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PARTIE III: POUR UNE NEGOCIATION A VENIR

3.2 Un environnent sujets à enjeux pour l’exploitant

3.2.5 Le devenir des liaison interrégionales

La question des flux interrégionaux est d’une brûlante actualité en cet été 2005, où les articles

de presse56 sont légion pour témoigner du mécontentement des Régions à l’encontre de la

décision de la SNCF de réduire l’offre sur trois lignes. Après une description des liaisons interrégionales, il convient de replacer le contexte actuel dans une perspective de déclin de cette activité pour laisser augurer des enjeux qui impacteront le TER.

3.2.5.1 Liaisons interrégionales : les éléments du débat

Les liaisons Corail, du nom du matériel utilisé, peuvent être définis comme l’ensemble des lignes du réseau ferré qui ne sont ni assuré par des TGV ni par le TER. Ces liaison sont soient des radiales dont l’origine ou la destination passe par Paris ( Paris-Nevers, Paris-Orléan-

Tours…) soit des transversales (Nantes-Lyon, Bordeaux-Toulouse…)57. Ces lignes qui

subissent une rude concurrence avec le transport aérien, le TGV et le déplacement autoroutier sont sur le déclin depuis une dizaine d’année, déclin traduit par une baisse du trafic, une insuffisance d’investissements, une hausse des déficits et une stratégie commerciale inopérante. Les préconisations sont en vigueur depuis le rapport Barel (1995), mais ce n’est que tout récemment que la SNCF a annoncé sa volonté de ne plus assurer certaines lignes. Les données financières de TIR pointent un déficit chronique, avec un ratio produit sur charges de 0,69 en 2003, que les investissements conséquents à prévoir dans la rénovation du matériel dans les dix ans à venir ne pourront que consolider. Durant des années les difficultés pourtant réelles étaient peu sujets à discussion, les lignes les plus rentables - principalement le

TGV – couvrant les pertes d’autres lignes au nom du principe de péréquation.58 Or, la hausse

des péages a grevé les possibilités de péréquations par une marge de l’exploitant qui se retrouve d’autant diminuée (plus de 800 millions d’euros versés entre 1998 et 2003).

Dans ces conditions, et dans le cadre d’un environnement concurrentiel qui va croissant (cf. 3.2.6), la SNCF a pris la décision d’impulser une nouvelle ambition à ces lignes, et ce d’autant plus que la pertinence de certaines dessertes est en cause.

En 2004, l’entreprise ferroviaire a ainsi engagé une stratégie active par le transfert de sa branche Voyage France Express (VFE) à sa branche Transport Public (TP) d’un ensemble de liaisons corail pour constituer une Activité trains interrégionaux (TIR). L’activité TIR, créée au 1 janvier 2005, devient une activité de plein exercice, disposant de ses propres moyens de production (effectifs et matériels), d’un budget et de la responsabilité de ses résultats économiques.

Elle concerne vingt cinq lignes (25), dont le critère déterminant les séparant des lignes restées à VFE est la part majoritaire de voyageurs qui effectue un trajet sur une distance inférieure à

56 Les échos, « Trains corail : la polémique enfle », 07/08/2005.

Le Monde, « Un débat escamoté », éditorial, 08-09/08/2005. La dépêche du Midi, « La nouvelle bataille du rail », 09/08/2005.

La Voix du Nord, « Etat-Régions : bataille du rail sur les trains corail », 06/08/2005.

Fédération Nationale des Associations d’Usagers des Transports, « Dessertes ferroviaires interrégionales : Etat, Régions et SNCF doivent prendre leurs responsabilités », bulletin spécial n°123, avril 2004.

57 Cf. carte des liaisons TIR, annexe 12. 58

82

trois cent (300) kilomètres ; les types de trajets correspondent à de l’intra régional et de l’interrégional de proximité.

