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CHAPITRE 2 REVUE DE LITTÉRATURE SUR L‘ENCOMBREMENT VISUEL DES

2.2 Contributeurs à l‘encombrement

2.2.2 Densité d‘information

La seconde catégorie de contributeurs à l‘encombrement visuel est la densité d‘information, causée par une abondance d‘information utile ou redondante. Conséquemment, nous avons identifié un contributeur à l‘encombrement pour cette catégorie, soit la pertinence de l‘information pour la tâche. Nous discutons par la suite de l‘utilité de techniques de filtrage pour réduire l‘encombrement à l‘écran et leurs effets sur la conscience de la situation.

2.2.2.1 Pertinence à la tâche

Le facteur de pertinence à la tâche fait référence à des éléments présentés à l‘écran qui ne sont pas nécessaires pour la tâche actuelle de l‘opérateur, ou qui sont redondants à de l‘information déjà présente à l‘affichage. Dans ce cas, l‘intention du concepteur d‘interface d‘offrir plus d‘information à l‘utilisateur peut avoir un impact négatif sur la performance de ce dernier, car il distrait par l‘augmentation de l‘encombrement visuel.

Lohrenz et Hansman (2004) ont demandé à 12 pilotes de réaliser une double tâche en simulateur de vol, soit de suivre avec précision le plan de vol et d‘identifier un élément au sol. Les participants ont utilisé successivement trois affichages : une carte montrant la position de l‘appareil par rapport au sol mais sans le plan de vol, un affichage montrant le plan de vol mais sans la carte, et un affichage mixte montrant la carte et le plan de vol. Les participants ont obtenu la meilleure performance pour les deux tâches en utilisant l‘affichage montrant uniquement le plan de vol. Les auteurs en concluent que l‘encombrement visuel causé par la présence d‘information qui n‘est pas nécessaire à la tâche (la carte) a diminué la performance des pilotes sur l‘affichage mixte.

La présence d‘information redondante à l‘affichage contribue aussi à l‘encombrement visuel. Il peut s‘agir d‘une même information répétée à plusieurs endroits à l‘écran (Boston & Braun, 1996) ou d‘un élément graphique qui n‘apporte aucune nouvelle information à l‘utilisateur (Alexander et al., 2008), comme par exemple afficher à l‘écran de vol le réglage barométrique avec trois unités de pression différentes. Alexander et ses collègues (2008) ont réalisé des entrevues semi-dirigées avec quatre pilotes expérimentés sur l‘encombrement visuel de l‘affichage de vol. Les auteurs ont trouvé que 10% des commentaires faits par les pilotes ont identifié le facteur de redondance de l‘information comme un contributeur de l‘encombrement visuel. La présence d‘information superflue à la tâche de vol en cours ou offrant peu d‘information pour le vol ont été identifiés comme encombrant l‘affichage.

Ainsi, le facteur de densité d‘information se concentre sur la tâche de l‘utilisateur et le contexte d‘utilisation qui rende un affichage encombré tandis que le facteur de densité visuelle considère l‘encombrement visuel comme une propriété de l‘affichage. La présence de symboles inutiles pour la tâche courante contribue à accroitre l‘encombrement visuel d‘un affichage car ils détournent l‘attention du pilote de l‘information plus importante pour compléter la tâche. La pertinence de l‘information pour la tâche est un facteur essentiel de l‘encombrement visuel, car les éléments d‘information que le pilote peut considérer comme contribuant à l‘encombrement visuel pour une tâche particulière durant une phase de vol donnée peuvent être ignorés durant une tâche différente ou une autre phase de vol.

2.2.2.2 Techniques de filtrage

L‘abondance d‘information présentée à l‘utilisateur est une conséquence de l‘avancée technologique continuelle du domaine aérospatial, avec l‘ajout à bord du véhicule de nouveaux capteurs et instruments et la croissance de la puissance de calcul des ordinateurs de bord (Woods et al., 2002). Serait-il pertinent d‘offrir à l‘utilisateur des techniques de filtrage de données, interactives ou automatiques, afin de réduire la charge visuelle à l‘écran et mieux soutenir sa tâche? L‘utilisation de techniques de filtrage soulève de nouvelles questions liées aux facteurs humains auxquelles il importe de répondre avant de poursuivre dans cette voie.

Le filtrage interactif de données est la possibilité offerte au pilote de masquer une couche d‘information à sa demande afin de réduire l‘encombrement visuel, par exemple en masquant la couche de trafic aérien sur la carte de terrain (Kroft & Wickens, 2002; Wickens, Kroft, & Yeh,

2000; Yeh & Wickens, 2001). Cette technique s‘avère utile lorsque l‘écran permet d‘afficher l‘information sur deux couches superposées physiquement distancée (Hayes, Moore, & Wong, 2006). Toutefois, cette technique a deux désavantages. Premièrement, il y a un coût en temps et en performance pour interagir avec l‘application qui peut résulter en une charge de travail accrue (Kroft & Wickens, 2002; Yeh & Wickens, 2001). L‘interaction du pilote avec l‘écran est du temps passé la tête basse à une tâche autre que le pilotage. Deuxièmement, le pilote peut manquer un évènement ou l‘apparition d‘une nouvelle menace se déroulant sur la couche d‘information masquée de l‘application, et oublier de consulter ces données masquées. Ce phénomène est connue sous le nom de « loin des yeux, loin de la tête » (out-of-sight, out-of-mind) (Podczerwinski, Wickens, & Alexander, 2002). Podczerwinski et ses collègues ont observé une possibilité accrue de manquer un évènement se produisant sur la couche d‘information masquée de l‘application, une manifestation probable du phénomène de loin des yeux, loin de la tête (Podczerwinski et al., 2002).

Le filtrage automatique utilise des algorithmes pour masquer les donnés superflues et ne présenter qu‘un sous-ensemble de toute l‘information disponible (Pfautz, Schurr, Ganberg, Bauer, & Scerri, 2011). Par exemple, un tel algorithme utilisé pour l‘application de trafic aérien (Cockpit display of traffic information, CDTI) ne montrerait sur la carte que les avions les plus proches et filtrerait les avions distants. Bien que cette approche montre ses bienfaits avec le développement d‘algorithmes et de règles de filtrages plus puissants, le filtrage automatique n‘est pas sans soulever des préoccupations sur la confiance en l‘automatisation et ses effets sur la conscience de la situation (Endsley, 1995). Est-ce que les règles de filtrage sont claires et compréhensibles pour le pilote? Est-ce que l‘algorithme est déterministe? Est-ce que le pilote demeure conscient de son environnement et capable de détecter de nouvelles menaces? Voici les questions posées par Endsley (1996) dans son travail faisant figure d‘autorité sur l‘automatisation des systèmes et qui demandent plus d‘attention afin de mieux comprendre l‘effet du filtrage automatique sur la conscience de la situation.