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Chapitre 3. Nouvelle structure du PEOT

3.2. Schéma de synthèse

3.2.3. Déprotection des éthers silylés

Suite à la formation du N1,N4-bis(2-(2-((tert-butyldiméthylsilyl)oxy)éthoxy)éthyl)but-2-ynediamide, il a fallu

trouver une méthode pour recouvrer les fonctions alcools avant de les fonctionnaliser. Les fonctions obtenues sur les bouts de chaîne de l’unité de répétition doivent être de bons groupes partants lors d’une réaction SN2, car il s’agit de l’étape d’activation pour la synthèse d’un dendrimère PEOT. Ainsi, la méthode

de déprotection générale pour tous les éthers silylés a été investiguée, elle introduit une source de fluor dans une solution comportant la molécule avec le groupement à déprotéger. La libération de la fonction alcool se fait aisément en raison de la forte affinité entre les atomes de silicium et de fluor. L'énergie nécessaire pour la dissociation de ces atomes s’élève aux environs de 600 kilojoules par mole (kJ/mol), donc la liaison entre le silicium et le fluor est l’une des plus stables dans le tableau périodique. La grande énergie de liaison sert de moteur à la réaction de déprotection de groupements silylés puisque la liaison du silicium avec le fluor est favorisée par rapport à la liaison du silicium avec l’oxygène. La source de fluor la plus couramment utilisée pour la déprotection d’un éther silylé est le fluorure de tétrabutylammonium (TBAF). Ce réactif est intéressant parce qu’il permet d’introduire directement une source de fluor dans différents solvants organiques. Quant aux autres sources de fluor, généralement des sels, ils nécessitent l’utilisation d’un solvant polaire avec une bonne constante diélectrique pour les solubiliser en plus de l’introduction d’un agent de transfert de phase pour transporter l’ion fluorure dans le solvant organique comportant la molécule protégée. Cependant, la méthode d’élimination des résidus du TBAF est de l'extraire dans la phase aqueuse en conservant le produit déprotégé dans la phase organique. Ainsi, le même défi d’isolation du N1,N4-bis(2-(2-hydroxyéthoxy)éthyl)but-2-ynediamide se présente puisque son

caractère hydrophile favorise son affinité avec la phase aqueuse. Encore une fois, le dérivé dicarboxamide dialcool ne peut pas être séparé des résidus réactionnels par extraction liquide-liquide.

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Pour contourner cet obstacle, il a été envisagé que la réaction de Garegg-Samuelson pour substituer les alcools primaires en fonctions iodures pouvait être effectué sans purification du milieu réactionnel après la déprotection des éthers silylés avec le réactif de TBAF (Schéma 24). Ces deux réactions successives ont été réalisées dans le même ballon réactionnel, ce qui est nommé une réaction «one-pot». Il a été considéré que les réactifs et les produits secondaires de la déprotection restants dans le milieu réactionnel n’interviennent pas lors de la réaction d'iodination. Toutefois, le produit N1,N4-bis(2-(2-iodoéthoxy)éthyl)but-

2-ynediamide n’a pas été récupéré, ni observé en suivant la méthode «one-pot».

NH O NH O O OTBDMS O TBDMSO NH O NH O O I O I 1) TBAF, THF, 1 h, 25 °C 2) I2, PPh3, imid., THF, 16 h, 25 °C

Schéma 24. Déprotection et iodination «one-pot» de l’unité de répétition PEOT-amide (Iodure)

Plusieurs raisons peuvent expliquer l'incapacité à former le monomère PEOT-amide avec terminaisons fonctionnalisées en iodures. Dans un premier temps, la déprotection peut être incomplète, malgré le suivi par chromatographie sur couche mince. En effet, les conditions d’élutions présentaient le N1,N4-bis(2-(2-

((tert-butyldiméthylsilyl)oxy)éthoxy)éthyl)but-2-ynediamide sur la CCM à un Rf de 0,7 ainsi qu’un point unique sur la ligne de base qui a été attribué au N1,N4-bis(2-(2-hydroxyéthoxy)éthyl)but-2-ynediamide.

Cependant, il est possible que la polarité du dérivé dicarboxamide monoalcool soit suffisante pour rester sur la ligne de base tout comme l’intermédiaire dicarboxamide dialcool. Si la déprotection des alcools est incomplète, il y aura, subséquemment à la réaction d’iodination, un mélange de produits secondaires indésirables en plus du monomère PEOT-amide attendu (Figure 26A). La formation de ces produits réduit considérablement le rendement global des deux réactions successives ce qui n’est pas viable pour une synthèse à grande échelle. En considérant que la déprotection des éthers silylés s’effectue de façon stœchiométrique, la présence des résidus réactionnels de l’étape de déprotection pourrait être la raison empêchant la réaction d'iodination de se produire. Néanmoins, il fallait tenter le coup pour éviter l'obstacle de la purification de l'intermédiaire N1,N4-bis(2-(2-hydroxyéthoxy)éthyl)but-2-ynediamide.

