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Décomposition de Clebsch-Gordan

Le produit tensorielρ⊗ρ0 de deux représentations irréductiblesρetρ0 d’un groupe de Lie matriciel G n’est pas forcément irréductible. S’il est complètement réductible (par exemple si G est compact par la proposition 1.20), alors sa décomposition en somme directe de représentations irréductibles est appelé la décomposition de Clebsch-Gordan de ce produit tensoriel.

Le résultat suivant donne la décomposition de Clebsch-Gordan des produits tensoriels de deux représentations irréductibles de SU(2).

Théorème 2.12. Pour tous les j1, j212N, nous avons Dj1 ⊗Dj2 '

j1+j2

M

J=|j1−j2|

DJ =D|j1−j2|⊕D|j1−j2|+1⊕ · · · ⊕Dj1+j2−1⊕Dj1+j2 .

En particulier, sij1 6= 0etj2 6= 0, alors la représentation Dj1⊗Dj2 deSU(2)n’est pas irréductible.

Les physiciens notent la base(|j1, m1i ⊗ |j2, m2i)m1,m2 de l’espace vectoriel complexe Vj1⊗Vj2, oùm112Z, −j1≤m1 ≤j1, j1+m1 ∈Net de mêmem212Z, −j2 ≤m2≤ j2, j2 +m2 ∈ N, formée des tenseurs purs des éléments des bases canoniques de Vj1 et Vj2, qu’ils appellent lesétats couplés, de la manière suivante :

|j1, m1i ⊗ |j2, m2i=|j1, m1;j2, m2i.

69. Voir la proposition1.22, sachant queSO(3)etSU(2)sont connexes.

70. Voir la partie2.1.

Dans la décomposition de Clebsch-Gordan donnée par le théorème ci-dessus, ces vecteurs s’expriment donc comme combinaisons linéaires (à coefficients a priori complexes) des vecteurs de la base canonique

(|J, Mi)M∈1

2Z,−J≤M≤J, J+M∈N

de VJ pour |j1 −j2| ≤ J ≤ j1 +j2, que les physiciens appellent les états découplés. Ils notent aussi |J, Mi =|(j1, j2)J, Mi pour préciser de quel produit tensoriel il s’agit. Dans les sommes ci-dessous, les indicesJ etM sont des demi-entiers tels quej1+j2+J ∈Net J +M ∈N. Nous avons donc une écriture comme combinaison linéaire

|j1, m1;j2, m2i=

j1+j2

X

J=|j1−j2| J

X

M=−J

h(j1, j2)J, M|j1, m1;j2, m2i |(j1, j2)J, Mi,

où les indices variablesJ etM de ces deux sommes sont des éléments de 12Zvariant de 1 en 1 entre les deux bornes indiquées et où les coefficients h(j1, j2)J, M|j1, m1;j2, m2i ∈C sont appelés lescoefficients de Clebsch-Gordan. On considère aussi les symboles3-j définis par

j1 j2 j3 m1 m2 m3

= (−1)j1−j2−m3

√2j3+ 1 hj1, m1;j2, m2|(j1, j2)j3,−m3i,

où les coefficentshj1, m1;j2, m2|(j1, j2)j3,−m3isont les coefficients de la matrice de passage de la base des états découplés à la base des états couplés :

|(j1, j2)J, Mi=

j1

X

m1=−j1

j2

X

m2=−j2

hj1, m1;j2, m2|(j1, j2)j3,−m3i |j1, m1;j2, m2i, avec la même convention de sommation que ci-dessus.

Démonstration du théorème 2.12. Nous profitons de cette démonstration pour intro-duire un outil important pour étudier les représentations de groupes, la notion de caractère.

Si V est un espace vectoriel complexe de dimension finie, et si A ∈ GL(V), nous noteronstrA, et appelleronstracedeA, la trace de la matrice deAdans n’importe quelle base de V, ce qui ne dépend pas de la base, puisque tr(P XP−1) = trX pour tous les X, P ∈GLN(C).

Si G est un groupe de Lie matriciel et si (V, ρ) est une représentation de G, nous appellerons caractèrede (V, ρ)l’applicationχρ:G→Cdéfinie par

∀g∈G, χρ(g) =tr(ρ(g)).

Remarquons que χρ est une application de classe C, par composition de telles applica-tions. Notons que par la propriété ci-dessus de la trace, la valeur de χρ(g) ne dépend que de la classe de conjugaison de g dansG: pour tous les g, h∈G, nous avons

χρ(hgh−1) =χρ(g).

