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DESTINATION DE L'EX FIRME INDUSTRIELLE

LES PHÉNOMÈNES PRIVILÉGIÉS

DESTINATION DE L'EX FIRME INDUSTRIELLE

Flux Sociétés Entreprise personnelle Total

Disparition véritable Apport autre société Fin de location-gérance Divers Non précisé Total 139 (68%) 32 (16%) 3 (1,4%) 3 (1,4%) 20 (5,3%) 204 (100%) 61 (42%) 10 (7%) 1 (0,7%) 0 (0%) 22 (15,1%) 145 (100%) 200 (57%) 43 (12%) 4 (1%) 3 (1%) 42 (12%) 349 (100%)

D'après la CNME BIE, n° 80, 1978, p. 45 et p. 47.

Au départ, les firmes qui sont créées ex-nihilo représentent 65 % du total ; ensuite 57 % disparaissent réellement, ce qui donne un taux de rotation de 1,013 et un taux de renouvellement net de 8 %.312 Ces résultats sont très faibles, ils peuvent s'expliquer par le fait que la majorité (242 cas) des firmes sont dirigées par un propriétaire exploitant, le reste étant en location-gérance ou de manière non indiquée (107 cas).

En outre, plus de la moitié des firmes en question se trouve au- dessous des 20 000 francs de capital social nécessaires pour constituer une SARL : ce sont donc des petites entreprises qui disparaissent volontairement, pour la plupart. Encore faut-il comprendre pourquoi elles cessent d'exister.

Le sort du patrimoine peut nous aider : les disparitions effectives sont beaucoup plus le fait des sociétés (68% du total sociétaire) que des entreprises en nom personnel (42% du total individuel). Et il semble plus facile de céder l'entreprise en vente ou reprise (35% du total individuel) que d'obtenir l'accord de tous les associés pour ce faire (3,4% du total sociétaire).

Par contre, l'apport à une nouvelle société reste plus courant dans le cas d'une ancienne société démantelée (16% du total sociétaire) que dans celui d'une firme individuelle vendue en parts (7% du total individuel). Le départ doit donc être fait entre les mouvements effectifs d'entrée et de sortie (environ les 2/3) et le reliquat des fausses opérations (le 1/3 restants). Comme il s'agit de firmes où la situation du propriétaire-dirigeant a une grande importance, c'est à son niveau que se décide le sort de l'unité industrielle.

312 Sur la définition de ces taux, voir infra point 1.2 C. 1°. Ici les taux sont obtenus grâce aux opérations suivantes : 226/200 = 1,013 ; 0,65 – 0,57 = 0,08.

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2°) Les âges respectifs des firmes et de leurs dirigeants

La comparaison entre l'âge des dirigeants et celle des firmes n'est pas une concession faite au déterminisme biologique, mais bien une méthode se situant dans le droit-fil des études sur l'entreprise et le temps.313 Le tableau numéro 21 met en parallèle deux tranches d'âge, pour les deux grandes formes juridiques existantes.

Tableau 21. Ages des firmes et des dirigeants lors de la cessation d'activité

Age Firmes industrielles Age Dirigeants de ces firmes

Société ENP Total Société ENP Total - de 1 an 2 à 5 ans 6 à 10 ans 11 à 20 ans 21 à 50 ans + de 50 ans Non précisé 7 33 44 59 55 5 1 4 27 22 32 53 6 1 11 60 66 91 108 11 2 - de 50 ans 51 à 60 ans 61 à 65 ans + de 65 ans Décès Non précisé 68 42 14 73 0 7 44 18 18 52 7 6 112 60 32 125 7 13 Total 204 145 349 Total 204 145 349

D'après la CNME (1978) article cité, p. 46 et 47. ENP : entreprises en nom personnel.

En moyenne, les sociétés disparaissent à l'âge de 22 ans, les entreprises en nom personnel après 18 ans d'activité. Ce qui donne un âge moyen global de 20 ans pour cet échantillon, à comparer à l'âge moyen d'introduction en Bourse : près de 18 ans (voir tableau 40 infra).

