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La démarche consiste à modifier les conditions climatiques directement sur le site soit par des méthodes de manipulation climatique (serres, tube chauffants, etc.) soit à déplacer un

échantillon (transplantation) dans un milieu présentant des conditions climatique différentes.

Sur le terrain, les températures peuvent être modifiées soit de manière passive en utilisant un

réchauffement par effet de serre (réflexion du rayonnement infrarouge), soit active, en

utilisant du matériel permettant un apport énergétique sous forme de chaleur (infrarouge,

câbles chauffants, etc.) (Tableau. 1). Le réchauffement actif peut être apporté directement au

sol ou à l’atmosphère. La démarche adoptée sera choisie en fonction de plusieurs paramètres

tels que, l'écosystème considéré, son isolement énergétique, le budget alloué, la puissance du

réchauffement voulue, la durée de l'expérimentation. La température n’est pas le seul facteur

manipulé, les précipitations peuvent être altérées pour simuler les effets des sécheresses ou de

la diminution du couvert neigeux (Steinweg et al., 2013 ; Tan et al., 2014 ; Santonja, 2014).

Ces expérimentations sont peu nombreuses comparées à celles qui traitent de l'augmentation

de la température mais sont indispensables pour comprendre le rôle de la teneur en eau,

facteur clé des échanges au sein du sol. Les expériences climatiques de terrain ont l’avantage

de pouvoir être laissées en place plusieurs années (>10 ans (Frey et al., 2008 ; Rinnan et al.,

2007) afin d’étudier les réponses des écosystèmes sur le long terme. Ce sont généralement des

expériences peu coûteuses (surtout passives) et nécessitant peu de main d’œuvre après

l’installation initiale de l’expérimentation (elle dépend fortement du type d’expérimentation

mise en place). Il est à noter cependant, que les méthodes déployées peuvent perturber le

fonctionnement de l’écosystème par rapport à son état naturel. Par exemple, une serre peut

être une barrière aux pollinisateurs ou aux herbivores, modifier la couverture neigeuse et les

spectres lumineux. L’ensemble de ces artéfacts expérimentaux a un impact sur le

fonctionnement du système et il est donc primordial de réaliser des expériences contrôles qui

évaluent les impacts de l’expérimentation seule.

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A B

D

C

Figure.22 : Méthodes d’expérimentations de changements climatiques. (A)

Chambre à effet de serres (Hoffmann et al., 2010), (B) Réchauffement induit par rayonnement infrarouge (Harte et Shaw, 1995), système d'exclusion de pluie (O3HP ; Santonja, 2014) , (D) Augmentation de la concentration en dioxide de carbone atmosphérique (CO2) (Ainsworth et Long, 2004)

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Tableau.1 : Comparaison de différentes méthodes de manipulation de réchauffement climatique de terrain. Tableau adapté à partir de Shaver et al., 2000

Effet de serre Passif

Réchauffement par effet de serre (réflexion du rayonnement IR et réduction des pertes thermiques par déplacement horizontal)

Elle est simple et peu chère. Elle ne nécessite aucune source d'énergie

Très peu de contrôle sur la température. Grande variabilité de la température. Nombreux

artefacts tels que la modification de la luminosité, du vent, de l'humidité et du régime

des précipitations

Chapin et al., 1995 ; Shaver et al., 1998 ; Jonasson et al., 1999 ;

Serre ouverte Passif Identique à la méthode précédente

Identique à la méthode précédente. Les précipitations sont bien moins

altérées

Identique à la méthode précédente exceptée pour les précipitations. Seules les petites surfaces peuvent être traitées uniformément

Marion et al., 1997; Arft et al., 1999 ; Rinnan et al., 2007 ; Deslippe et al., 2005 ; Hollister et

al., 2006 ; Serres ouverte +

réchauffement actif Passif/actif

Identique aux méthodes précédentes et réchauffement par câbles électriques

chauffants

Contrôle précis de la température aérienne ou de la différence de température. Peut être combiné avec

un contrôle de la teneur en CO2

Modifie le régime des vents, l’humidité et

l’évapotranspiration Norby et al., 1997 ;