En particulier, si G= SU(2), comme tout élément deSU(2)est diagonalisable, ayant deux valeurs propres de module 1inverses l’une de l’autre, le caractère χρ est déterminé par la valeur de χρ

eit 0 0 e−it

pour tout t∈R(modulo 2πZ). De même, si (V, ρ) et(V0, ρ0) sont deux représentations conjuguées de G, alors

χρρ0 .

Nous regroupons dans l’énoncé suivant les propriétés élémentaires des caractères.

Proposition 2.13. Soient(V, ρ),(V0, ρ0)deux représentations d’un groupe de Lie matriciel G.

(1) La dimension de la représentation ρ est égale à χρ(e).

(2) Le caractère de la représentation somme directe (respectivement produit tensoriel) de ρ etρ0 est la somme (respectivement produit) des caractères de ρ et ρ0 :

χρ⊕ρ0ρρ0 et χρ⊗ρ0ρχρ0 .

(3) Si Gest compact, deux représentations deGsont conjuguées si et et seulement si elles ont même caractère.

Démonstration. (1) Puisqueρ(e)est l’identité de V, ceci découle du fait que la trace de la matrice identité dansGLN(C) est égale àN.

(2) La première affirmation découle du fait que la trace d’une matrice diagonale par blocs est la somme des traces de ses blocs.

Montrons la seconde affirmation. Si (ei)1≤i≤M et (fk)1≤k≤N sont des bases de V et V0, alors(ei⊗fk)1≤i≤M,1≤k≤N est une base deV ⊗V0. Soient(aij)1≤i,j≤M et(bk`)1≤k,`≤N

les matrices de ρ(g) et ρ0(g), où g ∈ G, dans les bases (ei)1≤i≤M et (fk)1≤k≤N. Alors le coefficient de ej⊗f` dans

ρ⊗ρ0(g)(ei⊗fk) = (ρ(g)(ei))⊗(ρ0(g)(fk)) = (ajiej)⊗(b`kf`) =ajib`kej⊗f` . est aji bk`. Donc en calculant la trace de ρ⊗ρ0 dans la base (ei⊗fk)1≤i≤M,1≤k≤N, nous avons

χρ⊗ρ0(g) =aiibkkρ(g)χρ0(g).

(3) Nous admettrons cette affirmation, voir par exemple [Kna, §4.2]. L’idée est que la multiplicité mρ0(ρ) d’une représentation irrréductible donnée ρ, dans la décomposition d’une représentationρ0deGen somme directeρ0=L

ρmρ0(ρ)ρ, oùρparcours un ensemble de représentants des classes d’équivalences de représentations irréductibles deG, s’exprime par une formule explicite uniquement en fonction des caractères de ρ et de ρ0 (voir [KS, page 58]. Comme ces multiplicités déterminentρ0 à conjugaison près, le résultat en découle.

Calculons le caractère de la représentation irréductible(Vj,Dj)deSU(2)pourj∈ 12 N. Pour tout t∈R, posons

χj(t) =χDj

eit 0 0 e−it

,

de sorte que pour tout g ∈ SU(2), nous avons χDj(g) = χj(arcsintrg2 ). Dans la base (z1j+mz2j−m)m∈1

2Z:−j≤m≤j, j+m∈N de Vj, la matrice Dj eit 0

0 e−it

est diagonale, de coefficients diagonaux(e2imt)m∈1

2Z:−j≤m≤j, j+m∈N. Donc (dans les sommes ci-dessous, les indices sont des demi-entiers variant de1 en 1entre les deux bornes indiquées)

χj(t) =

j

X

m=−j

e2imt.

Montrons que pour tous lesj1, j212 Nett∈R, nous avons

Ceci démontre que pour toutg∈SU(2), nous avons χDj1(g)χDj2(g) =

ont les mêmes caractères. Par la proposition 2.13(3), ces deux représentations sont donc conjuguées, ce qui démontre le théorème 2.12.

Pour démontrer la formule (40), nous pouvons par symétrie supposer quej2 ≤j1. Po-sonsz=e2it, et supposons quez6= 1. Alors un argument élémentaire de série géométrique montre que

χj(t) = zj+1−z−j z−1 .

Donc, en posant m = j2 −k dans la première somme de la seconde ligne et m = k−j2

dans la seconde somme de la seconde ligne pour obtenir la troisième égalité, et en utilisant le fait quej1+j2−k≥0sij2 ≤j1 etk≤2j2 pour obtenir la dernière égalité, nous avons

Ceci démontre la formule (40) si t /∈πZ. Par continuité, cette formule (40) est vraie pour

tout t∈R, ce qui démontre le résultat.

