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Des libertariens aux extropiens : l'utopie anarcho-capitaliste

En 1974, le philosophe Robert Nozick imaginait une « machine à expérience » permettant à quiconque s'y branchant de vivre une infinité d’expériences. La force d'une telle machine réside, entre autres, dans le fait que le sujet connecté croit et ressent ce qu'il vit comme s'il le vivait réellement, « une fois dans le réservoir, vous ne saurez pas que vous y êtes ; vous penserez que tout arrive véritablement »400. Si une telle machine existait, voudrions-nous nous brancher dessus ? Serions-nous prêts à plonger dans la cuve ? Une vie riche d’expériences, garantissant le bonheur, menée virtuellement peut-elle remplacer notre vie réelle ? Voilà les questions que permet de poser l'expérience de pensée de Nozick. En outre, elle permet de combattre certaines visions de l'utilitarisme, à commencer par la réduction de l'utilité à une simple conception hédoniste, car « si le plaisir était notre bien suprême, nous serions tous volontaires pour être ainsi prisonniers à vie de la machine, dans un état d'intoxication perpétuelle, ne ressentant rien d'autre que du bonheur »401. Or, une telle vie semble totalement dénuée de sens, à tel point que « certaines personnes préféreraient même sans doute être mortes que mener pareille existence »402. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles l'ensemble de la population ne se drogue pas. Le bonheur produit par l'utilisation de drogues paraît superficiel et faux. Plus qu'un véritable bonheur, il s'agit pour un grand nombre de personnes d'une fuite hors de la réalité. Or cette fuite hors de la réalité au profit du plaisir par l'utilisation de drogues ou d'une « machine à expérience » ne semble pas constituer une très bonne perspective d'avenir. Nozick, de son côté, met en évidence trois points susceptibles de conduire au refus de se brancher sur la machine à expérience. La volonté de « faire certaines choses », la volonté « d'être d'une

399

J.-Y.GOFFI, « Transhumanistes et bioconservateurs », op. cit., p. 352.

400 Robert N

OZICK, Anarchy, State and Utopia, Nex-York, Basic Books, 1974, trad. fr. E. d'Auzac de Lamartine, Anarchie, État et Utopie, Paris, PUF, 1988, p. 64.

401 W. K

YMLICKA, Les théories de la justice, op. cit., p. 21.

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certaine façon » et la volonté d'un « contact véritable avec une réalité plus profonde »403. La limite de la machine de Nozick consiste en ce fait qu'elle se limite à stimuler les états mentaux des sujets plongés dans une cuve. Ces derniers sont passifs, ils n'ont aucune liberté d'action et se contentent de recevoir des stimuli qui leur font ressentir l'amour, l'expérience de manger un gratin, de rédiger un mémoire. Nozick compare le fait de se brancher à la machine à une sorte de suicide. Une telle machine à expérience peut-elle être considérée comme une amélioration de la qualité de vie ? Le transhumaniste James Hughes aurait certainement un avis sur la question, étant donné qu'il défend, avec David Pearce, la légalisation de certaines drogues pour promouvoir une forme d'amélioration et d'augmentation cognitive : « établir, promouvoir et protéger le droit de chaque individu à utiliser la totalité du spectre de son esprit afin d'entreprendre de multiples modes de pensées et d’expériences alternatives d'états de conscience »404.

Si nous venons d'évoquer le philosophe Robert Nozick, ce n'est pas seulement en raison de l'anecdote de sa machine à expérience, mais aussi en raison du fait qu'il est libertarien. Or, nous avons évoqué plus haut que certains transhumanistes, en particulier Max More, se revendiquent d'une tradition libertarienne. Le transhumanisme de Max More, l'extropianisme, constitue l'une des branches du mouvement transhumanisme et a eu une grande influence dans les années 90. « L'une des façons dont les extropiens se distinguent du milieu transhumaniste en général consiste à faire du libertarianisme et de l'anarcho-capitalisme le point central de leur vision du monde »405.

