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Ce stage d’observation avait pour objectifs

L’observation et l’acquisition de la compréhension du fonctionnement et du rôle des acteurs de soin au sein d’un service d’urgence hospitalière.

Le recueil de la parole, des impressions, du ressenti des différents acteurs de soin sur l’expression du consentement ou du refus de soin (cause, contexte, formulation…) et son rapport au temps (temps de l’arrivée, de l’attente de la prise en charge, de l’écoute…).

L’observation et le recueil de données verbales et non verbales des différents acteurs du soin centrés sur le recueil du consentement ou du refus de soin par la patiente.

Les compétences à acquérir durant ce stage étaient de

Développer des capacités d’écoute et de reformulation permettant une analyse des attentes des patientes, et des différents acteurs de soin dans la démarche de recueil du consentement ou du refus de soin au sein du service.

Développer des capacités rédactionnelles en vue d’élaborer une synthèse signifiante de la problématique spatio-temporelle dans le cadre du recueil du consentement ou du refus au sein d’un service d’urgence.

Le cadre du stage

Le stage s’est déroulé du lundi 4 février 20919 au vendredi 8 février 2019, les trois premiers jours de 14h à 21h, et les deux derniers jours de 7h à 14h. Durant ces cinq jours, j’ai logé à l’internat de médecine de l’hôpital, ce qui m’a permis une immersion complète dans l’univers d’un grand hôpital.

De plus, je portais la blouse blanche des médecins, et un badge précisant mon nom, ma fonction, et mon université de rattachement.

Les activités réalisées

Durant ces cinq jours de présence aux urgences, j’ai entendu et recueilli les propos de 82 patientes âgées de 15 à 50 ans, dans le cadre de conversations informelles mais dirigées, dans le but de recueillir leur vécu par rapport aux objectifs annoncés précédemment.

Parfois, l’entretien ne dépassait pas quelques minutes, parfois il durait au-delà de 20 minutes et se poursuivait au fil des consultations. Quelques patientes ont tenu à me revoir avant de quitter le service, et une a demandé mon adresse mail pour témoigner de ce moment245. Ces échanges ont eu lieu dans les deux salles d’attente du service.

Il m’a aussi été possible d’avoir quelques échanges avec l’équipe soignante, mais les activités aux urgences ne permettent de longs échanges pour ne pas perturber les activités. Deux aides-soignantes et une sage-femme ont accepté de me parler.

Le médecin m’a autorisée après consentement de la patiente à assister à une consultation. Il en a été de même avec une sage-femme. Dans les deux cas, rien d’intime n’a été exposé à mon regard.

Précision

Si la finalité du stage était de prendre conscience et de vivre au plus près de la clinique pour que notre mémoire de fin de master ne soit pas pure théorie et rhétorique concernant notre sujet d’étude, l’attente de ma tutrice était précise. En effet, Marjorie Botz était intéressée par mon profil d’étude ni médical ni technicien. Un regard différent, philosophique, du vécu des patientes dans son service lui apparaissait comme un moyen supplémentaire d’étayer des

245 Le document est joint en annexe page 21

hypothèses qu’elle avait commencé à initier. Aussi je me suis sentie en responsabilité de rendre compte au plus près de son attente qui était : « de connaître le vécu des patientes dans le temps des attentes » et non pas seulement la question du consentement nécessaire à la rédaction du mémoire de fin d’étude. C‘est pourquoi la question du temps est devenue centrale dans mon écoute, révélant par-là que la dimension des limites au consentement au soin était concomitamment voilée et dévoilée par cette approche. En effet, la question du temps est intimement liée aux limites du consentement au soin. Autrement dit, plus l’attente est longue et angoissante moins la patiente est en mesure de consentir en pleine connaissance au soin et a fortiori de le refuser. Je précise que je n’ai été investie d’aucune mission d’audit, je n’en ai ni le goût ni les compétences.

