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1. Aspects méthodologiques

L’objectif 2 de la thèse était de décrire la prise en charge initiale de l’HPP et d’analyser l’association entre les facteurs liés à la prise en charge initiale de l’hémorragie du post- partum et l’évolution de l’HPP vers une HPP sévère.

Pour répondre à cet objectif, nous avons analysé, dans une deuxième étude, les données disponibles de l’étude TIUHPPI recueillies entre le 1er mai 2013 et le 30 septembre 2014, l’essai étant encore en cours au moment de l’écriture de cette thèse.

La base de données était disponible. Cependant, il a fallu auparavant, la nettoyer et adapter son format pour qu’elle puisse être analysée avec un logiciel de statistiques.

Cette deuxième étude a donné lieu à la rédaction d’un deuxième article, intitulé : « Initial management of post-partum hemorrhage : A cohorte study in Benin and Mali» qui est accepté par l’International Journal of Obstetrics and Gynecology (Annexe 2).

Toutes les femmes dont les données ont été recueillies dans le cadre de l’essai TIUHPPI entre le 1er mai 2013 et le 30 septembre 2014 étaient incluses dans cette étude, à l’exception de celles chez qui une étiologie antépartum était identifiée (placenta accreta, placenta praevia, rupture utérine ou HRP) car, dans ces cas, une prise en charge particulière était requise.

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La variable à expliquer était l’HPP sévère définie comme une HPP avec un traitement chirurgical (ligature vasculaire et / ou une hystérectomie) et / ou une transfusion sanguine et/ou le transfert dans une unité de soins intensifs et/ou le décès.

Les composants de la prise en charge initiale de l'HPP étaient considérées comme des variables d’exposition et incluaient: le volume estimé des pertes sanguines au moment du diagnostic: <1000 ml / > = 1000 ml; le délai d'injection de l'ocytocine à partir du diagnostic d’HPP: <10min / 10-20min / > = 20min ou pas d’injection d’ocytocine; le massage utérin : oui/non ; l’examen manuel de la cavité utérine : oui/non ; l'examen du col de l'utérus : oui/non ; et, enfin, la perfusion de cristalloïdes : oui/non.

Les facteurs liés aux caractéristiques des femmes, des soins prénatals, du travail et de l'accouchement, et le niveau de soins des centres ont été considérés comme des variables d’ajustement.

Les facteurs de risque individuels maternels d’HPP sévère ont été sélectionnés à partir de la littérature (Kramer et al. 2013; Driessen et al. 2011; Al-Zirqi et al. 2008; Mousa, Cording, et Alfirevic 2008; von Schmidt auf Altenstadt et al. 2013; Belghiti et al. 2011; Briley et al. 2014) et incluaient : le pays de résidence : Mali/Bénin, l'âge maternel: <25 années/25-30 ans/> = 30 ans ; la parité : primipares/multipares sans antécédent de césarienne /multipares avec un antécédent de césarienne; un antécédent d’HPP : oui/non, le type de grossesse : simple/multiple, la présence d’une anémie pendant la grossesse (hémoglobine <11g / dL) : oui/non; la survenue d’une pré éclampsie pendant a grossesse : oui/non; l’induction du

travail : oui/non; le mode d’accouchement: accouchement par voie basse

spontanée/accouchement par voie basse instrumentale; le travail prolongé définie comme une phase active supérieur à 12h : oui/non; l’administration d’ocytocine pendant le travail :

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oui/non; l’injection préventive d’ocytocine lors de la troisième phase du travail : oui/non; le poids de naissance: <2500g/2500-3000g/3000-3500g/> = 3500g; l'existence d’une épisiotomie et / ou une déchirure périnéale : oui/non. Le niveau de soins des hôpitaux où les femmes accouchaient était classé comme suit: premier niveau (établissements de soins primaires) / second niveau (hôpital de district ou universitaire).

