• Aucun résultat trouvé

1  Contexte et Analyse Bibliographique

1.1  Rappel sur les différents modes de combustion de prémélange

1.1.3  La détonation

On peut reporter sur un graphe les délais mesurés par différentes MCR, i.e. avec différents temps de compression, en fonction de l’intégrale de Livengood-Wu calculée à la fin de la compression LWI (tEOC). Dans le cas où la compression est infiniment rapide, les réactions n’auraient pas commencé à la fin de la compression, et donc l’intégrale de Livengood-Wu serait égale à 0. En faisant tendre linéairement LWI(tEOC) vers 0, il apparaît possible de retrouver le délai d’auto-inflammation idéalisé considérant une compression instantanée.

L’historique de compression a donc une grande importance dans la détermination de délai d’auto-inflammation et plus encore sur le processus d’apparition de ce mode de combustion. La pré-étude présentée ci-dessus met d’ailleurs en évidence que cet effet est d’autant plus important dans le cas d’une compression lente et se traduit par une apparition plus précoce de l’auto-inflammation dans une chambre fermée. Il sera pris en compte dans la suite du manuscrit.

1.1.3 La détonation

Le mode de propagation de la détonation est communément représenté comme une discontinuité réactive plane supersonique se propageant dans les gaz. Chapman et Jouguet ont été les premiers à étudier qualitativement le régime de détonation. Leur modèle le représente comme une discontinuité plane et unidirectionnelle, à travers laquelle les réactions chimiques sont réalisées instantanément. Plus tard, Zeldovich, Von Neumann et Döring, à partir du modèle

Chapman-Page 55/290

Jouguet, représentèrent la détonation comme une discontinuité, un choc précurseur, suivi d’une zone de réaction. Ces deux modèles sont expliqués plus bas. Un rappel sur la structure tridimensionnelle de la détonation mettra en avant l’importance de la taille de cellule sur l’existence d’une détonation dans une chambre.

1.1.3.1 Modèle de détonation de Chapman Jouguet

Le premier modèle de détonation a été développé en 1889 et 1904 respectivement par D.L.Chapman [58] et E.Jouguet [59] en s’appuyant sur les premières observations de la détonation par Mallard, Vieille et Le Châtelier (1883). Ils ont tous deux basé leur théorie sur les travaux de Rankine (1870) et Hugoniot (1887,1889) qui se sont intéressés aux équations de conservation derrière un choc. Le modèle de détonation développé par Chapman et Jouguet (Figure 1-11) est basé sur un certain nombre d’hypothèses :

 L’onde de détonation est considérée comme une discontinuité plane, mince, stationnaire et de vitesse absolue 𝐷 constante. La vitesse de propagation de ce front est celle des perturbations acoustiques dans les gaz brûlés. Elle est définie par l’équation (1-16).

𝐷𝐶𝐽 = (𝑢 + 𝑐)𝐶𝐽 (1-16)

Avec u la vitesse des gaz brûlés et c la vitesse du son dans les gaz brûlés.

 Passage de l’état (0) à l’état (1) par une réaction chimique complète et instantanée  Absence de tout phénomène dissipatif lors du passage de l’état (0) à l’état (1). Les

transports de masse et de chaleur sont également négligés  On suppose les gaz parfaits

Figure 1-11 Représentation schématique du modèle de Chapman Jouguet

Le développement des équations bilans de masse, de quantité de mouvement et d’énergie pour retrouver le rapport de pression engendré par le passage de la détonation est détaillé en Annexe E. L’objectif de Chapman a été de trouver un critère de vitesse minimum pour obtenir une détonation. Jouguet, quant à lui, s’est intéressé aux différents lieux des états thermodynamiques satisfaisants pour une détonation. Il a également calculé l’entropie le long de la courbe d’Hugoniot pour en extraire un minimum, on parle du critère de Jouguet. Il s’est également aperçu que ce minimum entropique correspondait à une condition de vitesse sonique dans les gaz brûlés. C’est aujourd’hui ce qui est communément appelé le critère CJ. Jouguet a également montré que, dès qu’un front de détonation a tendance à se propager à une célérité plus importante que la célérité CJ, issue d’une détonation forte, une onde de détente rattrape l’onde de détonation et la ralentit.

Page 56/290

1.1.3.2 Modèle de détonation de Zel’Dovich van Neumann Döring (ZND)

Le modèle de Chapman Jouguet n’est cependant pas suffisant pour prédire les sauts de pression engendrés par la propagation d’une onde de choc dans le milieu. De plus, ce modèle permet de décrire uniquement la propagation autonome et stationnaire d’une détonation.

