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Développement des gerbes atmosphériques

50

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200

225

250

10

2

10

3

10

4

10

5

√s (GeV)

σ

(mb) p + p

Total Elastic

QGSJETII-04

EPOS LHC

EPOS 1.99

QGSJETII-03

TOTEM

FIGURE2.1 – Sections efficaces proton-proton totale et élastique, calculées avec EPOS LHC (ligne pleine), QGSGETII-04 (ligne pointillée), EPOS 1.99 (ligne tiretée) et QGSJETII-03 (ligne tiretée-pointillée). Les points correspondent aux données issues de [1] et les étoiles sont les mesures du LHC par l’expérience TOTEM [2]. A titre indicatif 1018eV correspondent à une cinquantaine de TeV dans le référentiel du centre de masse.

hadroniques dans des domaines cinématiques inexplorés. De plus l’étude du développe-ment de telles gerbes, nécessite une grande compréhension de l’atmosphère qui joue ici le rôle de calorimètre géant. L’intérêt est donc multiple et pluridisciplinaire, l’étude des gerbes atmosphériques faisant intervenir des disciplines dont on ne soupçonnerait pas le lien telles que la physique des particules ou les sciences de l’atmosphère. Dans ce chapitre nous nous intéresserons tout d’abord au développement des gerbes atmosphériques en s’attachant à décrire les différents processus entrant en jeu dans le développement des composantes élec-tromagnétiques et hadroniques de ces dernières. Nous présenterons ensuite les différentes observables relatives aux gerbes atmosphériques et permettant de remonter à leurs caracté-ristiques physiques. Enfin, nous passerons en revue les différentes méthodes de simulations de gerbes et discuterons les limites de validité de ces dernières.

2.2 Développement des gerbes atmosphériques

2.2.1 Première interaction

La première interaction du primaire avec un noyau de l’atmosphère constitue le déclen-cheur et la première étape du développement d’une gerbe atmosphérique. Que le primaire soit un proton ou un noyau plus lourd, sa section efficace est extrêmement importante et la quantité de matière traversée par ce dernier avant d’interagir est de l’ordre de1 g cm−2.

2.2 Développement des gerbes atmosphériques Le primaire interagit alors par interaction forte, produisant majoritairement des mésons et plus particulièrement des pions de façon extrêmement focalisée étant donné leur facteur de Lorentz. Ces particules vont alors initier et alimenter les composantes hadroniques et électromagnétiques de la gerbe.

Comme mentionné précédemment, les sections efficaces à ces énergies extrêmes sont su-jettes à de grandes incertitudes. En effet, aucune mesure de précision en accélérateur n’est disponible à des énergies suffisamment hautes et une extrapolation de ces sections efficaces est nécessaire. Grâce aux mesures de sections efficaces proton-proton au LHC, les incerti-tudes liées à l’extrapolation de ces dernières se sont néanmoins réduites récemment. Les me-sures effectuées au LHC notamment par LHCf permettent également de réduire de manière significative les incertitudes sur les modèles d’interactions hadroniques en général, notam-ment sur la multiplicité des particules dans l’état final. Sur la figure2.1sont représentées les différentes extrapolations de sections efficaces proton-proton pour différents modèles d’in-teractions hadroniques. On peut constater qu’aux énergies extrêmes la dispersion entre les différents modèles reste relativement importante. La réduction de ces incertitudes est im-portante dans le sens où la position du point de première interaction est la première source de fluctuations dans le développement d’une gerbe atmosphérique pour une composition de primaire donnée.

2.2.2 Evolution de la gerbe

Les mésons produits à la suite de la première interaction et qui vont alimenter la gerbe atmosphérique sont alors sujets à deux types de processus distincts. Etant donnée leur très faible longueur de désintégration à ces énergies, ils sont susceptibles d’une part d’interagir avec les noyaux de l’atmosphère à l’instar du primaire. Ils sont, d’autre part, susceptibles de se désintégrer. Dans le cas d’une interaction avec un noyau de l’atmosphère et du fait de l’énergie élevée, de nombreux mésons secondaires seront de nouveaux créés. Les particules produites dans ces interactions le sont de façon préférentielle vers l’avant, coïncidant plus ou moins avec la direction initiale du primaire, et seront concentrées autour de l’axe de la gerbe, constituant son cœur.

