• Aucun résultat trouvé

Découverte de Microcodiun1 elegans dans la Gon1pholite du Haut-Jura neuchâtelois. Etude et position systén1atique de cette Algue

par JULES FAVRE.

En 1911, j'avais signalé dans la Gompholithe miocène du Locle (1911, p. 407) un organisme que je n'avais pu identifier. Quelques années plus tard, en 1914, GLücK (1914) décrivait ce même organisme de l'Helvétien (Citharellenkalk) du Jura badois, sous le nom de lVIicrocodium elegans et le plaçait dans les Algues calcaires de la famille des Codiacées1).

La conservation de cette Algue dans les sédiments du Locle laisse à désirer. Elle est plus mau-vaise encore dans les gisements du Jura badois, si on en juge par les dessins et la description qu'en donne GLücK; il semble même que, dans cette région, la structure intime caractéristique de la plante a été à peu près complètement détruite par la fossilisation. Hien d'étonnant dès lors si le paléontolo-giste allemand, n'ayant pu observer les éléments les plus significatifs de cette Algue, l'ait classée parmi les Codiacées, alors qu'elle semble appartenir, comme on le verra plus loin, aux lYiélobésiées.

Tout d'abord, comme le montrent les figures 2-6, pl. 4 et la fig. 6 du texte, l'organisme de la Gompholithe du Locle est bien le même que celui de l'Helvétien du Jura badois. Il est constitué (pl. 3, fig. 37-38, pl. 4, fig. 1) par de petites masses souvent groupées en grand nombre, ordinaire-ment arrondies, pouvant atteindre un diamètre de 1,4 mm.; elles sont aussi ovoïdes, ou en rognons souvent allongés et mesurent jusqu'à 4 mm., mais conservant, en diamètre, la dimension des exem-plaires subglobuleux. La structure de ces masses est tout à fait caractéristique (pl. 4, fig. 2-7 et fig. 6 du texte). En coupe médiane, on y observe un corps central, souvent excentrique, subisodia-métrique dans les exemplaires globuleux, subcylindrique dans les exemplaires ovoïdes ou allongés.

Il est formé par un aggrégat de grains de calcite non orientés, de dimensions fort variables et de forme très irrégulière. De ce corps central partent, en disposition rayonnante, des éléments obpyramidaux tronqués étroitement accolés, mais non soudés entre eux, de section ordinairement hexagonale, à grande base arrondie et à petite base non nettement délimitée elu côté du centre.

Jusqu'ici, il n'existe aucune divergence sensible entre la description de GLücK et celle relative aux exemplaires du Locle. Mais d'après le paléontologiste allemand, ces éléments obpyramidaux,

1) Cette étude était sous presse quand M. le Prof. J. PIA m'a indiqué une notice de M. W. N. EDWARDS: Lower Eocene Plants from lstria, Ann. and Mag. of nat. History, 10ème sér., vol. 10, p. 21:3, pl. X, London, 1932, dans laquelle l'auteur signale et figure un 1Vlicrocodit!m qu'il nomme elegans. Les échantillons de cette Algue proviennent d'un bloc non en place auquel M. EDWARDS

donne un âge montien. Leur structure intime n'est pas connue, de sorte que leur attribution à l'espèce de Glück n'est pas certaine.

Dans cette même notice, M. EDWARDS suggère qu'il pourrait y avoir un lien de parenté entre Pûa bibractens'is Bertr. et Ren., une Botryococcaceae du Carbonifère et M'icrocodiwn. Comme on le verra plus loin, la structure cellulaire particulière que présente le JJiicrocodium du Miocène du Jura n'autorise pas un tel _rapprochement.

40 J. FAVRE ET CONS., TERTIAIRE DU HAUT-JURA NEUCHÂTELOIS

qu'il appelle tubes palissadiques (PalissadenschHiuche), seraient creux, ce qui ne ressort pas nette-ment- dans la plupart des figures qu'il donne et ce qui n'est pas le cas dans les Algues du Locle. Le plus souvent, ces derniers montrent en section mince longitudinale une structure fort indistincte et sont constitués par des plages de calcite plus ou moins fissurées ou plus ou moins grenues que GLüCK

a représentées (1914, par ex. fig. 16 et 17, 19-20). Mais, lorsque la fossilisation est moins mauvaise, on aperçoit sur le fond de calcite transparent de ces éléments obpyramidaux, dans certains cas, un système de stries longitudinales obscures divergeant en éventail, et dans d'autres cas, un système de stries transversales foncées, arquées-concentriques. Enfin, quand la conservation des Algues est la meilleure, ce qui est rare, ces deux systèmes de stries coexistent et déterminent un réseau de cellules aux zones colorées comprenant plusieurs assises de cellules qui se rencontrent dans quelques genres de Mélobésiées.