Le dirigeant de société a 61 ans en moyenne, à la cessation. Le Patron d'une firme en nom personnel en a 63. L'âge moyen du dirigeant est donc de 62 ans au moment de la cessation volontaire d'activité. Ces informations nous permettent de calculer l'âge moyen du dirigeant à la création : 62 – 20 = 42 ans. Soit 39 ans pour les dirigeants de société, et 45 pour les autres.

Or, les aides récemment mises en place par l'Etat (voir in chapitre III), s'adressent aux moins de 35 ans : on se situerait donc ici en dehors des créations visées par le gouvernement de Raymond BARRE. Il s'agirait aussi plus de promouvoir une insertion rapide des jeunes, que de faciliter le reclassement d'individus plus âgés.

D'autre part, il semble que l'âge actuel de la retraite (60 ans) soit suivi par les petits patrons indépendants, alors que les dirigeants sociétaires ont tendance à prolonger leur vie active. Ces causes sociales ne sont pas à négliger, même si les contraintes financières commandent la fermeture, par exemple la perte des trois quarts du capital social.314

313 J. ALLA (1974) "Age et évolution de l'entreprise", Revue économique, n° 8, p. 1001.

314 F. ROLLAND (1978) "Perte des 3/4 du capital social et concordat", Gazette du Palais, 1er semestre, p. 126-127.

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3°) Les causes principales des cessations volontaires

Trois causes se détachent nettement de cet échantillon représentatif du tissu industriel français : l'âge du dirigeant (surtout sans successeur), le manque de rentabilité, et les déterminants accidentels. Ces derniers sont les mêmes que pour une firme à la défaillance juridiquement constatée. Par exemple quand se produit le décès d'un dirigeant (il y en a 7 dans le tableau précédent) qui n'avait pas délégué ses prérogatives, lors de conflits naissants entre les associés en litige (ce sera la moitié des causes de cessations), ou après un sinistre inopiné (incendie, inondation, tremblement de terre).

Le manque de rentabilité peut provenir de difficultés sectorielles (le produit se vend mal) dues à une intrusion de concurrents plus compétitifs sur le marché, ou à l'obsolescence organisationnelle (pas de produit de remplacement, pas de brevets d'invention nouveaux). Il ne faut pas oublier le problème des coûts élevés par rapport à la norme sectorielle, les résistances d'un personnel démoralisé, ou encore le non-investissement durable.

Pour faire face à ces insuffisances ou ces accidents, la firme devrait s'endetter exagérément au goût des dirigeants. La solution du retrait volontaire s'avère alors préférable à une issue judiciaire. Cette cause concerne environ 50 % de sociétés et touche plus particulièrement les secteurs du BTP et de la Presse-Edition.315

L'âge du vieux dirigeant (plus de 65 ans) implique 35,8 % des entreprises, dont 20 % environ vont disparaître, faute de successeur.316 A cet égard, il serait intéressant que les pouvoirs publics dirigent une partie des créateurs potentiels vers ces firmes à reprendre, qui correspondent bien à la dimension restreinte des firmes nouvelles.

Nous pouvons alors, d'un point de vue plus général, essayer d'évaluer la part des cessations volontaires dans l'ensemble des disparitions d'entre- prises que nous connaissons (graphique n° 5).

Graphique 5. La part des cessations dans les disparitions effectives.

315 CNME (1978) article cité, p. 48. 316 Ibidem.

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Tableau 22. Données pour les disparitions du 1er trimestre 1978

Procédure ou flux Sociétés Entreprises en

nom personnel

Total

Nombre % Nombre % Nombre % Règlements judiciaires

Liquidations des biens Cessations d'activité 388 636 204 31,6 51,8 16,6 318 424 300 30,5 40,7 28,8 706 1060 504 31,1 46,7 22,2 Total. . . 1228 100 1042 100 2270 100 Source : CNME (1978) p. 42.

