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Dédoublement cinétique d’amines propargyliques

I. 24a, ils réagissent plus rapidement sur l’énantiomère (S) de l’amine, conduisant

I.36 comme donneur d’acyle (Schéma I.30)

I.4.2 Dédoublement cinétique d’amines propargyliques

Les amines propargyliques constituent des intermédiaires clés dans la synthèse d’un grand nombre de composés naturels45 ou synthétiques46 et elles sont généralement obtenues par addition nucléophile d’un alcynure sur une imine.47 Une alternative à ce type de réaction est le dédoublement cinétique d’amines racémiques. Ainsi, nous avons débuté notre étude en nous intéressant aux amines propargyliques car, à part l’équipe de Seidel,37 aucun groupe de recherche n’a effectué le dédoublement cinétique de ces amines. Pour se faire, 1 équiv d’amine propargylique racémique en présence de 0,5 équiv de donneur d’acétyle I.29, devrait mener à 50% d’amide énantio-enrichi et à 50% d’amine (n’ayant pas réagi) de configuration absolue opposée (Schéma I.45).

Schéma I.45. Hypothèse de travail.

45

(a) B. Jiang, M. Xu, Angew. Chem., Int. Ed., 2004, 43, 2543; (b) J. J. Fleming, J. Du Bois, J. Am. Chem. Soc.,

2006, 128, 3926

46 C. Swithenbank, P. J. McNulty, K. L. Viste, J. Agric. Food Chem., 1971, 19, 417

47

(a) S. Nakamura, M. Ohara, Y. Nakamura, N. Shibata, T. Toru, Chem.–Eur. J., 2010, 16, 2360; (b) J. A. Bishop, S. Lou, S. E. Schaus, Angew. Chem., Int. Ed., 2009, 48, 4337

- 65 - I.4.2.1 Synthèse des substrats

Nous avons commencé nos travaux par la mise au point de deux stratégies de synthèse permettant d’accéder de manière efficace et modulable aux amines propargyliques racémiques. La première approche a consisté à introduire différents groupements alkyles et aryles en position  de l’amine tout en gardant le groupement phényle, porté par la fonction alcyne, inchangé. Ainsi, le phénylacétylène I.65 a été traité par du n-butyllithium puis additionné sur différents aldéhydes pour conduire aux alcools propargyliques I.66a-f. Ces derniers ont ensuite été engagés dans des réactions de Mitsunobu pour obtenir les amines protégées I.67a-f sous forme de phthalimides. Les amines primaires correspondantes I.68a-f ont alors été isolées avec des rendements compris entre 75% et 83% après traitement par de l’hydrazine dans l’éthanol au reflux (Schéma I.46a).

Schéma I.46a. Première stratégie de synthèse : Méthode A.

La même méthode A a été appliquée pour la synthèse des composés I.68g-i où cette fois le groupement aryle porté par l’alcyne a été modifié (Schéma I.46b).

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Afin d’apporter plus de diversité structurale au niveau de l’alcyne, une deuxième approche synthétique a été mise au point. Celle-ci a consisté à synthétiser le phthalimide I.70 à partir de l’alcool propargylique I.69 via une réaction de Mitsunobu. Des couplages de Sonogashira ont ensuite été réalisés avec différents dérivés bromés pour accéder aux composés I.67j-p et, après traitement de ces derniers par de l’hydrazine, les amines propargyliques I.68j-p ont pu être isolés avec des rendements compris entre 67% et 77% (Schéma I.47).

Schéma I.47. Deuxième stratégie de synthèse : Méthode B.

Au final, 16 amines propargyliques racémiques ont pu être synthétisées par ces deux méthodes (Schéma I.48).

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Schéma I.48. Synthèse des amines propargyliques racémiques par les Méthodes A et B.

I.4.2.2 Optimisation des conditions réactionnelles

Après avoir réalisé la synthèse des produits de départ, il nous a fallu trouver les conditions réactionnelles optimales pour la réaction de dédoublement cinétique. Dans un premier temps, l’étude de l’influence de différents solvants sur la réaction a été réalisée sur l’amine propargylique racémique I.68a (Tableau I.5).