Les données ont été analysées en plusieurs étapes. Dans un premier temps, les caractéristiques des femmes, de la grossesse, du travail et de l’accouchement ; le niveau de soins des établissements ; et les composants de la prise en charge initiale de l’HPP ont été décrits à l'aide des statistiques descriptives. La distribution des variables a été comparée entre les femmes ayant une HPP sévère et celles ayant une HPP sans critère de sévérité en utilisant le test exact de Fisher ou un test du Chi2.

Ensuite, une analyse bivariée et une analyse multivariée par régression logistique ont été effectuées pour estimer les associations brutes et ajustées et leurs intervalles de confiance à 95% (IC à 95%).

Le mode d’accouchement n'a pas été inclus dans la régression logistique parce qu’une seule femme avaient accouché par voie basse instrumentale, toutes les autres avaient accouché par voie basse spontanée. Les effectifs étaient trop déséquilibrés entre les deux modalités de la variable.

Dans une première étape, nous avons créé un modèle de régression logistique en considérant tous les facteurs liés aux caractéristiques des femmes, de la grossesse, du travail et de l'accouchement, et le niveau de soin. Une procédure automatique de sélection « pas à pas descendante » a permis, à partir du modèle complet, d’éliminer les variables ayant une

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p-value >0,20 à chaque fois qu’une variable était retirée du modèle. A la fin de cette procédure, les variables restantes dans le modèle ayant une p-value <5% ont été sélectionnées pour les analyses suivantes.

Dans une deuxième étape, l'association entre chaque composant de la prise en charge initiale de l’HPP et l’HPP sévère a été testée après un ajustement sur les variables qui ont été sélectionnées à l'étape précédente.

Les facteurs avec une valeur de la p-value <0,05 étaient considérés comme significativement liés à l’HPP sévère.

Les interactions pertinentes entre deux variables ont été testées avec le test de Wald. Les cas avec une ou plusieurs valeurs manquantes pour les variables analysées n’ont pas été inclus dans les modèles de régressions logistiques (n = 14 femmes, 6,2% de l'échantillon). Les données ont été analysées avec Stata v.12 Software (Stata Corporation, College Station, TX).

2. Résultats

Parmi les 22 666 femmes qui ont accouché par voie basse pendant la période d'étude, 223 (0,9%) répondaient aux critères d'inclusion. Parmi celles-ci, 88 (39,5%) ont eu une HPP sévère (Figure 9) : 68 femmes ont eu une transfusion, 44 femmes ont été admises en unité de soins intensifs, 12 femmes ont eu une ligature vasculaire et/ou une hystérectomie et 8 femmes sont décédées.

Dans notre échantillon, 133 femmes (59,6%) ont eu une HPP causée par une atonie utérine +/- rétention placentaire, 40 femmes (17,9%) ont eu une HPP causée par une atonie utérine

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et des lacérations génitales et 50 femmes (22,4%) ont eu une HPP causée uniquement par des lacérations génitales non diagnostiquée avant la prise en charge initiale de l’HPP.

Figure 9: Flux des femmes

Le tableau 5 présente la répartition des caractéristiques des femmes, de la grossesse et de l’accouchement, ainsi que le niveau de soin des centres.

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L'âge moyen des mères était de 27 ans (écart type = 6,5 ans). La plupart des femmes ont eu une administration prophylactique d'ocytocine (93,3%) au cours de la troisième phase du travail.

Le fait de vivre au Bénin, l'âge maternel avancé, la multiparité avec antécédent de césarienne, l'anémie pendant la grossesse, l'induction du travail, l'injection d’ocytocine pendant le travail, le poids de naissance inférieur à 2500g, et le fait d’accoucher dans un hôpital de deuxième niveau de soins, étaient associés à un risque accru d'HPP sévère en analyse univariée (tableau 5).

L’épisiotomie et/ou une déchirure périnéale, l'antécédent d'HPP, la pré-éclampsie, le travail prolongé et l'injection prophylactique d’ocytocine ont été retirés du modèle de régression logistique, lors de la procédure de sélection pas à pas descendante.

