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Défaut d’observabilité

9.4 Conclusion . . . . 92

9.1 Introduction

Les modèles de trajectoires paramétriques par morceaux sont séduisants parce qu’ils per-mettent de modéliser une très grande variété de trajectoires réalistes. De plus, ils sont adaptés à des trajectoires hors-modèle. Par exemple, toute trajectoire de classe C1 à vitesse constante peut être approchée de manière satisfaisante par des trajectoires de classe C1MRU-MCU par morceaux. Si l’on considère des trajectoires dont le nombre de sections est fixé, on est alors dans un cadre paramétrique avec un paramètre fini-dimensionnel qui détermine la trajectoire. Le problème n’est pas simple pour autant. Si la trajectoire est constituée de sections paramétrique dont les modèles sont distincts, l’estimateur pour le modèle d’observation avec bruit gaussien peut exister dans un espace différent de celui de la vraie trajectoire, auquel cas on ne peut pas les comparer. Si l’on ne suppose plus le nombre de sections connus, alors le problème est non-paramétrique et requiert une approche type sélection de modèle avec une pénalité croissante en le nombre de sections. Cependant, cette approche n’a pas été concrétisée au cours de cette thèse, en particulier à cause du caractère pathologique de la fonction d’observation.

Dans la section 9.2, on montre la consistance de l’estimateur du maximum de vraisemblance puis on présente en section 9.3 le défault d’observabilité qui rend l’estimation des modèles par morceaux pratiquement inutilisables.

9.2 Consistance

On reprend le formalisme introduit au chapitre 6. On rappelle qu’un modèle paramétrique Mi est la donnée d’un ensemble Θi ⊂ Rdi et d’une application θ 7→ SMi,θ. On suppose donnée une collection de modèles paramétriques M = {Mi}i∈I. On travaille avec le modèle d’observations à temps continu

dYt= Ψ[Sξ(t), t]dt + εdWt,

où (Wt)t∈[0,1] désigne un processus de Wiener et Sξ= p X k=1 SMϕ(k),θk1[τk−1,τk[,

avec τ = (τ0, · · · , τp) ∈ ∆p , ϕ est une application de Np = {1, . . . , p} dans I et

θ = (θ(1), · · · , θ(p)) ∈ Θϕ(1)× · · · × Θϕ(p).

On rappelle que, pour tout entier p ≥ 1,

pdef= ©(t0, · · · , tp) ∈ [0, 1]p+1, 0 = t0< t1 < · · · < tp = 1ª .

Pour un p fixé, on note Ξp l’ensemble des éléments caractérisant une trajectoire paramétrique par morceaux. Remarquons qu’il n’y a pas de métrique naturelle sur Ξp notamment à cause de θ qui appartient au produit Θϕ(1)× · · · × Θϕ(p). Pour un autre choix de ϕ, le paramètre θ peut vivre dans un ensemble produit différent. À présent, on souhaite estimer le paramètre ξ ∈ Ξp de la trajectoire réelle. Les difficultés sont immédiates. L’estimateur du maximum de vraisemblance pour le modèle statistique (Pξ)ξ∈Ξp est défini1 par

˜ ξε= arg min ξ∈Ξp Z 1 0 {Φ(Sξ)(t) − Φ(Sξ)(t)}2 dt − 2ε Z 1 0 {Φ(Sξ)(t) − Φ(Sξ)(t)} dWt.

Si la collection contient plusieurs modèles, d’après la remarque précédente, il se peut que θ(˜ξε) ne soit pas dans le même espace que θ. Comme il n’y a pas de métrique raisonnable pour Ξp, on ne peut pas parler de consistance pour un tel estimateur. On pourrait envisager de montrer la consistance de la trajectoire de paramètre ˜ξε, c’est-à-dire, pour tout η > 0,

lim ε→0P ³ kSξ˜ε − SξkL2 > η ´ = 0 .

Il doit alors être possible d’adapter la théorie classique des M -estimateurs avec ce nouveau critère. Pour la suite, on va se contenter des cas où la collection M ne contient qu’un modèle ou alors on suppose la fonction ϕ fixée indépendamment de ξ, autrement dit on impose la séquence des modèle paramétriques de la trajectoire. Pour tout modèle Mi pris dans la collection M, on suppose que l’application (t, θ) 7→ SMi,θ, [0, 1] × Θi→ R2 est continue. On note

Λpdef= ©ξ ∈ Θ × ¯p : Xξ continueª ,

avec Θ = Θip si la collection ne contient qu’un modèle Mi et Θ = Qpk=1Θϕ(k) sinon et ¯∆p l’adhérence de ∆p dans Rp+1. Précisons la nature topologique de Λp. On suppose pour simplifier que M ne contient qu’un modèle. L’application

Θp× ¯p → (R2)p

(θ, τ ) 7→ ¡SM,θkk) − SM,θk−1k)¢1≤k≤p est continue. Or, on a

Λpdef= ©ξ ∈ Θ × ¯p : SM,θkk) = SM,θk−1k), ∀k ∈ Npª ,

Défaut d’observabilité 91 donc Λp est un fermé dans le compact Θ × ¯p, donc c’est un compact. Le modèle statistique considéré est désormais (Pξ)ξ∈Λp.

