre 65,9% à 24 mois. La poursuite du TMZ adjuvant apportait également un bénéfice sur la survie globale (HR 3,22 IC 95% 1,30 à 8,00 ; p = 0.01) en analyse multivariée. La survie médiane dans le groupe 6C et dans le groupe 9C était de 94% contre 100% à 12 mois et de 65% contre 76% à 24 mois.

Ces résultats rejoignent ceux des quelques travaux récents [120-122]. Dans un travail publié par Hau et al. étudiant la faisabilité d’un traitement prolongé par TMZ (au moins 12 cycles) chez des patients pris en charge pour un gliome de haut grade de malignité au diagnostic ou à la récidive, les patients recevant du TMZ en première ligne, avec une médiane de 13 cycles, avaient une survie sans progression de 14 mois [120]. Seiz et al ont étudié 114 patients adultes porteurs d’un GBM qui bénéficiaient d’une RCT suivie d’un traitement par TMZ adjuvant qui était poursuivi jusqu’à progression ou apparition d’une toxicité (nombre médian de cycle : 6) [121]. Dans cette étude cinquante-cinq patients recevaient six cycles ou moins et 59 patients recevaient plus de six cycles. Il existait une association positive significative entre le nombre de cycles de TMZ adjuvant et à la fois la survie sans progression et la survie globale.

Figure 26. Survie globale

pour les patients recevant au moins six cycles de TMZ comparée à celle des patients recevant moins de six cycles (p<0.0001). D’après Seiz et al., 2010.

Cycles = 6 at least

Baurain et al ont conduit une étude de phase II randomisée multicentrique sur des patients atteints de GBM (Baurain J., données non publiées). Après un traitement standard par RCT puis six cycles de TMZ adjuvant, les patients qui n’étaient pas en progression tumorale étaient randomisés. Vingt-et-un patients dans le bras expérimental bénéficiaient alors de cycles supplémentaires de TMZ, et ce jusqu’à progression, tandis que les patients randomisés dans le bras standard étaient simplement surveillés. L’analyse intermédiaire, présentée au congrès de l’ASCO en 2010 montrait un taux de survie sans progression à six mois de 70% et 57% dans chacun des deux groupes, respectivement, suggérant un bénéfice potentiel à la poursuite du traitement au delà de six cycles. Cependant l’analyse finale n’a à ce jour pas été publiée. Enfin une équipe canadienne a récemment publié une étude rétrospective portant sur 52 patients atteints de GBM, mettant en évidence une augmentation significative de la survie sans progression et de la survie globale (survie globale médiane 24.6 mois versus 16.5 mois) pour les patients bénéficiant de plus de six cycles de TMZ adjuvant (nombre médian de cycles : 11 [7-13]) comparativement aux patients traités par six cycles seulement [122].

Figure 27. Survie sans progression et survie globale pour 52 patients avec GBM bénéficiant

d’au moins six cycles de chimiothérapie (courbes de Kaplan-Meier). La survie des patients pour lesquels le traitement est arrêté après six cycles est comparée à celle des patients pour lesquels le traitement est poursuivi au-delà de six cycles. D’après Urgoiti et al., 2012.

Cependant, il faut noter qu’un essai de phase II testant l’adjonction de Bévacizumab et d’Irinotécan à la RCT avec TMZ puis au TMZ adjuvant n’a montré aucune différence en terme de survie globale ou de survie sans progression chez les patients recevant plus de six cycles de TMZ adjuvant versus ceux n’en recevant que six [126].

1.2. Survie prolongée des patients de notre série

Il est intéressant de noter que les patients inclus dans notre étude, quel que soit le groupe de traitement auquel ils appartiennent (6C versus 9C), semblent présenter un bon