L'âge maternel, la parité, l'induction du travail et le type d'établissement de soins de santé étaient significativement associée à l'HPP sévère en analyse multivariée.

Tableau 5 : Distribution des caractéristiques des femmes, de la grossesse et de l’accouchement, et le niveau de soins des établissements, et risque d’HPP sévère. Analyse univariée.

HPP HPP sévère

N % N % ORbruts IC95%

Caractéristiques des femmes

Pays de résidence

Benin 115 51,6 65 57,5 5,0 2,76-9,05

Mali 108 48,4 23 21,3 1 _

94 (Tableau 5 : suite) Age maternel <25 ans 84 37,7 23 27,4 1 _ <= 25 ans et <30 ans 62 27,8 30 48,4 2,5 1,24-4,96 >=30 ans 77 34,5 35 46,7 2,3 1,20-4,49 Parité Primipare 67 30,2 29 43,3 1,4 0,78-2,57

Multipare sans antécédent de césarienne 142 64,0 49 35,0 1 _ Multipare avec antécédent de césarienne 13 5,9 10 76,9 6,2 1,63-23,55

Antécédent d’HPP 12 5,4 4 33,3 0,7 0,21-2,54 Caractéristiques de la grossesse Grossesse multiple 15 6,7 9 60,0 2,4 0,83-7,03 Anémie 56 25,2 35 63,6 3,8 2,01-7,21 Pré-éclampsie 12 5,4 7 58,3 2,21 0,68-7,21 Caractéristique du travail et de l’accouchement

Déclenchement artificiel du travail 20 9,0 16 80,0 7,1 2,3-22,25 Accouchement par voie basse

spontanée

222 99,6 87 39,6 _ _

Travail prolongé 14 6,5 7 50,0 1,6 0,53-4,67

Ocytocine pendant le travail 66 29,6 40 61,5 3,6 1,96-6,58

Ocytocine prophylactique 208 93,3 82 39,6 0,9 0,29-2,61

95 (Tableau 5 : suite) Poids de naissance <2500g 39 17,7 21 53,9 2,5 1,15-5,41 <=2500g et <3000g 61 27,6 23 37,7 1,3 0,65-2,57 <=3000g et <3500g 89 40,3 28 31,8 1 _ >=3500g 32 14,5 14 45,2 1,8 0,76-4,07

Episiotomie et/ou déchirure périnéale 64 28,7 26 40,63 1,05 0,58-1,90 2ème niveau de soins (vs 1er) 175 78,48 78 44,83 3,0 1,41-6,42

Données manquantes : parité (n=1); anémie (n=1); travail prolongé (n=6); poids de naissance (n=2);

Les composants de la prise en charge initiale de l'HPP et leur association brute avec l’HPP sévère sont décrits dans le tableau 6.

Le volume moyen des pertes de sang au moment du diagnostic était de 660 mL (écart type = 362 ml).

Plus de 99% (n=221) des femmes ont eu un examen manuel de la cavité de l'utérus, plus de 97% (n=217) des femmes ont eu une perfusion de cristalloïdes, et plus de 96% (n=216) des femmes ont eu un massage utérin. Quatre femmes (1,8%) n’ont eu aucune injection d'ocytocine, tandis que plus des deux tiers (69,6%) (n=153) ont eu une injection dans les 10 minutes après le diagnostic d’HPP. L'examen du col de l'utérus a été réalisé dans les deux tiers (67,3%) (n=150) des cas.

En analyse univariée, l’examen du col était significativement associé à un risque accru d'HPP sévère (tableau 6). Au contraire, l'injection d'ocytocine dans les 10 minutes après le diagnostic d’HPP était associée à une diminution du risque d’HPP sévère.

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Le volume estimé des pertes sanguines au moment du diagnostic d’HPP, la révision utérine, la perfusion de cristalloïdes et le massage utérin n’étaient pas associés significativement à la survenue d’une HPP sévère.

Tableau 6 : Distribution des composants de la prise en charge initiale de l’HPP et risque de survenue d’une HPP sévère. Analyse univariée.

