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Quel degré de détail ?

1.4 Représenter la redistribution : choix et enjeux

1.4.5 Quel degré de détail ?

Il est habituel dans les présentations des effets redistributifs du système fiscal et social de diviser la population en cinq groupes égaux en nombre (quintile) ou en dix groupes (décile). De telles présentations sont conditionnées par les données utilisées, en particulier les données d’enquête qui ne permettent pas d’obtenir des résultats précis sur des sous-groupes plus petits. Le problème est qu’il existe une très forte hétérogénéité au sein du décile supérieur de la distribution des revenus, tant en termes de types de revenus qu’en termes de prélèvements obligatoires. Agréger

l’ensemble des 10 % des plus hauts revenus revient alors à masquer une grande partie des caractéristiques du système fiscal (importance des niches fiscales, rôle des prélèvements sur les patrimoines, etc.) qui prend une place très importante dans le débat public.

Les représentations adoptées dans cette étude décomposent généralement la population en plusieurs sous-groupes de revenu. Les 90 % d’individus ayant les re-venus les plus faibles sont représentés en neuf déciles : P0-10 représente le décile du bas, c’est-à-dire les 10 % d’individus ayant les plus faibles revenus, P10-20 les 10 % suivants, etc. Comme TAXIPP simule les revenus et leurs compositions jus-qu’en haut de la distribution, il est possible de décomposer le décile supérieur (les 10 % d’individus ayant les plus hauts revenus) en plusieurs catégories : P90-95 re-présente les centiles compris entre 90 et 95 (les « classes moyennes supérieures ») ; puis chaque centile est représenté séparément jusqu’au 1 % d’individus ayant les plus hauts revenus. Enfin, il est possible de décomposer le dernier centile en isolant les 0,1 % (P99,9) ou les 0,01 % d’individus ayant les plus hauts revenus (P99,99).

S’il est utile de mettre en évidence l’hétérogénéité du décile supérieur en termes de revenu, il ne faut pas pour autant succomber à une illusion graphique et sur-estimer le nombre de personnes à hauts revenus : chaque groupe du haut de la distribution représente par construction un nombre d’individus de plus en plus pe-tit.

Q UINZE ANS DE FISCALITÉ FRANÇAISE

Avant de présenter les variations de la fiscalité française pendant les trois quin-quennats couverts par notre étude, il est utile de présenter les évolutions moyennes des prélèvements obligatoires et d’illustrer les difficultés de représentation de la re-distribution fiscale en présentant la situation d’une année récente. Nous analysons ensuite chaque période successivement, en commençant par le dernier quinquennat et en remontant dans le temps.

2.1 L’évolution des taux moyens de prélèvements obligatoires

L’ensemble des simulations de TAXIPP repose sur le cadre macro-économique de la comptabilité nationale. Cette approche agrégée a le défaut de ne pas refléter l’hé-térogénéité des situations, mais c’est un cadre de départ incontournable et déjà très instructif. Le graphique 2.1 présente l’évolution des taux moyens de prélèvements obligatoires, estimés par le modèle TAXIPP mais reflétant avant tout les estimations des comptes nationaux.

La comptabilité nationale construit plusieurs agrégats de l’ensemble des revenus du pays. Le plus connu, le produit intérieur brut (PIB) correspond à l’ensemble des

revenus issus de la production nationale et atteint en 2011 près de 1990 milliards d’euros. À ce montant global, il faut soustraire la dépréciation du capital et ajouter les revenus nets reçus du reste du monde. On obtient alors le revenu national, égal à 1750 milliards d’euros en 2011. Ce revenu national correspond à l’ensemble des revenus primaires des Français, qui agrège l’ensemble des revenus primaires du travail et des revenus du capital.

FIGURE 2.1 – Taux moyens de prélèvements obligatoires (1997-2012).

0%

1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012

En pourcentage du revenu national

Taux moyen de prélèvements obligatoires

Taux moyen de prélèvements obligatoires - hors prélèvements sur les transferts et les revenus de remplacement

Taux moyen de prélèvements obligatoires - hors prélèvements sur les transferts et les revenus de remplacement et hors cotisations sociales contributives

Sources :TAXIPP 0.1 et comptabilité nationale.

Sur le graphique 2.1, les taux de prélèvements obligatoires sont estimés en pour-centage du revenu national. La courbe la plus haute décrit le taux moyen de prélè-vements incluant les prélèprélè-vements obligatoires de tout type, y compris les prélève-ments sur les transferts et les revenus de remplacement. Le taux moyen oscille sur la période autour de 48 % du revenu national1. Si on exclut les prélèvements sur les transferts et les revenus de remplacement – qui viennent avant tout en déduc-tion de ces revenus de remplacement –, on obtient un taux moyen de prélèvements proche de 44 % du revenu national. Ces prélèvements obligatoires incluent les

co-1. Il s’agit du taux le plus proche des estimations présentées par l’OCDE.

tisations sociales contributives qui financent des droits aux pensions de retraite et aux allocations chômage. On peut considérer que ces prélèvements obligatoires ne sont pas des impôts comme les autres puisqu’ils donnent droit à des revenus diffé-rés proportionnels aux sommes cotisées2. Si on retire les cotisations contributives, le taux d’imposition tombe aux alentours de 30 % du revenu national.

Cette approche agrégée a le mérite de souligner deux caractéristiques impor-tantes de notre système fiscal au cours des quinze dernières années : d’abord, on constate en masse totale peu de modifications importantes, et quand elles existent, elles semblent avant tout déterminées par la conjoncture économique ; deuxième-ment, notre système fiscal présente des taux de prélèvements obligatoires élevés, mais en grande partie portés par des taux de cotisations sociales contributives im-portants. C’est une des particularités – bien connue – de notre système fiscal, qui rend particulièrement malaisées les comparaisons entre la France et ses voisins.