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Des législations nationales inopportunément conciliantes

Dans le document Le principe <i>aut dedere aut judicare</i> (Page 113-132)

Tous les efforts réalisés pour permettre au principe aut dedere aut judicare de s'appliquer de manière la plus large et la plus effective possible ne seront que lettres mortes si les États édictent des législations nationales enrayant le processus. Cette décélération est notamment palpable au regard de la restriction majeure dûe au jeu des immunités (I) et de la persistance préjudiciable de mesures d'amnistie (II), les immunités et amnisties garantissant « à une personne ou à un groupe de personnes qu'elles ne seront pas traduites en justice bien qu'elles aient commis – ou pu commettre – certains crimes524 ».

I ) Une restriction majeure par le jeu des immunités

Les immunités, qui sont le « droit de bénéficier d'une dérogation à la loi commune, un privilège525 », détiennent une suprématie certaine sur l'obligation de poursuivre ou d'extrader (A), d'autant plus qu'il existe une conception restrictive des exceptions à l'immunité (B).

A )

Une suprématie des immunités sur l'obligation de poursuivre ou d'extrader

Tandis que cette hégémonie des immunités sur le principe aut dedere aut judicare va entrer en contradiction avec la récusation de la qualité officielle (2), cette dernière va induire une impunité qui va se révéler paradoxale (1).

1 –

Une impunité paradoxale

Bien que les immunités puissent paraître inconcevables au premier abord, il est tout de même utile de rappeler que ces dernières ont une raison d'être légitime, à savoir la protection d'un

524 http://www.trial-ch.org/fr/

État et de ses représentants, afin de garantir notamment « l'égalité souveraine entre États526 » et empêchant de la sorte que ces derniers ne soient attraits devant les juridictions d'un autre État afin d'y être jugés, ce qui constituerait indéniablement un risque pour la stabilité de l’État et un péril pour l'égalité souveraine entre les membres de la communauté internationale.

Cependant, l'utilisation de ces immunités aboutit déplorablement à ce qu'immunité rime avec impunité527, réduisant à néant le principe aut dedere aut judicare car celui-ci se voyant inapplicable. Or, il est inconcevable que les personnes qui bénéficient de ces immunités, à savoir les représentants étatiques de haut rang, soient celles qui jouent un rôle déterminant dans la commission de crimes de droit international, « crimes odieux qui bouleversent la conscience de l'humanité, violent certaines règles les plus fondamentales du droit international et menacent la paix et la sécurité internationales528 ». L'on se retrouve de la sorte avec une inégalité engendrée par les immunités et la volonté de protéger la souveraineté de l’État, entre d'une part les principaux responsables qui se voient protégés par leur statut, et d'autre part les individus certes coupables mais avec une responsabilité moindre qui voient quant à eux leur responsabilité pénale engagée d'emblée. À titre d'exemple, Hissène HABRE, qui a été Président du Tchad de 1982 à 1990, a utilisé pendant ces années durant lesquelles il était au pouvoir « la violence, la torture, les exécutions extrajudiciaires, les arrestations arbitraires529 », avant d'être chassé et de se réfugier au Cameroun puis au Sénégal, laissant les victimes dans l'espoir illusoire de le voir condamné pour les actes commis contre sa propre population.

Il semble ainsi paradoxal d'accorder une immunité à des individus qui certes représentent l’État, mais qui sont pour autant « les auteurs d'actes qui sont outrageusement en dehors des compétences que le droit international reconnaît aux représentants de l’État530 ». C'est pourquoi le principe selon lequel les individus, quels qu'ils soient, doivent être tenus responsables de leurs actes et en conséquence poursuivis a été formellement affirmé dans l'affaire Pinochet531.

Néanmoins, en déclarant l'illicéité du mandat d'arrêt émis par la justice belge contre le Ministre des affaires étrangères congolais YERODIA, la Cour internationale de justice a regrettablement affirmé la primauté des normes internationales relatives à l'immunité des représentants étatiques sur les

526 M. KOHEN, Promoting justice, human rights and conflict resolution through international law, Leiden, Martinus Nijhoff Publishers, 2007, p512.