HPP HPP sévère

N % N % ORbrut IC95%

Volume des pertes sanguines au diagnostic d’HPP <1000mL (vs >=1000mL)

189 85,5 72 38,5 0,6 0,29-1,33

Injection d’ocytocine

<10min 153 69,6 48 31,6 0,2 0,09-0,44

<=10 et <20min 28 12,7 13 48,2 0,4 0,14-1,14

>=20 ou aucune injection d’ocytocine 39 17,7 27 69,2 1 _

Examen du col 150 67,3 70 46,7 2,6 1,38-4,81

Massage utérin 216 96,86 84 39,25 0,5 0,11-2,22

Révision utérine 221 99,1 87 39,7 0,7 0,04-10,68

Perfusion de cristalloides 217 97,8 86 39,5 0,4 0,07-2,66

Données manquantes : injection d’ocytocine (n=3); volumedes pertes sanguine au diagnostic d’HPP (n=2); perfusion de cristalloides (n=1).

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Après ajustement sur les caractéristiques des femmes, de la grossesse et de l’accouchement et le niveau de soins des établissements (tableau 7), l'injection d'ocytocine dans les 10 minutes après le diagnostic d’HPP est restée significativement associée à une diminution du risque d’HPP sévère (OR ajusté = 0,4; IC95% = [0,14-0,77]). Au contraire, l'examen du col utérin (OR ajusté = 2,7; IC95% = [1,28-5,82]) était associé à un risque accru d'HPP sévère.

Tableau 7: Analyse multivariée

*ORajustés IC95%

Volume des pertes sanguines au diagnostic d’HPP <1000mL (vs >=1000mL)

0,5 0,20-1,09

Injection d’ocytocine

<10min 0,4 0,14-0,77

<=10 et <20min 0,7 0,21-2,06

>=20 ou aucune injection d’ocytocine 1 _

Examen du col 2,7 1,28-5,82

Révision utérine 2,9 0,05-184,09

Massage utérin 0,4 0,05-2,99

Perfusion de cristalloides 0,2 0,01-2,57

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3. Discussion

À notre connaissance, cette étude est la première à analyser l’association entre les composants de la prise en charge initiale de l’HPP et la survenue d’une HPP sévère dans des pays à faibles ressources. Ces résultats suggèrent que les gestes de la prise en charge initiale de l’HPP sont prodigués chez la plupart des femmes. Cependant, une injection rapide d'ocytocine dans les 10 minutes après le diagnostic d’HPP n’a été effectuée que dans moins de 70% des cas, alors que ce geste est associé à une diminution significative du risque d’HPP sévère au Bénin et au Mali.

Nos résultats sont similaires à ceux de l’étude de Driessen et al menée en France, qui a montré une diminution du risque d'HPP sévère chez les femmes qui avaient reçu une injection d'ocytocine dans les 10 minutes qui avaient suivi le diagnostic d’HPP par rapport à celles qui avaient été traitées plus tard (Driessen et al. 2011).

Dans notre étude, près d'un tiers des femmes ont reçu une injection d'ocytocine plus de dix minutes après le diagnostic de l'HPP ou n’ont pas reçu d’ocytocine. Plusieurs raisons peuvent expliquer ce résultat. Tout d'abord, les professionnels de santé peuvent ne pas être suffisamment sensibilisés à l'importance de l'administration d'ocytocine rapidement après le diagnostic d’HPP. Deuxièmement, l'ocytocine peut ne pas être disponible immédiatement dans la maternité. En effet, ce médicament doit souvent être acheté à la pharmacie par les accompagnants de la femme (Cham, Sundby, and Vangen 2009), ce qui retarde son administration.