On peut donc considérer que les règlements judiciaires et les liquidations des biens représentent les trois-quarts des disparitions totales. Ce pourcentage est du même ordre de grandeur que celui de la précision des prévisions de défaillances : avant et après le processus de sortie, on ne saisit toujours que 75 à 80 % du phénomène.

C. Troisième degré : les procédures collectives

Quand la direction de l'entreprise s'entête, la situation risque fort de devenir défavorable pour tout le monde : créanciers, salariés et débiteur. Depuis très longtemps, le droit français de la faillite s'est doté de procédures tendant à rétablir la poursuite des opérations commerciales et industrielles. On pense aux réformes majeures de 1838, 1889, 1935, 1955 et 1967.

Avec la réforme de 1967, trois procédures différentes coexistent : la suspension provisoire des poursuites pour permettre le redressement économique et financier de certaines entreprises d'intérêt local ou régional, le règlement judiciaire pour les firmes jugées redressables, et la liquidation des biens pour les situations irrémédiablement compromises.317 Le terme ancien de "faillite" n'est plus utilisé que pour la faillite personnelle d'un non- commerçant. Le critère classique d'ouverture des deux dernières procédures est la cessation des paiements. C'est la situation juridique d'un débiteur qui ne peut honorer ses dettes avec ses liquidités disponibles en caisse.318 Elle est déclenchée à l'initiative du débiteur lui-même ou du juge du tribunal de commerce.

1°) La suspension provisoire des poursuites

L'article premier de l'ordonnance n° 67820 du 23 septembre 1967 indique l'objet de cette procédure spéciale : "Il est institué une procédure de suspension provisoire des poursuites et d'apurement collectif du passif pour

317 A.-M. BAUDRON (1972) La suspension provisoire des poursuites et l'apurement collectif du

passif selon l'ordonnance du 23 septembre 1967, Paris, LGDJ, 280 p.

318 J.-L. BOISNEAULT (1980) De la cessation des paiements à la situation difficile comme critère

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les entreprises en situation financière difficile, mais non irrémédiablement compromise, dont la disparition serait de nature à causer un trouble grave à l'économie nationale ou régionale et pourrait être évitée dans des conditions compatibles avec l'intérêt des créanciers. ‒ Cette procédure est applicable aux commerçants ainsi qu'aux personnes morales de droit privé, même non commerçantes."319

Selon Antoine CHEVRIER, il y a incompatibilité entre la notion de situation difficile et celle de cessation des paiements. Si une entreprise relève de la seconde option, elle sera mise en règlement judiciaire ou en liquidation des biens, puisqu'alors la situation sera irrémédiablement compromise.

Le terme "irrémédiablement" est ambigu, d'une part car il ne caractérise pas précisément l'état financier de l'entreprise en difficuluté, et d'autre part il donne l'occasion d'une certaine interprétation du texte officiel. En prenant l'exemple d'une firme n'ayant pas l'envergure requise, qui n'est pas en cessation des paiements, Antoine CHEVRIER a montré l'ambiguïté des termes employés.320

Cet auteur, qui est lui-même syndic de faillite, propose de substituer le mot "gravement" à "irrémédiablement", pour que la distinction soit moins nette entre le plan de redressement, procédure spéciale relevant d'un choix politico-économique, et les deux autres procédures, tout en permettant un traitement plus souple des entreprises concernées par la procédure spéciale. Autrement dit : appliquer la procédure spéciale à toutes les firmes viables en difficulté.

Certains auteurs se sont par ailleurs interrogés sur le rôle du curateur: "Le curateur est un personnage mythique, qui jouit de la traditionnelle aura de sympathie des redresseurs de torts et des chevaliers des causes perdues (...) [mais] tout ce qu'un homme seul peut faire en trois mois d'un entreprise moribonde, c'est le plus souvent d'en organiser la reprise par une autre entreprise ; là n'était pas l'objectif principal de l'ordonnance de 1967? il y a pour cela des moyens moins indirects et plus adaptés (...). L'homme miracle procède du même mythe que le patron de droit divin ; si l'entreprise souffre d'être une monarchie, ce n'est pas une régence qui l'en curera."321

319 Journal Officiel, reproduit in R. ITHURBIDE (1973) Histoire critique de la faillite, p. 372. Le

décret d'application paraîtra le 3 janvier 1968 au Journal Officiel.