Application physique

Comme évoqué en préambule, le groupeSU(2)apparaît aussi en physique des particules par une symétrie appelée la symétrie d’isospin,71 à ne pas confondre avec la notion de spin de ces particules. Comme initialement remarqué par Heisenberg, certaines particules soumises aux interactions fortes présentent des propriétés semblables tout en ayant des charges électriques différentes. C’est le cas par exemple

71. La terminologie dérive de la terminologie “isotopic spin” (spin isotopique) introduite par E. Wigner en 1936, voir [Wig]

• du doublet de nucléons (le proton p de masse environ 938,27 MeV /c2 et de charge +|e|= 1,602176565 10−19C, et le neutronnde masse environ939,56MeV /c2et de charge nulle),

• du triplet de pions (le pion π0 de masse environ134,97 MeV /c2 et de charge nulle, et les pionsπ± de masse environ 139,57MeV /c2 et de charge±|e|), et

• du quadruplet de baryons Delta, tous de masse environ1232MeV /c2, et de charges 2|e|,|e|,0−|e|pour ∆++,∆+,∆0,∆.

Les physiciens expliquent cela par le fait que l’hamiltonien de l’interaction forte admet une symétrie par le groupe SU(2), brisée par l’interaction électromagnétique, et que les particules sujettes à l’interaction forte peuvent être décrites par les vecteurs de base |jmi des divers espaces de représentations irréductibles de spin j de SU(2). Ils introduisent deux nombres quantiques, l’isospin total I si la représentation est (VI,DJ) et l’isospin projection I3 (aussi noté Iz) si la particule corrrespond au vecteur de base |II3i, c’est-à-dire si la fonction d’onde de la particule est un vecteur propre de valeur propre I3 pour l’opérateur J3.

Voici un tableau d’isospins :

famille particule I I3

nucl´eon proton p=uud 12 +12 nucl´eon neutronn=udd 1212

pion π=d u 1 −1

pion π0 1 0

pion π+=u d 1 1

baryon Delta ∆ =ddd 3232 baryon Delta ∆0=udd 3212 baryon Delta ∆+ =uud 32 12 baryon Delta ∆++=uuu 32 32

L’isospin projectionI3 est relié aux nombres de quarks composant les particules par la formule suivante :

I3 = 1

2 (nu−nu)−(nd−nd)

où nu,nd,nu etndsont respectivement le nombres de quarks haut, quarks bas, antiquark haut et antiquark bas composant la particule.

Les physiciens notent parfois directement par le spinj la représentation Dj de spinj deSU(2). Ainsi les décompositions de Clebsch-Gordan des produits tensoriels de

représen-tation de petits spins de SU(2) sont les suivantes :

On dit que la représentation 12⊗1 contient les représentations de spin 12 et 32. La matrice de passage de la base des états couplés

|1 de l’espace vectoriel de la représentation 12⊗1à la base des états découplés

|1

de l’espace vectoriel de la représentation 1232, fournie par les coefficients de Clebsch-Gordan, est (voir par exemple [Zub1, page 18])

Les processus de transformation virtuels d’un nucléon en un nucléon plus un pion et réciproquement se comprennent par le fait que la représentation 12⊗1contient la représen-tation de spin 12, et ainsi les phénomènes de cohésion des noyaux par échange de pions entre nucléons, dont est responsable l’interaction forte, se comprend par des passages continuels entre états couplés et états découplés.

3 Les groupes de Lorentz et de Poincaré

Dans ce chapitre (pour lequel nous renvoyons aux références [Nab, Del, Gou], nous noterons

e0= (1,0,0,0), e1= (0,1,0,0), e2 = (0,0,1,0), e3 = (0,0,0,1) la base canonique de R4 et (toujours avec la convention de sommation d’Einstein)

x= (x0, x1, x2, x3) =xµeµ

un élément générique de R4, appelé par les physiciens un quadrivecteur72 (ou parfois 4-vecteur). Les indices en lettres grecquesµetν varient entre0et3. Les physiciens appellent x0lacoordonnée de tempsetx1, x2, x3 lescoordonnées d’espace. C’est en effet pour pouvoir manipuler des grandeurs ayant même dimensionalité qu’ils posent

x0 = c t

où t est le temps (en secondes) et c≈2.99792458 108 ms−1 la vitesse de la lumière dans le vide, et sorte que les quatre quantitésx0, x1, x2, x3 sont mesurées en mètres.

