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Description des deux types de sources

Dans les expériences que décrivent les chapitres suivants, nous avons utilisé des émet- teurs à section droite monomodes émettant à λ ≈ 950 nm ainsi que des émetteurs à sec- tion évasée émettant à λ ≈ 975 nm, par souci d’abréviation nous les noterons respective- ment RWG (pour ridge waveguide laser) et TPL (pour tapered laser). Ils satisfont tous deux les contraintes mentionnées précédemment. Nous décrivons ici leurs caractéristiques et leurs performances en tant qu’émetteurs individuels. Les structures verticales, basées sur des al- liages InGaAs et AlGaAs, sont conçues pour réduire la divergence dans la direction verti- cale [Helal 15, Crump 15, Winterfeldt 16] – cela permet une moindre sensibilité aux défauts d’alignement des optiques et une amélioration du couplage.

Structure latérale

Les RWG sont à section droite, c’est-à-dire que la dimension latérale du guide est constante tout au long du composant (long de 2 mm), sa largeur 2wxest de 4 ou 5 µm. Une photographie

vue de haut est présentée figureII.41(a).

Les TPL sont composés de deux zones distinctes, une zone à section droite longue de 2 mm et une zone à section évasée longue de 4 mm. L’angle d’évasement est de αT = 6°, le guidage

du mode optique est effectué par le gain dans cette section évasée. Comme explicité dans la section1.2.2(chapitre I p.19), la zone à section droite joue le rôle de filtre spatial : étant donné la faible largeur de son guide (2wx = 4, 5 µmou 5 µm) elle ne supporte que le mode transverse

Section 4 - Émetteurs à forte luminance dédiés à la combinaison cohérente 99

(a) Photographie (vue de haut) d’un émetteur monomode à section droite RWG (Modulight).

(b) Schéma d’un émetteur à section évasée TPL (FBH).

Figure II.41: Représentation des deux types de sources utilisées. Traitement des facettes

Les traitements sont adaptés à notre utilisation comme évoqué section4.1, avec un traitement anti-reflet (AR) sur la face arrière :

◦ RWG : Face arrière Rar < 1% , Face avant Rav = 3%.

◦ TPL : Face arrière Rar < 0, 1% , Face avant Rav = 0, 5%.

Le traitement des faces avant est identique à l’utilisation d’émetteurs similaires avec une face arrière à haute-réflectivité (HR). La valeur de la réflectivité est donc suffisante pour permettre le fonctionnement laser en cavité étendue.

Luminance et efficacité électrique-optique

Étant donné que la facette arrière des émetteurs est traitée AR, le fonctionnement laser de l’émetteur seul est impossible. On implémente alors une cavité étendue sur la face arrière pour permettre la caractérisation optique des émetteurs. Cette cavité est très simple, elle est composée uniquement de l’émetteur, d’une lentille asphérique de collimation et d’un miroir pour renvoyer l’onde optique dans le milieu à gain – la sortie de cavité se trouve sur la face avant de l’émetteur et c’est ici que les caractérisations sont effectuées. Une puissance optique de 250 mW est obtenue avec les RWG et plus de 3 W avec les TPL (figureII.42), en cavité étendue. La puissance atteint4 W lorsque le courant de la section droite est poussé à IR= 400 mA. Les

courbes de puissance en fonction du courant injecté sont illustrées figureII.42, en comparaison avec un émetteur classique où la face arrière est traitée HR – aucune cavité n’est alors nécessaire, les émetteurs lasent seuls. La puissance extraite dans ce cas est légèrement plus faible en cavité, ce qui reflète les pertes plus importantes.