Les libertariens

Nous avons laissé supposer à plusieurs reprises au cours de ce travail que le transhumanisme libertarien était condamnable. Il s'agit néanmoins d'un parti pris que tous ne partagent pas. Si notre inclination s'oriente davantage vers une position plus démocratique et vers la promotion d'un système reposant sur le principe d'une égalité libérale, n'oublions pas, cependant, que la conception libertarienne ne prétend pas non plus reposer sur des valeurs d'injustice ou d'inégalité. Bien au contraire, les libertariens défendent une théorie de la justice reposant avant tout sur la liberté tandis que les partisans du versant démocratique soutiennent davantage une justice reposant sur l'égalité. James Hughes explique cependant que « les libertariens sont d'accord avec les égalitariens sur le

403 R.N

OZICK, Anarchie, Etat et Utopie, op. cit., p. 64-65.

404 J.H

UGHES, Citizen Cyborg, Why Democratic societies Must Respond to the Redesigned Human Nature, Westview Press, Cambridge, 2004, p. 209.

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fait que tout le monde devrait avoir la même "égalité des chances" dans la vie, mais qu'ils sont en désaccord quant au principe de redistribution ou de services sociaux qui sont nécessaires afin de garantir l'égalité des chances »406. Avant de nous intéresser à la conception de Max More, nous allons revenir quelque peu sur les principes et les fondements de la pensée libertarienne.

Les libertariens défendent le libre marché et exigent la limitation de l'intervention de l’État en matière de politique sociale. C'est pourquoi ils s'opposent au recours à une fiscalité redistributive comme moyen de mettre en pratique les théories libérales de l'égalité. […] La fiscalité redistributive est intrinsèquement injuste et […] constitue une violation du droit des gens407.

Ainsi, selon le point de vue libertarien, il faut concevoir les mécanismes de marché comme étant intrinsèquement justes. On observe une condamnation de toute pratique recommandant l'intervention de l’État dans la mesure où celui-ci ne pourrait pas apporter de réponses convaincantes aux problèmes sociaux. Pis encore, toute intervention de l’État est perçue dans un tel cadre comme étant une injustice et une violation des libertés individuelles. Les logiques de redistribution des ressources sont particulièrement visées : prendre aux riches pour donner aux pauvres. La politique de Robin des Bois, si on peut l'appeler ainsi, s'avère être pour les libertariens totalement illégitime même si certains principes de bases sont respectés : le libre marché et un système reposant (à sa fondation) sur l'égalité des chances. Il est ainsi souvent reproché aux libertariens de ne pas tenir compte d'un certain nombre d'avantages sociaux. En outre, plus qu'une critique de l'étatisme, « le libertarianisme mue la défense des liberté individuelles en une lutte incessante contre l’État », ce qui conduit Sébastien Caré à considérer ce mouvement comme un mouvement subversif orienté vers l'idéal d'une utopie libérale408. Cependant, on note également que le libertarianisme est perçu soit comme un mouvement de subversion politique, soit comme une justification des politiques conservatrices.

Tout comme le transhumanisme, le libertarianisme naît au début des années 1970, époque à laquelle les libertariens se sont dotés « de leurs premières institutions indépendantes »409. C'est un mouvement récent revendiquant une pensée antiétatique héritée de l'anarchisme individualiste représenté entre autres par Henri David Thoreau,

406

Ibid., p. 202. 407 W.K

YMLICKA, Les Théories de la justice, op. cit., p. 109-110.

408 Sébastien C

ARE, La pensée libertarienne. Genèse, fondements et horizons d'une utopie libérale, Paris, PUF, 2009, p. 14.