320 A CHEVRIER (1976) "De la défaillance financière à une procédure collective rénovée", Revue

trimestrielle de droit commercial, vol. 29, p. 650.

321 Ch. LE RENARD (1978) "Faut-il réformer le curateur ?", Revue française de gestion, n° 15, mars-avril, p. 61.

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Figure 12. Procédure de suspension provisoire des poursuites.

L'idée intéressante est que le travail du curateur, durant les trois mois de sa mission, devient très souvent une préparation à l'opération d'absorption qui permettra de renflouer l'entreprise. Il s'agit donc bien, selon notre terminologie, de la transformation d'un mouvement apparent de sortie qui s'amorçait en un faux mouvement de conversion de la firme. La jurisprudence confirme cette tendance.322

Nous devons donc estimer la portée statistique de cette nouvelle procédure, apparue à la fin des trente glorieuses (1944-1973). En dix ans, de 1968 à 1977, la Suspension Provisoire des Poursuites a été demandée pour 461 entreprises, soit une moyenne de 46 firmes par an. Au total des requêtes présentées par les débiteurs ou leurs créanciers, s'ajoutent 3 saisines d'office (458 + 3 = 461). A la fin de l'année 1977, le bilan de la SPP s'établissait ainsi :

322 Voir le cas de l'Imprimerie Crété, tribunal de Paris, Revue de Jurisprudence Commerciale, 1973, p. 135-150 (note de J.-F. MARTIN), ou celui de la restructuration du Groupe Delcer, tribunal de commerce de Lille, Revue de Jurisprudence Commerciale, 1971, p. 158-161.

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165 affaires ont échoué, retombant sous les coup des procédures de droit commun (RJ et LDB), soit 65,7 % des 251 SPP prononcées et terminées (340 – 89 = 251) ; 58 plans ont été menés avec succès à leur terme, soit 23,1% du total précédent ; 89 plans étaient en cours à la date du 31 décembre 1997, soit 26,2 % du total des SPP prononcées (89/340 = 26,17 %).

Tableau 23. Dix ans de Suspension Provisoire des Poursuites (1968-1977)

Année Requêtes Présentées Suspensions des pours. Plans acceptés Tranf. en RJ Tranf. en LDB En cours 31/12/1977 Terminés 1968 21 14 8 7 1 - - 1969 18 14 7 8 1 - - 1970 45 39 28 14 1 - - 1971 20 12 12 4 1 - - 1972 13 9 5 8 1 - - 1973 14 5 3 7 0 - - 1974 62 48 26 24 4 - - 1975 75 48 32 16 5 - - 1976 81 63 32 15 6 - - 1977 109 88 47 25 17 - - Total 458 340 200 128 37 89 58

Source : J.-P. HAEHL (1979) "Vers l'élaboration d'un droit économique des entreprises en difficulté : bilan et perspectives de l'ordonnance du 23 septembre 1967", Revue de Jurisprudence

Commerciale, n° 1 et 2, p. 50. RJ : Règlements judiciaires ; LDB : Liquidation des biens. Nos

estimations pour les RJ et LDB en 1977 à partir de l'ensemble cumulé (42 procédures).

Pour donner une ordre de grandeur, eu égard aux jugements déclaratifs des procédures de droit commun, il suffit de calculer le pourcentage SPP/RJ + LDB. En dix ans, on a : 340/112 604 = 0,3%. Ce faible pourcentage nous autorise à négliger ce phénomène dans notre conception démographique, d'autant plus que le mouvement d'ensemble des SPP suit à peu près celui des deux autres procédures, avec une croissance très forte en 1974 et une progression régulière depuis. De fait, il n'y a que 0,05 % qui échappent à la démographie des firmes, soient 58 cas de SPP terminées.

