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Dans ce sous-chapitre, nous souhaitons mettre en exergue la concordance de nos résultats en relation avec la question PICOT qui s’articule de manière suivante : « En quoi l’entretien motivationnel peut-il favoriser la prise de conscience chez les personnes hospitalisées en soins aigus souffrant d’une dépendance alcoolique se situant dans l’âge du mitan ? ».

Au vu des différents résultats obtenus par la recension de résultats dans le chapitre précédent, le groupe remarque que le fait de réaliser un EM a effectivement pu, dans la majorité des cas, favoriser une prise de conscience, car des effets positifs sur la consommation d’alcool ont été démontrés. Néanmoins, il ressort de la plupart de nos résultats qu’il faudrait continuer de mener des recherches sur ce qui fait que l’EM est efficace en étudiant d’autres facteurs que le contenu de l’entretien. Comme développé dans le chapitre « concepts », selon le modèle transthéorique du changement de Prochaska et DiClemente, il existe différentes phases. La prise de conscience engendrerait le passage de la précontemplation à la contemplation (Prochaska et al., 1997). La mise en exergue et la mise en lien des différents éléments présentés ci-dessus nous ont permis de répondre en grande partie à notre question PICOT. Cependant, les résultats des articles

n’ont pas permis de tirer des conclusions significatives quant à l’âge du mitan, malgré le fait que certaines études incluaient cette variable.

Nous constatons que les différents articles démontrent des éléments similaires à ceux ressortis dans la partie « concepts ». L’alcool se révèle effectivement être un réel problème de santé publique impactant le sujet à différents niveaux. Dans les différents articles analysés, tous les sujets souffraient d’une problématique alcoolique, celle-ci pouvant aller de l’abus de la substance jusqu’au diagnostic de dépendance. Nous ressortons au vu des résultats des articles et du concept « dépendance » qu’un dépistage précoce de la consommation d’alcool influence sur le processus de changement, d’où l’importance d’investiguer le mode de consommation de la personne hospitalisée. Par ailleurs, comme indiqué dans la partie « concepts », chaque sujet est singulier et chaque contexte d’apparition du trouble ainsi que chaque étape de changement le sont également.

Comme mentionné sous la partie « concepts », les éléments qui définissent l’EM sont multiples. Ce dernier est justement un style de conversation qui se doit d’être centré sur le patient. De plus, il tend à conduire une conversation avec la mobilisation de principes fondamentaux qui favorisent le partenariat soignant soigné, ce qui permet d’augmenter la motivation au changement tout en favorisant une prise de conscience du trouble alcoolique. Les articles mettent effectivement en lumière que l’EM a permis aux sujets de conscientiser la problématique, car un changement de comportement a été amorcé chez la plupart d’entre eux. Il est fortement

ressorti de ces derniers que le rôle des thérapeutes est primordial dans le processus de prise de conscience et de changement. Ce qui s’est révélé être efficace sont le type et la manière de mener l’entretien. Des résultats favorables concernant la consommation d’alcool sont présents, lorsque le thérapeute investiguait des éléments tels que le renforcement à la motivation, le désir et le besoin de changer, l’engagement, l’ambivalence ou toutes autres techniques propres à l’EM ainsi qu’à la relation d’aide.

De plus, ce type d’entretien peut être dispensé par tous les professionnels de la santé et de ce fait l’infirmière est tout à fait légitime dans cette pratique et la discipline infirmière est directement impliquée. Au vu des résultats présentés dans le sous-chapitre précédent, nous pouvons remarquer que la réalisation d’un EM sous forme d’interventions brèves a un impact positif sur la diminution de la consommation d’alcool. Une seule séance de cinq à vingt minutes peut déjà avoir un impact favorable sur la diminution de la consommation d’alcool. Puisque les interventions brèves sont de courte durée, elles peuvent se réaliser au cours d’une hospitalisation en soins aigus. Comme relevé par McQueen et al. (2017), l’hospitalisation accorde un moment de pause et de répit propices à la réflexion. De plus, l’hospitalisation permet aux patients de demander de l’aide après le séjour, et donc d’induire les prémices d’un changement de comportement. Nos divers articles ne définissent pas la prise de conscience en tant que telle. Néanmoins, nous avons constaté qu’au travers des différents EM sous forme d’interventions brèves, que les personnes ont eu une modification de

comportement ou ont évoqué des notions en lien avec la prise de conscience. L’article de Jones, Latchford, & Tober (2016), expose que plusieurs participants deviennent conscients de leur problème de consommation d’alcool suite à une intervention brève motivationnelle. Nous tirons la conclusion que pour que la personne entame un changement de comportement c’est qu’il y a une prise de conscience.

