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La démarche méthodologique d’une recherche qualitative/interprétative comprend deux phases, soit la collecte de données et l’analyse qualitative des données. Cette phase “nécessite l’utilisation de stratégies souples afin de préserver l’interaction avec les participants.” (Savoie-Zajc, 2000) Dans ce type de recherche, la chercheure privilégie l’entrevue semi-dirigée avec questionnaire et observation participante plutôt qu’à l’observation faite à partir de grilles d’observation. Dans le but de faire émerger plusieurs aspects d’un problème étudié, il apparaît nécessaire que la chercheure utilise plusieurs stratégies de collecte de données, telles que l’entrevue, l’observation et l’usage de matériel écrit divers. Pour notre part, nous avons retenu l’entrevue et l’usage de matériel écrit. Les lignes qui suivent présentent ces deux instruments de collecte de données.

3.4.1 L’entrevue

L’entrevue semi-dirigée est la méthode choisie pour recueillir nos données. Ce type d’entrevue est souvent utilisé dans les approches qualitatives de recherche comme mode de collecte de données parce qu’il permet une certaine structuration tout en laissant une souplesse lors de l’entretien avec la personne interrogée. Voici comment Savoie-Zajc (1997) définit l’entrevue:

L’entrevue semi-dirigée consiste en une interaction verbale entre des personnes qui s’engagent volontairement dans pareille relation afin de partager un savoir d’expertise, et ce, pour mieux comprendre un phénomène d’intérêt pour les personnes impliquées. (Savoie-Zajc, 1997, p. 265)

Plusieurs arguments justifient le recours à l’entrevue. D’un point de vue épistémologique, la compréhension des conduites sociales doit être appréhendée à partir de la perspective des acteurs sociaux. La prise en compte des dilemmes et des enjeux que vivent les acteurs sociaux apparaît comme un argument de type éthique et

politique. Enfin, d’un point de vue méthodologique, l’entrevue constitue un instrument privilégié d’accès à l’expérience des acteurs dans la mesure où ces expériences sont interprétées à la lumière de la perspective même des acteurs. Ceci rejoint la perspective des interactionnistes qui insistent sur le sens que les acteurs confèrent à leur action, sur la façon dont ils se représentent le monde et sur la façon dont ils ressentent leur situation. Le contexte social, tels une institution ou les groupes d’appartenance, la construction de sens et le façonnement de trajectoires sociales sont des aspects à prendre en considération. L’entrevue, parce qu’elle permet d’entrer en relation avec les autres, apparaît comme une porte d’entrée sur l’interprétation que des acteurs sociaux font de leur vécu.

Ce vécu, difficile d’accès, est médiatisé au travers du jeu et des enjeux des rapports sociaux qu’impliquent nécessairement la relation d’entretien ainsi qu’au travers du jeu aussi complexe de multiples interprétations auxquelles les discours donnent lieu. (Poupart, 1997, p. 198)

Rappelons que l’objectif visé est de comprendre le vécu des acteurs impliqués dans le processus d’élaboration et d’implantation de programmes par compétences. Comme nous cherchons à comprendre le point de vue des acteurs, ceci nous place dans une position d’intersubjectivité. Notre rôle est donc de guider les acteurs avec des thèmes précis et des questions ouvertes. Dans le cadre de cette recherche, nous avons conduit des entretiens semi-dirigés auprès des partenaires impliqués dans la conception du programme en techniques de production multimédia. Un entretien est semi-dirigé en ce sens qu’il n’est ni entièrement ouvert, ni canalisé par un grand nombre de questions précises. Généralement le chercheur dispose d’une série de questions-guides, relativement ouvertes, à propos desquelles il souhaite recevoir une information de la part de l’interviewé.

Les entretiens ont été conduits auprès de six acteurs du milieu des entreprises et de treize acteurs du milieu de l’éducation qui ont été impliqués dans les différentes

phases de l’élaboration et de l’implantation du programme. Les acteurs ont été choisis en fonction de leur disponibilité à participer à la recherche. Trois types de schémas d’entrevue ont été élaborés (Annexe 1): un pour les acteurs du milieu des entreprises et deux pour les acteurs du milieu de l’éducation. Ces schémas contiennent des catégories de questions élaborées en fonction des étapes de l’élaboration et de l’implantation de programmes auxquelles les acteurs ont participé. Les acteurs du milieu de l’entreprise ont été impliqués au niveau de l’analyse de situation de travail (AST) et de la rédaction du projet de formation. Parmi les acteurs du milieu de l’éducation nous avons considéré deux groupes d’acteurs, soit les enseignants et les professionnels (cadres, conseillers pédagogiques, consultants). Les professionnels ont été impliqués dans l’animation et la coordination de l’élaboration et de l’implantation du programme. Les enseignants ont été impliqués surtout à l’étape de la validation du programme et de son implantation.

