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Détermination des paramètres de création et de recuit

Pour être en mesure de résoudre l’équation différentielle (VI-9), il faut déterminer les valeurs numériques de V0(T), c(T) et R(T). Pour la fluoroapatite phosphocalcique, ces paramètres sont connus en fonction de la température. En revanche pour la fluoroapatite à un silicate, V0(T) et c(T) ne sont connus qu’à température ambiante et le recuit thermique, défini par R(T), n’a pas été mesuré. L’évolution thermique de V0(T), c(T) et R(T) a donc été supposée être la même que pour la fluoroapatite phosphocalcique pour un premier calcul de l’évolution du désordre en fonction du temps.

Par ailleurs, l’équation différentielle (VI-9) dépend de l’énergie E des particules alpha et du volume désordonné V0(T) créé par un recul alpha, mais dans la filiation radioactive de 244Cm, E et V0(T) varie en fonction du temps puisqu’il y a deux noyaux émetteurs alpha différents 244Cm et 240Pu, ce qui complique le calcul. On peut pour simplifier le problème, considérer que comme la différence de masse entre les deux noyaux de recul (240Pu et 236U) est très faible, l’énergie de recul, et par conséquent V0(T), sont avec une bonne approximation proportionnels à l’énergie de la particule alpha. Si V0(T) et E varient dans la même proportion, l’équation (VI-7) montre qu’il y a qu’une très petite influence sur le niveau de désordre à l’équilibre,

y

eq. Ainsi, l’énergie de la particule alpha et la valeur de V0(T) correspondant à l’actinide introduit dans l’apatite peuvent également être utilisées pour l’élément fils (240Pu).

1. Terme de création de défauts, V0(T)

Pour pouvoir utiliser l’équation différentielle (VI-9), il reste à définir le terme de création de défauts qui est le volume amorphe moyen V0(T) créé par chaque recul alpha en fonction de la température de la matrice. Pour cela, on peut utiliser les volumes amorphes V(T) créés par les ions plomb de 320 keV dans les deux compositions d’apatite considérée (chapitre IV), en faisant l’hypothèse que les volumes V(T) et V0(T) sont dans le rapport du nombre d’atomes déplacés, calculé par le code de calcul SRIM 2000 [Ziegler] (tableau VI-3).

Pour résoudre l’équation différentielle à 60°C et 100°C, les valeurs des V0 doivent être diminuées puisque le taux de création des défauts diminue quand la température augmente

(tableau VI-3). Le facteur de réduction de V0(T) peut être évalué à partir des courbes donnant l’évolution de la dose critique d’amorphisation en fonction de la température [Ewing 3, Wang 1], puisque la dose nécessaire à l’amorphisation est inversement proportionnelle à V0(T) lorsque le modèle d’impact direct s’applique. Dans la fluoroapatite phosphocalcique, la valeur de V0

obtenue expérimentalement à 25°C doit être diminuée par un facteur 1,3 et 1,7 respectivement pour 60°C et 100°C. Dans le cas de la fluoroapatite à un silicate pour obtenir les valeurs à 60°C et 100°C, il n’existe pas de données permettant de connaître la variation de V0(T) en fonction de la température, nous utiliserons donc, en première approximation, les mêmes facteurs de réduction. Matrices V(25°C) (cm3) An V0(25°C) (cm3) V0(60°C) (cm3) V0(100°C) (cm3) Ca9.95An0.05(PO4)5.95(SiO4)0.05F2 3,3×10-19 244Cm 1,14×10-19 8,8×10-20 6,7×10-20 Ca9.95An0.05(PO4)5.95(SiO4)0.05F2 3,3×10-19 239Pu 1,05×10-19 8,1×10-20 6,2×10-20 Ca9Nd0.5An0.5(PO4)5(SiO4)F2 2,2×10-19 244Cm 7,9×10-20 6,1×10-20 4,6×10-20

Tableau VI-3 : Terme de création de défauts isolés : volumes amorphes, V, créés par chaque ion plomb à 25°C ; volumes amorphes V0 créés par chaque recul alpha, à 25, 60 et 100°C pour 2 compositions de matrice

fluoroapatite.

