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PARTIE I. DE QUOI ET DE QUI PARLE-T-ON ? ÉTAT DES LIEUX DE DIFFERENTES SOURCES DE

7. Les discriminations

Depuis 1945, la Charte des Nations Unies consacre le principe du « respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion ». Depuis, les motifs de discrimination intégrés dans le cadre de la loi se sont élargis à des critères divers allant du patronyme, à l’apparence physique, en passant par l’état de santé, etc. La définition juridique de la discrimination a également évolué, puisque désormais la notion désigne des effets et non plus des intentions : il s’agit de constater une inégalité de traitement pour des motifs interdits (il existe aujourd’hui des inégalités de traitement qui sont jugés légitimes par la société : l’entrée à des concours, les impôts progressifs, etc.) et il n’est plus obligatoire de prou- ver qu’il y avait une intention délibérée.

La discrimination est illégale et sanctionnée dans toutes les situations prévues par la loi. 23 cri- tères discriminatoires sont répertoriés : origine, sexe, situation de famille, grossesse, apparence physique, particulière vulnérabilité résultant d'une situation économique, apparente ou connue de son auteur, patronyme, lieu de résidence, état de santé, perte d'autonomie, handicap, caractéris- tiques génétiques, mœurs, orientation sexuelle, identité de genre, âge, opinion politique, activité syndicale, capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français, appartenance ou non-appar- tenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une Nation, une prétendue race ou une religion détermi- née138. Et plusieurs domaines où ces traitements défavorables peuvent exister sont spécifiés par la loi. Exemples : l’accès à l'emploi, l’accès au logement, l’éducation (conditions d'inscription, d'ad- mission, d’évaluation) ou la fourniture de biens et services (accès à une discothèque, à un restaurant, à un bâtiment public, souscription d'un crédit...).

La mesure des discriminations est évidemment complexe. Ses contours ne sont pas nécessaire- ment clairs pour tous : les personnes ne savent pas toujours qu'elles ont fait l'objet d'attitudes dis- criminatoires ou peuvent être réticentes à l'admettre dans certaines circonstances. D’autres au con- traire peuvent considérer, à tort, en être victimes.

7.1 Les victimes de discrimination en France : 21% des Français ont été concernés

en 2019, soit 11 millions de personnes de 18 ans et plus

La Commission Européenne a réalisé en 2019 une enquête sur les discriminations. Les Européens ont été interrogés sur leur propre expérience en matière de discrimination. Ainsi, 17% des Euro- péens ont déclaré avoir été victimes de discrimination au cours des 12 derniers mois, contre 21% des Français139. En France, 28% des personnes ayant déclaré avoir été victimes de discrimination l’ont été sur leur lieu de travail, contre 23% en moyenne en Europe140.

138 Article 225-1 du code pénal, modifié par la loi n°2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité citoyenne 139 Commission Européenne, Mai 2019, « Discrimination in the European Union », Eurobaromètre Spécial n°493, p.156.

Les motifs de discrimination en Europe et en France en 2019

Source : Commission Européenne, Eurobaromètre Spécial n°493

En 2018, 5 631 réclamations pour cause de discrimination ont été portées à la connaissance du Défenseur des droits en France, soit une progression de 4% en un an (5 405 réclamations en 2017 et 5 203 en 2016)141. Parmi les saisines mettant en cause une discrimination en 2018, le handicap est le premier critère invoqué (22,8%), devant l’origine ethnique (14,9%) et l’état de santé (10,5%)142.

Dans son enquête sur l’accès aux droits, la Direction de la Promotion de l’égalité et de l’accès aux droits, a interrogé 5 117 personnes par téléphone dans le courant de l’année 2016. Le rapport 2016 du Défenseur des droits indique que « près de la moitié des personnes interrogées [ont rap- porté] avoir été personnellement confrontés à une situation de discrimination dans les cinq dernières années » principalement dans l’accès aux droits143. Suite à ces faits, 8 per- sonnes sur 10 n’ont pas entrepris de démarche pour parvenir à faire valoir leurs droits. L’inutilité des démarches est évoquée dans 79% des situations. Cet argument est plus souvent avancé par les personnes les plus jeunes (18-24 ans) et les plus âgées (45-79 ans) de l’échantillon. Pour les 25-54 ans, c’est le manque de preuves qui est plus souvent cité pour expliquer l’absence de démarches visant à faire reconnaître la discrimination dénoncée. Le manque de confiance envers les instances policière et judiciaire est plus souvent cité parmi les personnes dont le plus haut niveau de diplôme est le Bac. Parmi les personnes n’ayant pas entamé de démarches, 42% des ouvriers et 41% des personnes qui n’ont pas le baccalauréat l’expliquent notamment par un manque de confiance en la justice, contre 31% de l’ensemble des personnes concernées144.

141 Défenseur des droits, 2018, Rapport annuel d’activité, p.42 142 Ibid, p.42

143 Défenseur des droits, 2016, Rapport annuel d’activité, p.23 144 Défenseur des droits, 2016, Rapport annuel d’activité, p.24

Raisons avancées par les personnes qui n’ont pas entrepris de démarches particulières pour faire reconnaître l’existence du fait considéré discriminatoire

Source : Défenseur des droits, rapport d’activité 2016, p.24

Les travaux menés par le CREDOC pour la Direction générale de la cohésion sociale complètent ces données : sans en être la victime directe, près d’une personne sur deux a été le témoin d’une discri- mination dans l’année. Des analyses statistiques montrent qu’avoir été témoin de ces discriminations, au-delà de l’effet qu’elles peuvent avoir sur l’individu concerné au premier chef, minent le sentiment de vivre dans une société cohésive.145

145 Sandra Hoibian, « Les Français en quête de lien social », Baromètre de la cohésion sociale 2013, Collection des rapports du CREDOC n°292, 2013 http://www.credoc.fr/pdf/Rapp/R292.pdf

79% 75% 57% 41% 39% 34% 23% 4%