3.1 L’espace-temps de la relativité restreinte

Nous appelleronsespace-temps de Minkowski,73 et noteronsR1,3, l’espace vectorielR4 ou son espace affine associé, muni de la forme bilinéaire g:R4×R4 →R dont la matrice (gµ,ν)0≤µ,ν≤3 dans la base canonique est lamatrice de Minkowski74

I1,3=

−1 0 0 0 0 1 0 0 0 0 1 0 0 0 0 1

=

−1 0 0 I3

,

la seconde écriture étant une matrice par blocs 1-3 dans la décomposition R4 =R×R3, avec I3 la matrice 3×3 identité. Ainsi g est symétrique (c’est-à-dire que sa matrice est symétrique), non dégénérée (c’est-à-dire que sa matrice est inversible), de signature (1,3) ou (−,+,+,+) (c’est-à-dire que les valeurs propres de sa matrice (qui sont réelles non nulles car cette matrice est diagonalisable surRet inversible) sont, à permutation près, de signes−,+,+,+). Cette forme bilinéaire est appelée laforme lorentzienne standard75sur R4, ou letenseur métriquede l’espace-temps de Minkowski. Pour tous lesx, y∈R1,3, nous noterons

x·y =g(x, y) (parfois appelé un scalaire de Lorentz). Ainsi

x·y=−x0y0+x1y1+x2y2+x3y3

72. terminologie sans doute introduite par Sommerfeld [Som]

73. Il est appelé espace pseudo-euclidien standard de signature(1,3)dans la partie1.1.

74. En fait, Minkowski considérait la matrice opposée, voir [Min], et il introduisit comme postulat que la quantitéc dt2dx12dx22dx32 devait rester positive lors du mouvement dans l’espace-temps : la vitesse d’un objet ne peut dépasser la vitesse de la lumière.

75. D’autres références choisissent la signature(+,−,−,−), mais ce choix n’a pas grande importance.

et en particulier eµ·eν =gµ,ν.

La forme quadratiquex7→g(x, x) associée à gest

x·x=−(x0)2+ (x1)2+ (x2)2+ (x3)2.

Avec une terminologie introduite a priori par Minkowski (voir par exemple [Min]), un vecteurx∈R1,3 est dit

(1) de type tempssi x·x <0,

(2) de type espacesi x·x >0, et nous noterons alors kxk1,3 =√

x·x ,

(3) de type lumière(ou tout simplement lumière76) six·x= 0.

Un vecteur x de R1,3 de type lumière non nul ou de type temps est dit orienté vers le futursi sa coordonnée de tempsx0 est strictement positive, et orienté vers le passésinon.

Remarquons que les vecteurs orthogonaux à eux-même dans l’espace-temps de Minkowski (qui n’est pas un espace euclidien !) sont exactement les vecteurs lumières.

nappe

nappe

x0 vecteur de type temps

vecteur lumière 0

vecteur de type espace (orienté vers le futur)

(orienté vers le futur) du futur

du passé

Le cône de lumière77 (vectoriel) de R1,3 est l’ensemble des vecteurs de type lumière.

Privé du vecteur nul, il est réunion de la nappe du passé {x∈R1,3 : x·x= 0, x0<0}

et de la nappe du futur

{x∈R1,3 : x·x= 0, x0 >0}.

L’espace R1,3 privé du cône de lumière possède exactement trois composantes connexes, celle des vecteurs de type espace, celle des vecteurs de type temps orientés vers le futur (à l’intérieur de la nappe du futur) et celle des vecteurs de type temps orientés vers le passé (à l’intérieur de la nappe du passé).

76. Les mathématiciens disent aussiisotropes.

77. Les mathématiciens disent aussicône isotrope.

Exercice E.3. (1) Montrer que tout multiple strictement positif d’un vecteur de type temps orienté vers le futur et toute somme de vecteurs de type temps orientés vers le futur est encore un vecteur de type temps orienté vers le futur. Montrer que tout multiple strictement positif d’un vecteur de type lumière orienté vers le futur est encore un vecteur de type lumière orienté vers le futur.

(2) Montrer que deux vecteurs non colinéaires x et y de type lumière (respectivement deux vecteurs x ety de type temps) sont dans la même nappe (respectivement à l’intérieur de la même nappe) si et seulement si x·y <0.

Un vecteur deR1,3 est ditunitaire si |x·x|= 1. L’ensemble des vecteurs unitaires de R1,3 est la réunion de l’hyperboloïde à une nappe

{x∈R1,3 : x·x= 1}

(formé des vecteurs unitaires de type espace), et de l’hyperboloïde à deux nappes {x∈R1,3 : x·x=−1}

(formé des vecteurs unitaires de type temps). Ces hyperboloïdes sont des sous-variétés de dimension 3 de R4, en utilisant le critère des fonctions implicites (proposition 1.4).