527 B. NOVOGRODSKY, « Immunity for torture : lessons from Bouzari v. Iran », The European Journal of International Law, Vol.18 n°5, 2008, p1.

528 Rapport de la CDI sur les travaux de sa quarante-huitième session (6 mai – 26 juillet 1996), Extrait de l'Annuaire de la CDI, 1996, vol. II(2), Document A/51/10, para. 28.

529 M. ALBARET, « Acteurs et interdépendances dans l'affaire Hissène Habré », Études internationales, vol.39, n°4, 2008, pp. 2-3.

530 M. KOHEN, Promoting justice, human rights and conflict resolution through international law, op.cit., p513. 531 A. BIANCHI, « Immunity versus Human rights : the Pinochet case », The European Journal of International Law,

normes internationales imposant aux États de prendre des mesures afin de poursuivre et juger les auteurs de crimes internationaux et notamment de crimes contre l'humanité, échafaudant de la sorte une hiérarchie entre les différentes normes internationales532.

C'est ainsi que lors du jugement de l'affaire Pinochet533, les Lords se sont référés au State Immunity Act, texte de droit britannique qui renvoie aux normes imposées par le droit international534.

Les juridictions nationales étant de la sorte soumises au droit international, avec notamment une compétence universelle « assujettie aux principes du droit international, en particulier s'agissant de l'immunité de juridiction535 », la Commission du Droit International est venue déclarer à juste titre que :

« l'absence de toute immunité procédurale permettant de se soustraire aux poursuites ou au châtiment dans le cadre d'une procédure judiciaire appropriée constitue un corollaire essentiel de l'absence de toute immunité substantielle ou de tout fait justificatif. (…) Les poursuites engagées devant une cour criminelle internationale seraient l'exemple type d'une procédure judiciaire appropriée où l'individu ne pourrait invoquer aucune immunité substantielle ou procédurale en arguant de sa qualité officielle pour se soustraire aux poursuites et au châtiment536 ».

Cette divergence entre les prérogatives des tribunaux nationaux et celles des juridictions internationales va constituer l'une des raisons pour lesquelles il existe une contradiction entre la persistance des immunités et la récusation de la qualité officielle (2).

2 –

Une contradiction avec la récusation de la qualité officielle

Bien que l'égalité souveraine prohibe qu'un représentant étatique soit attrait devant les juridictions d'un État tiers, celle-ci ne peut en aucun cas, dans l'hypothèse où une juridiction internationale se verrait conférer une telle compétence, empêcher que ce représentant ne soit poursuivi devant cette juridiction. Dans cette hypothèse, il sera pourtant plus approprié de ne « pas parler ici d'absence d'immunité mais plutôt de non impunité537 ».

532 R. CARNERERO CASTILLA, « Un paso atras en la lucha contra la impunidad. La sentencia de la Corte Internacional de Justicia de 14 de febrero de 2002 en el Asunto relativo a la orden de arresto de 11 de abril de 2000 ( República Democrática del Congo c. Bélgica) », Cuadernos de Jurisprudencia Internacional, 1, Madrid, p20. 533 Cf. infra.

534 M. KOHEN, Promoting justice, human rights and conflict resolution through international law, op.cit., p520. 535 Portée et application du principe de compétence universelle, Point 84 de l'ordre du jour, Sixième commission,

Compte-rendu analytique de la treizième séance, 2009, A/C.6/64/SR.13, p8. 536 Rapport de la CDI sur les travaux de sa quarante-huitième session op.cit., para. 29.

Cette volonté de limiter l'impunité même des plus hauts représentants étatiques est retrouvée dès le traité de Versailles du 28 juin 1919, dont l'article 227 posait le principe de poursuites contre l'empereur allemand Guillaume II pour « offense suprême contre la morale internationale et l'autorité sacrée des traités538 ».

