Ségrégation cellulaire Plasticité cellulaire Reprogrammation ApoptoseD
III: Nerf occulomoteur
2.4. Dérivés neuronaux du rhombencéphale
2.4. Dérivés neuronaux du rhombencéphale
Le rhombomère 1 dérive au stade adulte en cervelet, tandis que la région r2-r7 donne naissance au pons et à la medulla oblongata. Nous centrerons le propos sur ces deux dernières structures. Le pons et la medulla sont peuplées de neurones, organisés en noyaux, aux fonctions aussi diverses que les mouvements du cou, de la face, la mastication, la déglutition, le contrôle du rythme respiratoire, de la pression artérielle, de la température corporelle. Au stade adulte, l’anatomie de cette région est dominée par l’organisation segmentée de huit des douze nerfs crâniens (du V au XII) et des ganglions associés (Figure 8A, B, C). Des expériences de traçage ont été réalisées pour savoir s’il existe un lien entre la segmentation du rhombencéphale et l’architecture des nerfs
Noyau Type dans...Spécifié par... Cibles Remarques Trijumeau moteur Trijumeau (V) r2-r3 (s,p)
r5 (s), r5-r6 (p) Hoxa3/b3
Facial moteur Facial (VII) r4 (s), r4-r5 (p) Hoxa1/b1
Facial (VII) r5 (s)
r6 (s), r7 (p)
r6 (s) Ganglion otique
Vague (X) r7 (s,p)
Dorsal moteur Vague (X) r7-r8 (s,p)
Accessoire (XI) r7-r8 (s,p)
Hypoglosse Hypoglosse (XII) r8 (s,p) Hoxa3/b3 Muscles de la langue
Projection dans
nerf... Situationfinale
Branchimoteur
→ BA1 Hoxb2 (r3)Hoxa2 + Pons digastriques, tensor tympani. Absent chez Krox20Muscles de la mastication,
-/-Abducens Somatomoteur Abducens (VI) Pons Muscle droit lateral(rotation de l'oeil) Absent chez Krox20et MafB-/-
-/-Branchimoteur
→ BA2 Pons Muscles de la face,digastriques
Salivatoire
supérieur Visceromoteur Pons
Ganglions submandibul-laires, pterygo/
sphenopalatin
Absent chez Krox20
-/-et MafB
-/-Ambiguus Branchimoteur→ BA3 Glossopharyngé(IX) Medulla Muscle stylopharyngé
Salivatoire inférieur Visceromoteur Glossopharyngé(IX) Pons
Ambiguus (bis) Branchimoteur→ BA3 Medulla Muscles du pharynx, dularynx
Visceromoteur Medulla Muscles lisses des viscèresthroraciques et
abdominaux
Ambiguus (ter) Branchimoteur→ BA4 Medulla Muscles du pharynx et dularynx
Somatomoteur Medulla
A
Noyau Type Spécifié dans... Organes sensoriels
Sensoriel Trijumeau (V) r2-r6 (p) Toucher, douleur, température
Trijumeau principal Sensoriel Trijumeau (V) r1 (p)
Cochléaire Sensoriel Cochlée / Son
r6-r7 (p) r3-r6 (p) r5-r6 (p)
noyau de l'olive supérieure r5 (p) r1-r3 (p)
Vestibulaire Sensoriel Canaux semi-circulaires de l'oreille interne r1-r3 (p) r1-r3 (p) r1-r3 (p) r4 (p) r4 (p) r4-r5 (p)
noyau vestibulaire médian r6-r7 (p) r3-r5 (p)
Solitaire principal Sensoriel r7-r8 (p)
Réticulaire r1-r7 (p- Relais cervelet -cortex moteur
Olive inférieure Réticulaire r6 (p) Relais cervelet-moelle
Afférences du
nerf... Situationfinale Trijumeau
spinal/descendant Medulla
Pons Toucher, propriocéption de la mâchoire
Vestibulo-cochléaire
(VIII) Pons
nucleus magnocellularis nucleus angularis nucleus laminaris noyau lemniscal latéral
Vestibulocochléaire
(VIII) Medulla/Pons
noyau supérieur noyau A de Wold noyau de Deiters ventral nucleus tangentialis noyau de Deiters dorsal
Facial (VII), Glossopharyngé
(IX), Vague (X) Medulla
Barorécepteurs artériels, carotide, corps aortiques
Pontin/pontique Pons
Medulla
noyau vestibulaire supérieur nucleus quadrangularis
B
Figure 9 - Nomenclature et caractéristiques des neurones spécifiés dans le rhombencéphale
(A) Tableau des noyaux moteurs. (B) Tableau des noyaux sensoriels dont les neurones sont spécifiés dans le rhombencéphale (par opposition aux neurones sensoriels dérivant des placodes ectodermiques et des crêtes neurales). p: poulet ; s: souris. D'après Marin & Puelles 1995 et Guthrie 2007.