Les catégories de questions des schémas d’entrevue, soit l’émergence, l’élaboration et l’implantation du programme sont en lien avec les idées décrites dans le cadre de référence. De façon plus spécifique, les questions concernant l’émergence du programme, discutent du type d’acteurs impliqués, leur champ d’action, leurs relations et le contexte dans lequel la collaboration entre ses différents acteurs a pris place. Ses questions se référent à la section du cadre de référence qui traite de la collaboration de partenaires. Certaines questions, sur l’élaboration du programme concernent les cinq dimensions consécutives des actions de formation en partenariat telles que décrites par Landry (1994b). Par exemple, les questions sur le choix des acteurs qui ont participé à l’élaboration du programme, touchent la dimension politique des actions de formation en partenariat, tandis que les questions sur le déroulement du processus d’élaboration de programme, touchent à la dimension organisationnelle. Les questions sur le choix des compétences se réfèrent à la dimension didactique et celles sur les rôles joués par les acteurs sont en lien avec la dimension personnelle.

Les questions sur la description du processus d’implantation de programme et les changements apportés en cours de route, tentent de vérifier l’application des divers éléments (ressources humaines, matérielles, physiques) définissant le programme telles que présentées par Nadeau (1988) dans le cadre de référence. Les questions sur les perceptions de l’enseignement donné, les perceptions de l’importance accordée à certaines compétences, se réfèrent aux conditions qui favorisent l’implantation d’une innovation dans un système scolaire telles que décrites par Gross et al. (1971), dans le cadre de référence. Les questions sur les difficultés rencontrées en regard de la coordination de programme sont en lien également avec les propos de cet auteur.

Finalement, les questions qui portent sur la conception du travail et de la formation du technologue en multimédia sont en liens avec les conclusions des études réalisées par la SQDM (1996), SECOR (1996) et Pricewaterhouse Coopers (1999). Les questions dans cette section se rapportent aussi à la dimension de l’élaboration et de l’implantation du programme.

3.4.2 L’analyse documentaire

La recherche qualitative/interprétative nécessite que soient combinés plusieurs modes de collecte de données afin de compenser pour les biais inhérents à chacun pris individuellement. L’analyse documentaire est donc le deuxième mode de collecte de données retenu pour cette recherche. L’analyse documentaire consiste à analyser diverses sources d’informations écrites (compte rendu de réunions, rapports, demandes de subventions, étude de faisabilité, etc.), visuelles, électroniques (programmes informatiques) ou orales (enregistrements).

Pour les besoins de notre recherche, nous avons choisi de consulter tous les documents produits par le cégep de Matane au cours du processus d’élaboration du programme en techniques de production multimédia. Étant donné que la production de

ces documents s’inscrit dans le processus de gestion des programme tels que défini dans le Cadre général de la DGFPT (1995), il était important de les consulter tous afin de bien comprendre l’ensemble du processus.

Le document Projet d’attestation d’études collégiales en production multimédia, Travaux préliminaires (1996a), a été consulté parce qu’il fait partie des études préliminaires conduites par la DGFPT (1995) servant à déterminer de façon plus précise les besoins de formation liés à un programme. En effet, avant d’amorcer les travaux d’élaboration d’un programme, la Direction des programmes doit disposer d’un ensemble d’éléments d’information émergeant de la planification sectorielle collégiale de même que les études qui y sont associées.

Le document Technologue en production multimédia. Rapport de la situation de travail, (1996b), a été consulté parce qu’il présente l’ensemble des éléments d’information recueillis lors de la tenue de l’analyse de la situation de travail (AST). L’AST est une consultation menée uniquement auprès des acteurs du monde du travail. Elle a pour but de tracer le portrait d’une professsion. Le document consulté contient les renseignement suivants: Description générale de la profession du technologue en production multimédia (nature du travail, conditions d’exercice et d’organisation du travail, etc), une description du travail (tâches et opérations), les conditions d’exercice des tâches, les habiletés et comportements transférables et les suggestions concernant la formation.

Le document Centre de formation et de consultation en multimédia (1997a) ne fait pas partie des documents produits dans le cadre du processus d’élaboration de programme tel que défini par la DGFPT (1995). Ce document décrit le projet de création d’un centre de formation et de consultation en multimédia associé au Cégep de Matane. Il a été consulté parce qu’il contient des informations sur les besoins de formation dans le domaine du multimédia à Matane. Ces renseignements étaient

pertinents en regard de notre questionnement sur l’émergence du programme en techniques de production multimédia au Cégep de Matane.

Le document Techniques de production en multimédia, Programme d’études collégiales, édition provisoire (1997b), a été consulté parce qu’il présente dans la première partie une vue d’ensemble du programme, des buts du programme et des compétences visées. La deuxième partie décrit les objectifs et les standards du programme. Enfin, le document Guide d’accompagnement du programme d’études, (1997c) contient des informations sur les principes directeurs du programme, les principes andragogiques, les intentions éducatives, les stratégies globales du programme, l’intégration des apprentissages, la synthèse du programme d’études, la présentation de la matrice des compétences, l’organigramme des compétences, le calendrier de la séquence d’enseignement et les rôles et fonctions des enseignants et enseignantes. Il comporte aussi des tableaux, soit la matrice des compétences, l’organigramme des compétences par fonction de travail, l’organigramme des compétences par session, les calendriers des sessions 1-2-3. Ces documents nous ont été utiles pour situer les propos des acteurs en ce qui concerne les choix pédagogiques qui ont été faits lors du processus d’élaboration de programme. Ils nous ont également permis de comprendre certains problèmes exprimés par les acteurs en ce qui a trait à l’implantation du programme, notamment sur la question de la séquence des cours.