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Nous avons atteint l’objectif de notre travail : identifier les freins et facteurs favorisant l’utilisation de la varénicline et du bupropion par les médecins généralistes. Nous avons réalisé un état des lieux des connaissances, représentations et pratiques à ce sujet. Nous avons pu constater qu’il était possible de développer cette pratique chez les médecins généralistes, et nous devons dégager des pistes de travail en ce sens.

Forces de notre étude

 Il s’agit d’une étude qualitative originale

« La valeur d’une recherche scientifique est en grande partie dépendante de l’habileté du chercheur à démontrer la crédibilité de ses découvertes. » Boutin G, 2011 (76).

Une étude quantitative va définir des questions, puis les évaluer auprès des sujets étudiés. La richesse de l’étude qualitative réside dans sa capacité à faire émerger de nouveaux concepts, sans définition de ceux-ci a priori. Elle permet de créer de nouvelles hypothèses, et a donc une visée exploratoire. Ces hypothèses pourront être à leur tour approfondies par des études plus ciblées. Elle explore également l’existence et la signification de phénomènes sociaux, là où la méthode quantitative va quant à elle mesurer, quantifier des variables. Dans cette étude, le but n’était pas de quantifier, ni d’émettre des pourcentages sur les actions des médecins.

Concernant le tabagisme, les médecins généralistes sont tout d’abord impliqués sur le plan professionnel, dans le cadre de la prévention primaire et secondaire : dans la définition européenne de la WONCA7, la médecine générale comprend en effet « la promotion de la santé, la prévention des

maladies et la prestation de soins à visée curative et palliative » (7). La Société française de médecine générale estimait, en 1995, que les activités préventives représentaient au moins un tiers de l’activité en médecine générale (77). Le médecin traitant constitue souvent le premier recours et un point d’entrée naturel dans le système de soins, et deux tiers des médecins (63,2 %) abordent au moins une fois avec chaque patient la question de la consommation de tabac selon le Baromètre Santé Médecins Généralistes de 2009 (10).

Mais il faut le souligner, les médecins sont également concernés sur le plan personnel : en 2015, 16 % d’entre eux déclaraient fumer dont 14 % quotidiennement (il faut cependant noter que cette prévalence était en forte baisse par rapport à 2003, où 29 % des médecins généralistes déclaraient fumer)(78). Un certain nombre d’entre eux ont une expérience intime, personnelle, du tabagisme, certains ont parfois tenté un sevrage, ont pu vivre un échec de sevrage, ou vivent avec leur addiction. Les médecins peuvent aussi connaitre des personnes fumeuses dans leur entourage, leur affect se retrouvant fortement impliqué.

7 WONCA : « World Family Doctors Caring for People », Société Européenne de médecine générale - médecine

62 Cela fait toute la complexité de la prise en charge : les croyances, les représentations, le vécu personnel des médecins, prennent une part importante dans leurs prises en charge. Ils influencent leurs comportements, par essence polymorphes, et leurs décisions face au patient tabagique comme nous le verrons ensuite.

Des traitements médicamenteux efficaces, la varénicline et le bupropion, peuvent être prescrits par les généralistes en cas d’échec de sevrage à l’aide des substituts nicotiniques, en accord avec les recommandations de la HAS. Nous n’avons cependant pas trouvé de recherche équivalente à la nôtre, cherchant à évaluer les connaissances, représentations et pratiques des médecins concernant ces traitements.

 Modalités semi-dirigées de recueil des données

Nous avons choisi de réaliser des entretiens semi-dirigés, qui nous semblaient être le meilleur moyen d’obtenir des informations sur notre sujet précis : il fallait à la fois laisser le cheminement du discours se faire, sans enfermer les praticiens dans un cadre trop rigide, tout en les guidant vers le thème à approfondir : cela n’était pas aisé devant le sujet vaste du sevrage tabagique et la volonté d’étudier en particulier certaines thérapeutiques médicamenteuses du sevrage. Le guide d’entretien préétabli restait donc très souple, et l’investigatrice était flexible quant à l’ordre et à la formulation des questions.