La dimension latérale étroite des RWG implique que le guide ne supporte que le mode transverse fondamental, la qualité de faisceau émis par ces émetteurs est donc très bonne : le facteur M2 est proche de 1. La luminance est finalement de l’ordre de L≈ 20 MW.cm−2.sr−1. Pour les TPL, le faisceau émis n’est pas limité par diffraction malgré le filtrage spatial par la section droite, la section évasée dégrade légèrement la qualité de faisceau en générant des modes transverses supplémentaires. La luminance est alors de L≈ 150 MW.cm−2.sr−1 avec un facteur M2 ≤ 2, 5 dans la direction horizontale (le faisceau reste limité par diffraction dans la direction verticale). Il s’agit d’une valeur moyenne pour tout le faisceau ; toutefois seule une petite partie de la puissance totale est responsable de la dégradation du facteur M2. Il est donc possible de revoir la valeur moyenne de la luminance en considérant une puissance plus faible contenue dans un cône d’angle solide plus faible également, c’est-à-dire possédant un meilleur facteur M2. Dans le cas des TPL,80% de la puissance optique est contenue dans le lobe central limité par diffraction (M2 = 1), la luminance peut ainsi être revue à la hausse en considérant uniquement la puissance contenue dans le lobe central : L≈ 300 MW.cm−2.sr−1 (à IT = 6 A,

(a) Caractéristique P(I) d’un RWG en cavité étendue (trait plein) et avec traitement HR en face arrière (trait pointillé).

(b) Caractéristique P(I) d’un TPL en cavité étendue (trait plein) et avec traitement HR en face arrière (trait pointillé) – le courant de la section ridge est fixé àIR= 200 mA.

Figure II.42: Caractéristique en puissance des émetteurs avec l’efficacité de conversion électrique- optique notée PCE (Power Conversion Efficiency). Un profil de faisceau typique à courant d’injection moyen est inséré.

avec le courant (dégradant la qualité de faisceau), si bien qu’à faible courant (IT = 3 A), on

observe un facteur M2 nettement meilleur (≤ 1, 3) avec près de 90% de la puissance optique dans le lobe central.

Montage

La figure II.43illustre le montage final des émetteurs individuels RWG – le montage des TPL reste très similaire. La cathode des diodes est soudée à une petite embase en cuivre chez nos partenaires. Cette embase est alors positionnée sur un support en cuivre également, lui-même placé sur un module thermoélectrique à effet Peltier pour réguler finement la température. Dans le cas des TPL, un radiateur à eau est placé sous le module thermoélectrique pour évacuer la charge thermique ; dans le cas des RWG un simple radiateur à air suffit étant donné que la quantité de chaleur à évacuer est plus faible – près de 10 W thermiques sont à évacuer pour les TPL.

(a) Vue de face d’un émetteur RWG monté sans optiques de collimation.

(b) Vue de trois-quart d’un émetteur TPL monté avec ses optiques de collimation.

Figure II.43: Photographies du montage des émetteurs.

La collimation des faisceaux est effectuée à l’aide de lentilles asphériques très ouvertes (ON ≈ 0, 6) dont les distances focales sont de l’ordre de quelques millimètres (3 − 8 mm). En face avant d’un TPL, une lentille cylindrique supplémentaire est nécessaire afin de corriger l’astigmatisme intrinsèque du faisceau.

Section 4 - Émetteurs à forte luminance dédiés à la combinaison cohérente 101 Propriétés de phase

Nous l’avions déjà évoqué précédemment, le chemin optique vu par l’onde (et donc la phase accumulée) peut être modifié par une variation du courant d’injection. Ce phénomène est liée à un effet de courant (effet Joule) qui induit un changement local de la température, et de fait une variation de l’indice optique. Les propriétés de phase des émetteurs sont ainsi des données importantes pour leur combinaison cohérente. On distingue ici deux grandeurs qui nous intéressent : la variation de la phase en fonction du courant d’injection ϕ(I), et les fluctuations de phase à courant constant (ou bruit de phase). Le bruit de phase indique l’amplitude et la gamme spectrale des fluctuations de phase dans un émetteur.