pronostic, avec 69.4% de patients encore vivants 24 mois après le diagnostic. Dans l’essai EORTC-NCIC 2005, seulement 27.2% des patients inclus étaient encore vivants à 24 mois [22]. Dans notre série comme dans le bras RT - TMZ de l’essai de 2005, la proportion de patients jeunes < 50 ans avoisinait les 30 % (29.3% dans notre série versus 31.3% dans l’essai de 2005). L’âge médian (58.2 ans [18-76] dans notre série versus 56 ans [19-70] dans l’essai de 2005) et la proportion d’hommes (65.5% versus 64%) étaient comparables. En revanche seulement 65.5% (38/58) des patients de notre étude avaient un IK au diagnostic ≥ 70, alors que 86.6% (249/287) des patients du bras RT-TMZ de l’essai de 2005 avaient un score OMS ≤ 1. La majorité de nos patients et de ceux de l’essai EORTC-NCIC 2005 bénéficiaient d’une résection tumorale (82,8% et 83%, respectivement). Cependant seulement 39% des patients du bras radiothérapie - TMZ de l’essai de 2005 bénéficiaient d’une résection complète, alors que c’était le cas pour 60.3% des patients de notre série. Cela pourrait en partie expliquer le pronostic plus favorable de nos patients. Par ailleurs, nous avons sélectionné des patients qui non seulement avaient pu bénéficier de la totalité de protocole dit « de Stupp » standard, à savoir la RCT suivie de six cycles de TMZ adjuvant, mais qui par ailleurs étaient considérés au moins comme en maladie stable lors de l’évaluation à la fin des six premiers cycles de TMZ adjuvant. Dans l’essai de 2005, seulement 36.5% des patients qui débutaient la RCT bénéficiaient au final du protocole de traitement complet. Parmi les autres patients, 35.0% ne pouvaient jamais commencer la phase adjuvante du traitement, tandis que cette phase adjuvante devait être interrompue dans 65.0% des cas (du fait d’une progression tumorale dans presque la moitié des cas).

1.3. Absence de majoration de la toxicité liée au TMZ

En terme de toxicité, nous n’avons observé qu’une seule toxicité de grade 4 au cours des cycles additionnels de TMZ (après le 8ème cycle), sans conséquence clinique. Chez ce patient la poursuite du traitement était bien tolérée par la suite. Par ailleurs deux patients seulement ont présenté une toxicité hématologique au cours des cycles additionnels de TMZ nécessitant une diminution de dose.

Quelques travaux récents se sont intéressés à la toxicité d’un traitement prolongé par TMZ. Leurs résultats suggèrent qu’une telle stratégie est faisable et relativement bien tolérée, sur le plan hématologique notamment [120,123,124]. Ainsi, Hau et al ont étudié la faisabilité d’un traitement prolongé par TMZ chez des patients traités pour un gliome de haut grade de malignité, au diagnostic ou à la récidive, par au moins 12 cycles de TMZ, grâce à un questionnaire envoyé aux neuro-oncologues [120]. Les cycles additionnels de TMZ étaient bien tolérés. Dans une étude rétrospective basée sur une cohorte prospective de 46 GBM traités par TMZ adjuvant prolongé, aucune interruption de traitement pour toxicité n’était enregistrée [124]. Dans l’étude de Khasrow et al, trois patients qui ont bénéficié d’un traitement prolongé par TMZ, jusqu’à 90 mois, pour la récurrence d’un gliome de bas ou de

haut grade ont été rapportés [123]. Aucun d’entre eux n’a présenté de toxicité significative. Une étude récente suggère que les toxicités hématologiques sévères surviendraient plus fréquemment au cours des premiers mois de traitement par TMZ [104].

1.4. Effet de la prise de corticoïdes à la fin du 6ème cycle de TMZ adjuvant

De façon intéressante, les patients du groupe 9C étaient plus fréquemment traités par corticothérapie à la fin du 6ème cycle de TMZ adjuvant que les patients dans le groupe 6C. Cela pourrait s’expliquer par le fait que les patients de ce groupe avaient plus de chances d’avoir un résidu tumoral sur l’IRM réalisée à la fin du 6ème cycle, expliquant en partie le choix du neuro-oncologue de poursuivre le traitement. Nous avons montré qu’une prise de corticoïdes à la fin des six premiers cycles de TMZ adjuvant avait un impact significatif sur la survie, les patients sous corticoïdes ayant un risque significativement plus élevé de décès. Les patients du groupe 9C, bien que plus fréquemment traités par corticoïdes à la fin du 6ème

cycle de TMZ adjuvant, avaient une meilleure survie sans progression. Cela suggère un impact fort du nombre de cycles de TMZ sur la survenue de la récidive.

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