Selon les préconisations des sociologues A. Blanchet, A. Gotman et J-C Kaufmann dans leurs livres faisant référence en recherche qualitative (71,79), la démarche de recherche choisie permettait une dynamique de conversation plus riche et nuancée qu’une simple réponse aux questions posées. Cela permettait d’éviter des réponses trop formelles, attendues ou idéales, le médecin évoquant sa pratique et sa pensée réelle et non ce qu’il pensait être attendu par l’investigatrice.

Le guide d’entretien assurait la reproductibilité inter-sujet de la méthode d’investigation.

 Bonne représentativité des participants

La sélection aléatoire de 15 des médecins interviewés parmi 20 a été une force dans cette étude. Nous ne pouvions pas prétendre à une représentativité statistique, néanmoins l’échantillon était varié en âge, équilibré et en genre et dans la répartition entre médecins fumeurs, non-fumeurs, ou sevrés. La moitié des participants de notre étude avait une expérience personnelle du tabac (tabagisme actif ou sevré). 20% des participants étaient fumeurs actifs, approchant la prévalence du tabagisme chez les médecins généralistes (16% en 2015)(78). Des études ont montré que le statut tabagique du médecin pouvait influencer sa pratique, avec notamment une moindre pratique du conseil minimal par les médecins fumeurs (étude en Vienne en 2002, et en Maine-et-Loire en 2008)(80,81). Pour exemple, en 2002 à St-Etienne, le Dr Guarrigues-Naserzadeh retrouvait que 75% des médecins non- fumeurs interrogeaient systématiquement leurs patients sur leur statut tabagique contre seulement 64% des médecins fumeurs (p<0,032)(82). Il était donc pertinent que notre population soit représentative sur ce critère. Devant le faible effectif de notre population d’étude, nous ne pouvions pas statuer de manière statistique sur l’influence du statut tabagique du médecin sur sa pratique concernant les thérapeutiques médicamenteuses évoquées. Cependant aucune tendance particulière n’était retrouvée, les médecins prescripteurs étant fumeurs, sevrés ou non-fumeurs.

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Limites de notre étude

 Secteur géographique limité à la Gironde

Nous avons choisi de restreindre notre secteur géographique de recherche à la Gironde. Malgré la taille importante du territoire choisi, favorisé par le déplacement de la doctorante jusqu’aux cabinets médicaux les plus isolés, il existait finalement peu de secteurs très éloignés de structures de soins (hôpital ou clinique), considérés comme « rural ». Notre échantillon était varié mais sa représentativité étendue aux médecins généralistes en France pouvait alors se discuter. Une majorité des médecins interviewés exerçait en milieu citadin. Seuls 3 participants travaillaient en milieu rural. Le secteur d’exercice pouvait influencer le type de patientèle, et nous avons pu voir dans l’introduction que les patients les plus précaires étaient ceux les plus impactés par le tabagisme (3). En milieu citadin, nous avons pu recruter 3 médecins exerçant dans des zones où la précarité était importante. Les secteurs restaient donc équilibrés.

 Biais de sélection des participants

Devant les refus de participation ou l’absence de réponse de certains médecins malgré les relances, nous pouvions estimer que les médecins, acceptant de participer à l’étude lors de la phase de sélection aléatoire, étaient des médecins plus motivés, plus impliqués dans la pratique du sevrage tabagique au cabinet ou tout du moins plus intéressés par ce sujet.

Nous avons cherché à savoir si les praticiens sélectionnés étaient maitres de stage, cela pouvant influencer leur pratique : selon la thèse de Maud Bufala interrogeant les MSU de toute la France (faculté de médecine de Nice, 2015), 81% attribuaient à la maîtrise de stage un regain d’intérêt professionnel, et 82% une remise en cause de leur pratique. La pratique réflexive était largement favorisée pour près de 60 % d’entre eux (83). Dans notre étude, 9 médecins sur les 20 participants étaient maitres de stage, ce qui était assez conséquent. En effet en 2016, on recensait 8550 Maitres de Stage Universitaires (MSU) pour 88886 médecins généralistes (84), soit 9,6% de MSU en France, contre 45% dans notre étude : un possible biais de sélection a pu survenir, lié à la motivation de ces médecins à participer à des études, du fait de leur implication auprès des étudiants.