409

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Lysander Spooner ou encore Benjamin Tucker. Le philosophe Henry David Thoreau est particulièrement connu pour son antiétatisme non-violent et pour son combat contre l'esclavage. Tout comme le transhumanisme aujourd'hui, la pensée anarchiste de Thoreau vise l'émancipation de l'individu par un respect des libertés individuelles et une critique de l'intervention de l’État. Il est particulièrement connu pour sa condamnation de l'esclavage et son refus de cautionner les actes des son État (qui pratique l'esclavage et la guerre au Mexique) en ne payant pas ses impôts. Il théorise ce refus dans son texte La Désobéissance civile410. Liberté, indépendance et émancipation sont à ce titre les mots d'ordre d'un anarchisme individualiste à la Thoreau. Ce sont également les valeurs défendues par le versant extropien. Cependant, la pensée antiétatiste trouve également ses origines dans des théories bien moins attrayantes que celles de Thoreau, comme par exemple, dans le darwinisme social. Une telle pensée estime que l’État n'a pas à intervenir ni à s'occuper des problèmes sociaux car cela freine le véritable progrès social, « toute action de l’État consistant à protéger les plus faibles et contrariant, ainsi faisant, le processus de sélection naturelle, doit être combattue au motif qu'elle entrave fatalement la marche vers le progrès social »411. On voit bien de nos jours ce que peut avoir de dérangeant une telle conception de la justice, qui conduira notamment à la mise en place de pratiques eugénistes. En militant pour un retrait de l’État dans la mise en place de politique sociale, les défenseurs du darwinisme social ne se sont pas contentés d'une attitude passive à l'égard des plus défavorisés et l'antiétatisme s'est transformé en un étatisme eugénique stérilisant ou exterminant les classes sociales les moins populaires. On peut néanmoins retenir que la pensée libertarienne trouve ses sources dans la défense des libertés économiques (pour les partisans de droite) et dans la défense des libertés individuelles (pour les partisans de gauche), couvrant ainsi un large spectre politique412.

Il nous faut ici démêler quelque peu les différentes positions énoncées ci-dessus. En effet, la distinction entre position libérale, néo-libérale, libertaire, libertarienne, anarchiste ou encore anarcho-capitaliste n'est pas si évidente et si le vocabulaire est commun, on observe cependant de nombreux glissements de sens d'une position à une autre. Toutes ces

410

Henri David THOREAU, On the Duty to the Civil disobedience (1849) ,trad. fr. G. Villeneuve, La désobéissance civile, Paris, Mille et une nuits, 1996.

411 Sébastien C

ARE, La pensée libertarienne, op. cit., p. 36.

412

Nous pourrions également ici mentionner les libertariens de gauche qui encouragent l’État à verser un revenu de base universelle afin de permettre aux plus démunis la possibilité de subvenir à leur existence. Cette conception soulève également de nombreuses critiques dans la mesure où il serait illusoire de considérer que le facteur économique seul joue un rôle dans les différences de classes et les inégalités sociales.

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positions qui s'ancrent dans le contexte politique et socio-économique actuel revendiquent un idéal commun de liberté, de justice et d'autonomie sans pour autant se mettre d'accord sur la définition de ces concepts. Chacun tente ainsi de se réapproprier l'idéal d'autonomie pour le faire coïncider avec ses projets et ambitions, de telle sorte que ce qui sera appelé « autonomie » par les uns sera perçu comme une privation d'autonomie par les autres. Une opinion répandue considère que la justice se doit de satisfaire certaines conditions de possibilités de l'autonomie. Parmi ces conditions, on trouve ce que Rawls nomme les « biens premiers ». Ceux-ci sont de deux sortes : soit sociaux (« il s'agit de biens qui sont distribués directement par les institutions sociales, comme le revenu et la richesse, les opportunités et le pouvoir, les droits et les libertés » ) soit naturels (« il s'agit de bien comme la santé, l'intelligence, la force, l'imagination et les aptitudes naturelles, qui sont affectés par les institutions sociales mais ne sont pas directement distribués par elles »)413. En dehors du débat consistant à savoir si les biens premiers sont effectivement des conditions nécessaires à la pratique de son autonomie et à la réalisation de ses aspirations, on assiste à une polémique concernant le rôle de l’État et sa légitimité à intervenir dans la distributions de ces biens premiers414.