A posteriori, il est probable que l'inefficacité de la réaction soit dans le choix des conditions réactionnelles pour former les groupements partants des terminaisons de l’unité de répétition. En effet, l'utilisation de l'iode

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moléculaire (I2) en présence de l’alcyne activé qui est sensible aux additions de Michael présente un

problème intrinsèque, car ce réactif peut effectuer une halogénation trans sur l’alcyne réactif (Figure 26B).89

Figure 26. A) Produits résultant d’une déprotection partielle des bouts de chaîne B) Produits secondaires résultant de l’halogénation de l’iode moléculaire sur l’alcyne activé

Par la suite, l'optimisation des conditions de déprotection vers le composé dialcool a été effectuée pour séparer et purifier l'intermédiaire entre les deux réactions pour arriver à obtenir le monomère PEOT-amide. Les premières conditions utilisaient du TBAF comme source de fluor afin de libérer les fonctions alcools des groupements protecteurs silylés, uniquement 16 % du produit a été récupéré après la purification (Schéma 25).

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Le rendement de la réaction est trop faible pour continuer dans cette voie, car une masse initiale d'environ 2,5 g résulte en seulement 210 mg de produit récupéré. De plus, les rendements attendus pour les réactions de déprotection des éthers silylés sont généralement entre 80 et 95 %.90

L’isolation de l’intermédiaire dicarboxamide dialcool a été investiguée en changeant la source de fluor. Le fluorure de potassium (KF) a été introduit dans un milieu réactionnel polaire, soit un mélange de MeOH et d’eau (Schéma 26). Le MeOH servait à la solubilité des dérivés dicarboxamides, soit avec les fonctions alcools protégées ou libres. L’eau était nécessaire pour dissocier le sel et stabiliser les ions fluorures dans le milieu réactionnel. Le MeOH et l’eau sont des solvants qui sont miscibles ce qui permettait l’interaction entre les groupements protecteurs et les ions fluorures.

Schéma 26. Déprotection des éthers silylés avec le sel de KF

L'analyse du spectre RMN 1H a confirmé la capacité de libérer les fonctions alcools, mais la présence de

pics a été observée aux déplacements chimiques correspondants aux chaînes alkyles du groupement protecteur. Ainsi, le produit récupéré suite à l’évaporation de la phase aqueuse contient un mélange des intermédiaires dicarboxamides monoalcool et dialcool. De plus, malgré la trituration du milieu pour éliminer le KF, des traces de solide correspondant à l’apparence du sel sont perceptibles dans le contenant d’entreposage. En somme, le sel de KF ne permet pas une libération complète des fonctions alcools, la purification n'élimine pas complètement les résidus réactionnels et le rendement est faible par rapport aux niveaux attendus.

L’introduction d’une source de fluor n’est pas l’unique méthode de déprotection des éthers silylés. Selon les ramifications du groupement protecteur silylé, il est possible de libérer les fonctions alcools dans un milieu acide ou basique. La majorité des éthers silylés sont sensibles à un pH faible, seulement les éthers de tert- butylediphénylesilyle (TPS) et de triisopropylesilyle (TIPS) résistent plus longtemps à un milieu acide.91 En

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acide organique a été introduit pour acidifier le milieu réaction. L'acide 2,2,2-trifluoroacétique (TFA) a été utilisé pour sa miscibilité avec les solvants organiques halogénés (Schéma 27).

Schéma 27. Déprotection des éthers silylés avec le réactif TFA

La réaction avec le TFA fonctionne dans un faible rendement de 26 %, ce résultat était inattendu puisqu'aucune raison apparente n'explique l'inefficacité de la déprotection. Cependant, cette tentative a permis de comprendre plusieurs facteurs pour la déprotection des éthers silylés. Premièrement, la confirmation qu'un milieu réactionnel acide libère les alcools des éthers de tert-butyldiméthylsilyle. Puis, il est nécessaire de choisir un réactif facile à éliminer sans avoir recours à une extraction liquide-liquide ou qu’il ne laisse pas de résidus dans la phase aqueuse. Finalement, il faut s'assurer d’avoir une interaction entre le réactif de déprotection et les éthers silylés grâce à un solvant qui solubilise autant le dérivé dicarboxamide diprotégé que les intermédiaires déprotégés.

Un réactif de déprotection qui correspondait à tous ces critères est une solution aqueuse de 1 % HCl (v/v). Le HCl(aq.) acidifie le milieu réactionnel ce qui permet de libérer les terminaisons alcools des groupements

protecteurs silylés (Schéma 28). Le HCl est soluble dans l'eau, mais lors d'une évaporation sous pression réduite l'acide passe en phase gazeuse et s’élimine facilement. Ainsi, aucun résidu de l’acide n’est présent dans le ballon suite à l’évaporation de la phase aqueuse. Enfin, la solution d’acide chlorhydrique est aqueuse, ce qui permet de solubiliser les dérivés dicarboxamides déprotégés. Donc, il ne suffit que d’introduire un solvant polaire miscible avec une solution aqueuse et capable de solubiliser le N1,N4-bis(2-

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Schéma 28. Déprotection des éthers silylés avec une solution de 1 % HCl(aq.)

Cette tentative a satisfait les attentes pour le rendement d’une réaction de déprotection, soit de 88 % à l’échelle du gramme, et l'analyse RMN dans ces conditions confirme la pureté du produit récupéré. En effet, le groupement protecteur silylé est éliminé dans la phase organique lors de l’extraction et l’acide est évaporé en même temps que l’eau de la phase aqueuse. Le cheminement pour optimiser les conditions de déprotection a permis de trouver des conditions douces et une purification simple pour obtenir le N1,N4-

bis(2-(2-hydroxyéthoxy)éthyl)but-2-ynediamide.