Un montage expérimental1 a été dédié à la mesure de ces propriétés, il s’agit d’un interféro- mètre de Mach-Zehnder. Sur le premier bras est placé l’émetteur dont nous souhaitons mesurer les propriétés, le second sert quant à lui de référence de phase. Le schéma du montage est représenté figure II.44(a). Le faisceau laser d’une diode DFB est ainsi séparé en deux sur une première lame séparatrice afin d’injecter les deux bras de l’interféromètre. Les deux faisceaux se superposent alors sur la deuxième lame séparatrice où ils interfèrent. Si on impose un angle non-nul entre leurs directions de propagation sur les sorties de l’interféromètre, on observe un système de franges d’interférences. La position de ces franges est directement reliée à la relation de phase Δϕ entre les deux bras de l’interféromètre. Par conséquent, une variation de cette relation de phase – liée à une variation de phase dans l’émetteur – décalera la position des franges et nous allons mesurer ce décalage. Néanmoins Δϕ ne peut être mesuré directement avec un seul détecteur – l’intensité en un point est proportionnelle à cos Δϕ seulement. La relationΔϕ peut toutefois être entièrement connue si l’on a accès a son cosinus et son sinus de manière simultanée – en effet il ne reste plus qu’à calculer :

Δϕ = atan  sin Δϕ cos Δϕ . (II.39)

Pour ce faire, il suffit de mesurer l’intensité résultant des interférences en deux points de l’interférogramme, espacés de4i où i est l’interfrange – c’est-à-dire espacés deπ2 en phase. Le pre- mier détecteur mesure donccos Δϕ et le second cosΔϕ +π2= − sin Δϕ (voir figureII.44(b)). De cette manière nous avons mesuré précisément les variations de phase entre les deux bras – à noter qu’il s’agit de mesures relatives et non absolues, et c’est ce dont nous avons besoin.

(a) Montage expérimental ; BS : lame séparatrice. (b) Profil d’interférences.

Figure II.44: Schéma de l’interféromètre de Mach-Zehnder pour la mesure des propriétés de phase des émetteurs (a) ; exemple de profil d’interférences observé en sortie de l’interféromètre (b) avec la position des mesures en phase I (∝ cos Δϕ) et en quadrature Q (∝ − sin Δϕ).

Le bruit de phase nous permet d’évaluer la gamme spectrale des fluctuations de phase dans le milieu à gain. Dans le cas d’une correction active de la phase cette information nous donne

l’ordre de grandeur de la bande passante de rétro-action nécessaire. La mesure de bruit de phase d’un émetteur TPL est représentée figureII.45(a). En terme de combinaison cohérente, nous avons vu qu’une variation de phase de σΦ = 0, 1 rad≈ 30π entraine une baisse de 1% de

l’efficacité de combinaison : on repère alors ce niveau sur la courbe. On observe que le bruit de phase accumulé à quelques hertz est de σΦ(f ≥ 7 Hz) ≈ 30π . Ceci nous donne une valeur

de référence pour une éventuelle correction active de la phase : la bande passante doit être de l’ordre de la dizaine de hertz. Par conséquent, une boucle de correction lente est suffisante. Le faible bruit de phase observé est typique des sources laser à semi-conducteur [Redmond 11].

100 101 102 103 10-7 10-6 10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100 101 Frequency / Hz Brui t de phase / rad.Hz -1/2

π/30

10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100 Brui t de phase intégr é / rad

(a) Densité spectrale du bruit de phase d’un émetteur TPL.

(b) Déphasage (simple passage) induit par le cou- rant IR d’un émetteur TPL.

Figure II.45: Propriétés de phase d’un émetteur TPL mesurées en simple passage.

La variation de phase ϕ(I) permet quant à elle de quantifier la variation de courant né- cessaire pour appliquer un déphasage. Elle est mesurée sur le montage lors d’une variation de courant d’injection dans le milieu à gain. Dans le cas d’un TPL, uniquement le courant de la section droite IR est modifié. Les résultats sont illustrés sur la courbe figure II.45(b), on

observe une variation quasi-linéaire de la phase en fonction du courant. Une variation de phase de ∆ϕ = π est obtenue pour une variation de courant ∆Iπ ≈ 35 mA. Cela implique qu’une

variation de phase relativement importante à travers l’émetteur est obtenue sans modification significative de la puissance en sortie de celui-ci. Dans le cas des RWG, une variation de phase de ∆ϕ = π est obtenue pour ∆Iπ ≈ 40 mA – ici la variation de puissance n’est pas négligeable

étant donné qu’il s’agit d’une variation du courant d’injection de 10 à 15%.