Propriété de soi

Nous avons déterminé précédemment que le transhumanisme semblait relever bien plus d'une éthique utilitariste que d'une éthique déontologique. Il s'avère cependant que la pensée libertarienne vient complexifier cette catégorisation puisque le libertarianisme peut reposer tant sur une éthique conséquentialiste que sur une éthique d'ordre déontologique. Les libertariens défendent à l'instar de Mill qu'il faut permettre aux individus de réaliser leurs « plans de vie », cependant leurs argumentaires reposent pour une grande part sur le droit de propriété et personne ne peut violer ce droit, même si cela peut sauver une, dix, cent ou mille vies. Pour Sebastien Caré, les libertariens ne forment pas un groupe uniforme mais constituent un mouvement qui repose sur des présupposés éthiques divers. Ainsi, le

413 W.K

YMLICKA, Les Théories de la justice, op. cit., p. 77.

414 Pour toutes questions relatives aux théories de la justices, aux utopies anarcho-capitalistes ou encore

aux utopies libérales nous renvoyons aux ouvrages de Will KYMLICKA (Les Théories de la justice, op. cit.,) et Sébastien CARE (La Pensée libertarienne, op. cit.,). Le lecteur y trouvera de nombreuses informations sur les diverses controverses opposant Rawls, Nozick, Friedman, Rothbard, Hayek, Dworkin et bien d'autres. Il s'agit là d'un sujet complexe que nous ne pouvons analyser ici comme il se doit. Les ouvrages de Kymlicka et de Caré constituent une très bonne introduction à la philosophie et au contexte politique et socio-économique du XXe siècle. Le lecteur pourra notamment se familiariser avec la stratégie du « maximin » qui vise à maximiser ce que peut obtenir l'individu dans une situation minimale, c'est-à-dire dans la pire des situations possibles. Nous nous contenterons de mettre en lumière les concepts qui nous permettent de manière directe d'appréhender les thèses transhumanistes extropiennes ou démocratiques.

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libertarianisme peut se revendiquer d'un conséquentialisme téléologique, d'un utilitarisme, d'une position déontologique jusnaturaliste ou encore contractualiste. On trouve même chez Ayn Rand une conception libertarienne reposant sur une éthique de la vertu415.

Tous les fondements de la pensée libertarienne, qu'ils soient politiques, philosophiques ou éthiques, conséquentialistes ou déontologiques, se situent dans le principe de propriété. Il y a ici un lien manifeste avec la pensée libérale et les thèse de Locke416. Les libertariens revendiquent par ailleurs cette filiation avec Locke et s'inspirent largement de clause lockéenne sur la propriété privée417 . La pensée libertarienne repose sur le fait que les individus ont un droit de propriété sur leur propre personne, que ce droit est inviolable et qu'il est le garant de la liberté, dans la mesure où « être propriétaire de soi- même c'est avoir sur sa propre personne les droits qu'un maître possède sur son esclave »418. La dialectique du maître et de l'esclave, en se retrouvant dans un seul et même individu, devient ainsi la garantie de la liberté, de l'autonomie et de l'autodétermination. Cette dialectique permet également de parvenir à penser et à comprendre le concept de propriété de soi dans la mesure où « il peut paraître bizarre de déclarer qu'on a des droits de propriété sur sa propre personne, comme s'il existait un entité distincte, le "soi", dont on était propriétaire »419. C'est une dialectique réflexive, un droit sur sa propre personne qui conduit les libertariens à considérer ce droit comme le garant de la liberté individuelle qu'ils tiennent pour valeur suprême. À ce principe de propriété de soi, vont venir s'ajouter des considérations éthiques et des implications politiques. Si les individus sont libres, l’État n'a, en théorie, aucun droit sur eux, et comme ils sont légitimement propriétaires de leur corps, aucune institution ne devrait avoir de droits sur leur personne. Ainsi par exemple de la position de Robert Nozick qui

fait appel à un principe de « propriété de soi », qu'il présente comme une interprétation du principe selon lequel les individus doivent être traités comme des « fins en soi ». […] une société libertarienne traiterait les individus non pas comme des « instruments ou des ressources », mais comme des « personnes ayant des droits individuels, avec la dignité que cela implique ».420

415

Ayn RAND est une philosophe américaine (d'origine russe) libertarienne. Son ouvrage philosophique le plus connu s'intitule The Virtue of Selfishness : A New Concept of Egoism, New-York, Penguin Books, 1961.

