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1 APPREHENDER LE ROLE DES GROSSISTES DANS LE CANAL DE DISTRIBUTION : ELABORATION

1.2 Les activités prises en charge par les grossistes au sein du canal de distribution : une analyse

1.2.1 Définition et enjeux d’une analyse en termes de modèle économique

Les recherches consacrées à l’économie de la distribution se sont progressivement emparées du concept de modèle économique, qui demeure un concept récent dans l’analyse stratégique des firmes. L’intérêt croissant porté à ce concept s’explique en grande partie par sa compatibilité avec l’analyse stratégique classique qu’il vient compléter et enrichir par son caractère plus opérationnel.

• L’ENTREPRISE SE POSITIONNE DANS LE CANAL A PARTIR DES ACTIVITES QU’ELLE CHOISIT DE REALISER

Le distributeur choisit les activités qu’il réalise en fonction des ressources et des compétences dont il dispose et des revenus qu’il vise. Ces choix définissent sa position au sein du réseau de valeur. Pour P. Volle & alii (2008), « cette question de la position dans un réseau de valeur est assurément stratégique et détermine en grande partie la nature même de l’entreprise et de ses activités. Elle doit être traitée au plus haut niveau et dépend en grande partie des ressources et compétences dont dispose l’entreprise. Il est probable que l’histoire personnelle des fondateurs – formation,

expériences préalables, etc. – explique en grande partie la position prise dans le réseau de valeur. L’entreprise ayant pris position dans un réseau de valeur, la question se pose ensuite de savoir quelles activités elle va réaliser elle-même, et quelles activités elle va déléguer à un prestataire, sous- traitant, partenaire ou allié. En effet, offrir tel produit ou tel service n’implique pas nécessairement d’en être (le seul) producteur. Les exemples sont nombreux de distributeurs qui proposent un service sans pour autant le délivrer eux-mêmes : quand un cuisiniste fait installer l’électro-ménager par un artisan, quand un distributeur de jouets fait emballer les articles par une association caritative, etc. Chaque activité dans la chaîne de valeur peut être ou non délégué : conception, production, logistique, gestion du point de vente, management de la relation client, communication, etc. Selon les ressources et compétences dont il dispose et selon les niveaux de revenus qu’il vise, le

distributeur choisit de faire lui-même ou de faire faire. »35

L’ensemble de ces choix va caractériser le modèle économique ou business model de l’entreprise, qui doit permettre de définir comment l’entreprise va « gagner de l’argent » [Volle P. & alii (2008)].

• LE CONCEPT DE MODELE ECONOMIQUE POUR APPREHENDER LES CHOIX STRATEGIQUES DES ENTREPRISES

Le concept de business model est apparu dans les années 1990, période qui se caractérisait par des mutations technologique (développement de l’informatique et du numérique, apparition d’Internet), économique (libéralisation des marchés financiers et création de valeur pour l’actionnaire en lien avec l’analyse stratégique) et réglementaire (dérégulation internationale des marchés bancaires, télécom, énergie, etc.), qui ont profondément bouleversé les modes de gestion des entreprises. Dans ce contexte, les outils classiques de l’analyse stratégique des entreprises se sont avérés partiellement obsolètes [J. Redis (2007)].

Le concept de business model constitue une réponse au besoin de renouvellement des outils d’analyse et de gestion des entreprises. Il a d’abord été utilisé pour caractériser les projets des entreprises de l’économie numérique (modèle de revenus par abonnement, forfait, publicité, etc.) à

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l’ère de « la nouvelle économie » [B. Demil & X. Lecocq (2008)], avant de connaître un succès croissant auprès de la communauté scientifique.

• RENDRE LE CONCEPT OPERATIONNEL POUR COMPRENDRE LES MODALITES DE CREATION DE LA VALEUR

Malgré ce succès, le concept de modèle économique ne bénéficie pas d’une définition stabilisée. Suite à la synthèse de la littérature consacrée au business model qu’il a réalisé, J. Redis (2007)

constate une certaine confusion dans la définition du concept, la liste des composantes supposées du

business model variant sensiblement selon les auteurs. Ce constat est partagé par B. Roux (2011) qui

évoque pour sa part la polysémie du concept de business model, présent dans de nombreux

domaines de la recherche en sciences de gestion. Mais pour l’auteur, l’intérêt du concept repose sur sa dimension heuristique qui permet de s’interroger sur la nature des performances des entreprises : « (…) le problème n’est pas tant de définir ce qu’est un business model, ni de savoir s’il dispose d’une existence ontologique, il s’agit plutôt de l’opérationnaliser pour mieux embrasser la stratégie d’une firme d’un seul regard en prenant une hypothèse forte d’hétérogénéité des firmes sur nombre de dimensions que le concept de business model tend à expliciter. Cette opérationnalisation du business model nécessite moins de continuer à définir ce qu’est un business model qu’à expliciter comment le business model impacte la performance de la firme. »36

L’objectif d’une analyse de la firme en termes de modèle économique est donc de comprendre les modalités de la création de valeur plutôt que mesurer cette valeur. Cette démarche revient, selon P. Volle & alii (2008) à déterminer : i) « les sources de revenus que l’entreprise va tenter de

générer », ii) « les ressources et compétences qu’elle va mobiliser pour ce faire », iii) « les produits et services qu’elle va offrir », iv) « les activités qu’elle va ou non réaliser dans la chaîne de valeur et plus largement », et enfin v) « la position qu’elle souhaite occuper dans le réseau de valeur du secteur (producteur, assembleur, commerçant, simple intermédiaire, etc.) ».37

Pour nombre d’auteurs, le concept de business model constitue un nouvel outil d’analyse stratégique de l’entreprise qui vient compléter les outils classiques fondés sur l’analyse concurrentielle (cf. encadré 7, partie 1.2.2, infra). Selon X. Lecocq & alii (2006), alors que la stratégie interroge le dirigeant sur la façon d’être plus performant que les concurrents, l’approche par le modèle économique pose la question de l’identification des sources de revenus de l’entreprise. Dès lors, définir le business model de l’entreprise conduit à se préoccuper d’éléments plus opérationnels que ceux des théories dominantes en stratégie ; ce qui permet « de rendre compte et de comprendre des dimensions de la gestion d’activité que les concepts actuels de la stratégie ne permettent pas

d’exprimer. »38

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Roux B. (2011), p. 4-5.

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Volle P. & alii (2008), p. 124. Selon les auteurs le concept de BM est très utile dans le sens où de nombreuses questions de stratégie marketing en dépendent, notamment : qui sont les clients ? Comment peut-on se rendre utile à leurs yeux (proposition de valeur) ? Comment le marché est-il couvert, en termes symboliques

(publicité) et physiques (distribution) ? Comment les clients sont-ils conquis et fidélisés ?

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