Pour terminer, nous souhaitons mettre en lien notre question PICOT avec la théorie en sciences infirmières de Margaret Newman Health as Expanding Consciousness Theory. Comme mentionné dans le chapitre concerné, la maladie permet l’expansion de la conscience à un niveau supérieur. L’infirmière, par le biais de l’EM, permet également d’acroître la conscience du patient. En ayant analysé nos différents articles, nous pouvons en déduire qu’une composante essentielle à la prise de conscience est la relation entre le soignant et le soigné.

Perspectives pour la pratique

En nous basant sur nos diverses recherches, les analyses des résultats mais également sur nos diverses expériences professionnelles et nos réflexions personnelles nous pouvons amener quelques pistes pour la pratique infirmière. En effet, il en résulte que l’EM sous forme d’intervention brève serait bénéfique pour diminuer la consommation d’alcool après avoir pris conscience de la problématique. Comme il est ressorti à moult reprises dans notre travail de Bachelor, l’alcool reste un problème majeur en matière de santé publique. Mis en exergue dans le chapitre « problématique », les coûts liés à alcool sont conséquents pour la Suisse. En effet, la dépendance à l’alcool s’élève à 4,2 milliards de Francs par année (Fischer et al., 2014). Réaliser un EM, en contexte hospitalier, permettrait d’engendrer un changement de comportement, ce qui permettrait une diminution des coûts de la santé. Outre le bénéfice financier, la réduction de la consommation d’alcool, grâce aux interventions brèves motivationnelles, augmenterait les comportements avantageux pour la santé et diminuerait les comportements dits à risque et donc potentiellement nocifs pour la santé, ceci dans l’optique de favoriser la santé. Sur la base des articles analysés, le justificatif du manque de temps est remis en question puisqu’une séance d’intervention brève motivationnelle serait suffisante afin d’amorcer la prise de conscience. Il est tout de même nécessaire de garder à l’esprit que le chemin vers le changement peut être long.

De plus, l’EM fait partie intégrante du cursus de formation en soins infirmiers de niveau universitaire en Suisse. C’est pourquoi, selon nous, chaque infirmière a la compétence et les connaissances pour l’exercer.

De temps à autre, en milieu hospitalier, la notion d’addiction est perçue comme étant un sujet délicat à aborder avec le patient. C’est pourquoi le soignant peut se sentir démuni face à la problématique de l’alcool et par conséquent mettre de côté l’aspect psychique de la prise en soins. Néanmoins, dans le but de valoriser les différents rôles infirmiers et favoriser la prise en soins holistique, il est important de ne pas omettre la sphère psychique en milieu somatique. C’est-à-dire qu’il faut éviter au maximum de dissocier les deux contextes.

En regard du rôle d’experte en soins infirmiers, l’infirmière a l’opportunité, au travers du recueil de données, d’amorcer un dépistage à l’aide d’outils adaptés pour une prise en soins optimale. De plus, les demandes provenant du patient peuvent être parfois explicites ou implicites. Puisque, selon le groupe, la notion d’addiction reste encore taboue, au sein de notre société ainsi que dans les services de soins, le patient ne demandera pas forcément de l’aide en tant que tel. Par conséquent, c’est à l’infirmière de pouvoir déceler les besoins tacites, comme l’a appuyé également l’expert du terrain.

Le changement de comportement est un long processus et relève du défi pour le patient. L’infirmière est tenue de donner de l’information et d’orienter la personne alcoolique à sa sortie de l’hôpital. En regard de notre pratique

professionnelle et des témoignages récoltés de deux experts du terrain, nous pouvons émettre la remarque suivante : idéalement, les hôpitaux et les institutions ambulatoires spécialisées en addictions devraient davantage collaborer dans le but d’optimiser la continuité des soins. Par ailleurs, selon Wagner et al. (2016), les professionnels de la santé devraient prendre contact avec le patient, au travers d’un appel téléphonique, une semaine après l’hospitalisation, ce qui aiderait à maintenir le changement de comportement car le patient se sentirait soutenu.

Pour terminer, une phrase d’un expert du terrain a retenu notre attention. Cette dernière relève qu’en tant que soignant, nous ne pouvons pas tout faire, mais ne rien faire serait dommage.