Mais cette omission statistique ne doit pas masquer l'importance du caractère novateur de cette procédure spéciale. En effet, il s'agit d'une réponse à court terme (3 ans pour le plan de redressement) à des problèmes urgents et d'un choix local stratégique : dix tribunaux de commerce seulement sont habilités à prononcer la SPP.

Toutefois, des insuffisances subsistent. Premièrement, il n'existe pas, à l'heure actuelle, de critère précis de détermination de l'intérêt national ou régional dont parle l'article 1er de l'ordonnance.323 Les projets de réforme qui ont été déposés en 1979 à l'Assemblée Nationale (n° 974-975) prévoient un

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seuil de 500 salariés ou de 40 millions de francs d'actifs.324 Ce type de seuils doit être révisé tous les dix ans compte tenu de la croissance des grandes firmes industrielles sous la pression de la concurrence internationale.

Deuxièmement, les créanciers (il n'y a pas de masse dans la SPP) et les salariés ne sont pas assez associés à la préparation du plan de redressement, du moins officiellement, alors qu'ils consentiront les plus gros sacrifices financiers.325

Troisièmement, la tendance actuelle consite à œuvrer pour une absorption de la firme par une rivale, tendance qui se retrouve au niveau de l'intervention de l'Etat : "Parfois l'Etat met comme condition à ses interventions la cession du contrôle exercé dans la société à un groupe d'intérêts extérieur qui acquiert les actions ou les parts pour un prix symbolique."326 Malgré tout, la procédure spéciale permet d'anticiper la cessation des paiements et de proposer des solutions pour le redressement d'entreprises d'une certaine importance économique. Les autres firmes relèvent des procédures de droit commun.

2°) Les procédures d'apurement collectif du passif

Dès l'article 1er de la loi n° 67563 du 13 juillet 1967, la portée des deux procédures se fait jour : "Tout commerçant, toute personne morale de droit privé, même non commerçante, qui cesse ses paiements, doit, dans les quinze jours, en faire la déclaration en vue de l'ouverture d'une procédure de règlement judiciaire ou de liquidation des biens."327 Encore faut-il se demander ce que recouvre cette expression : "cessation des paiements", et ensuite, suivre le déroulement du règlement judiciaire, puis de la liquidation des biens.

a) La cessation des paiements

Au plan économique et financier, cette notion peut recouvrir plusieurs aspects, selon la méthode choisie. Pratiquement, les magistrats de la Cour de Cassation ont retenu trois critères : l'impossibilité de se procurer des crédits auprès des banques, le non-paiement d'une ou plusieurs lettres de change exigibles, et un passif exigible supérieur à l'actif disponible.328

En s'appuyant sur les arrêts de la Cour de Cassation, Antoine CHEVRIER propose d'abandonner cette notion et de clore le débat sur la distinction entre cessation des paiements et insolvabilité. Pourquoi proposer cet abandon ? Pour l'auteur, la notion est à l'usage trop restrictive, car attendre

324 A. BIENAYMÉ (1979) rapport cité, p. 38.

325 La plus grande partie des créances (70 à 80 %) est réglée lors de la dernière année du plan selon J.-P. HAEHL (1979) p. 49. De plus les salaires sont souvent bloqués pendant un certain temps. 326 Cl. CHAMPAUD (1979) "Pouvoirs publics et entreprises défaillantes. Réflexions d'un juriste sur des problèmes non résolus", Humanisme et Entreprise, n° 117, octobre, p. 16.