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Nos résultats apportent une évidence supplémentaire pour adapter les lignes directrices de la prise en charge de l’HPP dans le contexte des pays à faibles revenus. Il est important que l'ocytocine soit constamment disponible dans les établissements de santé et que le stock de médicaments soit régulièrement contrôlé. L’ocytocine doit, par ailleurs, être injectée le plus rapidement possible dans les 10 minutes qui suivent le diagnostic d’HPP. Il est urgent de sensibiliser les professionnels de santé à l'importance de l'administration d'ocytocine rapidement après le diagnostic d’HPP. Dans les centres où le personnel qualifié pour une injection est peu disponible, le recours à des dispositifs facilitant l’injection, tels les dispositifs Uniject (Stanton et al. 2013; Althabe et al. 2011; Tsu et al. 2003) (figure 10), pourrait être une solution pour réduire les retards de l’administration de l’ocytocine. Cependant, d'autres recherches sont nécessaires pour évaluer l'efficacité des dispositifs Uniject pour le traitement de l'HPP, car actuellement l’efficacité de ce dispositif est testée uniquement dans le cadre de la prévention de l’HPP.

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La révision du col de l'utérus était associée à un risque accru d'HPP sévère. Un tiers des femmes n’ont pas bénéficié de cet examen. Cette association peut refléter un biais d'indication. En effet, l'examen du col de l'utérus est probablement réalisé plus souvent chez les femmes qui ont les pertes sanguines les plus importantes et probablement trop tard pour diminuer le risque de survenue d’une HPP sévère.

Accoucher dans les établissements de santé de deuxième niveau de soins était associé à un risque accru d'HPP sévère. Nos données ont confirmé que les femmes accouchant dans les structures de deuxième niveau de soins les plus à risques d’HPP sévère.

Dans notre étude, la révision de la cavité utérine et le massage utérin n'ont eu aucun effet significatif sur l'HPP sévère. Nous n’avions probablement pas la puissance nécessaire pour montrer un effet significatif. En outre, concernant la révision de la cavité utérine, les effectifs étaient très déséquilibrés entre les deux modalités de la variable.

Concernant le massage utérin, une revue de la Cochrane a conclu à son efficacité dans la prévention de l'HPP (Hofmeyr, Abdel-Aleem, and Abdel-Aleem 2013), mais à notre connaissance, aucune étude n’a évalué son effet dans le traitement de l'HPP. D'autres recherches sont nécessaires sur ce sujet, car le massage utérin est un geste facilement réalisable.

Enfin, dans notre échantillon n’incluant que des accouchements par voie basse et excluant les étiologies antépartum de l’HPP, l’incidence de l'HPP semble très faible (0,9%), et l’incidence de l'HPP grave, parmi les femmes présentant une HPP, est élevée (39%) au regard des résultats d’autres études (Calvert et al. 2012; Driessen et al. 2011; Cortet et al. 2015)).

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L’estimation du volume des pertes de sanguines était subjective dans notre étude, et cette méthode peut conduire à une estimation inférieure de l'HPP (Calvert et al. 2012). En outre, dans notre étude, le traitement de première ligne ne semble pas optimal en raison de délais importants. Cette situation pourrait expliquer l’incidence élevée d'HPP graves. D’autre part, compte-tenu de la faible incidence de l’HPP, les cas d'HPP diagnostiqués dans notre étude pourraient être les plus graves et donc les moins sensibles à la prise en charge initiale.

Cette étude présente plusieurs points forts. Nous avons utilisé les données recueillies à partir de sept hôpitaux de différents niveaux de soins au Bénin et au Mali. Nous avons utilisé une définition opérationnelle de l’HPP sévère permettant une meilleure identification des cas. Peu de données étaient manquantes. Enfin, les caractéristiques maternelles significativement associées à l'HPP sévère dans notre étude étaient identiques à celles retrouvées dans d'autres études: l'âge maternel avancé, la multiparité avec un antécédent de césarienne et le déclenchement artificiel du travail et le niveau de soins (Driessen et al. 2011; Al-Zirqi et al. 2008; Mousa et al. 2014; Kramer et al. 2013; Khireddine et al. 2013). Cependant, notre étude comporte certaines limites. Tout d'abord, la définition de l’HPP sévère utilisée dans cette étude dépend de la performance des professionnels de santé et des ressources disponibles dans les centres participants. Une définition basée sur le changement du taux péripartum d'hémoglobine, qui est plus objective (Driessen et al. 2011), ou sur l’estimation du volume des pertes sanguines, est probablement peu adaptée au contexte des pays à ressources limitées. En effet, la plupart des femmes n’a pas eu de numération de formule sanguine avant l’accouchement (80%) et un quart des femmes n’en n’a pas eu après le diagnostic d’HPP. Par ailleurs, le volume des pertes sanguines a été

