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Définition et concept

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II. δes origines développementales de la santé (DOHaD), l'environnement maternel et la

1. δes DOHaD

1.1. Définition et concept

δes "Developmental Origins of Health and Diseases" (DOHaD), ou Origines Développementales de la Santé, sont un concept scientifique proposé dans les années 1980 par David Barker, un épidémiologiste britannique. Ce concept s'appuie sur un certain nombre d'observations ayant établi un lien entre l'environnement in utero et/ou durant les premières phases de la vie (jusqu'à l'âge de 1 an environ), et l'apparition de maladies à l'âge adulte (Barker and Osmond 1986; Barker et al. 1989). Par la suite, de nombreuses études épidémiologiques et expérimentales ont confirmé, étayé et précisé cette théorie.

δes premières observations de Barker ont été faites dans le comté du Hertforshire au Royaume-Uni. Il avait alors observé que les régions où la mortalité d'origine coronaire était la plus élevée correspondaient à celles où la mortalité infantile avait été la plus importante une cinquantaine d'années plus tôt (Barker and Osmond 1986). Des recherches approfondies lui ont permis d'établir un lien entre un faible poids à la naissance et dans les premiers mois de la vie, et une augmentation de la prévalence de certaines pathologies telles que l'hypertension, les maladies cardio-vasculaires et coronariennes ou le syndrome métabolique à l'âge adulte, et également avec une augmentation de la mortalité (Barker and Osmond 1986; Barker, Osmond et al. 1989; Osmond et al. 1993; Rich-Edwards et al. 1997; δeon et al. 1998; Eriksson et al. 1999). Dans les années qui ont suivi, de nombreux chercheurs ont essayé de trouver une explication biologique à ces observations épidémiologiques. En 1992, Hales et Barker

ont formulé le terme de "thrifty phenotype hypothesis" (Hales and Barker 1992) ou hypothèse du phénotype d'épargne, dérivé de la "thrifty genotype hypothesis" de Neel (Neel 1962). Ce dernier a essayé d'expliquer pourquoi certains individus sont enclins à développer un diabète. Sa théorie suggère que ces personnes sont porteuses de gènes qui prédisposent au diabète. Ces gènes, historiquement avantageux, apparaîtraient comme délétères dans le monde moderne. En effet, ils ne permettraient pas une métabolisation efficace des aliments et favoriseraient le stockage de graisses durant les périodes d'abondance afin de subvenir aux besoins de l'individu pendant les périodes de pénurie (Neel 1962). δ'hypothèse du phénotype d'épargne suggère que, lorsque l'environnement fœtal est pauvre en qualité ou en quantité, une réponse adaptative se met en place. δa croissance du cerveau est alors privilégiée au détriment de celle des autres organes, comme le foie, le muscle squelettique ou le pancréas (Figure 8).

Figure 8. Représentation originale de l'hypothèse du "phénotype d'épargne" d'après (Hales and Barker 2001).

Cela va entraîner une altération du métabolisme global après la naissance. δ'organisme, programmé pour augmenter la survie dans un environnement nutritionnel appauvri, stockera davantage les nutriments. Ces adaptations ne deviendront cependant délétères que si l'environnement nutritionnel postnatal est plus abondant qu'avant la naissance (Hales and Barker 1992; Hales and Barker 2001).

Si les premiers travaux réalisés dans ce domaine se sont surtout intéressés à la nutrition de la mère, le champ d'étude des DOHaD s'est ensuite élargi. Des études se sont ainsi intéressées à de nombreux autres facteurs environnementaux intervenant lors des premières phases de développement (in utero et jusqu'à l'âge de un an), comme l'exposition aux produits chimiques (médicaments, polluants...), le stress ou des infections de la mère (Tableau 2). Il est maintenant clairement établi que ces phases de la vie sont critiques dans la mise en place de susceptibilités à de nombreuses maladies. Cependant, ces dernières ne se révèleront que si l'individu évolue dans un environnement propice, favorisant leur survenue (mauvaise nutrition, sédentarité, ...). Tableau 2. Environnement précoce et conséquences à l'âge adulte selon la littérature

Causes précoces Conséquences à l'âge adulte

Restriction de croissance intra-utérine, faible poids de naissance

Diabète de type 2, surcharge adipeuse abdominale, hypertension artérielle, maladies cardio-vasculaires, maladie rénale chronique, bronchopneumopathies obstructives

Diabète gestationnel, obésité maternelle pendant la grossesse, prise de poids gestationnelle excessive

Obésité, insulinorésistance, diabète de type 2

Prématurité Retard cognitif et moteur, diabète de type 2,

hypertension

Croissance post natale ralentie Diabète de type 2, maladies cardio-vasculaires Croissance post natale excessive Obésité, cancer

Exposition de la mère et du jeune enfant à des toxiques

Retard cognitif et moteur, obésité, puberté précoce, infertilité, cancer, hypertension, maladies cardio- vasculaires

Infection maternelle pendant la grossesse, infections précoces de l'enfant

Asthme, maladies cardio-vasculaires, autisme, schizophrénie

Situation psychosociale dans l'enfance difficile, carence affective

Retard cognitif et moteur, troubles émotionnels et comportementaux, obésité

δ'adaptation précoce de l'individu à son environnement fait intervenir la "plasticité phénotypique". δe terme de "plasticité" désigne la capacité d'un génotype à produire différents phénotypes en réponse à des environnements variés. δa plasticité est à son maximum lors des phases de développement d'un organisme et va modifier l'expression des gènes afin de produire un phénotype qui soit adapté à l'environnement futur (Gluckman and Hanson 2004). Si ce phénotype est en adéquation avec l'environnement, la santé ne sera pas affectée. εais si ceux-ci sont discordants, l'individu sera plus susceptible de développer certaines maladies chroniques comme l'obésité, le diabète de type 2 ou les maladies cardio-vasculaires (Godfrey et al. 2007; Portha et al. 2014). Cependant, le phénotype ne résulte pas uniquement de changements dans la séquence d'ADN. Des études incluant un très grand nombre d'individus présentant ou non un phénotype d'intérêt, ont identifié un certain nombre de variantes de l'ADN nucléaire et de ses gènes associés qui contribuent au risque de développer une pathologie donnée. Toutefois, dans la plupart des cas, chaque variante ne contribue que très faiblement au risque de développement de la pathologie. De plus, la composante génétique (toutes les variantes de l'ADN nucléaires) n'explique en général que 20% de la variance phénotypique (Wallace 2010). Par ailleurs, les mutations de l'ADN, aléatoires (δenski and εittler 1993; Brisson 2003) ou liées à certains toxiques (Skinner 2008; εartinez- Zamudio and Ha 2011), sont rares et insuffisantes pour expliquer des variations de phénotype. Il a également été prouvé que la prévalence de certaines maladies, comme la polyarthrite rhumatoïde ou la schizophrénie, était variable chez des jumeaux monozygotes, possédant pourtant le même patrimoine génétique (Bell and Spector 2011). De même, des études ont montré que l'incidence de certaines maladies, comme le diabète, certains cancers, les maladies de Parkinson ou d'Alzheimer, varie en fonction de l'halogroupe des individus, donc de leur origine ethnique et géographique. Cela renforce l'idée que l'environnement régional peut avoir une influence sur la santé (Wallace 2010).

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