Parmi les participants à notre étude, 11 étaient abonnés et lecteurs de la Revue Prescrire, soit 55% de notre échantillon. Ils étaient en proportion plus importante que dans la population de médecins généralistes en France (environ 18% d’abonnés en France en 2016 : 16062 abonnés pour 88886 médecins généralistes toute activité confondue)(56,85). Devant la taille réduite de notre échantillon, il pouvait s’agir d’une fluctuation d’échantillonnage, ou d’un biais de sélection. Il était cependant nécessaire de mettre ce résultat en avant, car cela a pu influencer les représentations des participants sur les traitements médicamenteux comme nous le verrons par la suite.

64  Biais lors du recueil des données

La doctorante manquant d’expérience et de pratique dans le domaine des entretiens de recherche, elle a pu parfois influencer les réponses des médecins interviewés, par sa communication verbale mais également non verbale. Sa place vis-à-vis des participants pouvait également influencer les propos recueillis (jeune médecin, remplaçante). Elle a cependant toujours cherché à garder une attitude neutre et bienveillante, afin de limiter au maximum un éventuel biais de prévarication de la part des participants (biais d’omission volontaire, qui conduit la personne interrogée à répondre sciemment de façon erronée aux questions posées).

5 interviews se sont placées après la décision de remboursement du Champix® et la parution d’un article sur la varénicline dans Prescrire, qui maintenait au contraire un doute sur ce traitement (61). Un biais de connaissances a donc pu émerger entre les premiers et les derniers entretiens. Cependant cela a eu finalement peu d’influence car ces derniers participants n’avaient pas encore pris le temps de lire l’article, ou ne le connaissaient pas. Ils n’étaient pas non plus au courant du remboursement du Champix®. Cela n’avait donc pas encore modifié leurs représentations ou attitudes sur la prescription.

 Absence de triangulation de l’analyse et des sources

Nous n’avons pas pu réaliser de triangulation de l’analyse, n’ayant pas trouvé de personne motivée pour la réaliser dans le temps imparti. Cela aurait permis de renforcer la validité de notre étude.

 Quantité de données recueillies non exploitées

Comme discuté précédemment, notre guide d’entretien comprenait des questions délibérément larges et vastes, afin de ne pas enfermer le discours dans un cadre trop rigide. Par conséquent, une grande quantité de propos pertinents et intéressants ont été recueillis, mais ne répondaient pas directement à l’objectif de ce travail. La quantité importante d’informations obtenues a été compliquée à traiter et a rendu la synthèse et la présentation des résultats difficile.

Beaucoup de résultats codés n’ont pas été utilisés. Parmi les items issus de l’analyse des verbatims, non décrits dans cette étude, nous pouvons citer notamment :

 Les aides principalement utilisées par les médecins dans le sevrage : patches nicotiniques en grande majorité, formes orales en second lieu, avec peu d’association des deux formes, et enfin place importante de la cigarette électronique, qui a suscité de nombreuses réflexions de la part des médecins interviewés ;

 Le recours fréquent à des médecines alternatives, acupuncture et hypnose, surtout à la demande des patients ;

 L’opinion positive sur le réseau ASALEE qui parait une aide intéressante selon les médecins ;  La perception des médecins sur leurs patients fumeurs : les patients doivent être « motivés

», doivent « se responsabiliser », les patients ont des motifs multiples de consultation ou des co-addictions, les patients sont informés et ont un avis sur leur prise en charge, ou à l’inverse sont naïfs d’information, les patients ne passent plus par le médecin pour se sevrer du tabac.

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Interprétation des résultats

Influence des connaissances sur les pratiques des médecins, concernant ces

thérapeutiques médicamenteuses de l’arrêt du tabac

 On constate une méconnaissance des traitements chez la plupart des participants

Lors des entretiens, plusieurs médecins méconnaissaient la varénicline et le bupropion. La confusion et l’amalgame entre les deux traitements étaient importants. Le manque de connaissances est un des freins retrouvés dans la plupart des travaux de thèses de médecine réalisés auprès des médecins généralistes dans le domaine des addictions (Marc Piardon, Créteil, 2006 ; Julia Dyens, Paris, 2009 ; Myriam Sciolla, Marseille, 2012)(86–88).