Réchauffement actif du sol Actif Réchauffement par câbles chauffants enfouis dans le sol

Contrôle précis de la température du sol. Peut être combiné avec le

réchauffement par serre

Modifie l'humidité du sol. Pas d'effet sur les températures aériennes. Perturbe la structure du

sol

Peterjohn et al., 1994 ; Ineson et al., 1998b ; Hartley et al., 1999 ; Schindlbacher et al., 2011 ; Frey

et al., 2008 ; Chaleur infrarouge

électrique Actif Réchauffement par radiations infrarouges

Contrôle précis de l'énergie imputée. Simulation directe du changement

global (équilibre énergétique)

Le réchauffement dépend entièrement des radiations. Pas d’influence des mouvements

atmosphériques, réchauffement constant et continu

Harte et al., 1995 ; Harte et Shaw 1995 ; Zhang et al., 2005 ; Steinweg et al., 2013 ; Bell et al.

2010, Jing et al. 2013 ;

Transplantation Passif

Utilisation de l'hétérogénéité spatiale des conditions climatiques. Transplantation de sols

intacts avec leur biomasse aérienne (plante + sol)

Températures et précipitations naturelles

Perturbation due à la transplantation. Pas de contrôle direct sur les conditions climatiques. Changements d’autres facteurs (contamination

d’espèces, UV, etc.)

Ineson et al. 1998a ; Grogan et Chapin, 2000 ; Budge et al. 2011

; Djukic et al. 2013 ; Vanhala et al. 2007 ; Gavazov et al. 2013 ;

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En raison de la grande variété des méthodes utilisées pour induire un changement climatique,

il est parfois difficile de comparer les résultats obtenus (Aronson et McNulty 2009). Parmi

l'ensemble des méthodes proposées, les radiateurs infrarouges sont les plus faciles à mettre en

place et les plus précis quant au réchauffement apporté au système. Les dispositifs les moins

chers sont les serres ouvertes (Aronson et McNulty 2009). La transplantation de sol présente

l’avantage de simuler un climat de manière totalement naturelle. Cette méthode permet donc

de reproduire l’énorme variabilité temporelle du climat ce qui n'est pas le cas d'un

réchauffement continu (rayonnement infrarouge, câbles chauffants). En contrepartie, lors de la

transplantation, le contrôle de l’intensité du changement climatique est peu régulé. En outre la

transplantation peut perturber le fonctionnement du système étudié. De plus, des

contaminations (abiotiques et biotiques), une augmentation de la pression atmosphérique ainsi

qu'une évolution du spectre lumineux (UV) peuvent altérer le fonctionnement du système

étudié.

Pour tirer parti des différents avantages de chaque méthodes certaines études les

associent. Sun et al. (2013) utilisent ainsi un système de serre ouverte combiné avec un

réchauffement direct du sol par câbles chauffants dans le cadre d'une étude portant sur les

effets du changement climatique sur les prairies arctiques. Bruns et al., 2013, combinent un

réchauffement passif par réverbération du rayonnement infrarouge la nuit et un système

automatique permettant d’ouvrir le système en cas de précipitations.

Parmi les méthodes de manipulation climatique, la transplantation de sol ne permet pas un

contrôle parfait des conditions climatiques simulées. De plus, le prélèvement de sols peut

être perturbateur pour le fonctionnement du système étudié. Cependant, cette méthode

fournit l'avantage de simuler un climat de manière totalement naturelle. Ainsi l'effet de la

variabilité temporelle et naturelle du climat peut être observé. Les effets possibles de

synergie dus à la variation de la température et l’humidité sont également présents.

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2. Dispositif de simulation climatique utilisé dans cette thèse

2.1. Contexte de l’étude