2. Terme de recuit thermique, R(T)

Les vitesses de recuit thermique R(T) de défauts isolés sont extrapolées à partir des paramètres (Ea, F) [tableau VI-1], précédemment déterminés grâce à des mesures de recuit de couches amorphes effectuées à haute température sur des monocristaux de fluoroapatite phosphocalcique orientés selon l’axe c et selon la direction <110> [Ouchani 3]. Ces valeurs (Ea, F) permettent d’évaluer les vitesses de déplacement de l’interface (dL/dt) le long des directions cristallines <110> et c. Elles sont respectivement de 2,75×10-15 cm/an et 7,13×10-17 cm/an à 60°C. Pour les défauts isolés, toutes les orientations cristallines sont présentes mais c’est l’orientation où le recuit est le plus rapide qui imposera sa vitesse.

Pour l’estimation du recuit thermique, les résultats obtenus le long de la direction<110> ont donc été utilisés. Ainsi, pour Ca10(PO4)6F2, R(60°C) est égal à 7×10-8 an-1, en utilisant l’équation (VI-2) avec un volume amorphe moyen :

v = V

0

(60°C)/2 4×10

-20cm3 et une

surface

s 10

-12cm2. Cette vitesse de recuit thermique correspond à une période de demi-vie

(

t

1/2th) des défauts isolés égale à 10 millions d’années. Cette valeur obtenue par extrapolation de

mesures réalisées à des températures beaucoup plus hautes, est entachée de grandes barres d’erreur. Elle est estimée à un facteur 5 près en tenant compte d’une incertitude de 0,1 eV sur l’énergie d’activation du recuit thermique.

La très longue durée de vie de ces défauts démontre que le recuit thermique est toujours négligeable lorsqu’il est comparé au processus de recuit par alpha sauf si (i) le débit de dose est très faible comme dans le cas des analogues naturels (ii) les températures de stockage ou d’entreposage sont élevées (tableau VI-4).

Pour Ca9Nd(PO4)5(SiO4)F2 les différents R(T) ont été évalués en utilisant la même vitesse de déplacement de l’interface que pour la fluoroapatite phosphocalcique et les valeurs de V0(T) intervenant dans le calcul de R(T) sont consignées dans le tableau VI-3 (tableau VI-4).

Matrices Température (°C) (dL/dt) (cm/an) R(T) (an-1)

t

1/2th (an) Ca9.95An0.05(PO4)5.95(SiO4)0.05F2 60 2,75×10-15 7×10-8 107

Ca9Nd0.5An0.5(PO4)5(SiO4)F2 60 2,75×10-15 7,5×10-8 9×106

Ca9Nd0.5An0.5(PO4)5(SiO4)F2 100 6,90×10-13 2,3×10-5 30000

Tableau VI-4 : Vitesse de recuit thermique, R(T) de défauts isolés et période de demi-vie thermique, t1/2th, à 60 et 100°C pour 2 compositions de matrice fluoroapatite.

3. Terme de recuit par alpha, c(T)

Les expériences de MET in situ, décrits dans le chapitre V, ont permis de déterminer c(35°C), le volume de cristal désordonné recuit par eV déposé par les particules alpha dans Ca10(PO4)6F2 et Ca9Nd(PO4)5(SiO4)F2. Comme l’équation (V-3) décrit l’évolution de c(35°C) en fonction du nombre de groupements silicate par maille, il est possible de déterminer précisément c(35°C) pour Ca9.95An0.05(PO4)5.95(SiO4)0.05F2 et Ca9Nd0.5An0.5(PO4)5(SiO4)F2.

Dans la fluoroapatite phosphocalcique, l’énergie d’activation thermique du processus de recuit par alpha est de l’ordre de 0,1 eV. A 60 et 100°C, l’efficacité de recuit mesurée, c(35°C), doit donc être augmentée respectivement d’un facteur 1,3 et d’un facteur 1,9. Cette énergie d’activation n’étant pas connue pour la fluoroapatite à un silicate, elle a été supposée identique à celle de la fluoroapatite phosphocalcique (tableau VI-5).

Matrices c(35°C) (cm3/eV) c(60°C) (cm3/eV) c(100°C) (cm3/eV) Ca9.95An0.05(PO4)5.95(SiO4)0.05F2 7,7×10-26 10,0×10-26 14,6×10-26 Ca9Nd0.5An0.5(PO4)5(SiO4)F2 2,5×10-26 3,2×10-26 4,7×10-26

Tableau VI-5 : Volume de cristal recuit par eV déposé par les particules αpour 2 compositions de matrice

fluoroapatite. Ce volume a été mesuré à 35°C (chapitre V), et évalué à 60 et 100°C grâce à l’énergie d’activation du recuit par alpha dans la fluoroapatite phosphocalcique égal à 0.1 eV.