327 Journal Officiel, 14 juillet 1967, p. 7059.

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que le service de caisse soit arrêté demande souvent un long délai. Elle est indaptée aux réalités économiques et aboutit à des contradictions.329

La constatation de la cessation des paiements ne serait-elle pas une évaluation implicite de l'entreprise ? Elle existerait à partir du moment où les actifs ne sont plus suffisants pour rembourser les dettes. Mais à quel prix estimera-t-on ces actifs ? Tout le problème est là : prix de marché ou prix à la casse ? Cela suppose qu'il y ait une limite d'endettement au-delà de laquelle la capacité de remboursement devient insuffisante. Une telle appréciation exigerait l'application d'un critère strict d'évaluation de l'entreprise.330

La déclaration de cessation des paiements est aussi appelée dans le public "dépôt de bilan", mais ce document indique simplement l'état des dettes et la valeur des actifs, il ne peut pas être soumis à la même analyse financière que les bilans annuels dressés par les experts-comptables de la firme.331

b) Le règlement judiciaire

Si la déclaration précédente est faite à temps, dans les 15 jours, le tribunal de commerce peut décider la mise en règlement judiciaire. En ce cas, l'ensemble des créanciers voit ses droits de poursuite individuels suspendus. Le débiteur peut alors proposer un concordat aux créanciers (figure n° 13).

Figure 13. Le déroulement des procédures judiciaires collectives.

Difficultés de l'entreprise Etat de cessation de paiements Tribunal

Jugement du Tribunal de Commerce :

i) Sur l'entreprise :

Règlement judiciaire Offre de concordat Validation par Tribunal

Liquidation des biens Rapport du syndic Extinction du passif

ii) Sur les dirigeants :

Sanctions civiles Faillite personnelle ; Interdiction de gérer à l'avenir

Sanctions pénales Banqueroute simple ou frauduleuse

329 A. CHEVRIER (1976) article cité, p. 650.

330 J. BRAVARD (1969) L'évaluation de l'entreprise, Paris, Dunod, p. 65.

331 CNME (1976) "L'origine des difficultés des entreprises françaises tombées en règlement judiciaire", BIE, n° 73, p. 49.

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Le rôle principal du syndic du règlement judiciaire est d'amener l'entreprise, dans de bonnes conditions de continuité de ses activités économiques, à l'homologation du concordat par le Tribunal de Commerce. Ce document crucial pose de redoutables problèmes de vérification des créances.332 En cas d'homologation du concordat, le tribunal a la possibilité de nommer de 1 à 3 commissaires à l'exécution de ce concordat. L'impératif du contrôle semble dominer l'ensemble des procédures collectives, ce qui est une logique qui remonte à l'époque où les comptabilités étaient beaucoup moins bien tenues en cas de faillite.333 La sanction principale attachée à ce contrôle est la transformation du règlement judiciaire en la liquidation des biens de l'entreprise.

c) La liquidation des biens

Au plan théorique, la liquidation vaut disparition des biens, même si la cession à forfait permet la continuation des actifs de l'entreprise.334 Le syndic se charge de liquider l'actif. Dès que la procédure est terminée, les créanciers recouvrent leur droit de poursuite individuel. Pour Antoine CHEVRIER, la liquidation des biens, envisagée globalement, permet d'assurer une certaine régulation économique, d'éliminer des circuits commerciaux et du domaine industriel les entreprises inadaptées. En fait, nous verrons que l'analyse statistique infirme quelque peu cette assertion, qu'il n'y a de véritable régulation drastique que pour une seule catégorie de firmes : les plus petites.

Gérard FARJAT saisit bien cette dichotomie régulationniste : "Le fait que la faillite du commerçant individu entraîne nécessairement la liquidation des biens, sans qu'on s'interroge sur les possibilités de survie de l'exploitation, va dans le sens d'une politique concentrationniste. Les fautes des débiteurs individus permettent d'éliminer des exploitations qui pourraient survivre, mais dont le maintien n'est pas jugé opportun par des pouvoirs publics qui recherchent la concentration et la disparition des petites exploitations."335 Il ne faut pas oublier cet aspect lorsque l'on s'interrogera sur la validité de l'indicateur des faillites.

2.3. Les défaillances juridiques (1974-1980)

Conformément au plan suivi lors de l'étude statistique préliminaire des créations d'entreprises industrielles, nous retiendrons trois points : la forme juridique des firmes défaillantes ; la structure de la population d'entreprises selon le capital social ; et les régions ou les secteurs en cause.

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