Il en sera de même après la seconde guerre mondiale et lors de l'élaboration des statuts des tribunaux militaires internationaux. En effet, l'article 7 du Statut du tribunal de Nuremberg stipule que « la situation officielle des accusés, soit comme chef d’État, soit comme hauts fonctionnaires, ne sera considérée ni comme une excuse absolutoire ni comme un motif de diminution de la peine539 ». De la même manière, l'article 6 du Statut tribunal militaire international de Tokyo prévoit une disposition similaire, selon laquelle le fait d'avoir occupé une position officielle ne saurait être suffisant pour constituer une dispense d'engagement de la responsabilité pénale individuelle540. Quant à la loi n°10 du Conseil de contrôle Allié du 20 décembre 1945, Conseil qui avait pour mission d'assumer l'autorité suprême à l'égard de l'Allemagne541, cette dernière pose le principe selon lequel « toute amnistie, grâce ou immunité ne sera pas acceptée comme un obstacle aux poursuites des criminels nazis542 ».

Ce refus de soumettre une quelconque position étatique à une exemption ou une diminution de responsabilité a été repris par l'Assemblée Générale des Nations Unies dans ses Principes de Nuremberg, celle-ci estimant que « le fait que l'auteur d'un acte qui constitue un crime de droit international a agi en qualité de chef d’État ou de gouvernement ne dégage pas sa responsabilité en droit international543 ».

Cette idée ne s'est pas atténuée au fil du temps, comme le démontre en 1996 le projet de Code des crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité, qui prévoit à son tour une disposition semblable, selon laquelle « la qualité officielle de l'auteur d'un crime contre la paix et la sécurité de l'humanité, même s'il a agi en qualité de chef d’État ou de gouvernement, ne l'exonère pas de sa responsabilité pénale et n'est pas un motif de diminution de la peine544 ».

C'est alors sans grand étonnement que le Statut de Rome contient à son tour une clause spécifiant le défaut de pertinence de la qualité officielle, selon laquelle le Statut « s'applique à tous

538 http://www.ladocumentationfrancaise.fr/

539 Statut du Tribunal international de Nuremberg, 8 août 1945, Art 7.

540 Charter of the International Military Tribunal for the Far East, 19 January 1946, Art 6.

541 J. BENOIST, « Le conseil de contrôle et l'occupation de l'Allemagne », Politique étrangère n°1 – 1946 – 11e année, p4.

542 M. KOHEN, Promoting justice, human rights and conflict resolution through international law, op.cit., p513. 543 A/RES/488(V), 12 décembre 1950, Principes du DI consacrés par le Statut du Tribunal de Nuremberg et dans le

jugement de ce tribunal, Principe III.

de manière égale, sans aucune distinction fondée sur la qualité officielle... »545 . Cependant, cette clause a posé nombre de difficultés au regard des Constitutions nationales qui prévoient quasiment systématiquement une immunité pour certaines catégories de hauts fonctionnaires. Ce fut le cas en Belgique, où l'article 27 fut jugé incompatible avec la Constitution qui prévoyait « les régimes d'immunité dont bénéficient le Roi et les membres du Parlement et les procédures spéciales prévues pour l'arrestation et les poursuites à l'encontre d'un membre du Parlement ou du Gouvernement546 ».

Outre la Belgique, le Conseil constitutionnel du Luxembourg a également mis en exergue un « risque de conflit547 » entre la Constitution et le Statut de Rome. Ce fut également l'avis de la Haute Cour constitutionnelle de Madagascar, dont la Constitution fut amendée afin de modifier le régime des immunités dans le but de mettre ce dernier en accord avec le Statut de Rome et afin de ratifier celui-ci548.

Nonobstant, certains États tels que l'Ukraine et le Honduras ont estimé quant à eux que les dispositions du Statut n'entraient pas en conflit avec leurs Constitutions respectives qui pourtant contenaient des dispositions relatives à l'immunité, étant donné d'une part pour l'Ukraine que « les crimes relevant de la compétence de la CPI étaient des crimes de droit international reconnus par le droit coutumier ou prévus dans des traités549 », et d'autre part pour le Honduras du moment où la règle de l'épuisement des voies de recours internes était respectée550 .

À l'inverse, c'est le Statut de Rome lui-même qui va venir instiller un doute quant à la possibilité pour un État de lui remettre un individu faisant l'objet d'une immunité. En effet, l'article 98 vient préciser que :

« la Cour ne peut poursuivre l'exécution d'une demande de remise ou d'assistance qui contraindrait l’État requis à agir de façon incompatible avec les obligations qui lui incombent en droit international en matière d'immunité des États ou d'immunité diplomatique d'une personne ou de biens d'un État tiers, à moins d'obtenir au préalable la coopération de cet État tiers en vue de la levée de l'immunité551 ».

