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Développement personnel et dimensions collectives

De : Yannick Lefebvre <yannick.lefebvre@reims.snes.edu>

Date : 15 mars 2012 22:32:11 HNEC Objet : documents

Bonjour

J'ai écrit un texte sur les difficultés des compléments de service (poste à cheval) en me servant de la réalité du travail que j'ai lu en CTSD. L'IA a été impressionnée et a recon-nu qu'il y avait plein de choses auxquelles elle ne pensait pas. Elle a proposé de s'en servir avec les chefs d'établissements.

Je pense que si je peux écrire des textes de cette nature, c'est par ma connais-sance du travail sur le travail, donc on peut le présenter comme un des effets de notre travail.

Tu peux le mettre dans le rapport donc.

Nous allons aussi nous en servir en CHSCT pour faire revendiquer la pénibilité de ces situations.

A bientôt Yannick

Madame la Directrice Académique des services départementaux des services de l’Education Nationale,

Comme tous les ans, nous allons étudier les compléments de services attribués à des collègues.

Vous n’êtes pas sans ignorer que les conditions de travail de ces collègues sont difficiles et plusieurs fois vous nous avez dit en avoir conscience. Cependant cette conscience ne semble pas partagée par tous les chefs d’établissement du département et un certain nombre de collègues nous font remonter des remarques ou des comportements de leur supérieur hiérarchique qui marquent un certain mépris pour leur situation.

Nous vous transmettons donc les problèmes et difficultés concrets et réels rencontrés par les collègues en complément de service afin que vous puissiez les porter à la connaissance des chefs d’établissements.

I°)

Le calendrier scolaire diffère d ’ un établissement à un autre pour : - les semaines A et B

- les conseils pédagogiques

- les réunions parents profs

- le renseignement des bulletins, l'arrêt des notes (entre quelques jours et un mois d’écart) - les conseils de classe

- l'épreuve d'Histoire des Arts - les réunions d’information diverses

- le renseignement et la validation des compétences

Les collègues en complément de service doivent tenir à jour un double (voire triple) calendrier et gérer les inévitables changements, quelque fois de dernière minute, qui les affectent. De fait, ils peuvent être conduits à assurer une présence à un nombre bien plus important de réunions, tout en étant absents à certaines dans chaque établissement. Parce que nous sommes des humains, la communication est essentiellement basée sur le dialogue et les rencontres : or, les professeurs en complément de service rencontrent plus rarement leurs collègues. Un sentiment d’isolement peut se développer aussi.

Les enseignants en complément de service ont, par ailleurs, sans cesse la sensation de travailler dans l'urgence car ils sont toujours en recherche d'informations.

Ils subissent le stress d’être amenés à devoir se justifier en cas d’erreur, d’oubli ou impossibilité d’assister à une réunion. Dans certains établissements, ils ressentent en effet souvent une suspicion du côté de la hiérarchie. Il leur arrive de se faire reprocher le manque de connaissance des informations. Plus graves, certains témoignent souvent de la mise en cause de leur crédibilité et de tentatives de culpabilisation. Ces personnels ressentent donc un manque de reconnaissance complet de leur travail et surtout un manque de reconnaissance des difficultés dans lequel il l'exerce

II°)

Le fonctionnement des établissements diffèrent sur de nombreux points quotidiens ou auxquels les collègues sont fréquemment confrontés.

• les Horaires de cours (début de cours à 7h55, 8h00, 8h05 etc ...). A cela, il faut ajouter le fait que les différents établissements peuvent ne pas être à la même heure.

• le fonctionnement de la reprographie (règles pour l’utilisation des machines, fonctionnement de ces dernières, des codes différents ...)

les logiciels pour remplir les bulletins et entrer les notes (sconet/pronote) les cahiers de texte numériques (différentes applications) ou non

les méthodes utilisées pour diffuser les informations : affichage, casier, Boîtes mail, écrit au tableau … Par ailleurs, les méthodes différent dans un même établissement selon les informations, les diffuseurs … cela se multiplie donc pour deux établissements, ou trois.

Il arrive aussi fréquemment que les boîtes mails soient submergées par des messages en double (transmission d’informations académiques ou nationales envoyées par chaque établissement à des moments différents) Technologie, le matériel d’expérience en SVT et Physique Chimie, le matériel d’EPS…)

le fonctionnement des gestionnaires et la répartition du budget : les démarches pour demander du matériel périssable, pour demander des investissements, pour préparer le budget d’une sortie …)

les modes de réservation et le fonctionnement de la salle informatique, multimedia, labo de langue ...

le fonctionnement du CDI

le fonctionnement de l’infirmerie

les lubies locales de chef d'établissement (qui peut exiger ici que pour déplacer une heure de cours on remplisse une fiche verte contresignée par l'adjoint, alors qu'ailleurs c'est le CPE qui gère cela tout etc.