Introduction :

L’enquête réalisée en Juillet 2018 par Mme Marjorie Botz dans le service des urgences gynécologiques et obstétriques de L’Hôpital Paule de Viguier de Purpan, montre que la question du temps passé aux urgences était cruciale. Comment est-il vécu ce temps des urgences par les patientes ? Avant, pendant, après la consultation, qu’est-ce qui se joue durant ce temps pour la patiente, entre la patiente et l’accompagnant(e), avec les soignants ? Cela a-t- il un impact sur le fonctionnement du service ? Sur la prise en charge de la patiente ?...

Autant de questions qui se sont éclairées au fil des rencontres et des échanges. C’est à partir de cette immersion dans le temps vécu aux urgences par les patients et les soignants que je me propose de vous exposer ma lecture du phénomène.

Tout d’abord, il me semble qu’une petite révolution copernicienne à l’image de celle pratiquée par Emmanuel Kant246, s’impose. Depuis la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé247, le patient est devenu l’acteur principal de la prise en charge du soin, cela lui octroie le droit de consentir ou de refuser un soin, et exige du praticien de recueillir cette parole et d’agir en conséquence. Ceci est en soi révolutionnaire ou au moins évolutionnaire dans un système hospitalo-centré où domine parfois encore le patriarcat médical. Aujourd’hui toutefois un nouveau paradigme, ou au moins une nouvelle perception des acteurs du soin devrait se faire jour.

En effet, la politique de santé publique qui a peiné à exister en tant que telle, (l’État ayant dévolu la charge des malades aux institutions religieuses dans les siècles précédant la révolution industrielle) est à notre époque une des préoccupations principales des citoyens et des élus. Le système de soin en France longtemps considéré comme l’un des plus performants au niveau mondial, tant du point de vue de l’offre de soin, que de leur qualité et de leur financement, est en difficulté face aux exigences économiques, restrictions budgétaires et pénurie de personnels soignants et s’essouffle à se maintenir.

Ce contexte socio-économique émaillé de grèves et de manifestations des personnels soignants, amène à recentrer mon regard, non plus sur le patient, dont la santé est la finalité du

246 Kant, E (1986) Critique de la Raison pure. Préface de la seconde édition. Paris:PUF, p19 247 Autrement appelée loi Kouchner

soin, mais sur l’action du soignant, qui va prendre en charge la vulnérabilité de la personne. Or si la souffrance ne peut disparaître de la condition humaine, si le patient par essence existera toujours, il n’en est pas de même pour le soignant dont c’est la profession, la spécialité autant théorique que pratique, l’art de soulager. Si les institutions de santé sont importantes dans la gestion de la santé d’un territoire, sans soignants, elles sont caduques.

Tous les pays en zone de guerre, d’urgence environnementale, en voie de développement ...ne bénéficient pas des structures de soin, pourtant on y soigne. La douleur à apaiser et la santé à recouvrer sont les défis des soignants des différentes ONG qui pallient les politiques publiques de santé des États défaillants ou fragilisés. Elles mettent en exergue « l’irremplaçabilité » des soignants non des institutions. Ce sont les personnes qui savent soigner, qui font la clinique qui assurent le fondement de toute institution soignante. Omettre les cliniciens c’est, à mon sens, vider les lieux de soin du soin, voire pire les rendre potentiellement maltraitants248

Aussi il me semble qu’avant de mettre en lumière le temps des patientes aux urgences gynécologiques et obstétriques de l’hôpital Paule de Viguier, c’est avant tout celui des soignants qu’il faut interroger, même si pour ce faire peu d’informations sont à ma disposition n’ayant pu réaliser que de très courts échanges.

En premier lieu, ce sera le temps et l’espace des soignants que nous essaierons d’éclairer, comme conditions préalables à toute prise en charge soignante.

Puis nous verrons, ce que la parole des patientes apporte à cet éclairage, et quel est leur temps et leur espace vécus aux urgences.

Nous essaierons ensuite d’élaborer très humblement quelques pistes de réflexion pour agir sur le temps de l’urgence au service des urgences, avant de conclure.

248ce que nous montrent malheureusement l’actualité de certains EHPAD Établissement d’Hébergement pour Personne Agée Dépendante, circulaire du 23 juillet 2010 pour le renforcement de la lutte contre la maltraitance en EHPAD, suite à l’article 118 de la loi HPST de juillet 2009