Zeldovich [60], Neumann [61] et W.Döring [62] ont « complété » le modèle de Chapman Jouguet en décrivant non plus l’onde de détonation comme étant infiniment mince, mais en la décomposant en une onde de choc se déplaçant à la vitesse CJ, une zone d’induction dans laquelle les gaz choqués se décomposent, et une zone de réaction, siège des réactions chimiques d’auto-inflammation du mélange réactif (Figure 1-12).

L’onde de choc amont crée un saut de température, de pression, et de masse volumique dans les gaz frais. Cette augmentation permet d’atteindre rapidement un état thermodynamique favorisant l’apparition du phénomène d’auto-inflammation des gaz frais (PZND, TZND et 𝜌ZND). Ces explosions thermiques successives vont venir alimenter l’onde de choc en énergie par libération de chaleur, et par augmentation du volume des gaz brûlés, ce qui lui permet de poursuivre son développement. La distance entre la zone de réaction et l’onde de choc est la longueur d’induction chimique 𝐿 .

À l’aval de la zone de réaction, on retrouve une vitesse de déplacement sonique caractéristique de l’état de Chapman Jouguet. Ainsi, aucune perturbation issue des gaz brûlés ne peut rattraper l’onde de détonation et donc la perturber.

Figure 1-12 Front de détonation ZND (D = constante DCJ) et évolution de la pression P et de la température T derrière celui-ci [8]

En résumé, l’ensemble des transformations subies par les gaz frais, lors d’une détonation autonome, suivrait ce modèle en quatre étapes :

 La compression des gaz frais par l’onde de choc jusqu’à l’état thermodynamique ZND (calculé à l’aide des relations de saut)

 Le temps d’induction chimique, permettant aux réactions d’auto-inflammation de se produire dans les gaz choqués, sur l’épaisseur de la zone d’induction 𝐿 .

Page 57/290  La forte libération d’énergie dans la zone de réaction

 Les produits de détonation subissent ensuite une détente de Riemann après la section sonique caractérisée par l’état CJ.

1.1.3.3 Comportement tridimensionnel de la détonation

Denisov et Troshin [63] ont montré que le front de détonation est localement instable. En effet, il est constitué d’ondes de chocs et de fronts réactifs qui se propagent de manière longitudinales et transversales donnant une structure tridimensionnelle au front de détonation. Ils ont également montré que cette structure se retrouvait quelles que soient les conditions de mélange, de température, et de pression dans la chambre, la rendant universelle.

La Figure 1-13 met en lumière l’évolution de cette structure au cours du temps. Elle est composée de trois types de fronts différents :

 Des ondes de Mach

 Des ondes de choc transverses

 Des ondes de choc longitudinales suivies de la zone de réaction

Le point d’interaction entre ces trois ondes est appelé « point triple ». Sa trajectoire dessine un motif en losange appelé « cellule de détonation », dont la plus grande longueur mesurée perpendiculairement à la propagation de la détonation est noté 𝜆.

Figure 1-13 Représentation schématique de la propagation d’un front de détonation et de sa structure 2D au cours du temps [64]

Cette cellule de détonation peut être assimilée à un marqueur du couplage entre la zone réactive et le choc. Shchelkin et al. [65] ont d’ailleurs établi une relation de proportionnalité entre la taille de cellule 𝜆 et la longueur de la zone d’induction Li (équation (1-17)).

Page 58/290

La valeur de k est très sensible aux conditions. Ainsi, on pourra observer une grande dispersion de cette dernière pour un même mélange et des conditions différentes de pression P0 et de température T0 devant le choc.

Plus encore, la cellule correspond à un marqueur d’existence d’une détonation. En effet, Peraldi et al. [66] ont montré que si la taille de cellule est supérieure à la plus petite dimension du tube, alors l’installation et la propagation d’une détonation est impossible. Plus précisément, Vasilev dans le chapitre 4 de l’ouvrage de revue de Zhang [67] a également montré que, pour un tube de section rectangulaire (l x h), la détonation ne peut pas se propager si la plus petite distance transversale dans la chambre est supérieure à une certaine valeur dépendant de la taille de la cellule et de la géométrie du tube (1-18).

𝑑 ≥𝑟 + 1 2𝜋 𝜆

(1-18) Avec 𝑑 min 𝑙, ℎ et r = 𝑙

.

Ainsi, une estimation de la taille de cellule, issue d’un calcul ZND de longueur d’induction dans le cas où une détonation se propagerait dans la chambre, permet déjà de vérifier qu’une détonation peut se propager dans la chambre.

1.2 Les transitions de régime de combustion