Bien évidemment devant tant de cause de stress les enseignants en complément préfèrent revoir leur investissement à la baisse pour survivre. Mais là encore, ils doivent subir la suspicion quand ce ne sont pas des reproches directs.

Tout cela bien sûr ne fait état des difficultés que dans un fonctionnement optimal : elles ne prennent pas en compte les pannes, dysfonctionnements habituels que l'on rencontre quotidiennement sur les lieux de travail. Quelques exemples : la panne de la photocopieuse ; le simple manque de papier ; découvrir au dernier moment dans l'établissement que l'on connaît le moins que quelqu'un a emmené le poste de télé, le video projecteur ou tout autre matériel dont on a besoin ; serrure de la salle bloquée ..

Vous remarquerez aussi que ces difficultés ne concernent pas vraiment directement l'activité qui prend, normalement, le plus de temps à l'enseignant : enseigner à ses élèves, préparer ses cours et son enseignement ainsi que les évaluations et corriger ces dernières ...

III°) Dans la classe avec les élèves, bien des choses aussi varient d'un établissement à un autre :

- les salles, leur taille, la disposition des tables, fonctionnement de l’électricité (interrupteurs, prises), des volets, des radiateurs, des serrures… autant de choses qui ont leur importance lors d’un cours

- le matériel disponible dans les salles, son emplacement et son fonctionnement ( en particulier informatique mais aussi pour la simple utilisation des dictionnaires, de cartes murales par exemple). D’où la nécessité souvent de changer les cours en fonction de la disponibilité du matériel ou d’utiliser du matériel personnel (PC portable par exemple)

- le public des établissements est différent, donc la pédagogie et les cours doivent être adaptés. Il est quelquefois nécessaire de faire des cours complètement différents pour un même niveau pour deux établissements différents.

- les rituels de discipline ou d’entrée peuvent exister ou non, peuvent différer d’un établissement à un autre.

- les règles pour les sanctions et les punitions ou pour l’exclusion ponctuelle de cours (utilisation des carnets de correspondance, de fiche…)

- les règles pour la gestion des absences (billet à chaque heure ou en début de demi journée, cahier d’appel, appel informatique avec des postes qui fonctionnent plus ou moins bien, contenus

des différents billets à remplir …)

- le suivi des élèves est difficile faute de temps et de la multiplicité des interlocuteurs, de leurs responsabilités qui diffèrent d’un établissement à un autre et de leurs disponibilités différentes (les principaux, les principaux adjoints, les CPE, les AS, les infirmières).

Les professeurs en complément de service sont plus souvent contraints de s’installer en même temps que les élèves (ne peuvent pas toujours arriver avant) ce qui complique l’entrée en classe.

Bien souvent l’enseignant doit commencer un cours dans l'établissement juste après le trajet qui l'a amené de l'autre ce qui ne favorise pas la disponibilité nécessaire pour enseigner à 25 ou 30 élèves.

Bien sûr cette liste n’est pas exhaustive !

Ces difficultés concrètes et précises touchent des personnels (qui sont aussi des personnes) qui subissent souvent la fatigue de trajets plus nombreux (et à leur frais s’ils travaillent sur la même commune), ont un risque plus grand d’avoir un maximum de niveaux différents (avec quelquefois la nécessité de refaire des cours pour un même niveau selon l’établissement). Ils ont l’impression d'être sans cesse en déplacement et de ne jamais être un membre à part entière de l’établissement.

Le mot qui revient le plus souvent dans leur bouche pour décrire leur situation c’est « bouche-trou ». D’autres disent qu’ils ne sont pas des enseignants mais « 18 heures d’enseignement ». Ce n’est pas tant la situation du complément qui leur donne cette image d’eux-mêmes que la manière dont ils sont considérés.

Enfin, chaque année, de février à septembre, ils sont dans l'attente de savoir où ils vont se retrouver à la rentrée suivante … Incertitude très difficile à vivre. Pour certains, cela dure depuis des années et quelquefois il y a assez d’heures dans leur établissement pour leur éviter le complément de service qui leur est imposé.