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Partie I : Corpus théorique et recension des écrits

2 Les modèles et les approches concernant le stress professionnel

2.3 Discussion autour des modèles et des approches

Dans les pages précédentes, les différentes théories et approches du stress ont été présentées. Bien que leur objectif premier reste de mieux appréhender et de démystifier le phénomène du stress professionnel, des différences fondamentales existent entre elles. Certaines veulent comprendre plutôt qu’expliquer le phénomène du stress. Dans un même ordre d’idée, certains auteurs ont une vision déterministe du stress, par le fait qu’un ensemble de facteurs structurels viendraient limiter et contraindre la portée et le choix des actions des individus. Dans ce courant de pensée, l’individu n’est pas un acteur ; il dépend de son environnement. Ce dernier point est remis en question par la vision volontariste, qui croit plutôt que l’individu analyse et interprète les facteurs structurels avant de faire un choix : il n’est donc pas passif, soumis à l’environnement, contrairement à ce que sous-entend la vision déterministe. Afin de mettre en pratique cette division déterministe/volontariste et expliquer/comprendre, le tableau suivant situe les différentes théories et approches du stress :

46 Tableau 5 Classification des approches et modèles du stress

Explication (causes) Compréhension (sens)

Approches déterministes • Syndrome d’adaptation général • Social Readjustment Rating Scale

• Daily Hassles and Uplifts

Scale

• Modèle de demandes- contrôles de Karasek • Modèle du stress au

travail par Cartwright et Cooper • Modèle déséquilibre efforts-récompense de Siegrist • Job Demands-Resources Approches volontaristes • Théorie cognitivo- comportementale • Approche traditionnelle • Approche positive

À la suite de cet exercice, un constat intéressant apparaît : la majorité des théories explorées utilisent une vision déterministe. Seules la théorie cognitivo- comportementale et les approches qui en découlent cadrent plutôt dans une approche volontariste. L’ensemble des théories déterministes soulevées dans le tableau ont un but similaire : expliquer les causes du stress professionnel par l’influence directe de l’environnement de travail sur la personne. Dans la théorie du syndrome d’adaptation générale de Seyle (1975), c’est un calcul purement déterministe. Le stress provient de l’environnement et les humains y réagissent tous de la même manière. Même si les théories SRRS et DHUS tentent de nuancer en graduant le taux de stress selon l’évènement, un principe déterministe prime. En effet, l’objectif recherché par la gradation du stress consiste à démontrer l’uniformité des réponses données. Cela entraîne l’idée que les humains réagissent de manière similaire au stress, et donc que seul l’environnement influence réellement la gravité du stress vécu par les individus. Pour les quatre autres modèles situés dans l’approche déterministe/explication, soit le modèle de déséquilibre efforts- récompenses de Siegrist et al. (1996), le modèle de demandes-contrôles de Karasek

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et Theorell (1990), le modèle du stress au travail par Cooper et Cartwright (1997), ainsi que le Job Demands-Resources de Demerouti et al. (2001), l’accent est davantage porté sur le milieu de travail que sur les particularités des employés. Ces quatre modèles tentent, de différentes manières, d’expliquer les différentes causes du stress selon l’organisation du travail. Le modèle de Siegrist et ses collaborateurs (1996) avance simplement que si les efforts exigés par l’employeur envers l’employé dépassent les récompenses offertes, celui-ci sera indubitablement stressé. Même chose avec le modèle de Karasek et Theorell (1990), dans lequel le profil d’un employé peut se diviser en quatre, selon la latitude décisionnelle offerte dans le milieu de travail et les demandes psychologiques que ce même travail exige. Les deux derniers modèles, celui de Cooper et Cartwright (1997) et celui de Demerouti et ses collaborateurs (2001), présentent encore plus précisément tous les éléments présents dans un milieu de travail, autant nuisibles qu’aidants, influençant le niveau de stress chez les employés. Même si on inclut plus manifestement l’individu dans ces modèles, celui-ci ne reste qu’un vecteur du stress, il n’a pas réellement d’impact sur le stress vécu. Par contre, la théorie cognitivo-comportementale de Lazarus et Folkman (1984) permet de voir une relation, un retour, entre l’individu et son environnement. La manifestation volontariste de cette théorie passe par les stratégies d’adaptation, qui sont alors individuelles, propres à chaque personne tentant de s’adapter aux exigences de son milieu de travail.

En effectuant un recul sur cette analyse générale des différents angles d’étude portés par les théories sur le stress professionnel, il devient possible de constater une difficulté partagée par toutes ces théories. En effet, elles n’arrivent pas à proposer de directives claires pour arriver à sortir l’employé de son rôle passif, ou encore à se distancer de l’idée que la seule emprise pour gérer le stress de la part d’un employé demeure dans l’élaboration de mesures personnelles, excluant dès lors le milieu de travail. Le constat qui ressort à la lecture de ces différentes théories est que des solutions communes et partagées entre l’employé et l’employeur ne sont pas clairement élaborées dans l’ensemble des écrits sur le stress professionnel. Cette incapacité à clairement établir des pistes de solutions collaboratives entre les

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travailleurs et leur employeur demeure une lacune manifeste dans les différents écrits, peu importe l’angle théorique adopté pour analyser le stress professionnel. Maintenant que l’ensemble des éléments théoriques rattachés au stress professionnel ont été abordés, les sections suivantes aborderont ce problème, mais appliqué directement à la population à l’étude, soit les infirmiers en centre hospitalier.

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