Ainsi, 0,5 équiv du réactif I.29 a été additionné en 1 h sur 1 équiv d’amine racémique dans différents solvants, à température ambiante, pour conduire à l’amide I.71a correspondant avec des ee allant de 46% (R) à 76% (S) à 50% de conversion. Comme les travaux antérieurs l’avaient déjà montré pour les amines benzyliques, une inversion de la sélectivité a été observée en fonction de la polarité du solvant utilisé. Dans les solvants peu polaires et aprotiques (Tableau I.5 entrées 1 à 7), l’énantiomère (R) de l’amine a été majoritairement

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acétylée et les amides correspondants ont été isolés avec des ee assez modestes (ee = 32% à 51%). En revanche, lorsque la réaction a été menée dans des solvants très polaires et aprotiques (Tableau I.5 entrées 8 et 9), c’est l’énantiomère de configuration (S) qui a été majoritairement acétylé fournissant les amides correspondants avec de bons excès énantiomériques (ee jusqu’à 76%).

D’autre part, lorsque les réactions de dédoublement cinétique ont été menées en présence de 12 équiv d’AliquatTM336 (chlorure de trioctylmethylammonium) dans les mêmes conditions et dans les mêmes solvants que précédemment, aucune inversion de la sélectivité n’a été observée. Comme pour les travaux réalisés antérieurement, en présence d’un sel d’ammonium comme additif, l’énantiomère (S) de l’amine réagit préférentiellement quel que soit le solvant utilisé pour former l’amide correspondant avec d’excellents excès énantiomériques (ee = 61% à 85%) (Tableau I.5, entrées 1 à 9).

Tableau I.5. Influence du solvant et de la présence de sel dans la réaction.

Entrée Solvant Sans Aliquat

TM 336 ee[a] (%) Avec AliquatTM 336 ee[a] (%) 1 THF 46 (R[b]) 85 (S[b]) 2 Cyclohexane 51 (R) 80 (S) 3 Toluène 46 (R) 81 (S) 4 Dioxane 36 (R) 73 (S) 5 ,,-trifluorotoluène 32 (R) 77 (S) 6 CH2Cl2 38 (R) 80 (S) 7 CHCl3 37 (R) 61 (S) 8 NMP 74 (S) 76 (S) 9 DMPU 76 (S) 78 (S)

aliquatTM 336 = n-oct3NMeCl, [a]Excès énantiomériques de l’amide déterminés par SFC sur colonne chirale.

[b]

Énantiomère majoritaire

Le THF, en présence d’AliquatTM336, a fourni la meilleure sélectivité lors du dédoublement cinétique de l’amine I.68a, ce résultat ayant pu être amélioré en abaissant la température à

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réactionnelles ont donc été retenues pour le dédoublement cinétique des autres amines propargyliques synthétisées précédemment.

Schéma I.49. Conditions réactionnelles optimales pour le dédoublement cinétique d’amines

propargyliques.

Une hypothèse selon laquelle deux états de transition seraient en compétition pour mener à l’acétylation de l’amine, peut être émise pour essayer d’expliquer l’inversion de sélectivité en fonction de la polarité du solvant. Dans les solvants apolaires, un état de transition stabilisé par des liaisons hydrogène serait prépondérant et favoriserait la réactivité de l’énantiomère (R). Au contraire, dans les solvants polaires, un état de transition n’impliquant pas de liaisons hydrogène serait prépondérant et favoriserait la réactivité de l’énantiomère (S) de l’amine. La présence de sel aurait ainsi le même effet que les solvants polaires en empêchant des liaisons hydrogène de se faire.