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mesuré avec une méthode visuelle qui a tendance a sous-estimé les grands volumes sanguins, comme nous l’avons déjà vu.

Deuxièmement, nous ne pouvons pas exclure la possibilité d’erreurs dans le recueil des délais d’administration d’ocytocine, en raison de biais de mémoire. Nous pensons qu'il existe un biais non différentiel qui a atténué l'effet observé. Il est assez improbable que les cliniciens aient classé les femmes avec une HPP sévère dans les plus longs délais d’administration de l’ocytocin, car leur responsabilité peut être engagée dans ce cas.

Enfin, les délais de la réalisation de la révision utérine et de l'examen du col de l'utérus n’ont pas été recueillis. Nous n’avons donc pas évalué leur effet sur l’HPP sévère.

Nous n’avons également pas pu évaluer la dose d'ocytocine injectée.

E.

Troisième étude

1. Aspects méthodologiques

L’objectif 3 de la thèse était d’évaluer la faisabilité de la mise en place de l’essai contrôlé randomisé TIUHPPI. Pour répondre à cet objectif, une étude pilote a été mise en place. Cette étude pilote était une étude préparatoire sur un échantillon de petite taille pour tester différents composants du protocole de recherche. Plus particulièrement, ses objectifs étaient d’évaluer le recrutement des femmes, l’impact de la mise en place du protocole de recherche sur l’organisation des soins, l’acceptabilité du dispositif sonde urinaire + préservatif par le personnel soignant, et enfin la tolérance des femmes vis-à-vis du tamponnement utérin par ce dispositif. Il s’agissait également d’apporter des informations

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complémentaires pour calculer le nombre de sujets nécessaires ; d’estimer la durée de l’essai principal ; et de tester le processus de randomisation et le recueil des données.

Les données recueillies lors de cette étude pilote devaient permettre d’adapter le protocole de recherche avant la mise en place de l’essai principal et d'obtenir de l'expérience.

Cette troisième étude a permis de rédiger un troisième article, intitulé: « A Randomized Controlled Trial to test the effectiveness of intrauterine balloon tamponade with condom catheter in severe postpartum hemorrhage management: A feasibility study in Benin.” et publié dans Journal of Women Health Care (Annexe 3).

J’ai été impliquée dans cette étude pilote, au début de mon doctorat, peu après sa mise en place. J’ai effectué une mission sur le terrain durant laquelle j’étais chargée de proposer des solutions aux problèmes liés à la mise en place de l’étude, puis l’analyse des données recueillies m’a permis d’évaluer la faisabilité de cette étude.

Cette étude pilote multicentrique a été menée dans trois structures de santé dans la zone urbaine de Cotonou (Bénin). Les trois maternités appartenaient au même réseau de santé et représentaient les différents niveaux de soins au Bénin. Nous avons inclus un hôpital universitaire délivrant des soins obstétricaux complets, possédant un service de soins intensifs et réalisant 4500 accouchements par an ; un hôpital de district délivrant également des soins complets et réalisant 3200 accouchements par an ; et enfin un centre de soins primaires délivrant des soins de base et réalisant 2000 accouchements par an.

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Toutes les femmes ayant accouché dans une des trois structures sélectionnées entre le 18 octobre 2012 et le 28 février 2013, ayant présenté une hémorragie du post-partum immédiate réfractaire aux traitements de première ligne, à la suite d’un accouchement par voie basse, et ayant donné leur consentement, étaient incluses dans l’étude et randomisées.