Le genre créé par GLücK, Microcodium, n'est donc pas une Codiacée, mais il se rapproche beaucoup des Mélobésiées. Si par la structure et la disposition de ses cellules, il rappelle tout à fait Lithophyllum et Archaeolithothamnium, il s'en écarte par une morphologie toute différente du thalle. Dans ces deux derniers genres, il est le plus souvent caractérisé par de petits buissons plus ou moins ramifiés, par des croûtes à surface unie ou mamelonnée ou portant des branches dressées.

Si ce thalle est parfois en forme de rognon, il ne montre cependant jamais cet arrangement en rameaux radiaires étroitement accolés, et par conséquent polygonaux, qui caractérise Microcodium. De plus la taille de ce dernier genre est notablement plus petite que celle des deux autres. Enfin, on verra plus loin que par sa biologie, Microcodium s'éloigne encore davantage des genres actuels de Mélobésiées. Aussi, sera-t-il peut-être nécessaire de créer pour lui une nouvelle famille. En atten-dant qu'il soit mieux connu ou qu'on en trouve d'autres espèces, c'est près des genres Li th op hyll um et Archaeolithothamnium qu'il semble le mieux placé.

Le corps central de Microcodium, d'où partent les rameaux radiaires, correspond probable-ment à l'hypothalle. Mais sa structure ne paraît pas s'être conservée, car on ne peut guère considérer comme un tissu qui le représenterait ce réseau fort irrégulier qu'on y observe et qui ne semble indiquer que les contours des grains de calcite qui en constituent la masse. Un tissu cellulaire montrerait cer-tainement plus de régularité. A l'inverse des genres de Mélobésiées connus jusqu'ici, l'hypothalle

Fig. 7. Section semischématique à travers

un thalle de Microcodium elegans GLÜCK. Gross.: 100.

était-il non calcifié, ou tout au moins à parois trop minces ou trop peu incrustées pour être susceptibles de conservation ? Les rameaux polygonaux rayonnants avec leur structure du Locle que j'ai examinés. Cette absence d'or-ganes reproducteurs pourrait inciter à rap-procher Micro cod i u rn de certaines Soléno-poracées à cellules ordonnées en rangées ré-gulières, chez lesquelles on n'a pas constaté ces organes, par exemple Lithocaulon; mais, dans ce genre, les cellules du thalle, de taille beaucoup plus considérable, sont d'autre ordre de grandeur.

La diagnose du genre Micro co diu rn GLücK, modifiée grâce aux observations faites sur les exem-plaires du Locle, peut être énoncée sous la forme suivante:

Thalle de très petite taille, massif, subglobuleux, ovoïde-allongé ou en forme de rognons irré-guliers. A son intérieur, d'un corps central (hypothalle ?) à structure primitive non conservée, partent des rameaux rayonnants constituant l'épithalle. Ces rameaux sont allongés, droits ou légèrement sinueux, étroitement serrés les uns contre les autres, mais non soudés, polygonaux et ordinairement à six pans; leur extrémité distale est arrondie, leur extrémité proximale est indistinctement limitée du côté du corps central. Ils sont constitués par des cellules rectangulaires, allongées dans le sens radiaire et exactement alignées en rangées arquées successives.

Les caractéristiques de l'espèce elegans GLücK, sont les suivantes. Le thalle, lorsqu'il est subglobuleux, mesure jusqu'à 1,40 mm. de diamètre, mais le plus souvent 0,60 mm. à 1 mm. Lors-qu'il est allongé, il peut atteindre jusqu'à 3 mm., très exceptionnellement 4 mm., mais il conserve

6

42 J. FAVRE ET CONS., TERTIAIRE DU HAUT-JURA NEUCHÂTELOIS

alors en diamètre, la dimension des exemplaires arrondis. Le corps central (hypothalle ?) presque toujours excentrique, a un diamètre variant de 0,07 mm. à 0,16 mm. Il est subisodiamétrique chez les individus globuleux, subcylindrique chez les exemplaires allongés. Sa structure primitive semble avoir disparu et il est constitué par un aggrégat de grains de calcite non orientés, de forme très irré-gulière et de taille fort inégale. Sur une coupe médiane d'un thalle globuleux on compte 12 à 24 rameaux rayonnants. Les dimensions de ces rameaux sont: longueur, jusqu'à 0,75 mm. (d'ordinaire 0,40-0,60 mm.), largeur, jusqu'à 0,28 mm. (généralement 0,13-0,20 mm.). Les cellules de l'épi-thalle mesurent en longueur de 3 à 10 ft (en moyenne 5-6 ft) et en largeur de 2 à 4 ft (en moyenne 2,5-3 ft) .

Documents relatifs