La désintégration de ces mésons, quant à elle, va alimenter les composantes électroma-gnétique et muonique de la gerbe atmosphérique. En effet, la désintégration des mésons chargés produit des muons et des neutrinos :

π+µ+νµ

πµ¯νµ

99.99% (2.1)

Quant à la désintégration des kaons chargés, elle produit de nombreux états finals à deux ou trois particules. Cependant, les deux principaux canaux sont les suivants :

K+µ+νµ Kµ¯νµ � (63.43%) K+ π+π0 Kππ0 � (21.13%) (2.2)

Les pions et kaons chargés vont donc essentiellement alimenter la gerbes en muons. Cepen-dant, les kaons, de par la diversité de leurs canaux d’interactions, vont également contribuer à alimenter la composante électromagnétique de la gerbe par le biais de pion neutres.

Rayon cosmique Particule leader Cascade nucl´eique Azote mol´eculaire m 0 2m ± ±d´esint´egration e+ e e+ e

Cascade pionique Cascade ´electromagn´etique

Nucl´eons

(proche de l’axe de la gerbe)

Composante muonique Composante´electromagn´etique Sol

e±

e± e±

µ µ µ

FIGURE2.2 – Développement schématique d’une gerbe atmosphérique. On suppose ici un

nucléon comme primaire. La gerbe résultante est constituée de 3 composantes : la cascade nucléique correspondant aux fragments du primaire, la cascade hadronique (mésons) et la cascade électromagnétique (e+eet photons).

2.2 Développement des gerbes atmosphériques En effet, les pions neutres produits dans la gerbe sont particulièrement intéressants puis-qu’ils vont alimenter la composante électromagnétique de la gerbe en se désintégrant majo-ritairement en paire de photons :

π0γγ(98.8%), (2.3)

ces photons interagissant alors pour créer des paires e+e, produisant à leur tour de nou-veaux photons. Ces processus sont particulièrement importants puisque la composante élec-tromagnétique constitue 99% du contenu en particule de la gerbe et près de 80% de son énergie.

On trouvera une représentation schématique du développement des différentes compo-santes d’une gerbe atmosphérique sur la figure2.2. Dans la suite de cette section, nous nous attacherons à décrire plus en détail le développement des composantes hadronique et élec-tromagnétique de la gerbe ainsi que les différents processus mis en jeux.

2.2.3 Cascade électromagnétique

Le développement de la composante électromagnétique de la gerbe fait intervenir des processus très bien décrits. La description de cette composante est par conséquent beau-coup moins sujette aux incertitudes que l’on peut rencontrer dans le cas de la composante hadronique. Les processus principaux qui gouvernent le développement d’une cascade élec-tromagnétique sont les processus dits radiatifs, c’est-à-dire la création de paires dans le cas des photons et le bremsstrahlung pour les électrons. On rappelle ici que la création de paires consiste en la production d’une paire e+epar un photon et le bremsstrahlung à l’émission d’un photon par un électron, dans les deux cas par interaction avec le champ électroma-gnétique d’un noyau. Ces processus sont très bien décrits jusqu’aux très hautes énergies, notamment grâce aux sections efficaces de production de paire et de bremsstrahlung propo-sées par Bethe et Heitler et sur lesquelles nous reviendrons plus en détail au chapitre6dans le cas de l’étude du développement des gerbes électromagnétiques en milieu dense.

Bien que les processus radiatifs constituent les processus dominant dans le développe-ment d’une cascade électromagnétique à haute énergie, d’autres processus peuvent jouer un rôle, particulièrement à plus basse énergie, tels que les pertes d’énergies par ionisations pour les électrons et positrons ou encore la diffusion Compton pour les photons. Ces pro-cessus restent néanmoins négligeables.