De la sorte, le Statut semble finalement subordonner les poursuites à une levée de l'immunité qui serait consentie par un État tiers, ce qui semble concrètement peu probable ou tout du moins

545 Statut de Rome, Art 27.

546 Questions soulevées par les Cours constitutionnelles nationales, op.cit., p7. 547 Id., p8.

548 Id., p30. 549 Id., p15. 550 Id., p19.

malaisé. L'ajout de cette disposition est plus que dommageable, faisant perdre à l'article 27 toute sa substance et l’assujettissant à une compatibilité avec les normes de droit international en matière d'immunité, ces deux types de normes étant manifestement inconciliables.

Ainsi, bien que se dégagent d'une certaine manière des limitations à une impunité absolue, les exceptions à l'immunité font l'objet d'une conception restrictive (B).

B )

Une conception restrictive des exceptions à l'immunité

Les exceptions à l'immunité ont été conçues de manière à ce que l'on puisse les limiter voire les contourner au maximum. Va s'opérer de la sorte une exonération temporaire de la responsabilité pénale individuelle (1), cette exemption étant corollaire à l'exercice d'une fonction officielle (2). 1 –

Une exonération temporelle de la responsabilité pénale individuelle

Bien qu'il soit avéré que l'existence d'une immunité ne va pas entièrement exonérer un individu de sa responsabilité pénale individuelle552 ad vitam aeternam, elle va pourtant représenter un contretemps553 majeur dans la mise en œuvre de cette dernière.

Tentant de minimiser cette réalité, la Cour internationale de justice est venue dans l'affaire du mandat d'arrêt souligner que :

« l'immunité de juridiction dont bénéficie un Ministre des affaires étrangères en exercice ne signifie pas qu'il bénéficie d'une impunité au titre de crimes qu'il aurait pu commettre, quelle que soit leur gravité. (…) L'immunité de juridiction peut certes faire obstacle aux poursuites pendant un certain temps ou à l'égard de certaines infractions ; elle ne saurait exonérer la personne qui en bénéficie de toute responsabilité pénale554 ».

L'immunité ne va pas alors annihiler la possibilité de poursuivre un individu, mais décaler l'engagement des poursuites à un moment ultérieur où le suspect ne bénéficiera plus d'une immunité. Pour autant, en attendant l'opportunité de pouvoir entamer des poursuites, l'immunité va dans certains États comme l'Allemagne ou le Japon constituer un « obstacle procédural qui interdit

552 I. BLANCO CORDERO, « Compétence universelle », op.cit., p38.

553 R. CARNERERO CASTILLA, « Un paso atras en la lucha contra la impunidad... » op.cit., p22.

554 Mandat d'arrêt du 11 avril 2000 (République démocratique du Congo c. Belgique), arrêt, C.I.J, Recueil 2000, p.3, para. 60-61.

d'ouvrir non seulement une enquête préliminaire mais aussi d'émettre un mandat d'arrêt555 ». Or, cet empêchement à ne serait-ce qu'enquêter peut induire de lourdes conséquences pour l'efficacité d'une enquête subséquente, le temps ayant un effet dévastateur sur les preuves et les victimes. Ainsi, bien que l'immunité soit levée, cette dernière aura pu jouer en la faveur du suspect et aller jusqu'à le dédouaner entièrement s'il est par la suite impossible de le poursuivre en raison d'un temps écoulé trop long qui aurait effacé les traces de sa culpabilité.

Néanmoins, il est vrai que « l'on voit aujourd'hui se dessiner un schéma général de restriction des immunités et des autres protections » dont pourraient se réclamer certains représentants de l’État556.

