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Chapitre 1. Introduction

1.4 Analyse des cyanotoxines

1.4.2 Essais biologiques

1.4.3.5 Détection par spectrométrie de masse

En règle générale, pour des fins qualitatives et quantitatives, la GC et la HPLC sont couplées avec une détection en spectrométrie de masse (MS) en simple et triple quadripôles.

La détection se fait par la distinction des composés en phase gazeuse selon leur charge une fois ionisés, donnant une valeur de masse sur charge (m/z) et de leur abondance relative aux autres ions dans le système. Les sources d’ionisations peuvent varier, mais les techniques d’ionisations les plus utilisées sont l’impact électronique (EI) en GC-MS et la nébulisation électrostatique (ESI) en HPLC-MS.

L’ionisation par EI en GC-MS se déroule en phase gazeuse et à très basse pression. Des électrons sont soumis à une énergie de 70 eV pour être accélérés et concentrés en faisceau. Ce faisceau atteindra les molécules neutres en phase gazeuse et ce bombardement permettra un transfert d’énergie et l’ionisation des molécules en éjectant un électron et formant un cation radicalaire (M+). La haute énergie cinétique des électrons induit des

réactions de clivage qui sont prévisibles et les signaux obtenus permettent d’obtenir des informations sur la structure des composés. Les ions ainsi formés se dirigent finalement vers l’analyseur.

En HPLC-MS, le mode d’ionisation le plus utilisé pour les cyanotoxines est l’ESI qui peut être couplé à l’analyseur MS à la sortie du LC. Contrairement à l’EI, cette ionisation nécessite un échantillon en état liquide, d’où l’intérêt de l’utiliser en amont de la HPLC. Sensible aux composés polaires, elle est considérée comme étant une source d’ionisation douce, étant donné que très peu de fragmentation se produit, limitant ainsi l’étude structurelle des composés, mais peut produire des ions multi chargés permettant l’ionisation de composés à haute masse moléculaire (> 100 kDa) [146]. Le solvant provenant de la séparation en HPLC est injecté en continu dans le système d’ionisation, et est dispersé en fines gouttelettes d’aérosols. Des additifs peuvent être ajoutés pour augmenter la conductivité de la solution, tel l’acide formique qui agit comme source de protons supplémentaire pour faciliter l’ionisation. Une différence de potentiel (quelques kV) positive ou négative est appliquée au bout d’une aiguille à décharge corona et conférera une charge aux gouttelettes. Elles sont alors attirées par le vide du détecteur MS qui est alors chauffé à environ 300 °C. Au fur et à mesure que le solvant s’évapore, les gouttelettes chargées deviennent instables par augmentation de densité de charges et après avoir atteint la limite de Rayleigh, les répulsions électrostatiques deviennent plus importantes que la tension de surface et une fission de Coulomb se produit,

créant une explosion des gouttelettes, devenant plus petites et plus stables. Les solvants évaporés, les ions, le plus souvent formés d’un ajout ou d’un retrait de proton selon la polarité du voltage appliqué à l’entrée de l’analyseur, se dirigent vers le premier quadripôle du système MS, où ils seront filtrés.

Suite à l’ionisation, les ions sont sélectionnés et séparés par un analyseur soit à simple quadripôles ou triple quadripôles. L’analyseur, schématisé à la Figure 1-9, est constitué de

quatre électrodes hyperboliques ou cylindriques parallèles. Une différence de potentiel est appliquée aux électrodes opposés, deux à potentiel positifs et deux à potentiels négatifs. Le champ électrique créé par les différents potentiels appliqués aux électrodes quadripolaires permet de modifier la trajectoire des ions en fonction de leur valeur en m/z. En effet, selon le potentiel appliqué, certains ions auront une trajectoire stable et traverseront le quadripôle pour aller au détecteur tandis que les autres ions instables seront éjectés. Ce système sert alors de filtre de masse afin de sélectionner les ions d’intérêts au profit des composés non désirés. Un simple quadripôle permet l’analyse en deux modes, soit en balayage complet ou full scan (FS) ou en suivi d’ions sélectionnés ou selected ion monitoring (SIM). Le mode en FS est un balayage large permettant d’obtenir une détection de tous les ions présents dans un spectre de masse entre les deux valeurs choisies en m/z, qui seront filtrés par le quadripôle. Ce mode sert à des fonctions qualitatives afin d’identifier les composés présents dans un échantillon. Le mode SIM, quant à lui, sélectionne une masse spécifique, avec une fenêtre de sélection en masse autour de l’unité, avant d’être transféré au détecteur, un multiplicateur d’électrons transformant le courant des ions le frappant en intensité. Ce mode, principalement utilisé à des fins quantitatives, est beaucoup plus sensible, car il élimine considérablement le bruit de fond, augmentant ainsi le rapport signal sur bruit (S/N).

Figure 1-9. Schématisation d’un triple quadripôle et le fonctionnement du mode d’acquisition

SRM.

Le système en MS le plus populaire de nos jours est le triple quadripôle faisant partie des spectromètres de masse en tandem (MS/MS) due à sa double dimension en terme séparation des ions. Le système, illustré à la Figure 1-9, est constitué d’un premier quadripôle

(Q1), suivi d’un quadripôle servant de cellule de collision des ions (q2) et finalement un troisième quadripôle (Q3) est utilisé pour une deuxième séparation des ions. La grande différence réside dans la cellule de collision qui permet la fragmentation des ions préalablement sélectionnés par le Q1. Aucun potentiel n’est appliqué afin de stabiliser les ions et un gaz inerte, généralement de l’argon, est soumis à une différence de potentiel (10 à 100 eV) et l’énergie cinétique du gaz induira une fragmentation par collision créant des ions radicaux qui seront transportés vers le Q3.

L’utilisation de quadripôles en série permet de faire des analyses en simple MS ou en MS/MS. En plus des modes obtenus en simple MS, un triple quadripôle permet la sélection d’ions fragments produits, le suivi de réaction ciblée ou selective reaction monitoring (SRM). Ainsi, un ion dit précurseur, pourra être fragmenté et ces ions, dits fragments, seront sélectionnés pour être séparés permettant ainsi une double sélectivité d’analyse. Le plus grand avantage d’un détecteur MS/MS est sa grande sélectivité permettant d’éliminer un grand nombre d’interférents. Les résultats obtenus sont aussi beaucoup plus sensibles dû à une

élimination considérable du bruit de fond augmentant ainsi le rapport S/N pour des analyses quantitatives.

L’analyse par MS est largement utilisée pour la détection des cyanotoxines due à sa notable sélectivité et sa grande sensibilité. En effet, la détection utilisant le ratio m/z réduit considérablement la probabilité d’avoir des interférents et ce, dans des matrices très chargées. De plus, la MS/MS permet une identification plus spécifique liée aux patrons de fragmentation des cyanotoxines étudiées [11]. Par exemple, les MC ont pu être identifiées individuellement à l’aide des standards disponibles, mais aussi à l’aide de la méthode des MC totales utilisant l’oxydation de Lemieux [53]. Par contre, l’ANA-a possède un interférent, la phénylalanine, dont les masses précurseurs et fragments sont trop proches pour être détectées par MS et MS/MS. C’est pour cette raison que la séparation chromatographique est essentielle pour cette toxine [143]. De plus, la même problématique s’applique au BMAA, qui possède des isomères de conformation possédant des masses identiques [141]. Finalement, des méthodes multi- toxines très sensibles ont aussi été développées pour l’analyse simultanée des MC, de NOD, d’ANA-a, de CYN, et de STX utilisant la HPLC-MS/MS [122, 147-149].