Enfin, afin de décrire correctement le développement d’une cascade électromagnétique à très haute énergie, il est nécessaire de prendre en compte l’effet LPM, tirant son nom des physiciens Landau, Pomeranchuk et Migdal. Nous parlerons en détail de cet effet au cha-pitre6. Ce dernier introduit une suppression des sections efficaces de production de paire et de bremsstrahlung et a des conséquences sur les longueurs de radiations des photons, élec-trons et posiélec-trons de la gerbe, en produisant un “retard” de développement de la cascade électromagnétique. Il est d’autant plus prépondérant que l’énergie des particules de la gerbe est élevée.

On peut décrire de façon relativement simple et schématique le développement d’une gerbe électromagnétique grâce au modèle de Heitler [3] afin de s’en faire une idée générale. Pour cela, il nous faut tout d’abord définir l’énergie critique Ec, qui correspond à l’énergie en

deçà de laquelle les processus de perte d’énergie commencent à être prédominants par rap-port aux processus radiatifs, c’est-à-dire à la production de paire et au bremsstrahlung : en deçà de cette énergie critique la gerbe cesse de se développer. Le modèle de Heitler repose alors sur le schéma suivant : partant d’une énergie initiale E supérieure à l’énergie critique Ec, le résultat d’une interaction est toujours une paire de particules dont on suppose que chacune ait la même énergie. Après un nombre d’étapes n, le nombre total de particules est alors 2net leur énergie totale ∝ 2n. Chaque interaction a lieu après une longueur λ= X0ln 2 correspondant à la distance après laquelle une particule a perdu la moitié de son énergie, où X0est la longueur de radiation électromagnétique (X0=37g cm−2dans l’air). La gerbe croît alors jusqu’à l’énergie critique Ec, énergie à laquelle les particules seront arrêtées au bout d’une longueur de radiation en moyenne. Le maximum de développement de la gerbe est donc atteint après un nombre d’étapes nmaxtel que Ec = E0/2nmax. La profondeur du maxi-mum de développement de la gerbe est alors donné par Xmax = X0ln(E0/Ec)

ln(2) , et le nombre moyen de particules au maximum par Nmax = E0/Ec. On remarquera que la profondeur du maximum de développement est proportionnelle à ln(E/E0)et que le nombre moyen de particules au maximum varie linéairement avec l’énergie.

A partir de ce modèle on peut appréhender les principales étapes du développement d’une gerbe électromagnétique. On peut distinguer trois phases distinctes : une phase de croissance de la gerbe où le nombre de particules est croissant grâce à l’alternance entre création de paires et bremsstrahlung jusqu’à atteindre le maximum de développement de la gerbe lorsque les particules la constituant atteignent leur énergie critique. Enfin, une fois ce maximum atteint, s’ensuit une phase d’extinction où les particules vont perdre la totalité de leur énergie.

Un tel modèle ne permet cependant pas une description fine et détaillée d’une gerbe élec-tromagnétique et ne permet de décrire que des comportements moyens, aucune fluctuation n’étant introduite ici. Pour une meilleure description du développement de la gerbe il faut alors faire appel à des simulations Monte Carlo détaillées.

2.2.4 Cascade hadronique

La description du développement d’une cascade hadronique est bien plus complexe que dans le cas d’une cascade électromagnétique. En effet, les processus intervenant dans le dé-veloppement d’une telle gerbe sont complexes et à l’heure actuelle relativement mal décrits, particulièrement aux premières étapes du développement. Comme mentionné précédem-ment, la première interaction du primaire avec un noyau de l’atmosphère conduit à une fragmentation du primaire et du noyau cible. Ces fragments, produits de façon extrêmement focalisée étant donné le facteur de Lorentz, vont constituer le cœur de la gerbe hadronique.

Les mésons, également produits lors de cette première interaction, vont en partie alimen-ter la composante électromagnétique de la gerbe comme mentionné en2.2.1. A chacune des étapes du développement de la cascade hadronique30% de l’énergie est cédée aux π0et par conséquent à la composante électromagnétique. 90% de l’énergie totale de la gerbe se re-trouve sous la forme d’électrons, positrons et photons dont l’énergie moyenne est de l’ordre d’une dizaine de MeV. Tant que la longueur d’interaction des pions chargés demeure infé-rieure à leur longueur de désintégration, ils continuent d’interagir et d’alimenter la cascade

2.3 Observables