Nerf IX fusionné avec le nerf X chez le
-/-crâniens (voir par exemple (Marín and Puelles, 1995; Dymecki et al., 2010)). La réponse est variable selon le type de neurones : certains sont spécifiés dans le rhombencéphale et migrent très peu, donc conservent leur organisation en segments ; d’autres sont spécifiés dans le rhombencéphale mais migrent en dehors ; d’autres enfin viennent peupler le pons et la medulla alors qu’il n’ont pas été spécifiés dans le rhombencéphale. Ainsi, la segmentation des nerfs crâniens ne fait pas vraiment écho à la spécification segmentée des neurones, mais plutôt à la position des points de sortie de nerfs, disposés très tôt au cours du développement, au niveau de r2, r4, r6 et r7 (Figure 5C). Dans cette partie, les grands types de neurones sont décrits puis leurs caractéristiques essentielles, notamment leur origine embryonnaire, sont consignées deux tableaux récapitulatifs (Figure 9A, B).
Les trois grands types de neurones sont spécifiés dans le rhombencéphale, à savoir les motoneurones, les neurones sensoriels et les « interneurones » (au sens large, c’est-à-dire des neurones multipolaires établissant des connexions avec d’autres neurones).
Les mieux connus sont les motoneurones. Il en existe de trois types : les branchiomotoneurones innervent les arcs branchiaux, à l’origine des muscles et tissus conjonctifs de la face, de la mâchoire, du pharynx et du larynx ; les somatomotoneurones innervent les muscles striés de l’œil, de la langue ; les visceromotoneurones innervent les ganglions sympathiques et parasympathiques, et prolongent leurs terminaisons vers les glandes salivaires, lacrymales, les muscles lisses des viscères (Lumsden and Keynes, 1989; Lumsden and Krumlauf, 1996). Tous ces motoneurones sont spécifiés dans le rhombencéphale, et projettent dans les nerfs crâniens. En ce qui concerne les neurones sensoriels, certains sont spécifiés dans le rhombencéphale mais la majorité dérive des placodes ectodermiques et des crêtes neurales. Ces neurones ont leurs corps cellulaires dans les ganglions crâniens.
Enfin, les interneurones constituent la famille la plus disparate et la plus mal connue (en ce qui concerne l’origine embryonnaire). La majorité d’entre eux constitue la formation réticulée. Il s’agit d’environ cent petits réseaux neuronaux dont les fonctions sont variées : relais des informations sensorielles (œil, toucher, ouïe) vers le cervelet pour assurer la coordination motrice, production de signaux rythmiques (respiration et réflexe d’avalement), contrôle de la vasodilatation, contrôle de l’endormissement, de l’état de conscience (via des projections vers le thalamus et le cortex cérébral). Une bonne partie de ces neurones est spécifiée dans le rhombencéphale mais les données de traçage sont lacunaires, eu égard à la complexité de l’anatomie réticulaire. Voici quelques exemples de noyaux réticulés connus :
- les noyaux du raphé, sérotoninergiques, spécifiés dans tout le rhombencéphale sauf r4 ;
- le noyau rétrotrapezoïde, responsable de la sensibilité au CO2/pH dans le sang, et donc du rythme respiratoire. Ces neurones sont spécifiés dans r5 (Dubreuil et al., 2009).
- le noyau sensoriel principal : relais entre les vibrisses (whisker-pad) et le cortex en tonneaux (barrel cortex). Ce noyau est spécifié dans r3 par Hoxa2 et conserve la même topographie « barreloïde » que le whisker-pad, le relais thalamique et le barrel cortex. La segmentation du rhombencéphale joue ici un rôle dans la somatotopie du système vibrisse-cortex en tonneaux (Oury, 2006).
Un réseau génétique permet la formation de segments dont chacun dérivera en un certain nombre de neurones. Ainsi, la structure des rhombomères, leur taille, leur forme, leur position peut avoir un impact direct sur l’architecture neuronale du cerveau postérieur. Comment le nombre de cellules contenues dans chaque rhombomère est-il déterminé ? Cela peut être en partie lié à la position des frontières le long de l’axe rostro-caudal. Comment le positionnement des frontières s’opère-t-il ? Les gradients d’AR ou FGF jouent-ils un rôle dans ce processus ? Ont-il alors un rôle de morphogène ? Ces questions requièrent une meilleure compréhension des mécanismes qui déterminent le patron d’expression des gènes, puisque finalement la morphologie des rhombomères est directement liée à ces patrons. Pour comprendre comment un gène s’exprime à un endroit précis, à un moment donné, il convient d’étudier la façon dont les facteurs situés en amont régulent l’activité de leur cible au niveau transcriptionnel.