416 John L

OCKE, Two Treatise of Government (1690), trad. fr., D. Mazel, Traité du gouvernement civil, Paris, garnier-Flamarion, 1992.

417 Cf. infra, note p. 164. 418 S.C

ARE, La Pensée libertarienne, op. cit., p. 151.

419 W.K

YMLICKA, Les Théories de la justice, op. cit., p. 120.

420

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Nozick émet l'idée que la notion de dignité implique une conception minimale de l’État. L’État, en effet, n'est pas en droit de demander quoi que ce soit à ses citoyens dans la mesure où cela nierait leur dignité en les transformant en ressources. On commence à distinguer une prémisse éthique à la critique d'une politique fondée sur la redistribution des ressources. En effet, si la personne est propriétaire de son corps, alors elle doit logiquement (selon les libertariens) être considérée comme étant propriétaire de ses aptitudes.

Si je suis propriétaire de ma personne, alors je suis propriétaire de mes aptitudes. Et si je suis propriétaire de mes aptitudes, alors je possède tout ce que je peux produire grâce à elles, tout comme la possession d'une terre signifie que je possède ce que cette terre produit. […] Si je suis légitimement propriétaire de ma propre personne, les personnes défavorisées par la nature ne peuvent formuler aucune revendication légitime sur mes aptitudes.421

Une telle conception de la propriété repose sur le principe qu'initialement le monde n'appartient à personne. Les libertariens considèrent qu'une chose qui n'appartient à personne peut, si je la réclame, devenir ma propriété. En admettant que la personne est propriétaire de son corps et de ses aptitudes, les libertariens en arrivent à la conclusion qu'« une fois que les individus ont acquis la propriété privée, la création d'un libre marché des capitaux et du travail est moralement nécessaire »422. Une fois le libre marché créé, le seul rôle de l’État doit consister en la protection des droits de propriété et du bon fonctionnement de l'économie néo-libérale. Les libertariens sont fortement critiqués par les partisans de l'égalité libérale qui prônent une politique de redistribution pour un système plus égalitaire. Ils ont une autre conception de la propriété et considèrent que le monde appartient à tous plutôt qu'à personne. Face à leur détracteur égalitariens, les libertariens ont souvent recours à des arguments de type « pente glissante » :

D'ailleurs, pourquoi ne pas étendre le principe d'égalisation des circonstances aux manipulations génétiques, ou au moins à certaines formes de transfert biologique ? Si un individu naît aveugle et un autre possède deux yeux en parfait état, pourquoi ne pas exiger le transfert de l'un de ses yeux à l'homme aveugle423 ?

421 Ibid., p. 121-122.

422 Ibid., p. 128. L'argument complet, exprimé sous le nom de clause lockéenne, prend la forme

suivante : « 1. Les individus sont propriétaires de leur propre personne. 2. Initialement, le monde extérieur n'appartient à personne. 3. Vous pouvez acquérir des droits absolus sur une quantité disproportionnée des ressources du monde extérieur si cela ne détériore pas les conditions de vie d'autrui. 4. Il est relativement facile d'acquérir des droits absolus sur une quantité disproportionnée des ressources du monde extérieur. Par conséquent : 5. Une fois que les individus ont acquis la propriété privée, la création d'un libre marché des capitaux et du travail est moralement nécessaire ». Nous reviendrons un peu plus tard sur cet argument de la clause lockéenne lors de notre critique de la conception libertarienne à l'aune d'une conception reposant sur le principe de l'égalité libérale. Nous verrons que la troisième prémisse de cet argument pose particulièrement problème.

423

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Un lecteur non averti pourrait tomber dans le piège que représente un tel argument. Imaginons que ce lecteur non averti n'ait jamais pris le temps auparavant de s’intéresser à de tels débats, imaginons par ailleurs qu'il soit, disons par tradition familiale, de gauche et