L'affaire PINOCHET illustre parfaitement ce schéma selon lequel cette exonération n'est que momentanée, la Chambre des Lords anglaise ayant rejeté par deux fois l'invocation de l'immunité du Général PINOCHET face à la requête d'extradition espagnole. Cette affaire est d'autant plus emblématique qu'il s'agit de l'un des rares cas n'ayant pas trait aux poursuites menées contre les auteurs de crimes commis durant la seconde guerre mondiale, renforçant de la sorte l'obligation qu'ont les États de poursuivre les auteurs de crimes internationaux, quelle que soit la période durant laquelle ces derniers ont été commis557. Le Général PINOCHET avait en effet été arrêté en 1998 lors d'une hospitalisation au Royaume-Uni sur la base de deux mandats d'arrêt émis par deux magistrats britanniques558 à la demande des juridictions espagnoles et en accord avec la Convention européenne d'extradition559. Le Général ayant saisi une juridiction de première instance au Royaume-Uni, cette dernière déclara d'une part que le premier mandat d'arrêt était illégal au motif que les crimes pour lesquels l'extradition était requise n'étaient pas des crimes soumis à extradition selon l'Extradition Act560, et d'autre part que le second mandat d'arrêt était également illégal au regard de la législation nationale et notamment du State Immunity Act561 qui reprenait les dispositions de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques562 relatives à l'immunité. Pourtant, la Chambre des Lords rejeta ce jugement et autorisa la poursuite du processus d'extradition au motif que les crimes commis étaient des crimes de droit international et que le

555 I. BLANCO CORDERO, « Compétence universelle », op.cit., p40.

556 M. KOHEN, Promoting justice, human rights and conflict resolution through international law, op.cit., p515. 557 A. BIANCHI, « Immunity versus Human rights : the Pinochet case », op.cit., p9.

558 Le premier mandat d'arrêt a été émis par le juge Nicholas EVANS sur la base de l'Extradition Act de 1989 et concernait le meurtre de citoyens espagnols au Chili. Le second mandat d'arrêt a quant à lui été émis par le juge Ronald BARTLE et concernait des actes de torture, de prise d'otages, de complicité de meurtres et de disparitions forcées à grande échelle.

559 A. BIANCHI, « Immunity versus Human rights : the Pinochet case », op.cit., p1. 560 A. BIANCHI, « Immunity versus Human rights : the Pinochet case », op.cit., p1.

561 State Immunity Act, United Kingdom, 20th July 1978, Part III, para. 20. « Heads of State ».

Général PINOCHET ne disposait plus de son immunité563, bien qu'à peine deux mois plus tard la Chambre des Lords réfute ce jugement suite à des allégations de partialité de l'un des juges qui aurait été « lié à Amnesty International564 ». Ce n'est que dans le troisième jugement que la Chambre des Lords vint finalement mettre un terme au débat et confirmer qu'un ancien chef d’État ne pouvait se voir protégé par une immunité quand ce dernier était soupçonné d'avoir commis des crimes internationaux565.

De la sorte, et bien qu'il y ait eu des désaccords entre les différents Lords concernant la portée des immunités, cette affaire a permis de mettre en relief le fait que contrairement au chef d’État en exercice qui dispose d'une immunité absolue donc ratione personae, l'ancien chef d’État ne dispose quant à lui que d'une immunité pour les actes commis dans l'exercice de sa fonction donc ratione materiae, hormis l'hypothèse où ce dernier aurait commis des crimes internationaux566 .

En effet, l'immunité et donc l'exemption à des poursuites judiciaires ne sont que des corollaires à l'exercice d'une fonction officielle (2).

2 –

Une exemption corollaire à l'exercice d'une fonction officielle

Dans la plus problématique mais non moins célèbre affaire du mandat d'arrêt, la Cour internationale de justice rappelle le bien-fondé des immunités et observe que « certaines personnes occupant un rang élevé dans l’État, telles que le chef de l’État, le chef du gouvernement ou le Ministre des affaires étrangères, jouissent d'immunité de juridiction dans les autres États567 ». De la sorte, la Cour affirme non seulement que les immunités sont circonscrites à une fonction officielle c'est-à-dire étroitement liées à la préservation de la souveraineté de l’État, mais vient également souligner la légitimité de telles immunités, à savoir que « les immunités reconnues au Ministre des affaires étrangères ne lui sont pas accordées pour son avantage personnel, mais pour lui permettre

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