Concernant plus spécifiquement la varénicline, parmi les médecins prescripteurs, un seul disait

« adapter la posologie » en cas d’effet indésirable. La méconnaissance de cette possibilité d’adaptation

de la dose, et de la possibilité de diminuer les effets indésirables par une diminution de la posologie (15), entrainait pour les autres prescripteurs une décision d’arrêt du traitement, alors qu’il restait efficace même après diminution de posologie d’après la méta-analyse de Cahill et al. de 2016 (RR versus placebo 2,29 ; IC95% 1,81—2,89)(29).

 Les recommandations de la HAS sont également méconnues

Les recommandations de la HAS concernant le sevrage tabagique étaient majoritairement méconnues. Certains savaient qu’elles existaient mais ne les avaient pas lues, d’autres ne connaissaient pas leur existence. Ils ne savaient donc pas positionner ces thérapeutiques dans la stratégie de sevrage. Une étude du Dr Laure, chercheur en sciences sociales à Metz, parue dans Santé Publique8 en 2006 montre

cependant que 61% des médecins de son étude considèrent les recommandations comme un atout, à la fois comme outil et comme incitation, bien qu’ils les jugent difficiles à respecter, et que 28% d’entre eux demandent à les améliorer. Différents travaux suggèrent néanmoins un écart entre les pratiques médicales et ces recommandations (89–91), comme par exemple dans l’exemple de la prise en charge du diabète de type 2, où ils voient d’abord leur rôle comme étant d’éduquer les patients ou d’adapter les prescriptions à la demande et non d’assurer un suivi sur les bases strictes du référentiel (92). Il faut également souligner que ces recommandations de la HAS n’ont pas été revues depuis 2014, et que leurs données concernant la varénicline n’ont pas été réactualisées avec l’apport des études les plus récentes, comme en témoigne la « fiche varénicline » disponible sur le site internet de la HAS9 datant d’octobre 2014. Or, les recommandations ne sont pas définitives, et du fait de

l’évolution des connaissances et des pratiques, leur demi-vie moyenne est de l’ordre de 5 ans (93,94). Ainsi, il serait nécessaire que les médecins soient mieux informés sur ces recommandations, mais également que celles-ci soient réactualisées à court terme.

8 Santé publique est une revue scientifique à comité de lecture francophone, généraliste et multidisciplinaire

soutenue par la Société Française de Santé Publique et animée par un comité de rédaction indépendant.

9 Disponible à l’adresse suivante : https://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_1718021/fr/arret-de-la-

66  L’apport de connaissances n’impacte que partiellement les pratiques des médecins

Dans notre étude, on pouvait constater que les 3 médecins connaissant bien la varénicline, son mode d’action, ses effets indésirables, étaient également prescripteurs de ce traitement. Toutefois, on ne pourrait limiter notre raisonnement en concluant qu’un apport de connaissances suffirait à modifier les pratiques des médecins. En effet, plusieurs études ont démontré que le simple fait d’informer les praticiens sur les changements à introduire est inefficace, comme décrit notamment dans une revue de la littérature québécoise de 2016 sur les stratégies visant l’intégration de la prévention dans les pratiques cliniques, et les conditions permettant d’en accroître l’efficacité (95–98). L’apport de connaissances reste bien entendu nécessaire, mais ne modifie que partiellement les pratiques des médecins, comme cela a été retrouvé dans plusieurs études (91,93,99,100).

Comme le souligne Paula Alvarez dans sa thèse (Bordeaux, 2018), un ensemble d’interventions est à privilégier afin de surmonter le plus de barrières possibles par rapport au changement des pratiques. Il s’agit d’utiliser deux stratégies ou plus, de façon concomitante ou successive. L’idéal serait de viser plusieurs déterminants de la pratique (l’organisation, le clinicien et le patient)(101). La multiplicité des stratégies d’information et de formation est donc particulièrement importante.