En 2003, les TIR représentent : trois cent vingt (320) trains par jour, presque cinq milliards de voyageurs-kilomètres et un déficit d’exploitation se montant à cent cinquante cinq (155) millions d’euros, soit un chiffre d’affaire de 7,3% total de l’activité grande ligne pour un total

de charge correspondant à 10,6%.59 Un audit réalisé en avril 2005 et transmis aux Régions fait

état d’un déficit de cent vingt quatre (124) millions d’euros pour chaque exercice.

3.2.5.2 Le TIR à vue des Régions et des usagers

Le déficit d’exploitation est actuellement assumé par la SNCF seule, qui, ne pouvant plus faire face aux coûts inhérents des liaisons interrégionales a décidé une réduction de l’offre sur deux dessertes (Quiper-Nantes-Bordeaux-Toulouse / Nantes-Lyon) et la suppression de la ligne Caen-Le Mans. Ces décisions sont très mal accueillies tant par les usagers que par les présidents de Régions dont les témoignages de mécontentement sont consultables dans la presse.

Depuis 2004, l’Etat pilote une démarche tripartite Etat-Régions-SNCF (rencontres auxquelles RFF n’est pas convié) pour favoriser la sortie d’une situation de blocage. Chacun des acteurs a une position qui à l’heure d’aujourd’hui est tranchée, et sans s’essayer à tout commentaire, la situation de chacun peut être résumée de la façon suivante :

- Pour l’instant l’Etat se positionne en rassembleur, mais n’a pas émis de possibilité de participer au financement du déficit d’exploitation de ces lignes ;

- Les régions, qui se félicitent du succès du TER, ne souhaitent pas pour autant récupérer la compétence de la gestion de ces lignes dont elles estiment que la charge revient à l’Etat ;

- La SNCF considère de son point de vue que le maintien du niveau d’offre de ces lignes répondant à une mission de service public doit être analyser au regard de la

logique d’aménagement du territoire à laquelle elles contribuent.60

La multiplicité des décideurs et des enjeux est ainsi particulièrement mis en lumière sur cet exemple, puisque les trains grandes lignes sont de l’ordre de décisions de l’Etat, même si l’utilisation est avant tout régional et interrégional. Pour l’heure, le groupe tripartite a engagé trois missions principales (réalisation d’un audit des comptes TIR, définir une méthodologie commune de refonte de desserte, faire un inventaire précis du matériel roulant effectué) et un débat sur les modalités d’un mode de conventionnement pour l’exploitation de ces lignes.

3.2.5. 3 Quelles conséquences pour le TER ?

Même si aujourd’hui l’Etat et les Régions ne veulent s’engager dans un processus de financement de ces lignes, une tendance émerge vers une modèle de convention, ou d’une

façon ou d’une autre le TER est concerné61. La conclusion du Conseil supérieur du service

public ferroviaire est à cet égard sans appel : « Confier aux régions un rôle d’autorité

organisatrice des dessertes interrégionales à moyenne distance permettrait d’adapter l’offre et d’améliorer la qualité du service en prenant mieux en compte les besoins des usagers en

59

Conseil Supérieur du service public ferroviaire (CSSPF), « Les relations ferroviaires interrégionales de voyageurs », rapport adopté en séance plénière le 16 mars 2005.

60

L’article 44 du cahier des charges de la SNCF stipule : « La Société nationale des chemins de fer français contribue, par

son activité, au développement économique et social des régions, des départements des communes, et à l’aménagement équilibré du territoire »

61

En, décembre 2004, la région Nord Pas de Calais a intégré dans sa convention TER la desserte entre Lille et Hirson, la Région Alsace a fait de même entre Strasbourg et Metz.

maîtrisant les dépenses publiques correspondantes dans un cadre de responsabilité adéquat62 ».

Si tel est le cas, il convient de s’interroger sur les choix et nécessaires arbitrages financiers qui devront être réalisés par les Régions, car on imagine mal une dotation de l’Etat pour un service qu’il ne finance pas aujourd’hui. Quels seront les impacts sur l’équilibre contractuel stable acquis aujourd’hui par le TER ? Quelle priorité sera effective ? Quelles seront les conséquences sur les attributions de sillons ou les correspondances ?