Définition 9.1. On définit l’estimateur du maximum de vraisemblance pour (Pξ)ξ∈Λp par

ˆ

ξε def= arg min

ξ∈Λp Z 1 0 {Φ(Sξ)(t) − Φ(Sξ)(t)}2 dt − 2ε Z 1 0 {Φ(Sξ)(t) − Φ(Sξ)(t)} dWt.

Lemma 9.1. L’application définie de Λp dans R+ par

ξ 7−→

Z 1

0

{Φ(Sξ)(t) − Φ(Sξ)(t)}2 dt (1)

est continue.

La preuve est une conséquence de la continuité de l’application ξ 7→ Sξ qui se vérifie sans difficulté.

Proposition 9.1. On suppose que M ne contient qu’un modèle ou que ϕ est fixé indépendamment de ξ. Soit une trajectoire Sξ avec ξ∈ Λp. Alors, si la trajectoire est observable dans Λp, c’est-à-dire

arg min

ξ∈ΛpkΦ(Sξ) − Φ(Sξ)kL2 = {ξ} , l’estimateur ˆξε est consistant.

Il suffit d’appliquer le théorème de consistance des M -estimateurs [110, Theorem 5.7] en utilisant la continuité de l’application (1) et la compacité de Λp.

Sur un plan pratique, les conditions sur le porteur pour garantir l’observabilité d’une cible en MRU par morceaux (proposition 6.5) ou en MCU par morceaux (proposition 6.9) permettent l’observabilité dans Λp.

La consistance n’est qu’un pan du problème d’estimation. Il faudrait ensuite s’intéresser à la vitesse de convergence de l’estimateur. Il est probable que l’estimation des modèles paramétriques par morceaux s’inscrivent dans un cadre classique, voir [98], [91], [88]. Cette investigation n’a pas été menée plus loin à cause du comportement pathologique que l’on va décrire dans la section suivante.

9.3 Défaut d’observabilité

En réalité, les modèles de trajectoires paramétriques par morceaux sont très peu adaptés au problème de la trajectographie passive. Non pas qu’ils soient de mauvais candidats pour la description de trajectoires réelles, mais parce que le critère des mesures angulaires ne permet pas quasiment pas la distinction entre certains modèles de trajectoires distincts, et ce malgré l’hypothèse d’observabilité. Ce constat illustre la limite de la notion binaire d’observabilité. En pratique, il est nécessaire, pour que l’algorithme de minimisation atteigne la trajectoire réelle, que le critère à minimiser admette un minimum assez « franc ». On peut fabriquer, dans le cadre idéal des mesures sans bruit d’observation, quantité de scénarios avec des minima locaux très proches du minimum global et atteint en des trajectoires relativement éloignées de la trajectoire réelle.

−10 −5 0 5 10 −5 −4 −3 −2 −1 0 1 2 3 4 Trajectoires km km Cible Porteur Estimation

Fig. 9.1 – Estimation d’une trajectoire consti-tuée d’un MCU suivi d’un MRU

0 5 10 15 20 0.7 0.8 0.9 1 1.1 1.2 1.3 1.4 Mesures angulaires Cible Estimation

Fig. 9.2 – Écart des mesures angulaires Sur la figure 9.1, on peut voir l’estimation d’une trajectoire MCU-MRU. Le tracé des mesures angulaires présenté en figure 9.2 montre à quel point les trajectoires sont proches sur le plan des mesures angulaires bien qu’elles soient très éloignées l’une de l’autre. On présente une situation similaire en figures 9.3 et 9.4 où la cible suit une trajectoire MRU-MCU. Les mesures angulaires entre trajectoires réelle et estimée sont quasiment confondues bien que les deux trajectoires soient très distinctes. −10 −8 −6 −4 −2 0 2 4 6 8 −5 −4 −3 −2 −1 0 1 2 3 4 5 Trajectoires km km Cible Porteur Estimation

Fig. 9.3 – Estimation d’une trajectoire consti-tuée d’un MCU suivi d’un MRU

0 5 10 15 20 0.7 0.8 0.9 1 1.1 1.2 1.3 1.4 Mesures angulaires Cible Estimation

Fig. 9.4 – Écart des mesures angulaires À cette situation s’ajoute la complexité algorithmiques de la minimisation. Par exemple, pour une trajectoire continues avec trois sections MRU, il faut estimer deux instants de rupture, quatre paramètres pour la première section MRU et deux pour chacune des sections suivantes ce qui si-gnifie qu’il faut minimiser une fonction à dix paramètres. Le logicielMatlab, très performant dans le cadre paramétrique, est d’un usage particulièrement laborieux pour de telles minimisations.

9.4 Conclusion

Le caractère mal posé de la trajectographie passive semble rendre impraticable l’estimation de trajectoires paramétrique par morceaux avec un nombre de sections fixé. Aussi, l’approche de

Conclusion 93 la sélection de modèles où on pénalise par rapport au nombre de sections n’a pas été étudiée plus avant. À cela s’ajoute un autre problème : l’estimation en trajectographie passive présente des instabilités très fortes : une trajectoire peut être proche en norme euclidienne d’un modèle paramétrique ou paramétriques par morceaux et l’estimation fournit un résultat très loin de la trajectoire réelle.

Chapitre 10

Robustesse en paramétrique

Sommaire

10.1 Introduction . . . . 96

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