Influence des représentations sur les pratiques des médecins, concernant ces

thérapeutiques médicamenteuses de l’arrêt du tabac

Selon la définition du Dr Jodelet10, les représentations sociales sont « une forme de connaissance

socialement élaborée et partagée, ayant une visée pratique, et concourant à la construction d’une réalité commune à un ensemble social ». Forme de connaissance dont « on a quelque mal à rendre compte de sa plénitude conceptuelle » les représentations sociales s’élaborent et s’inscrivent fondamentalement dans le cadre des interactions sociales. On ne peut en éliminer la « relation à la vie affective et émotionnelle » (102,103).

Le fonctionnement du cerveau humain entraîne des biais comportementaux, c’est-à-dire des erreurs systématiques dans la façon de se comporter ou de raisonner. Ces biais peuvent piéger les médecins. Le Dr David Kahneman docteur en psychologie et expert de la psychologie cognitive (et également prix Nobel d'économie), a décrit ces biais (104,105). Un article paru dans le JIM en 2016 décrit également les principaux biais cognitifs expliquant pourquoi l’information scientifique ne parvient parfois pas à convaincre (106).

Parmi ces biais cognitifs, on peut citer notamment :

 L’heuristique d’affect, qui consiste à prendre une décision en utilisant davantage ses émotions qu’un raisonnement ;

 Le biais d’ancrage, qui désigne la difficulté de se défaire d’une première impression ou d’une première idée, et le réflexe de Semmelweis ou biais de conservatisme qui est la tendance à rejeter les nouvelles preuves qui viennent contredire un paradigme établi ;

10 Denise Jodelet est docteur d'état, maître de conférences à l'école des hautes études en sciences sociales

(EHESS), directeur adjoint du laboratoire de Psychologie sociale. Elle est spécialiste de l'étude de représentations sociales.

67  Le biais de confirmation, tendance que nous avons à ne chercher ou à interpréter que les informations d’une façon qui confirme nos préconceptions, tout en ignorant celles qui ne les supportent pas ; le biais d’attente qui lui est corrélé : tendance qu’ont les expérimentateurs à croire, certifier et publier les données qui s’accordent avec ce qu’ils attendaient du résultat d’une expérience et, à l’inverse, tendance à refuser, douter et sous-noter celles qui contrarient ces mêmes attentes ;

 Le biais de représentativité, qui revient à se baser sur une représentation de la réalité ou sur des stéréotypes plutôt que sur une analyse statistique, ou à généraliser à partir de cas particuliers ou d'exemples, sans se baser sur un raisonnement logique et probabiliste.

 Les risques sont ainsi perçus comme prioritaires face aux bénéfices escomptés

L’article du JIM (106) énonce notamment que la perception des risques est supérieure à celle des bénéfices et « qu’en situation d’incertitude, on préfère souvent ne rien faire. Les conséquences d’une inaction sont souvent mieux acceptées que celles, même identiques, d’une action volontaire ». De plus, selon Daniel Kahneman, notre cerveau « comporte un mécanisme conçu pour accorder la priorité aux mauvaises nouvelles, […] les menaces sont prioritaires par rapport aux opportunités » (104). Dans notre étude, plusieurs médecins disaient avoir peur des effets secondaires qui avaient été décrits dans la littérature pour ces traitements. Ces médecins ne prescrivaient pas le traitement pour lequel ils évoquaient une crainte. La constatation d’effets secondaires par le médecin auprès de ses patients pouvait également être un frein à la prescription. Les effets secondaires constatés avec la varénicline étaient principalement des céphalées, des troubles du sommeil, des modifications du comportement ou de l’humeur, et des troubles digestifs, finalement concordants avec ceux décrits dans la littérature (26,30,31). Ces effets semblaient pour la plupart sans gravité mais entrainaient parfois, au dire des médecins, un arrêt du traitement. Les médecins avaient l’impression que ces effets étaient nombreux, considérables. Un biais de représentativité était parfois retrouvé dans le discours de certains participants, généralisant les effets secondaires ou événements indésirables à partir de cas particuliers ou d’exemples.

Les participants remettaient en question l’efficacité de ces traitements, bien que des études aient montré une plus grande efficacité de la varénicline versus placebo et versus TNS (19,26–30), et une

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