I.4.2.3 Généralisation de la réaction de dédoublement cinétique Après avoir déterminé les conditions optimales pour effectuer le dédoublement cinétique d’amines propargyliques, à savoir 12 équiv d’AliquatTM336 dans le THF, à 20 °C, pendant 12 h, celles-ci ont été appliquées aux différentes amines I.68a-p synthétisées précédemment. Dans tous les cas, nous avons observé une consommation totale du réactif

I.29 par CCM. Les amides I.71a-p ainsi que les amines n’ayant pas réagi ont été isolés puis

analysés par SFC pour déterminer leur excès énantiomérique. Cela nous a alors permis de confirmer que le taux de conversion

τ

c de la réaction était bien de 50%.48

Il est ressorti de cette étude que la taille du groupement alkyle en  de la fonction amine n’a pas d’influence majeure sur l’excès énantiomérique. En effet, les substituants Me, Et, iPr, iBu ou Bn ont tous fourni des ee aux alentours de 90%. En revanche, la présence d’un groupement

48

τc

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aromatique (I.71f) a entraîné une chute considérable de la sélectivité (ee = 7%) ce qui s’est révélé être une limite de la méthode.

D’autre part, un très grand nombre de substituants sont tolérés au niveau de l’alcyne puisque des ee avoisinants les 90% ont été obtenus avec des groupements aromatiques possédants des substituants électro-donneurs, électro-attracteurs, des hétéroaromatiques et même des groupements oléfiniques (Schéma I.50).

Schéma I.50. Généralisation de la réaction de dédoublement cinétique d’amines

propargyliques racémiques.

I.4.2.4 Application à la synthèse de la N-acétyl-(S)-coniine

Afin de montrer l’applicabilité de cette méthode, nous avons voulu réaliser la synthèse de la N-acétyl-(S)-coniine où le centre stéréogène serait obtenu grâce au dédoublement cinétique

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d’une amine propargylique racémique. Cette synthèse nous a aussi permis de montrer à la fois que cette méthode pouvait être appliquée à l’échelle du gramme et que l’énantiomère (S) étaient bien l’énantiomère majoritairement acétylé durant le processus.

La synthèse de la N-acétyl-(S)-coniine a commencé par la protection du 4-butyn-1-ol I.72 en l’éther benzylique. Ce dernier a été traité par du n-butyllithium et a été additionné sur le butanal pour former l’alcool propargylique I.73 racémique avec 78% de rendement sur les deux étapes. Cet alcool a ensuite été converti en l’amine primaire I.74 via une réaction de Mitsunobu générant intermédiairement le phthalimide qui a été déprotégé par de l’hydrazine dans l’éthanol au reflux. Un rendement global de 62% a pu être obtenu sur ces deux étapes. L’étape de dédoublement cinétique a ensuite été réalisée en faisant réagir 1 équiv d’amine racémique I.74 avec 0,5 équiv de donneur d’acétyle I.29 en présence d’AliquatTM336 à

20 °C dans le THF. L’amide I.75 a ainsi été isolé avec un excès énantiomérique de 94% et avec 50% de rendement, à noter que l’amine n’ayant pas réagi (ee = 94%) a aussi pu être récupérée. L’hydrogénation de la triple liaison ainsi que la déprotection concomitante de l’alcool primaire en présence de H2, Pd/C ont permis d’isoler le composé I.76 avec un rendement quantitatif. La formation de l’intermédiaire tosylé (TsCl, Et3N, DMAP, CH2Cl2) suivi de la cyclisation initiée par la déprotonation de l’amide par NaH, ont menés à la N-acétyl-(S)-coniine I.77 avec un rendement de 59%. La N-acétyl-(S)-coniine a donc été obtenue en 8 étapes à partir du butynol et avec un rendement global de 14%. Après comparaison du pouvoir rotatoire avec celui décrit dans la littérature,49 ([]20D +46.0 (c 0.65, CHCl3); lit. []22D +46.9 (c 0.4, CHCl3)) nous avons eu confirmation que la configuration absolue du centre stéréogène obtenu lors du dédoublement cinétique était bien de configuration (S) (Schéma I.51).

49

(a) D. Passarella, A. Barilli, F. Belinghieri, P. Fassi, S. Riva, A. Sacchetti, A. Silvani, B. Danieli, Tetrahedron

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Schéma I.51. Synthèse de la N-acétyl-(S)-coniine.

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