L’hyperboloïde à deux nappes possède deux composantes connexes. Celle constituée des vecteurs unitaires de type temps orientés vers le futur est appelée l’espace hyperboliqueréel de dimension 3, et notée

H3R={x∈R1,3 : x·x=−1, x0>0}.

Les traits gras du dessin ci-dessous représentent l’intersection des hyperboloïdes et du cône de lumière avec n’importe quel hyperplan vectoriel de R4 contenant l’axe des coordonnées de temps x0.

0 x0

H3R

à une nappe hyperboloïde à deux nappeshyperboloïde

x1, x2, x3

Lecône de lumière(affine) d’un pointxde R1,3 est l’ensemble des pointsy deR1,3 tels que le vecteur −→xy=y−x appartienne au cône de lumière vectoriel deR1,3.

x

0

x0

Deux vecteurs x, y ∈ R1,3 sont dit orthogonaux si x·y = 0. Le lecteur prendra bien garde à ne pas confondre les notions d’orthogonalité dans l’espace euclidien R4 et celle dans l’espace-temps de Minkowski R1,3. L’orthogonald’un sous-espace vectorielE deR1,3 est le sous-espace vectoriel

E1,3 ={x∈R1,3 : ∀y∈E, x·y= 0}

formé des vecteurs de R1,3 orthogonaux à tous les vecteurs deE.

Un sous-espace vectorielE deR1,3 propre (c’est-à-dire différent de {0} etR1,3) est dit (1) de type espace si la restriction de g à E est définie positive (donc de signature (+), (+,+) ou (+,+,+) si E est de dimension 1,2,3), ou de manière équivalente si tous ses vecteurs non nuls sont de type espace,

(2) de type lumière si la restriction degàEest dégénérée78(donc de signature(0),(0,+) ou (0,+,+) si E est de dimension 1,2,3), ou de manière équivalente s’il est tangent au cône de lumière,79

(3) de type tempssi la restriction de gàE est non dégénérée et non définie positive (donc de signature (−), (−,+) ou (−,+,+) si E est de dimension 1,2,3), ou de manière équivalente s’il contient au moins un vecteur de type temps.

En particulier, une droite vectorielle de R1,3 est de type espace, lumière ou temps si et seulement si n’importe lequel de ses vecteurs directeurs est de type espace, lumière ou temps. Par exemple, l’intersection d’un plan de type temps avec le cône de lumière est la réunion de deux droites distinctes de type lumière.

78. c’est-à-dire s’il existe un vecteur non nul deEqui est orthogonal à tous les vecteurs deE

79. En effet, siv E non nul est orthogonal à tous les éléments deE, alorsvest un vecteur lumière non nul, doncE n’est pas contenu dans l’hyperplan horizontalRe1+Re2+Re3, donc l’intersectionE (Re1+Re2+Re3), qui est un sous-espace vectoriel de type espace, est un supplémentaire dans E de la droite vectorielleRv, qui peut être de dimension0,1ou2.

0

plan de type lumière x0

plan de type temps

plan de type espace

Proposition 3.1. SoitE un sous-espace vectoriel de R1,3. (1) Nous avons dimE1,3 = 4−dimE.

(2) L’espace vectoriel R1,3 est somme directe de E et de E1,3 si et seulement si E n’est pas de type lumière.

Démonstration. (1) L’application80 de l’espace vectoriel R4 dans son espace vectoriel dual(R4) =L(R4;R) (dont les éléments sont les formes linéaires surR4) définie par

x7→ { b

x:y7→x·y}

est un isomorphisme linéaire, car elle est clairement linéaire, les espaces vectoriels de départ et d’arrivée ont même dimension, et elle est injective (car la forme lorentzienne g est non dégénérée). Donc si(fi)1≤i≤k est une base deE, alors les formes linéaires

b

fi pour1≤i≤k sont linéairement indépendantes, donc l’intersection des hyperplans ker

b

fi pour 1≤i≤k est de dimension égale à 4−k = 4−dimE. Or cette intersection est exactement E1,3, par linéarité.

(2) La somme des dimensions de E et de E1,3 est égale à la dimension de R1,3 par l’asertion précédente, et E est de type lumière si et seulement si l’intersection E∩E1,3

n’est pas réduite à {0}.

Exercice E.4. Montrer que tout vecteur non nul de R1,3 orthogonal à un vecteur de type temps est un vecteur de type espace.

Par l’exercice précédent, l’orthogonal d’un sous-espace vectoriel de type temps est un sous-espace vectoriel supplémentaire de type espace.